La thérapie par inhalation en cabinet de médecine générale

Les inhalateurs permettent d’ atteindre directement les maladies des voies respiratoires, en particulier l’ asthme et la BPCO. L’ administration locale permet de réduire considérablement les effets secondaires systémiques des médicaments utilisés. Il existe différentes formes d’ inhalation qui doivent être choisies en fonction des besoins du patient et des conditions physiques. La médication dépend du tableau clinique. Les directives pour l’ asthme (GINA) et la BPCO (GOLD) ont prévu des nouveautés importantes ces dernières années, dont chaque médecin de famille devrait être conscient. Un facteur important qui impose aux médecins dispensateurs une certaine limite dans le choix des inhalateurs est la nécessité pour une pharmacie privée de cabinet médical de se limiter à quelques médicaments pour un tableau clinique.

Inhalatives can be used to directly treat respiratory diseases, especially asthma and COPD. Local administration drastically reduces the systemic side effects of the drugs used.There are various forms of inhalation, which must be selected depending on the needs of the patient and physical conditions. The medication depends on the clinical picture. Here the guidelines for asthma (GINA) and COPD (GOLD) have provided relevant innovations in recent years, which every family doctor should be aware of. An important factor that imposes a certain limitation on self-dispensing physicians in the choice of inhalers is the need for a practice pharmacy to limit itself to a few medications for one clinical picture.
Key Words: respiratory diseases, inhalation, asthma, COPD

Comment les médicaments atteignent-ils le noyau de la maladie

Autrefois, on traitait les refroidissements des voies respiratoires supérieures avec un bol d’ infusion de camomille chaude que l’ on tenait au-dessus de la tête. L’ évaporation produit de grosses gouttelettes qui, après avoir pénétré dans les voies respiratoires supérieures, y sont déposées par impaction. Un système d’ inhalation moderne peut en revanche produire de très fines gouttelettes de 1 à 5 μm. Dans le cas de l’ inhalation humide avec un nébuliseur (par ex. type Pari Boy®), cela se fait par la pression de nébulisation. Les plus petites gouttelettes/particules sont en mesure d’ atteindre les voies respiratoires périphériques où elles sont partiellement sédimentées. Cela prend du temps, raison pour laquelle la respiration doit être retenue après une inspiration profonde.

Le dépôt intrabronchique dépend non seulement de la taille des particules, mais aussi de l’ intensité du débit inspiratoire. Si l’ inspiration est rapide et forte, ce qui est nécessaire avec un inhalateur à poudre (DPI) pour que de fines particules puissent se former, la part de dépôt central est plus élevée qu’ avec un aérosol-doseur (AD) moderne sous forme de «solution pour inhalation» ou un inhalateur « soft mist » qui produit un doux brumisat (type Respimat®). Avec ces derniers, la nébulisation est activée manuellement et non par l’ inhalation. Cela permet une inhalation très lente avec une meilleure déposition périphérique.

Pour et contre des différents dispositifs d’ inhalation

Différents systèmes d’ inhalation existent sur le marché : les inhalateurs à poudre (DPI), les aérosols-doseurs (AD), l’ inhalateur « soft mist » Respimat® et l’ inhalation humide par nébulisation. On distingue ici les nébuliseurs conventionnels des nébuliseurs à maillage (Pari Velox®, Philips Innospire Go®).

Différents facteurs font que l’ un ou l’ autre système d’ inhalation est à privilégier pour chaque patient. Il s’ agit de la capacité de coopération lors de l’ inhalation, qui dépend également de l’ âge, la force inspiratoire, la praticabilité (transport au quotidien) et la résistance aux conditions environnementales (chaleur, froid).

Les aérosols-doseurs existent depuis les années 50 du siècle dernier, c’ est-à-dire qu’ ils ont fait leurs preuves, sont peu coûteux et relativement faciles à ingérer. Les nouveaux AD contenant le médicament en solution dans le gaz propulseur HFA (p. ex. Alvesco®, Foster®) produisent de très petites particules avec une bonne déposition dans les voies respiratoires les plus étroites, ce qui peut être un avantage, notamment en cas d’ asthme. En conséquence, le dépôt en niveau du larynx est faible, de sorte que les corticostéroïdes topiques (CSI) sous cette forme entraînent plus rarement des maux de la bouche ou un enrouement. Dans le cas des AD conventionnels, une dispersion a lieu, c’ est-à-dire qu’ il faut secouer l’ AD avant l’ inhalation pour que le médicament sous forme de poudre se répartisse brièvement et uniformément dans l’ HFA. Sans agitation, seul le gaz propulseur serait nébulisé. Malheureusement, l’ HFA renforce l’ effet de serre beaucoup plus que le CO2, de sorte que l’ utilisation de l’ AD devrait ainsi être réduite. L’ AD est très sensible au froid. Même lors de températures <50, par exemple aux sports d’ hiver, l’ AD ne peut servir à rien (1).

En cas d’ AD conventionnel, il convient d’ utiliser une chambre d’ inhalation (CI) de type Aerochamber® bleu avec embout buccal (pour les enfants >5 ans et les adultes). Cela permet de réduire nettement le dépôt au niveau du larynx qui est autrement élevé. Pour les AD modernes sous forme de «solution», la chambre d’ inhalation n’ est pas nécessaire, sauf si les patients ont des difficultés à coordonner le déclenchement de l’ aérosol et le début de l’ inspiration. En cas de problème de coordination, il est même possible d’ équiper un inhalateur « soft mist » type Respimat® d’ une Aerochamber® (2).

Les inhalateurs à poudre ont été introduits il y a environ 60 ans, d’ abord des inhalateurs monodose, puis multidose. Ils sont généralement faciles à insérer et à emporter. Chez les patients recevant des CSI et qui dépendent de leur voix de par leur profession, un enrouement persistant peut toutefois être limitant. En cas d’  inhalateur DPI, une inspiration vigoureuse est nécessaire pour produire des particules fines. Il existe chez certains fabricants des dummies (par ex. Turbuhaler® rouge), qui permettent de vérifier chez chaque patient si l’ intensité du flux inspiratoire est suffisante pour l’ inhalateur en question. En cas d’ exacerbation, la capacité respiratoire diminue souvent, de sorte que les patients sachant qu’  ils ont des crises d’ obstruction sévère devraient disposer en cas d’ urgence d’ un AD contenant également un bêtastimulant à action rapide.

L’ inhalateur « soft mist » Respimat® est rempli de médicament liquide. Un ressort est tendu par une demi-rotation. Lorsque le ressort est libéré par une pression sur un bouton, il presse une dose mesurée à travers des canaux très fins. Lorsque le liquide ressort, il se forme un très fin nuage d’ aérosol qui peut être inhalé lentement, comme pour l’ AD. Comme le médicament est accompagné de cartouches de réserve et que l’ HFA n’  est pas nécessaire, ce système constitue également une nouveauté du point de vue de la protection de l’ environnement. Malheureusement, aucune demande d’ autorisation de mise sur le marché du Respimat® avec des bêtastimulants à courte durée d’ action ou des CSI n’ a été déposée jusqu’  ici en Suisse.

L’ inhalation humide par nébulisation a perdu beaucoup d’  importance en Suisse. Les médicaments importants n’ existent pas sous forme liquide. Les durées d’ inhalation sont longues, mais un peu plus courtes pour les nébuliseurs à maillage que pour les nébuliseurs de liquides. Leur utilisation se justifie surtout chez les enfants asthmatiques et chez les patients de tous âges atteints de FK (fibrose kystique). Pour ces derniers, il existe des antibiotiques (p. ex. colistine et tobramycine) qui doivent être inhalés régulièrement pour prévenir les exacerbations en cas de colonisation des voies respiratoires par Pseudomonas.

Le système d’ inhalation détermine la technique d’ inhalation

Pour une inhalation correcte, il faut d’ abord expirer, puis inspirer profondément et retenir sa respiration pendant plus de 10 secondes. Au début de la manœuvre d’ inspiration, l’ inhalateur AD ou « soft mist » doit être activé simultanément. Avec un inhalateur DPI, l’ inspiration entraîne automatiquement la libération des particules. L’ avantage est qu’ il n’ est pas nécessaire de coordonner l’ activation et le début de l’ inhalation. D’ un autre côté, l’ inhalation à partir d’ un DPI nécessite un débit respiratoire élevé avec un dépôt partiel au niveau du larynx, et il existe le risque qu’ en cas d’ obstruction aiguë, la pression inspiratoire soit réduite, de sorte que la poudre ne soit pas suffisamment libérée.

L’ inhalation correcte doit être instruite et exercée pour chaque patient. Il est judicieux que le personnel du cabinet soit formé en conséquence. Il faut faire comprendre au patient que l’ inhalation avec un DPI doit être vigoureuse et rapide. En revanche, avec un inhalateur AD et « soft mist », il est important que l’ inhalation soit effectuée très lentement. Il est donc logique, en cas de prescription de plus d’ un inhalateur, de choisir plutôt un traitement combiné, si possible pas deux systèmes qui nécessitent une technique d’ inhalation différente.

L’ instruction unique de la technique d’ inhalation s’ est révélée insuffisante dans la pratique. Lors de consultations répétées, il est donc souhaitable que les patients apportent leur inhalateur et fassent une démonstration de l’ inhalation au personnel formé. La technique d’ inhalation spécifique au dispositif présenté ici peut être consultée sur le site Internet de la Ligue pulmonaire suisse (3) sous forme de clips vidéo et également montrée au patient.

Choix des médicaments pour le patient spécifique

Comme tous les médicaments ne sont pas disponibles dans les quatre formes d’ inhalation possibles, il faut réfléchir avant la prescription à l’ inhalateur le plus approprié pour le patient. On choisit ensuite la bonne substance ou combinaison en fonction du tableau clinique et de la gravité et on vérifie si l’ inhalateur souhaité est disponible avec le médicament choisi. Dans le cas contraire, un compromis est inévitable.

Les médicaments peuvent être divisés en CSI, en bêtastimulants à courte (SABA) ou longue (LABA) durée d’ action et en anticholinergiques (LAMA). En ce qui concerne les LABA, il est important de noter que seul le formotérol a un début d’ action aussi rapide que la Ventoline®, le Bricanyl® ou le Berotec®. Cela a des conséquences pratiques :
Concernant l’ asthme, les directives actuelles de GINA (4) prévoient désormais en première ligne, pour les 5 degrés de sévérité de l’ asthme, que l’ inhalateur d’ urgence ne soit plus un inhalateur SABA, mais un traitement combiné de CSI/formotérol (LABA), car il peut compliquer le contrôle de l’ asthme. Seules les associations suivantes ont été testées dans des études : Symbicort TH® (5) et Foster DA® (6). Concernant l’ asthme léger, cette combinaison n’ est utilisée qu’ en cas de besoin dans les phases stables. En cas d’  asthme modéré et sévère, le médicament peut être prescrit comme traitement de base ou au besoin. Le grand avantage du formotérol est également qu’ il possède une large marge thérapeutique. La quantité normale de formotérol dans une dose de Symbicort TH® 200/6 est de 6μg. A court terme, la dose journalière peut toutefois être augmentée jusqu’ à 72μg au maximum, soit 12 inhalations. Cette forme de traitement porte le nom de MART (maintenance and rescue therapy). Les CSI combinés au formotérol à action rapide en tant que MART présentent également un autre avantage. Les patients peuvent répondre à leur besoin naturel d’ inhaler moins pendant les phases statiques, mais ils remarquent une amélioration rapide d’ une exacerbation naissante en cas d’ augmentation massive des doses dans le cadre d’ une utilisation plus fréquente. Cela leur montre une auto-efficacité de leur action, ce qui améliore à son tour l’ acceptation à long terme.

En cas d’ asthme sévère, l’ ajout d’ un inhalateur LAMA est judicieux

La mise à jour GOLD pour la BPCO (7) a également apporté un changement important. Pendant des années, l’ administration de CSI a été déconseillée en cas de BPCO, car ils peuvent augmenter le risque de pneumonie. Ces dernières années, de nombreuses preuves ont cependant été publiées selon lesquelles l’ inflammation éosinophile typique de l’ asthme apparaît également en présence d’  une BPCO, au sens d’ une coexistence asthme-BPCO (8). De nouvelles études (9) ont clairement montré que chez les patients présentant une éosinophilie sanguine > 0,3 G/l, le risque d’ exacerbation augmente avec un traitement par LAMA/LABA seul. Dans cette situation, les pneumonies ne posaient pas de problème sous les CSI. Cependant, le risque de pneumonie augmente clairement si l’ on prescrit des CSI avec des taux d’ éosinophiles < 0,1 G/l (10). Dans la zone jaune avec des éosinophiles > 0,1 et < 0,3 G/l, un essai thérapeutique peut être entrepris en cas d’ exacerbations fréquentes.

Les chances de trouver une éosinophilie sont maximales pendant l’ exacerbation, avant même l’ administration de corticostéroïdes oraux. Comme la plupart des laboratoires en cabinet médical ne comptent pas les éosinophiles séparément, ces hémogrammes doivent être envoyés séparément à des laboratoires externes.

Cet article est une traduction de « der informierte arzt » 04_2023

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Dr. med.Thomas Rothe

Pneumologie
Hôpital cantonal des Grisons
Loëstrasse 170
7000 Coire

L’ auteur n’ a pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.

◆ La prescription de médicaments à inhaler en cas d’ asthme et de BPCO nécessite une connaissance suffisante des différents systèmes d’ inhalation ainsi que des recommandations actuelles et des directives.
◆ Lors de la prescription, il faut tenir compte du médicament qui serait idéal pour le patient individuel, mais aussi du système d’ inhalation qui lui convient le mieux.
◆ L’ inhalation avec le médicament prescrit doit être bien instruite. Toutefois, comme des erreurs peuvent se produire au cours du processus, il est indispensable de toujours laisser le patient faire la démonstration de la technique d’ inhalation lors des consultations ultérieures.
◆ Lors de l’ instruction de la technique d’ inhalation, il ne faut jamais oublier que les inhalateurs AD et « soft mist » nécessitent une inspiration très lente, alors que les DPI exigent une inhalation forcée, rapide et puissante.

1. Rothe T, Fronkova A, Pein T, Latshang TD. Physikalische und klinische Aspekte der Inhalations-therapie bei Asthma und COPD. PRAXIS 2020; 109: 1-6
2. Wachtel H, Nagel M, Engel M et al. In vitro and clinical characterization of the valved holding chamber AeroChamber Plus for administering tiotropium Respimat® in 1-5-year-old children with persistent asthmatic symptoms. Resp Med 2018; 137: 181-90
3. https://www.lungenliga.ch/de/krankheiten-ihre-folgen/asthma/richtig-inhalieren.html
4. www.ginasthma.org
5. Bateman E, Reddel H, O’Byrne et al. As needed budesonide-formoterol versus maintenance budesonide in mild asthma. N Engl J Med 2018; 378: 1877-87
6. Papi A, Corradi M, Pigeon-Francisco M et al. Beclometasone-formoterol as
maintenance and reliever therapy in patients with asthma: a double-blind,
randomised controlled trial. Lancet Respir Med. 2013; 1: 23-31
7. www.copdgold.org
8. Miratvitlles M, Alvarez-Guitierrez F, Calle M et al. Algorithm for identification of asthma COPD overlap. Eur Respir J 2017; 49: 1700068 [https://doi.org/10.1183/13993003.00068-2017]
9. Lipson DA et al. Once-daily single-inhaler triple versus dual therapy in patients with COPD. NEJM 2018; 3: 1671-80
10. Martinez-Garcia MA et al. Inhaled Steroids, Circulating Eosinophils, Chronic
Airway Infection, and Pneumonia Risk in Chronic Obstructive Pulmonary Disease. A Network Analysis. J Respir Crit Care Med 2020; 201: 1078-85

Traitement médicamenteux de l’ obésité – Enfin une lueur d’ espoir, mais aussi des zones d’ ombres

L’ obésité est aujourd’ hui considérée comme une maladie chronique qui affecte considérablement la vie des personnes concernées, tant sur le plan de la santé que sur le plan psychologique. Malheureusement, les approches thérapeutiques classiques, qui se concentrent uniquement sur des stratégies cognitives visant à optimiser le mode de vie, en particulier le comportement alimentaire et l’ activité physique, n’ ont qu’ un effet insuffisant sur la réduction de poids visée. Jusqu’ à présent, la chirurgie bariatrique était donc la seule méthode efficace pour réduire durablement le poids corporel et la masse grasse excédentaire des personnes souffrant d’ obésité. Heureusement, il semble qu’ une percée ait été réalisée dans le traitement médicamenteux de l’ obésité, une lueur d’ espoir longtemps attendue. Mais là où il y a de la lumière, il y a aussi de l’ ombre. Nous souhaitons donner ici un aperçu différencié des aspects pratiques du traitement médicamenteux actuel et futur de l’ obésité.

Today, obesity is regarded as a chronic disease that has a considerable impact on the lives of affected people, both in terms of health and mental health. Unfortunately, classical therapeutic approaches, which focus solely on cognitive strategies to optimize lifestyle, in particular eating and exercise behavior, are insufficiently effective in achieving the desired weight reduction. Until now, therefore, bariatric surgery has been the only effective method for sustainably reducing the body weight and excess fat mass of people with obesity. Fortunately, a breakthrough now seems to have been achieved in the pharmacological treatment of obesity; a long-awaited ray of hope in obesity therapy. But where there is light, there is also shadow. We would like to provide a differentiated overview of practical aspects of current and future drug-based obesity therapy.
Key Words: obesity, medical treatment for obesity, GLP-1 analogues

Après une longue période d’ obscurité, enfin la lumière

Au cours des dernières décennies, le développement de médicaments pour la réduction du poids a été une histoire avec des hauts et des bas (1,2). Toute une série de médicaments a été autorisée pour le traitement de l’ obésité, mais ils ont ensuite disparu du marché, car ils présentaient un taux trop élevé d’ effets secondaires indésirables lors de leur utilisation à grande échelle, ce qui rendait le rapport risque/bénéfice inacceptable. Il est donc d’ autant plus réjouissant de constater que des médicaments ont été développés qui, d’ une part, sont nettement plus efficaces et, d’ autre part, semblent présenter un meilleur rapport bénéfice/risque. Il s’ agit en particulier de substances qui agissent comme agonistes sur le récepteur Glucagon like Peptide (GLP) 1. Nous connaissons ce groupe de substances depuis bientôt deux décennies dans le traitement du diabète de type 2, où elles présentent un grand avantage, non seulement en termes de contrôle glycémique, mais aussi en termes de prévention des maladies cardiovasculaires secondaires. Bien qu’ il n’ existe pas encore d’ études sur les effets cardiovasculaires chez les personnes obèses qui ne souffrent pas de diabète, l’ expérience acquise dans le domaine du traitement du diabète permet d’ espérer que les études en cours sur cette question seront également positives.

Que sont les agonistes du récepteur GLP-1 ?

Le GLP-1 est une hormone endogène sécrétée par des cellules intestinales spécialisées, notamment après l’ ingestion de nourriture. Il s’ agit d’ une hormone peptidique qui est décomposée en quelques minutes dans la circulation sanguine par la dipeptidyl peptidase-4 (DDP-4) et ainsi désactivée. Les agonistes du récepteur du GLP-1 (RA) sont des analogues de l’ hormone originale, qui ont été modifiés de telle sorte que, d’ une part, ils ne sont pas inactivés par la DPP4 et que, d’ autre part, ils circulent longtemps dans la circulation sanguine, par exemple en se liant à l’ albumine. Les médicaments utilisés dans le traitement de l’ obésité sont alors injectés par voie sous-cutanée (s.c.), car l’ absorption des peptides par le tractus gastro-intestinal est en principe possible, mais ne peut être obtenue qu’ au prix d’ efforts importants.

Quels sont les GLP-1 RA disponibles pour le traitement de l’ obésité ?

Deux substances sont actuellement autorisées en Suisse pour le traitement de l’ obésité. Sous le nom de Saxenda®, le liraglutide est utilisé depuis quelques années déjà et est actuellement financé par les caisses-maladie pour une durée maximale de 3 ans, à condition de respecter la limite définie dans la liste des spécialités (tab. 1). Le deuxième médicament autorisé par Swissmedic pour le traitement de l’ obésité porte le nom de Wegovy® et contient la substance sémaglutide, bien connue dans le traitement du diabète sous le nom d’ Ozempic®. Bien qu’ autorisé, Wegovy® n’ est pas encore disponible sur les marchés européen et suisse en raison de la forte demande aux Etats-Unis. Contrairement aux doses utilisées dans le traitement du diabète, des doses nettement plus élevées des substances correspondantes sont utilisées dans le traitement de l’ obésité. Concrètement, la dose maximale de Saxenda® est de 3 mg s.c. par jour et celle de Wegovy® de 2,4 mg s.c. une fois par semaine. Nous aimerions également présenter ici une troisième substance qui n’ a pas encore été autorisée pour le traitement de l’ obésité, mais qui a déjà été testée dans une grande étude de phase 3 chez des personnes souffrant d’ obésité. Ce peptide conçu, appelé tirazépatide, agit de manière agoniste sur le récepteur GLP-1 et sur le récepteur du polypeptide insulinotrope dépendant du glucose (GIP). Il convient de mentionner que cette substance, également appelée bi-agoniste, est déjà autorisée par Swissmedic pour le traitement du diabète de type 2 sous le nom de Mounjaro® (3). Toujours en raison d’ une forte demande aux États-Unis, qui dépasse manifestement les capacités de production actuelles, le médicament n’ est pas encore disponible sur le marché européen et suisse. Actuellement, il est annoncé pour le début de l’ année 2024 pour le traitement du diabète.

Comment agissent les médicaments dans le traitement de l’ obésité ?

L’ effet principal des médicaments mentionnés est une diminution de l’ appétit ainsi qu’ une satiété précoce après la prise alimentaire (4-7). Des études expérimentales ont montré que le traitement des stimuli alimentaires dans le cerveau est nettement influencé par l’ administration de GLP-1 RA (8). Cela permet aux personnes concernées d’ exercer plus facilement un contrôle sur leur comportement alimentaire afin d’ atteindre une restriction énergétique. Malheureusement, il existe également des indices selon lesquels les effets de réduction de l’ appétit s’ atténuent quelque peu après une longue durée de traitement ou sont partiellement masqués par des mécanismes de contre-régulation (5), ce qui pourrait entraîner une reprise du poids corporel. En effet, une étude menée sur 3 ans chez des personnes atteintes de prédiabète a montré que la réduction de poids de 9,2 % obtenue après environ un an n’ a pas pu être entièrement maintenue malgré la poursuite du traitement avec 3 mg de liraglutide, de sorte que la réduction nette du poids n’ était plus que de 7,1 % après 3 ans. En ce qui concerne le traitement avec 2,4 mg de sémaglutide, une étude récemment publiée a montré que la perte de poids maximale atteinte après 68 semaines pouvait être maintenue à un niveau stable sous traitement continu au cours de la deuxième année qui suivait (9) (perte de poids moyenne après 2 ans : 15,2 %).

Relation dose-effet

Les lecteurs moins familiarisés avec la médecine de l’ obésité seront peut-être surpris d’ apprendre qu’ il existe une relation dose-effet bien définie pour les médicaments anti-obésité, comme dans d’ autres domaines pharmacologiques de la médecine. La figure 1 illustre cette relation dose-effet pour le liraglutide et le sémaglutide dans des études de phase 2 (10, 11). Ceci est d’ une grande importance pour la pratique clinique, car l’ adaptation de la dose de GLP-1-RA administrée permet de prévoir et, le cas échéant, de contrôler l’ évolution du poids corporel chez la plupart des patients.

Efficacité des médicaments anti-obésité

Pour illustrer l’ efficacité des substances mentionnées, nous avons regroupé les données de trois grandes études de phase 3 (12-14). D’ un point de vue strictement scientifique, cette comparaison n’ est pas valable, car il ne s’ agit pas de groupes d’ étude tout à fait comparables. De même, le traitement de base au sens d’ une intervention sur le mode de vie, que recevaient aussi bien les groupes verum que les groupes placebo, n’ était pas identique entre les études. L’ indice de masse corporelle (IMC) au début du traitement, qui était de 38 kg/m2 dans les différents groupes de traitement, ainsi que la durée du traitement (liraglutide et tirazépatide pendant 72 semaines, sémaglutide pendant 68 semaines) étaient toutefois bien comparables. Il convient de rappeler ici que le tirazépatide n’ est pas autorisé pour le traitement de l’ obésité et que nous nous sommes limités à la plus forte dose de tirazépatide utilisée dans l’ étude, à savoir 15 mg s.c. par semaine, pour présenter les résultats.

Comme le montre la figure 2, 2,4 mg de sémaglutide une fois par semaine s.c. sont nettement plus efficaces pour réduire le poids que l’ application quotidienne de 1 mg de liraglutide. Cependant, l’ administration hebdomadaire de 15 mg de tirazépatide semble être encore plus efficace. Comme le poids a également légèrement diminué dans les groupes placebo, probablement en raison de l’ intervention simultanée sur le mode de vie, l’ effet net des médicaments doit toujours être calculé en soustrayant la perte de poids obtenue dans le groupe placebo de celle obtenue dans le groupe de traitement médicamenteux (fig. 2).

Un mode de représentation cliniquement pertinent et usuel dans la recherche clinique sur l’ obésité est également l’ indication du pourcentage de personnes traitées dans différentes catégories de réduction de poids. Comme le montre la figure 3, il est clair que beaucoup plus de personnes ont réussi à perdre du poids sous sémaglutide que sous liraglutide, le taux de réussite étant encore nettement plus élevé sous tirazépatide.

Dans l’ ensemble, les effets de réduction du poids des médicaments décrits sont très impressionnants et semblent se rapprocher de l’ efficacité des opérations bariatriques telles que le bypass gastrique Roux-en-Y ou la résection de l’ estomac par tube, qui génèrent une perte de poids à long terme d’ environ 25 à 30 % (15).

Les médicaments ne sont efficaces que tant qu’ on les utilise

L’ obésité est une maladie chronique. Nous partons aujourd’ hui du principe qu’ une fois qu’ un poids corporel a été atteint, le corps du patient se défend par des mécanismes de régulation complexes contre tous efforts pour perdre du poids. Les études scientifiques montrent de manière très cohérente qu’ il y a une reprise du poids corporel dès que le traitement est terminé, qu’ il s’ agisse d’ une intervention alimentaire ou physique, d’ un traitement médicamenteux ou d’ un traitement invasif comme un ballon ou un anneau gastrique. Ce principe de base de la médecine de l’ obésité a une fois de plus été documenté de manière impressionnante pour le traitement au sémaglutide. La figure 4 résume à titre d’ illustration les données de l’ étude STEP 4 (16) et de l’ étude STEP 1 trial extension (17).

Dans l’ étude STEP 4, les personnes incluses ont été randomisées, après 20 semaines de traitement au sémaglutide, soit dans un groupe recevant du sémaglutide, soit dans un groupe recevant un placebo. Dans l’ étude STEP 1 trial extension, le sémaglutide a été arrêté après 68 semaines. Il s’ est avéré qu’ après le passage au placebo ou l’ arrêt du sémaglutide, la reprise du poids corporel était rapide. Par conséquent, le traitement médicamenteux de l’ obésité devrait constituer un traitement permanent pour être efficace à long terme. Cependant, tant du côté des thérapeutes que des patients, il existe encore souvent l’ idée qu’ il suffit de réduire le poids et que cela peut être fait sans autres mesures pharmacologiques ou chirurgicales et sans contrôle cognitif permanent et extrêmement poussé. Au vu des preuves scientifiques, ce souhait doit malheureusement être qualifié d’ obsolète et de naïf. Dans ce contexte, il faut plutôt exiger qu’ avant l’ introduction d’ un traitement médicamenteux de l’ obésité, une information différenciée sur la reprise du poids corporel à laquelle on peut s’ attendre après la fin du traitement pharmacologique soit fournie et qu’ une nouvelle compréhension de la maladie avec une nécessité de traitement durable soit promue de manière analogue au traitement médicamenteux du cholestérol ou de la tension artérielle.

Quels sont les inconvénients ?

Comme la plupart des thérapies médicamenteuses, les médicaments décrits dans la thérapie de l’ obésité ont également des effets secondaires. Nous avons résumé dans le tableau 2 un aperçu des effets secondaires les plus fréquemment observés dans les trois études analysées. Les troubles gastro-intestinaux sont clairement au premier plan. Ces derniers apparaissent généralement au début du traitement et peuvent souvent être limités par une augmentation lente de la dose. Par la suite, ils disparaissent souvent ou se réduisent au moins à un niveau acceptable. Cependant, certaines personnes ne tolèrent tout simplement pas les médicaments ou présentent une réponse insuffisante au traitement. Dans ce cas, le traitement doit être arrêté rapidement.

Les effets secondaires les plus importants du point de vue clinique sont l’ augmentation de l’ incidence des calculs biliaires symptomatiques, ce qui mène également à une augmentation du taux de cholécystomes. La formation accrue de calculs biliaires ne doit pas être considérée comme une conséquence directe du traitement médicamenteux, mais comme une conséquence de la perte de poids, car d’ autres traitements visant à réduire le poids, comme la mise en œuvre d’ un régime très restrictif sur le plan énergétique ou une opération bariatrique, entraînent également une augmentation de l’ incidence des calculs biliaires.

L’ utilisation de médicaments sans remise en question préoccupe

Les effets secondaires décrits ci-dessus ne sont pas considérés comme problématiques et nous partons du principe qu’ ils ne compromettent pas le rapport risque/bénéfice de manière significative, même à long terme. Ce qui nous inquiète davantage, est l’ utilisation croissante de médicaments sans remise en question critique, notamment quand ils doivent être payés par le patient lui-même, sans réglementation. Ainsi, nous pouvons observer, tant dans notre entourage que dans les médias de masse et sur les canaux des médias sociaux, qu’ il existe un énorme engouement pour les médicaments décrits. De ce fait, il n’ est manifestement pas rare qu’ ils soient utilisés sans indication médicale, sous la motivation d’ une auto-optimisation subjective du poids corporel. Alors que le rapport risque/bénéfice est en faveur de l’ administration de médicaments en cas d’ indication médicale, en raison du risque accru pour la santé lié à l’ excès de poids, ce n’ est très probablement pas le cas pour les personnes qui ne présentent qu’ un faible excès de poids et qui n’ ont pas de comorbidités associées, voire qui ont un poids normal. L’ utilisation irréfléchie des médicaments chez les femmes en âge de procréer qui ne pratiquent pas une anticonception consécutive et chez les femmes qui souhaitent encore avoir un enfant est également potentiellement problématique. Comme il n’ existe à ce jour aucune donnée sur l’ utilisation des médicaments pendant la grossesse, le traitement médicamenteux doit être interrompu avant la survenue d’ une grossesse ou au plus tard au moment où celle-ci est constatée. La reprise rapide du poids à laquelle on peut alors s’ attendre pourrait compliquer considérablement le déroulement de la grossesse et, à long terme, influencer défavorablement le développement métabolique de l’ enfant à naître par des mécanismes épigénétiques de la programmation fœtale. Nous pensons qu’ il est urgent de clarifier ce point sur le plan scientifique, afin que les femmes nécessitant un traitement puissent être informées et conseillées de manière adéquate (18). Compte tenu de cette problématique et de l’ improbabilité d’ études d’ application réalisables dans ce domaine, il est d’ autant plus important de collecter et d’ évaluer scientifiquement les grossesses sous GLP-1 RA. Nous souhaitons donc encourager les collègues qui suivent des patientes ayant entamé une grossesse sous traitement actif à les signaler (19).

Où se situe la limite entre le style de vie et l’ indication médicale ?

Nous savons aujourd’ hui très bien que l’ importance quantitative de l’ excès de poids, mesurée par l’ IMC, ne donne que peu d’ informations sur l’ état de santé de la personne concernée. Le modèle de répartition des graisses, le volume des cellules adipeuses, l’ ampleur de l’ inflammation subclinique et de la résistance à l’ insuline, l’ empreinte génétique et épigénétique et de nombreux autres facteurs déterminent si et quand le surpoids ou l’ obésité entraînent des problèmes de santé. Il ne faut cependant pas oublier les limitations fonctionnelles ainsi que les conséquences psychosociales et socio-économiques de l’ obésité, qui compliquent considérablement la vie des personnes concernées. Dans la pratique clinique, il est donc indispensable de procéder à une évaluation minutieuse avant de recommander un traitement et, le cas échéant, de le mettre en œuvre. La liste des spécialités (LS) définit comme critère de prise en charge d’ un traitement par Saxenda® un IMC de >28 (à 35) kg/m2 associé à l’ existence d’ au moins une comorbidité liée à l’ excès de poids comme le prédiabète, la dyslipidémie ou l’ hypertension artérielle (tab. 3). D’ une part, le fait de concentrer le financement du traitement sur les personnes présentant les comorbidités correspondantes est à notre avis judicieux, mais d’ autre part, la limitation explicite à certaines comorbidités peut être problématique. Outre ces comorbidités définies arbitrairement par l’ OFSP, on pourrait également mentionner le syndrome d’ apnée du sommeil ou la stéatose hépatique ou la stéatohépatite comme comorbidités justifiant un financement. Il faudrait également tenir compte des limitations fonctionnelles, telles que la gonarthrose, ainsi que des troubles psychosociaux dus au surpoids. En fin de compte, il incombe comme toujours au médecin de procéder à une évaluation différenciée de l’ indication potentielle d’ un traitement.

Un accompagnement structuré est de plus en plus nécessaire

En règle générale, l’ utilisation des médicaments anti-obésité décrits devrait être accompagnée de manière structurée, comme cela a toujours été le cas dans les études d’ autorisation. La médication influence considérablement le comportement alimentaire de la personne traitée, de sorte qu’ il s’ agit en particulier de ne pas se contenter d’ une modification quantitative de l’ alimentation, mais de procéder également à une adaptation qualitative. Une consultation diététique qualifiée et concomitante et evt. la thérapie d’ entraînement physique peuvent être très efficaces pour soutenir cette démarche (20).

Absence de financement du traitement de longue durée

Actuellement, le financement du traitement médicamenteux de l’ obésité est limité dans le temps à 3 ans maximum. Nous devons malheureusement partir du principe que cela ne changera pas fondamentalement, du moins à court terme. Cependant, étant donné que l’ obésité est une maladie chronique et qu’ il faut s’ attendre à une reprise rapide du poids après l’ arrêt de la médication, une limitation dans le temps du financement du traitement n’ a aucun sens d’ un point de vue médical. Un autofinancement de la thérapie n’ est pas réaliste pour de nombreuses personnes concernées en raison de leur situation socio-économique défavorable et, de notre point de vue, n’ est pas non plus acceptable dans le contexte de l’ exigence de justice sociale. Tout comme les traitements chirurgicaux bariatriques, la faisabilité d’ un traitement médicamenteux ne devrait pas dépendre du statut socio-économique de la personne concernée. Il n’ est pas acceptable que l’ on finisse par dire : « Des médicaments pour les riches, des opérations pour les pauvres”. Pour éviter une telle évolution, il est urgent que l’ obésité soit enfin reconnue comme une maladie chronique par la société, les professionnels de la santé et surtout les décideurs en matière de réglementation.

Cet article est une traduction de « der informierte arzt » 03_2023

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Pr Dr Bernd Schultes

Centre du métabolisme de Saint-Gall
friendlyDocs AG
Lerchentalstrasse 21
9016 St. Gallen

stoffwechselzentrum@friendlydocs.ch

Dr. rer. hum. biol. Barbara Ernst

Centre du métabolisme de Saint-Gall
friendlyDocs AG
Lerchentalstrasse 21
9016 St. Gallen

stoffwechselzentrum@friendlydocs.ch

Pr Dr Gottfried Rudofsky

Cabinet d’ endocrinologie, de diabète et d’obésité
Baslerstrasse 30
4600 Olten

endokrinologie-olten@hin.ch

Bernd Schultes indique qu’ il donne des conférences pour les entreprises Novo Nordisk et Elli Lilly et qu’ il participe aux comités consultatifs de ces entreprises. Ces entreprises produisent et/ou font de la recherche, entre autres, sur des médicaments destinés au traitement de l’ obésité. Il a également participé en tant qu’ investigateur à des études cliniques de Novo Nordisk. Dr. rer. hum. biol. Barbara Ernst indique avoir participé en tant que coordinatrice d’ études à des études cliniques de la société Novo Nordisk. Gottfried Rudofsky indique qu’ il a donné des conférences pour les sociétés Novo Nordisk et Elli Lilly et qu’ il a participé aux comités consultatifs de ces sociétés. Il a également participé en tant qu’investigateur à des études cliniques de la société Novo Nordisk.

◆ Le développement de nouveaux médicaments anti-obésité représente un énorme progrès dans la médecine de l’ obésité et aidera à traiter la maladie plus efficacement.
◆ Le traitement médicamenteux de l’ obésité devrait toujours être suivi de manière structurée.
◆ Avant de prescrire un médicament, il convient d’ attirer l’ attention sur le fait que cette thérapie doit être considérée comme une thérapie durable et que les coûts de la médication devront probablement être supportés par les personnes concernées après 3 ans de traitement maximum.
◆ Les personnes à traiter doivent être explicitement informées de la reprise probable du poids corporel après l’ arrêt du traitement ainsi que de la situation peu claire concernant une éventuelle grossesse.
◆ Une utilisation des médicaments sans remise en question critique doit absolument être évitée, même dans le domaine du tiers garant.
◆ La possibilité d’ un traitement médicamenteux de l’ obésité ne devrait pas dépendre du statut socio-économique de la personne concernée. Il faut donc viser un financement durable de la thérapie lorsque l’ indication est donnée.

1. Schultes B. Pharmacological Interventions against Obesity: Current Status and Future Directions. Visc Med. 2016 Oct;32(5):347–51.
2. Schultes B. Medikamentöse Therapie der Adipositas – Aerzteverlag medinfo AG [Internet]. [cited 2023 Feb 6]. Available from: https://www.medinfo-verlag.ch/medikamentoese-therapie-der-adipositas/
3. Swissmedic 2019 © Copyright. Mounjaro®, Injektionslösung in einem Fertigpen (Tirzepatidum) [Internet]. [cited 2023 Feb 6]. Available from: https://www.swissmedic.ch/swissmedic/de/home/humanarzneimittel/authorisations/new-medicines/mounjaro_injektionsloesung_fertigpen_tirzepatidum.html
4. Blundell J, Finlayson G, Axelsen M, Flint A, Gibbons C, Kvist T, et al. Effects of once-weekly semaglutide on appetite, energy intake, control of eating, food preference and body weight in subjects with obesity. Diabetes Obes Metab. 2017 Sep;19(9):1242–51.
5. Tronieri JS, Wadden TA, Walsh O, Berkowitz RI, Alamuddin N, Gruber K, et al. Effects of liraglutide on appetite, food preoccupation, and food liking: results of a randomized controlled trial. Int J Obes (Lond). 2020 Feb;44(2):353–61.
6. Kadouh H, Chedid V, Halawi H, Burton DD, Clark MM, Khemani D, et al. GLP-1 Analog Modulates Appetite, Taste Preference, Gut Hormones, and Regional Body Fat Stores in Adults with Obesity. J Clin Endocrinol Metab. 2020 May 1;105(5):1552–63.
7. Friedrichsen M, Breitschaft A, Tadayon S, Wizert A, Skovgaard D. The effect of semaglutide 2.4 mg once weekly on energy intake, appetite, control of eating, and gastric emptying in adults with obesity. Diabetes Obes Metab. 2021 Mar;23(3):754–62.
8. Om F, M S, Ma T, F D, B T, A SE, et al. GLP-1 receptors exist in the parietal cortex, hypothalamus and medulla of human brains and the GLP-1 analogue liraglutide alters brain activity related to highly desirable food cues in individuals with diabetes: a crossover, randomised, placebo-controlled trial. Diabetologia [Internet]. 2016 May [cited 2023 Feb 6];59(5). Available from: https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26831302/
9. Garvey WT, Batterham RL, Bhatta M, Buscemi S, Christensen LN, Frias JP, et al. Two-year effects of semaglutide in adults with overweight or obesity: the STEP 5 trial. Nat Med. 2022 Oct;28(10):2083–91.
10. Astrup A, Carraro R, Finer N, Harper A, Kunesova M, Lean MEJ, et al. Safety, tolerability and sustained weight loss over 2 years with the once-daily human GLP-1 analog, liraglutide. Int J Obes (Lond). 2012 Jun;36(6):843–54.
11. O’Neil PM, Birkenfeld AL, McGowan B, Mosenzon O, Pedersen SD, Wharton S, et al. Efficacy and safety of semaglutide compared with liraglutide and placebo for weight loss in patients with obesity: a randomised, double-blind, placebo and active controlled, dose-ranging, phase 2 trial. Lancet. 2018 Aug 25;392(10148):637–49.
12. Pi-Sunyer X, Astrup A, Fujioka K, Greenway F, Halpern A, Krempf M, et al. A Randomized, Controlled Trial of 3.0 mg of Liraglutide in Weight Management.
N Engl J Med. 2015 Jul 2;373(1):11–22.
13. Wilding JPH, Batterham RL, Calanna S, Davies M, Van Gaal LF, Lingvay I, et al. Once-Weekly Semaglutide in Adults with Overweight or Obesity. N Engl J Med. 2021 Mar 18;384(11):989–1002.
14. Jastreboff AM, Aronne LJ, Ahmad NN, Wharton S, Connery L, Alves B, et al. Tirzepatide Once Weekly for the Treatment of Obesity. N Engl J Med. 2022 Jul 21;387(3):205–16.
15. Peterli R, Wölnerhanssen BK, Peters T, Vetter D, Kröll D, Borbély Y, et al. Effect of Laparoscopic Sleeve Gastrectomy vs Laparoscopic Roux-en-Y Gastric Bypass on Weight Loss in Patients With Morbid Obesity: The SM-BOSS Randomized Clinical Trial. JAMA. 2018 Jan 16;319(3):255–65.
16. Rubino D, Abrahamsson N, Davies M, Hesse D, Greenway FL, Jensen C, et al. Effect of Continued Weekly Subcutaneous Semaglutide vs Placebo on Weight Loss Maintenance in Adults With Overweight or Obesity: The STEP 4 Randomized Clinical Trial. JAMA. 2021 Apr 13;325(14):1414–25.
17. Wilding JPH, Batterham RL, Davies M, Van Gaal LF, Kandler K, Konakli K, et al. Weight regain and cardiometabolic effects after withdrawal of semaglutide: The STEP 1 trial extension. Diabetes Obes Metab. 2022 Aug;24(8):1553–64.
18. Schultes B, Ernst B, Timper K, Puder J, Rudofsky G. Pharmacological interventions for weight loss before conception – putative effects on subsequent gestational weight gain should be considered. International Journal of Obesity. (in press).
19. Swissmedic 2019 © Copyright. Meldung von vermuteten unerwünschten Arzneimittelwirkungen durch Patientinnen und Patienten [Internet]. [cited 2023 Feb 7]. Available from: https://www.swissmedic.ch/swissmedic/de/home/humanarzneimittel/marktueberwachung/pharmacovigilance/patienten-innen.html
20. Lundgren JR, Janus C, Jensen SBK, Juhl CR, Olsen LM, Christensen RM, et al. Healthy Weight Loss Maintenance with Exercise, Liraglutide, or Both Combined. New England Journal of Medicine. 2021 May 6;384(18):1719–30.
21. Spezialitätenliste (SL) – Präparate [Internet]. [cited 2023 Feb 6]. Available from: https://www.xn--spezialittenliste-yqb.ch/ShowPreparations.aspx
22. ElSayed NA, Aleppo G, Aroda VR, Bannuru RR, Brown FM, Bruemmer D, et al. 2. Classification and Diagnosis of Diabetes: Standards of Care in Diabetes—2023. Diabetes Care. 2022 Dec 12;46(Supplement_1):S19–40.
23. Mach F, Baigent C, Catapano AL, Koskinas KC, Casula M, Badimon L, et al. 2019 ESC/EAS Guidelines for the management of dyslipidaemias: lipid modification to reduce cardiovascular risk. Eur Heart J. 2020 Jan 1;41(1):111–88.
24. Unger T, Borghi C, Charchar F, Khan NA, Poulter NR, Prabhakaran D, et al. 2020 International Society of Hypertension Global Hypertension Practice Guidelines. Hypertension. 2020 Jun;75(6):1334–57

Apports de l’ hypnose et de la réalité virtuelle chez les patients âgés souffrant de troubles psychiques

Les nouvelles technologies sont omniprésentes dans notre vie. Comme outil à visées sociale et thérapeutique la réalité virtuelle (VR) fait partie de ces technologies dont l’ utilisation peut être bénéfique auprès de la population âgée. Plusieurs études démontrent qu’ elle peut réduire des troubles tels que l’ anxiété et la dépression, encourager le lien social chez les ainés et lutter contre l’ isolement. L’ hypnose, quant à elle, s’ avère un outil thérapeutique millénaire remis au gout du jour. Son utilisation dans la prise en soin des patients âgés souffrant de troubles psychiques présente un intérêt indéniable. En revanche, une adaptation des techniques hypnotiques est nécessaire dans cette population.

New technologies are omnipresent in our lives. As a social and therapeutic tool, virtual reality (VR) is one of those technologies that can be used to benefit the elderly population. Several studies show that it can reduce disorders such as anxiety and depression, encourage social interaction among the elderly and combat isolation. Hypnosis is an age-old therapeutic tool that has been revived. Its use in the care of elderly patients suffering from psychological disorders is undeniably interesting. However, hypnotic techniques need to be adapted to this population.
Key Words: virtual reality, disorders, hypnosis, elderly

Thérapie par exposition en réalité virtuelle

La réalité virtuelle (RV) est définie comme un ensemble de matériels technologiques permettant aux individus d’ interagir efficacement avec un environnement tridimensionnel en temps réel géré par un ordinateur (1,2). Si les études sont plus nombreuses dans le cadre de l’ analgésie et les réadaptations cognitive et fonctionnelle, la thérapie par exposition en réalité virtuelle (TERV) constitue une véritable indication thérapeutique en santé mentale. Elle permettrait de limiter le recours aux thérapeutiques médicamenteuses tout en ayant un accompagnement personnalisé du patient.

La TERV à l’ aide d’ un visiocasque (Figure 1) permet au patient de vivre des nouvelles expériences sensorielles et même de voyager dans un environnement dynamique voire ludique. La psychiatrie de la personne âgée peut bénéficier de ses apports thérapeutiques puisqu’ elle permet d’ immerger des patients dans des milieux virtuels d’ une façon accompagnée et contrôlée par le thérapeute. Un état de relaxation n’ est pas nécessaire, même si des suggestions de relaxation ou à un degré supplémentaire en combinant l’ hypnose (HRV) peuvent être associés en fonction du propre registre sensoriel, visuel et/ou auditif du patient.

Comme dans le cadre de l’ hypnose classique, l’ hypnose par RV est une « expérience existentielle » permettant de reprendre contact avec son corps, ses sensations et ses émotions.

Indications

1. Troubles anxieux : Les troubles anxieux sont la première indication psychiatrique de la RV. Les situations ou les objets anxiogènes sont modélisés en images de synthèse, la réalité est ainsi remplacée par un environnement virtuel contrôlé qui permet une exposition progressive aux situations anxiogènes. La TERV serait aussi efficace que les TCC classiques dans plusieurs troubles anxieux : phobies spécifiques, phobie sociale, agoraphobie, syndrome de stress post traumatique et addictions (2,3).

2. La dépression : la TERV permet une amélioration de certains symptômes, notamment le sentiment de dévalorisation et l’ empathie envers soi-même avec une diminution des affects négatifs et une diminution de l’ isolement social (2,4). La RV et sa possibilité de voyages virtuels permettraient de lutter contre l’ immobilité et la démotivation secondaire à la dépression.

3. Trouble somatoforme douloureux chronique : L’ immersion permet un détournement de l’ attention sur l’ univers virtuel et offre au patient la possibilité de s’ y évader mentalement (2). Combiné avec l’ hypnose, les sujets hautement hypnotisables rapportaient moins de douleur lors de l’ utilisation d’ outils hypnotiques (hypnose et HRV), tandis que les sujets faiblement hypnotisables rapportaient moins de douleur lors de l’ utilisation de la RV et de la HRV que l’ hypnose seule ou sans traitement. Il semblerait que la RV et l’ hypnose impliquent des mécanismes différents de réduction de la douleur. La modulation de la douleur pourrait être due à des mécanismes de distraction inhérents à l’ environnement RV, alors que la réponse à l’ hypnose résulterait des capacités de suggestibilité des sujets (5).

4. Troubles cognitifs : La création d’ environnements de test personnalisés permet de reproduire les tâches de la vie quotidienne et d’ améliorer la validité écologique du testing cognitif (6,7). La RV serait particulièrement efficace pour améliorer les fonctions exécutives, attention visuelle et les capacités visuo-spatiales ainsi que les symptômes psychologiques associés comme l’ anxiété ou l’ apathie (2,8,9,10,11). Chez les patients souffrant de démence, l’ univers sensoriel se restreint progressivement par déficit ou par manque de stimulation. Dans le cas de démences avancées, l’ usage de la RV se prête bien compte tenu de son utilisation en apparence récréative procurant une stimulation cognitive se basant, plus particulièrement, sur la réminiscence. L’ usage d’ immersion dans un environnement agréable (plage, montagne), couplant des lieux ou des moments familiers avec des musiques les plus adéquates possibles, permet de faire revivre des moments précieux en présence d’ une personne, proche ou soignant. L’ impact émotionnel de l’ expérience en RV améliore l’ humeur, baisse l’ anxiété et le stress et procure un sentiment de détente tout en diminuant l’ apathie (12,13).

Les principales étapes de la TERV sont résumées dans le tableau 1.

Effets secondaires et contre-indications

L’ expérience de réalité virtuelle en 360° est majoritairement appréciée par les personnes âgées. Parmi les effets secondaires, le plus souvent décrit et qui se majore avec l’ âge est le cybersickness ou cybermalaise, caractérisé par des nausées, maux de tête, transpiration, vertiges et troubles de l’ équilibre. Les troubles visuels préexistants, comme cataracte et troubles de la réfraction, sont des limitations partielles qui nécessitent une adaptation technique comme dans l’ interférence avec les prothèses auditives ou le port de lunettes. Une fatigue et des douleurs musculaires dorsales et nucales, perte du sens de la réalité ou dissociation du réel peuvent aussi se manifester (2). Chez les personnes âgées sensibles à ces effets, il est recommandé de choisir des écrans d’ affichage plutôt que des visiocasques et de proposer des environnements interactifs avec des interfaces ciblées, individualisées et pertinentes en fonction de la problématique psychologique du patient.

Hypnose

L’ hypnose accompagne la médecine depuis l’ aube des temps et sa conceptualisation, ainsi que sa pratique ont constamment évolué. Elle suscite bien souvent de la curiosité, du scepticisme autour d’ une méthode parfois considérée comme mystérieuse voire magique ou bien comme un moyen de contrôler le mental. Pourtant, l’ hypnose est un processus naturel, que chacun expérimente au quotidien ou pouvant être induit. Il n’ y a pas de consensus sur la définition de l’ hypnose, le phénomène étant complexe. Toutefois, la Société d’ Hypnose Psychologique la définit comme « un état de conscience incluant une focalisation de l’ attention ainsi qu’ une attention périphérique diminuée, caractérisé par une capacité accrue à répondre à la suggestion » (14). Grâce à l’ imaginaire et la créativité du patient l’ hypnose permet d’ accéder aux ressources internes, de les mobiliser afin d’ initier un changement pour atteindre un objectif thérapeutique. La relation à l’ autre, la considération du patient dans sa globalité et l’ installation d’ une alliance thérapeutique sont capitales pour favoriser une modification de ses perceptions et représentations internes.

Différents types d’ hypnose et déroulement d’ une séance

L’ hypnose thérapeutique se distingue de l’ hypnose de spectacle qui est directive, autoritaire, avec une mise en scène et utilisation de suggestions directes pour un public sélectionné.
L’ hypnose thérapeutique quant à elle peut être appliquée dans différents buts (Figure 2).
Dans l’ arsenal de l’ hypnothérapeute, on peut retrouver plusieurs façons de pratiquer l’ hypnothérapie :
– les outils hypnotiques : synchronisation de la posture, langage hypnotique, observation, repérage des canaux sensoriels, reformulation, métaphores
– l’ hypnose conversationnelle : fait appel aux techniques linguistiques, relationnelles, de focalisation entre autres
– l’ hypnose formelle : la plus répandue étant l’ hypnose ericksonienne (Tableau 2)
– l’ auto-hypnose : plus facile à pratiquer une fois que l’ apprentissage s’ est fait avec un thérapeute

Particularités de l’ hypnose chez les sujets âgés

Le déroulement de la séance d’ hypnose ainsi que les techniques de bases restent globalement les mêmes que chez l’ adulte (15). Une adaptation est nécessaire lorsqu’ il existe des troubles cognitifs, une modification du niveau de la compréhension et de l’ attention, ou des troubles sensoriels. Il y aurait plutôt une augmentation de la suggestibilité avec l’ âge avec une facilité d’ être dissociés (16). L’ effet de positivité (17) lié à un rappel plus facile des informations positives vécues, est à prendre en compte dans cette population afin de réactiver les réussites ou expériences à vécu émotionnel positif.

Le schéma type de l’ hypnose est souvent bousculé chez nos ainés. Leurs transes sont parfois différentes avec un état hypnotique fréquemment haché (retour à l’ état de veille, discussion), un maintien de l’ ouverture des yeux, surtout lorsqu’ il existe des troubles cognitifs. Avec l’ avancée de la perte cognitive, il convient de choisir le bon moment pour le sujet, favoriser la synchronisation, faire des séances de durée plus courte, en marchant ou en discutant, sans laisser de silence et en utilisant des phrases courtes, répétitives, au contenu positif avec des suggestions directes. Il est également important de privilégier les canaux sensoriels pour l’ induction et la focalisation de l’ attention sauf le gustatif à cause du risque de fausse route. Étant donné qu’ il est moins facile d’ accéder aux images internes et à la confusion, aller rejoindre le patient dans sa réalité, privilégier la communication non verbale et accéder aux capacités restantes paraissent être un bon abord (18).

Principales indications et contre-indications de l’ hypnose chez le sujet âgé

Le spectre de l’ application de l’ hypnose médicale est très varié. Il n’ existe que peu de contre-indications à la pratique de l’ hypnose chez la personne âgée, qui sont les mêmes que chez l’ adulte (Tableau 3).

L’ hypnose peut être utilisée comme un outil thérapeutique supplémentaire aux autres traitements, d’ autant plus que c’ est une approche non-médicamenteuse, rapide, rentable, non addictive, dépourvue d’ effets indésirables et sans dangers (28, 29). Son utilisation lors des soins difficiles, de soins d’ hygiène et de gestes douloureux prend alors tout son sens. D’ où l’ importance de former et sensibiliser les équipes qui interviennent auprès de nos aînés et de leur entourage, surtout les proches-aidants, dans le but d’ investir davantage la relation à l’ autre et faciliter la communication (30).

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Dre Montserrat Mendez

Médecin associée
Service Universitaire de Psychiatrie de l’âge avancé :
SUPAA région ouest
Avenue de Reverdil 8
1260 Nyon

Montserrat.Mendez-Rubio@chuv.ch

Dre Tatiana Baltag

Médecin Adjointe
Centre Hospitalier du Valais Romand (CHVR)
Service de Psychiatrie et Psychothérapie Ambulatoire
Centre de Compétences en Psychiatrie et Psychothérapie (CCPP) Sion et Sierre
Rue de Lausanne 63
1950 Sion

Tatiana.Baltag@hopitalvs.ch

L’ auteur n’ a pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.

◆ La TERV est une approche thérapeutique non invasive et facilement utilisable avec les personnes âgées avec une balance bénéfice-effets secondaires positive dans le traitement des troubles anxieux, les troubles de l’ humeur et le trouble somatoforme douloureux.
◆ Chez les patients souffrant de troubles neurocognitifs, la thérapie de réminiscence facilitée par la TERV permet d’améliorer les symptômes psychologiques accompagnants.
◆ La cybermalaise est l’ effet secondaire le plus fréquent directement lié à l’ âge.
◆ L’ hypnose est un processus naturel caractérisé par un état de conscience modifié induit par les suggestions proposées par le thérapeute et un outil thérapeutique complémentaire, permettant d’appréhender la personne dans sa globalité avec un abord humain.
◆ Une adaptation des séances d’ hypnose pour les aînés en fonction des indications et de l’ état cognitif de la personne est nécessaire.
◆ L’ absence d’ effets indésirables et son faible coût devraient encourager davantage de professionnels à être formés surtout s’ ils interviennent auprès de personnes âgées dont l’ état psychique est fragilisé.

1. Malbos, E., Oppenheimer, R, Lanc¸ on, C. Se libérer des troubles anxieux par la réalité virtuelle2 018; Paris, France: Groupe Eyrolles.
2. Elies C., Serra E. Réalité virtuelle et santé des personnes âgées institutionnalisées. Vers un EHPAD 2.0 ? Pratiques Psychologiques. Volume 28, Issue 4, December 2022 :191-207.
3. Powers, MB.,Emmelkamp, PM. Virtual reality exposure therapy for anxiety disorders: A meta-analysis. Journal of anxiety disorders 2008;22(3): 561–569.
4. Veling W., Lestestuiver, M. Jongma, HJR. Hoenders, C., van Driel. Virtual reality relaxation for patients with a psychiatric disorder: Crossover randomized controlled trial. Journal of medical Internet research, 23 (1) 2021; p. e 17233, 10.2196/17233
5. Rousseaux F, Bicego A, Ledoux D, et al. Hypnosis associated with 3D immersive virtual reality technology in the management of pain: a review of the literature. J Pain Res 2020; 13: 1129–38
6. Sokolov, A., Collignon, A., Bieler-Aeschlimann M. Serious video games and virtual reality for prevention and neurorehabilitation of cognitive decline because of aging and neurodegeneration. Current Opinion in Neurology 2020; 33(2):239-248.
7. Abichou, K., La Corte, V., Piolino, P. La réalité virtuelle a-t-elle un avenir pour l’étude de la mémoire épisodique dans le vieillissement? Gériatrie et Psychologie Neuropsychiatrie du Vieillissement 2017; 15(1) : 65-74.
8. Klinger, E. Martinet, A. Lucas, D. Perret. Design of virtual reality based physical and cognitive stimulation exercises for elderly people 2012; Communication présentée au ICDVRAT 2012, Laval, France.
9. Riva, V. Mancuso, S. Cavedoni, C. Stramba-Badiale. Virtual reality in neurorehabilitation: A review of its effects on multiple cognitive domains. Expert Review of Medical Devices 2020; 17 (10) : 1035-1061.
10. Moreno, A., Wall, K. J., Thangavelu, K., Craven, L., Ward, E., & Dissanayaka, N. N. A systematic review of the use of virtual reality and its effects on cognition in individuals with neurocognitive disorders. Alzheimer’s & dementia (New York, N.Y.) 2019; 5:834–850. https://doi.org/10.1016/j.trci.2019.09.016 Communication présentée au IEEE Virtual Reality 2014, Minneapolis, USA(2014)
11. Brimelow, RE, Dawe, B, Dissanayaka, N. Preliminary research: Virtual reality in residential aged care to reduce apathy and improve mood. Cyberpsychology, Behavior, and Social Networking 2014;23(3):165-170
12. Chapoulie E, Guerchouche R, Peit PD, Chaurasia G, Robert P, et al. Reminiscence Therapy using Image-Based Rendering in VR. IEEE Virtual Reality 2014; Minneapolis, United States. ffhal-01060300f
13. Charlet O., Rabeyron T. De la réalité virtuelle comme médiation thérapeutique auprès des personnes âgées en institution 2021.Médecine Hygiène « Psychothérapies.Vol 41(2) :75-86.
14. Elkins GR, Barabasz AF, Council JR, Spiegel D. Advancing research and practice: The revised APA Division 30 definition of hypnosis. American Journal of Clinical Hypnosis. 2015 Apr 7;57(4):378-85.
15. Becchio, J. Hypnose et gériatrie. Les Cahiers de L’année Gérontologique. 2014, 6(1), 6–11.
16. Cohen G, Faulkner D. Age differences in source forgetting: effects on reality monitoring and on eyewitness testimony. Psychology and Aging. 1989 Mar;4(1):10.
17. Guillaume, Cécile, Francis Eustache, et Béatrice Desgranges. L’effet de positivité: un aspect intriguant du vieillissement. Revue de neuropsychologie, vol. 1, no. 3, 2009, pp. 247-253.
18. Floccia M. Hypnose en pratiques gériatriques. Dunod; 2020 May 25.
19. Schnur JB, Kafer I, Marcus C, Montgomery GH. Hypnosis to manage distress related to medical procedures: A meta-analysis. Contemp Hypn. 2008 Aug 21;25(3-4):114-128.
20. Cordi MJ, Hirsiger S, Mérillat S, Rasch B. Improving sleep and cognition by hypnotic suggestion in the elderly. Neuropsychologia. 2015 Mar 1;69:176-82.
21. Ardigo S, Herrmann FR, Moret V, Déramé L, Giannelli S, Gold G, Pautex S. Hypnosis can reduce pain in hospitalized older patients: a randomized controlled study. BMC geriatrics. 2016 Dec;16:1-8.
22. Frischholz EJ. Antidepressant medications, placebo, and the use of hypnosis in the treatment of depression. American Journal of Clinical Hypnosis. 2013 Jan 1;55(3):209-14.
23. Satsangi AK, Brugnoli MP. Anxiety and psychosomatic symptoms in palliative care: from neuro-psychobiological response to stress, to symptoms’ management with clinical hypnosis and meditative states. Ann Palliat Med. 2018 Jan;7(1):75-111.
24. Duff S, Nightingale D. Alternative approaches to supporting individuals with dementia: enhancing quality of life through hypnosis. Alzheimer’s Care Today. 2007 Oct 1;8(4):321-31.
25. Bicego A, Rousseaux F, Faymonville ME, Nyssen AS, Vanhaudenhuyse A. Neurophysiology of hypnosis in chronic pain: A review of recent literature. American Journal of Clinical Hypnosis. 2021 Oct 15;64(1):62-80.
26. Courtois-Amiot P, Cloppet-Fontaine A, Poissonnet A, Benit E, Dauzet M, Raynaud-Simon A, Paquet C, Lilamand M. Hypnosis for pain and anxiety management in cognitively impaired older adults undergoing scheduled lumbar punctures: a randomized controlled pilot study. Alzheimers Res Ther. 2022 Sep 2;14(1):120.
27. Landry M, Stendel M, Landry M, Raz A. Hypnosis in palliative care: from clinical insights to the science of self-regulation. Ann Palliat Med. 2018 Jan;7(1):125-135.
28. Hammond DC. Hypnosis in the treatment of anxiety- and stress-related disorders. Expert Rev Neurother. 2010 Feb;10(2):263-73.
29. Häuser W, Hagl M, Schmierer A, Hansen E. The efficacy, safety and applications of medical hypnosis: a systematic review of meta-analyses. Deutsches Ärzteblatt International. 2016 Apr;113(17):289.
30. Burlaud A. Hypnose en gériatrie: un outil thérapeutique supplémentaire. NPG Neurologie-Psychiatrie-Gériatrie. 2013 Dec 1;13(78):317-20.

Epilepsie chez la personne âgée

Aussi bien l’ incidence que la prévalence de l’ épilepsie augmentent après 65ans. Au vu du vieillissement de la population, la prise en charge de l’ épilepsie chez la personne âgée devient un enjeu de santé publique. La prise en charge de ces patients implique de tenir en compte l’ étiologie, les comorbidités, les risques inhérents à une récidive de crise ou au traitement anticonvulsivant, ainsi que les changements pharmacodynamiques et pharmacocinétiques survenant dans l’ âge avancé.

Both the incidence and prevalence of epilepsy increase after the age of 65. In view of the ageing population, the management of epilepsy in the elderly is becoming a public health issue. The management of these patients implies taking into account the etiology, comorbidities, the risks inherent in a seizure recurrence or anticonvulsant treatment, as well as the pharmacodynamic and pharmacokinetic changes that occur in old age.
Key Words: epilepsy, elderly,public health, anticonvulsant treatment

L’ épilepsie est la troisième maladie neurologique la plus fréquente >65ans, après l’ AVC et les démences, tous deux majorant le risque d’ épilepsie (1). Cette tendance va s’ accentuer au vu du vieillissement de la population, avec estimation d’ une augmentation de 60 % des personnes de > 65ans dans les prochain 15ans (2). La prise en charge de l’ épilepsie chez la personne âgée implique des considérations particulières au vu des différentes étiologies, comorbidités, risque accru d’ effets secondaires du traitement, comédications, et changements pharmacodynamiques et pharmacocinétiques. De plus, la personne âgée est particulièrement vulnérable en cas de survenue de crise épileptique : risque de lésion traumatique, perte de confiance et diminution de l’ autonomie. Malgré tout cela, l’ épilepsie est souvent diagnostiquée avec retard chez la personne âgée, et ces patients ont moins facilement accès à des centres spécialisés (3).

Epidémiologie

Quand nous parlons de crises épileptiques chez la personne âgée, il convient de bien définir trois scénarios:
1) Crises épileptiques provoquées (ou symptomatique aigues), survenant dans la phase précoce d’ une lésion cérébrale ou suite à des troubles toxico-métaboliques. L’ incidence augmente linéairement dès la troisième décade, avec risque estimé à 3.6 % à 80ans (4). Suite à une première crise il convient d’ effectuer un bilan biologique large, une imagerie cérébrale et une anamnèse détaillée à la recherche d’ un facteur favorisant. Ce type de crise ne permet pas de retenir automatiquement un diagnostic d’ épilepsie. En effet, l’ épilepsie est définie par la survenue de ≥2 crises non provoquées espacées de 24h ou une crise unique avec risque de récidive à 10ans estimé ≥60 % (par le biais des examens complémentaires, tels qu’ EEG, imagerie) (5).

2) Epilepsie ayant débuté dans le jeune âge et se poursuivant dans l’ âge avancé.

3) Epilepsie survenant de novo à l’ âge avancé (>60ans).

L’ incidence de l’ épilepsie est accentuée dans le très jeune âge et l’ âge avancé (augmentation graduelle dès 40-50ans), et est estimée à 90-150/100’000 à 65ans. Ce pattern bimodal a été répétitivement démontré aussi bien dans des pays développés que en voie de développement (3, 6). Au vu du vieillissement de la population et de l’ amélioration des soins avec survie plus longue des patients souffrant d’ épilepsie dans le jeune âge, la prévalence de l’ épilepsie suit une même courbe bimodal (5.4 % chez la personne âgée et jusqu’ à 7.5 % chez les patients en EMS (7, 8)). L’ incidence de l’ état de mal épileptique (EME), soit une crise prolongées de plus de 5 à 10 minutes, est estimée à 86/100’ 00 chez la personne âgée, soit 5x plus élevé que chez les plus jeunes (9). De plus la mortalité associée à l’ EME augmente avec l’ âge pour atteindre 38 % > 60ans (9, 10) et représente un des facteurs pronostiques principaux (11). Ces données confortent le fait que l’ épilepsie chez la personne âgée ne doit pas être considérée comme une maladie bénigne.

Etiologies et facteur de risque

Les maladies cérébrovasculaires sont responsable de plus d’ un tiers des épilepsie chez la personne âgée (12) avec une incidence d’ épilepsie, suite à un AVC, de 6.4-15 % (13). Les maladies neurodégénératives et les étiologies indéterminées représentent environ un quart des cas (6). Les étiologies tumorales sont responsables d’ environ 10 % (14). Plusieurs études reportent une association entre les facteurs de risque cérébro-vasculaire et la survenue d’ épilepsie (15-18). Dans la cohorte ARIC (Atherosclerosis Risk in Communities) incluant plus de 10’000 patients suivi durant une décennie, la survenue d’ épilepsie était est associée à l’ HTA, le diabète et les AVC (18). Cette observation ouvre la possibilité d’ une approche holistique permettant peut-être de réduire l’ épileptogenèse en traitant les facteurs de risque cérébo-vasculaire.

Challenge diagnostic

Les crises épileptiques chez la personne âgée sont majoritairement focales et peuvent passer inaperçues de par leur sémiologie moins « motrice » que chez le jeune. Elles peuvent se manifester uniquement par des épisodes paroxystiques d’ arrêt d’ activité, perte de contact, chute ou confusion (3). Une épilepsie n’ aurait pas été considérée initialement chez 26 % de patients âgés avec diagnostic final d’ épilepsie (19). Jusqu’ à 70 % des crises, lors d’une maladie d’Alzheimer, se présenteraient purement avec des troubles de l’ état de conscience (20). De plus, le diagnostic différentiel est très large, incluant fluctuations dans le cadre d’ une maladie neurodégénérative, syncopes, AIT ou troubles toxico-métaboliques. L’ anamnèse auprès du patient et des proches est essentielle. Il convient de chercher activement le caractère stéréotypé des épisodes, les circonstances de survenue et d’ éventuels signes associés tel que des automatismes (Tab. 1). Les patients âgés tendent à avoir une confusion post-critique ou des phénomènes de Todd prolongés (plusieurs heures, voir jours), pouvant mener au diagnostic erroné de démence ou d’ AVC (21). Le diagnostic d’ épisode fonctionnel (PNES ; Psychogenic Non epileptic Seizures) est souvent peu considéré chez la personne âgée. Toutefois dans une cohorte de 94 patients de >60ans sous monitoring EEG à but de caractérisation d’ épisode, 27 ont présenté des épisodes non-épileptiques, principalement des PNES (22). Il s’ agit souvent de sujets avec une lourde comorbidité somatique (23). L’ EEG peut évidemment aider au diagnostic. Il convient toutefois de souligner qu’ un enregistrement interictal ne présente ni une spécificité ni une sensibilité parfaite. L’ EEG détecte des anomalies irritatives interictales chez environs un tiers des patients âgés souffrant d’ épilepsie. Inversement des anomalies irritatives interictales sont rapportées, principalement dans le sommeil, chez 2 à 6 % des patients souffrant de maladie neurodégénérative, sans nécessairement d’ épisode clinique compatibles avec des crises (20). L’ anamnèse et le jugement clinique doivent donc primer. En de cas forte suspicion clinique, un traitement d’ épreuve, voire un enregistrement EEG prolongé incluant du sommeil peuvent être discutés au cas par cas.

Traitement

Bien que la majorité des personnes âgées soient libres de crises après un an sous monothérapie (6), l’ introduction d’ un traitement est potentiellement complexe, et implique de tenir en compte les changements pharmacodynamiques et pharmacocinétiques liés à l’ âge, les comédications, et les comorbidités spécifiques à chaque patient. Le choix de la médication doit être fait au cas par cas avec balance de la tolérance et de l’ efficacité. Une consultation spécialisée, au moins dans la phase initiale, est donc recommandée. La lamotrigine et le lévétiracétam (24, 25) sont les anticonvulsivants les plus utilisés, et présentent, avec la gabapentine/prégabaline, les molécules de premier choix chez la personne âgée. Le lévétiracétam pouvant engendrer des troubles du comportement, il convient d’ en informer le patient et ses proches et de les chercher activement. La lamotrigine présente un effet éveillant et stabilisateur de l’ humeur, pouvant être bénéfique. Ce traitement peut toutefois majorer les myoclonies et son schéma d’ introduction lentement progressif au vu des risques de réaction cutanées sévères, peut être difficile à suivre en cas d’ atteinte cognitive. De manière générale, les inducteurs enzymatiques sont à éviter si possible au vu de leur effet sur le métabolisme osseux et leurs interactions médicamenteuses. Les tables 2 et 3 résument les caractéristiques des anticonvulsivants les plus communs. Lors de l’ introduction d’ un traitement, il convient d’ effectuer un schéma de titration lent et de viser une dose plus faible que chez le jeune.

Relation bidirectionnelle entre épilepsie et démence

Après une première crise non provoquée, chez un patient souffrant d’ une démence d’ Alzheimer, le risque de récidive est estimé à 70 % (26), remplissant les critères diagnostic pour une épilepsie. Un risque majoré de crises épileptiques en cas de démence est connu de longue date (27). Au vu d’ études animales décrivant que l’ accumulation de β-amyloïde favoriserait la survenue de crises électriques et qu’ en retour, les crises contribueraient à la dysfonction hippocampique et donc au trouble mnésique (28), l’ intérêt pour cette relation bidirectionnelle s’ est accru récemment. Dans la cohorte Framingham on rapporte un risque de démence doublé chez les patients souffrant d’ épilepsie, et de manière similaire un risque d’ épilepsie accru en cas de démence (29). De même, dans la cohorte ARIC, on observe 3x plus de risque de démence chez les patients avec épilepsie tardive (30) et 3x plus de risque de survenue d’ épilepsie chez les patients déments (18). La physiopathologie sous-jacente reste non élucidée. Des patients avec épilepsie ayant débuté dans l’ enfance présentaient, après plus de 50ans, plus de troubles cognitif et un PET-amyloïde plus altéré que des contrôles (31). Une étude récente n’ a par ailleurs pas retrouvée d’ association entre les anticonvulsivants et des troubles cognitifs (32), mais plutôt entre la fréquence des crises et le déclin cognitif. Inversement plus de 50 % des patients avec une épilepsie tardive présentent un MCI au moment du diagnostic (33, 34). Plusieurs études anatomopathologiques chez des patients, sans démence, ayant bénéficié d’ une lobectomie temporale pour traitement de l’ épilepsie, décrivent plus d’ accumulation de β-amyloïde ou de Tau-hyperphosphorylée chez les patients souffrant d’ épilepsie que chez des contrôles (20, 35, 36). Finalement des anomalies irritatives intercritiques à l’ EEG sont associés à un mauvais pronostic cognitif dans la maladie d’ Alzheimer (29, 37). Il n’ est pas encore compris si cela est dû à des crises infra-cliniques entravant la cognition, si ces anomalies EEG sont délétères en elles-mêmes, ou si elles témoignent d’ une pathologie sousjacente plus sévère. Ceci a amené à étudier les possibilités d’ un traitement anticonvulsivant prophylactique (Fig 1). Des études animales ont montré que le lévétiracétam, en réduisant l’excitotoxicité liée au glutamate et en supprimant l’ hyperactivité neuronale hippocampique, pouvait amener à une restauration de la fonction synaptique et une diminution des dépôts de β-amyloïde. Une étude récente a randomisé des patients souffrant de maladie d’ Alzheimer entre placebo et lévétiracetam à très basse dose : chez le petit sous-groupe présentant une activité irritative à l’ EEG (9 patients !) certaines fonctions cognitives s’ amélioraient après le lévétiracetam (38).

Conclusion

L’ épilepsie est une maladie fréquente chez la personne âgée, et peut avoir d’ innombrables conséquences aussi bien physiques que sociales ou psychiatriques. Au vu de la relation bidirectionnelle entre l’ épilepsie et la démence, un screening rigoureux à la recherche de phénomènes cliniques évocateurs de crises épileptiques chez les patients souffrant de démence, ou de plaintes cognitives chez ceux souffrant d’ épilepsie devrait être effectué. Le diagnostic et la mise en route d’ un traitement requiert le recours à un/e spécialiste.

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Dre méd. Isabelle Beuchat, MD

CHUV, NLG, BH07
Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV) et université de Lausanne, Suisse ; Département des neurosciences cliniques, Service de neurologie, Unité d’épileptologie
Rue du Bugnon 46
1011 Lausanne

Isabelle.beuchat@chuv.ch

Pr Andrea O. Rossetti, MD, FAES

CHUV, NLG, BH07
Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV) et université de Lausanne, Suisse ; Département des neurosciences cliniques, Service de neurologie, Unité d’épileptologie
Rue du Bugnon 46
1011 Lausanne

Andrea.rossetti@chuv.ch

Les auteurs n’ ont pas déclaré de conflits d’ intérêt en rapport avec cet article.

◆ L’ épilepsie est plus fréquente chez la personne de plus de 65ans
que dans n’ importe quelle autre tranche d’ âge.
◆ La sémiologie des crises épileptiques est différente, avec moins de manifestations motrices ou de généralisation.
◆ Le traitement anticonvulsivant chez la personne âgée doit être adapté, avec pondération de l’ efficacité et de la tolérance, et prise en compte des comorbidités spécifiques de chaque patient.
◆ Il existe une relation bidirectionnelle entre l’ épilepsie et la démence ;
la démence représente un facteur de risque indépendant pour la
survenue d’ épilepsie, et l’ épilepsie un facteur de risque indépendant pour la survenue de démence.

 

1. WHO. Epilepsy: a public health imperative. 2019 [online]. Available at: www.who.int/mental_health/neurology/epilepsy/report_2019/en/.
2. Available at: https://www.census.gov/content/dam/Census/%20library/publications/2016/demo/p95-16-1.pdf.
3. Stephen LJ, Brodie MJ. Epilepsy in elderly people. The Lancet 2000;355:1441-1446.
4. Annegers JF, Hauser WA, Lee JR, Rocca WA. Incidence of acute symptomatic seizures in Rochester, Minnesota, 1935-1984. Epilepsia 1995;36:327-333.
5. Fisher RS, Acevedo C, Arzimanoglou A, et al. ILAE official report: a practical clinical definition of epilepsy. Epilepsia 2014;55:475-482.
6. Sen A, Jette N, Husain M, Sander JW. Epilepsy in older people. The Lancet 2020;395:735-748.
7. Beghi E, Giussani G, Nichols E, et al. Global, regional, and national burden of epilepsy, 1990–2016: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2016. The Lancet Neurology 2019;18:357-375.
8. Birnbaum AK, Leppik IE, Svensden K, Eberly LE. Prevalence of epilepsy/seizures as a comorbidity of neurologic disorders in nursing homes. Neurology 2017;88:750-757.
9. DeLorenzo RJ, Hauser WA, Towne AR, et al. A prospective, population-based epidemiologic study of status epilepticus in Richmond, Virginia. Neurology 1996;46:1029-1035.
10. Sveinsson O, Andersson T, Carlsson S, Tomson T. The incidence of SUDEP: A nationwide population-based cohort study. Neurology 2017;89:170-177.
11. Sutter R, Kaplan PW, Ruegg S. Outcome predictors for status epilepticus–what really counts. Nat Rev Neurol 2013;9:525-534.
12. Liu S, Yu W, Lu Y. The causes of new-onset epilepsy and seizures in the elderly. Neuropsychiatr Dis Treat 2016;12:1425-1434.
13. Galovic M, Ferreira-Atuesta C, Abraira L, et al. Seizures and Epilepsy After Stroke: Epidemiology, Biomarkers and Management. Drugs Aging 2021;38:285-299.
14. Hernandez-Ronquillo L, Adams S, Ballendine S, Tellez-Zenteno JF. Epilepsy in an elderly population: Classification, etiology and drug resistance. Epilepsy Res 2018;140:90-94.
15. Leppik IE. Epilepsy in the elderly: scope of the problem. Int Rev Neurobiol 2007;81:1-14.
16. Ramsay RE, Pryor F. Epilepsy in the elderly. Neurology 2000;55:S9-14; discussion S54-18.
17. Choi H, Pack A, Elkind MS, Longstreth WT, Jr., Ton TG, Onchiri F. Predictors of incident epilepsy in older adults: The Cardiovascular Health Study. Neurology 2017;88:870-877.
18. Johnson EL, Krauss GL, Lee AK, et al. Association Between Midlife Risk Factors and Late-Onset Epilepsy: Results From the Atherosclerosis Risk in Communities Study. JAMA Neurol 2018;75:1375-1382.
19. Rowan AJ, Ramsay RE, Collins JF, et al. New onset geriatric epilepsy: a randomized study of gabapentin, lamotrigine, and carbamazepine. Neurology 2005;64:1868-1873.
20. Vossel KA, Tartaglia MC, Nygaard HB, Zeman AZ, Miller BL. Epileptic activity in Alzheimer’s disease: causes and clinical relevance. Lancet Neurol 2017;16:311-322.
21. Sheth RD, Drazkowski JF, Sirven JI, Gidal BE, Hermann BP. Protracted ictal confusion in elderly patients. Arch Neurol 2006;63:529-532.
22. McBride AE, Shih TT, Hirsch LJ. Video-EEG monitoring in the elderly: a review of 94 patients. Epilepsia 2002;43:165-169.
23. Duncan R, Oto M, Martin E, Pelosi A. Late onset psychogenic nonepileptic attacks. Neurology 2006;66:1644-1647.
24. Lattanzi S, Trinka E, Del Giovane C, Nardone R, Silvestrini M, Brigo F. Antiepileptic drug monotherapy for epilepsy in the elderly: A systematic review and network meta-analysis. Epilepsia 2019;60:2245-2254.
25. Lezaic N, Gore G, Josephson CB, Wiebe S, Jette N, Keezer MR. The medical treatment of epilepsy in the elderly: A systematic review and meta-analysis. Epilepsia 2019;60:1325-1340.
26. Voglein J, Ricard I, Noachtar S, et al. Seizures in Alzheimer’s disease are highly recurrent and associated with a poor disease course. J Neurol 2020;267:2941-2948.
27. Hesdorffer DC, Hauser WA, Annegers JF, Kokmen E, Rocca WA. Dementia and adult-onset unprovoked seizures. Neurology 1996;46:727-730.
28. Palop JJ, Chin J, Roberson ED, et al. Aberrant excitatory neuronal activity and compensatory remodeling of inhibitory hippocampal circuits in mouse models of Alzheimer’s disease. Neuron 2007;55:697-711.
29. Stefanidou M, Beiser AS, Himali JJ, et al. Bi-directional association between epilepsy and dementia: The Framingham Heart Study. Neurology 2020;95:e3241-e3247.
30. Johnson EL, Krauss GL, Kucharska-Newton A, et al. Dementia in late-onset epilepsy: The Atherosclerosis Risk in Communities study. Neurology 2020;95:e3248-e3256.
31. Joutsa J, Rinne JO, Hermann B, et al. Association Between Childhood-Onset Epilepsy and Amyloid Burden 5 Decades Later. JAMA Neurol 2017;74:583-590.
32. Foster E, Malpas CB, Ye K, et al. Antiepileptic drugs are not independently associated with cognitive dysfunction. Neurology 2020;94:e1051-e1061.
33. Witt JA, Werhahn KJ, Kramer G, Ruckes C, Trinka E, Helmstaedter C. Cognitive-behavioral screening in elderly patients with new-onset epilepsy before treatment. Acta Neurol Scand 2014;130:172-177.
34. Nardi Cesarini E, Babiloni C, Salvadori N, et al. Late-Onset Epilepsy With Unknown Etiology: A Pilot Study on Neuropsychological Profile, Cerebrospinal Fluid Biomarkers, and Quantitative EEG Characteristics. Front Neurol 2020;11:199.
35. Thom M, Liu JY, Thompson P, et al. Neurofibrillary tangle pathology and Braak staging in chronic epilepsy in relation to traumatic brain injury and hippocampal sclerosis: a post-mortem study. Brain 2011;134:2969-2981.
36. Tai XY, Koepp M, Duncan JS, et al. Hyperphosphorylated tau in patients with refractory epilepsy correlates with cognitive decline: a study of temporal lobe resections. Brain 2016;139:2441-2455.
37. Voglein J, Noachtar S, McDade E, et al. Seizures as an early symptom of autosomal dominant Alzheimer’s disease. Neurobiol Aging 2019;76:18-23.
38. Vossel K, Ranasinghe KG, Beagle AJ, et al. Effect of Levetiracetam on Cognition in Patients With Alzheimer Disease With and Without Epileptiform Activity:
A Randomized Clinical Trial. JAMA Neurol 2021;78:1345-1354.

La sexualité des personnes âgées – il est temps de briser un tabou

La sexualité est un facteur positif important de la qualité de vie jusqu’ à un âge avancé. Les personnes âgées pratiquent aussi régulièrement le sexe et sont majoritairement satisfaites de leur vie sexuelle. Les changements biologiques, les comorbidités existantes, les limitations fonctionnelles et les effets secondaires des médicaments sont des facteurs qui influencent négativement la satisfaction sexuelle. L’ optimisation de ces facteurs, comme les pertes fonctionnelles ou la réduction des médicaments, sont des mesures simples. Le passage d’ une forme d’ habitat autonome à une forme d’ habitat assisté peut modifier dramatiquement l’ expérience sexuelle. La qualité de vie dans de telles formes d’ habitat peut être améliorée de manière significative grâce à la détabouisation de la sexualité, à des conseils compétents et à l’ ouverture des institutions aux besoins sexuels des résidents.

Sexuality is an important contributor to quality of life even in advanced age. Older persons are regularly engaged in sexual activities and report a high level of satisfaction. Age associated biological changes, functional decline, comorbidities and medication side effects are common factors with negative impact upon sex life. Optimizing such factors and a thorough medication review are simple measures in daily practice.
Moving into a logterm care facility has the risk of a significant influence on sexual life in older persons. Thus, an open minded approach respecting privacy and sexual desire of older persons in such institution may improve quality of life.
Key Words: sexuality, older persons, geriatric patients

Les consultations « régulières » dans les cabinets médicaux se concentrent souvent sur des thèmes somatiques. Certains sujets tabous sont alors volontiers occultés. Même chez les jeunes patients, il est difficile d’ aborder le thème de la sexualité. Qui aime poser volontairement des questions sur la vie sexuelle d’ autrui, et qui plus est chez des personnes âgées ? Peut-on et doit-on aborder le thème de la sexualité des personnes âgées en consultation ? Nous pensons que oui et donnons dans l’ article suivant un bref aperçu des travaux récents sur ce thème souvent tabou.

Que signifie la sexualité dans le contexte du vieillissement en bonne santé ?

Le vieillissement en bonne santé a été défini en 2015 dans un document détaillé du Rapport mondial de l’ OMS sur le vieillissement et la santé (1). Il s’ agit d’ un processus qui, malgré la présence éventuelle de maladies chroniques, permet de développer ou de maintenir des capacités fonctionnelles qui vont de pair avec le bien-être. Dans cet ouvrage de plus de 200 pages, une page est consacrée à la sexualité des personnes âgées et regrette en premier lieu le peu de données disponibles, mais formule clairement que la fonction sexuelle représente un critère important de la qualité de vie des personnes âgées. Le même rapport présente des données qui montrent que jusqu’ à l’ âge de 64 ans, près des trois quarts des personnes ont encore des rapports sexuels au moins une fois par semaine et que la moitié des 65-74 ans sont également encore sexuellement actifs. Même un quart des 75-85 ans ont des relations sexuelles (avec pénétration) au moins une fois par semaine (1). Une étude récente décrit même des fréquences de 70 % chez les personnes de 75 ans et plus (2).

La société ne comprend souvent pas la vie sexuelle des personnes âgées, bien qu’ elles considèrent elles-mêmes que le sexe fait partie de leur qualité de vie personnelle. Dans une analyse récente sur le thème du sexe chez les personnes âgées, le groupe de recherche a pu identifier au total 5 thèmes importants pour l’ encadrement et le conseil des personnes âgées (3) (tab. 1).

Le fait que les personnes en Suisse aient aujourd’ hui des rapports sexuels plus tôt qu’ il y a 60 ans a été mis en évidence en 2009 par la Commission fédérale pour l’  enfance et la jeunesse. Alors qu’ en 1972, environ 20 % des hommes et 30 % des femmes avaient déjà eu des rapports sexuels à 17 ans, ces chiffres sont passés à 56 % et 66 % en 2007. A notre connaissance, il n’ existe pas d’ enquête sur la question de savoir si l’ activité sexuelle a également augmenté avec l’ âge. Une tendance dans ce sens est toutefois envisageable. Le statut de la relation (seul(e) ou avec un(e) partenaire) est un critère décisif. Une enquête de 2017 a examiné la fréquence de l’ activité sexuelle et des caresses en fonction de l’ âge, du sexe et du statut de la relation (2). Les personnes en couple étaient sexuellement actives dans plus de 80  % des cas, quel que soit leur sexe, alors que la fréquence tombait à environ 5 % pour les femmes et 18 % pour les hommes lorsqu’ ils n’ avaient pas de partenaire. L’ âge croissant est en outre corrélé positivement au dysfonctionnement sexuel et négativement au désir sexuel (4). Même avec l’ âge, la sexualité ne se réduit pas à l’ aspect physique. D’ autres facteurs au moins aussi importants sont l’ attitude personnelle et les expériences antérieures en matière de sexe, leur importance subjective pour la qualité des relations ainsi que les déterminants culturels (5). La sexualité des personnes âgées est souvent considérée comme une intimité vécue de la même manière par les deux sexes. En revanche, les hommes âgés font plus souvent état de pensées et d’ activités sexuelles que les femmes. 27 % des personnes âgées de 60 à 82 ans expriment plus souvent des pensées sexuelles que la moyenne d’ une population de référence de 22 à 36 ans (6). Cela montre que le sujet est tout à fait pertinent pour la pratique quotidienne.

Qu’ est-ce qui influence notre vie sexuelle avec l’ âge ?

Le plus grand «organe sexuel» est le système nerveux central (SNC). Les impulsions provenant de différentes zones du cerveau, des nerfs crâniens et du tronc cérébral régulent et contrôlent la libido, l’ excitation et, surtout, les processus physiologiques qui mènent finalement à l’ orgasme et à la satisfaction qui en découle (7). Des zones plus ou moins similaires sont impliquées chez les deux sexes. Seul le noyau sexuellement dimorphe du thalamus contrôle la sexualité de manière différente chez les femmes et les hommes (8). De nombreux neurotransmetteurs jouent un rôle dans ce processus ; la dopamine et la sérotonine, par exemple, sont des neurotransmetteurs de la sexualité.

Les médiateurs de la satisfaction sexuelle semblent être particulièrement importants (7). Mais d’ autres formes de sexualité, telles que les câlins, les caresses ou les embrassades, sont également appréciées jusqu’ à un âge avancé comme faisant partie d’ une bonne qualité de vie. Avec l’ âge, elles deviennent plus importantes que la sexualité associée au coït. Parallèlement, les organes sexuels de la femme et de l’ homme se modifient. Chez la femme, de nombreux changements sont déclenchés dans le cadre de la ménopause. Souvent, les femmes ménopausées souffrent d’ une diminution de la production de sécrétions vaginales, ce qui peut entraîner une pénétration douloureuse. L’ introïtus se rétrécit, la paroi vaginale s’ épaissit et se raccourcit. Les femmes subissent en outre une diminution de l’ excitabilité sexuelle (arousal). La diminution de la production endogène de testostérone chez les hommes, liée à l’ âge, est beaucoup plus lente que celle de la ménopause, mais elle est également liée à des modifications de la sexualité. Outre la diminution de l’ éveil et de la quantité de sécrétion de prostate, c’ est la dysfonction érectile avec ses effets sur la tumescence, la vidange du corps caverneux et le retard de la régénérescence qui est au premier plan.

Comorbidités et médicaments

Les comorbidités existantes ont un effet négatif sur les changements physiologiques mentionnés précédemment. Elles vont de l’ arthrose aux polyneuropathies, des douleurs chroniques aux troubles psychiques ou cognitifs (dépression, démence). A cela s’ ajoutent les effets des stimulants et des addictions comme l’ alcool, la nicotine et autres drogues. Un grand nombre de médicaments agissant sur le SNC (y compris la moelle épinière) influencent par leurs effets les deux neurotransmetteurs la dopamine et la sérotonine. C’ est pourquoi l’ indication de ces substances doit toujours être vérifiée de manière critique en cas de troubles. Une réduction de la dose peut déjà entraîner une amélioration des symptômes (tab. 2).

La sexualité dans les soins de base, un tabou ?

Dans la pratique, le thème de la sexualité semble tabou. Seuls un peu plus de 20 % des femmes et près de 40 % des hommes de plus de 50 ans en parlent. Plus la personne est âgée, plus souvent « les deux parties » se taisent. Les femmes semblent particulièrement désavantagées. Une grande enquête britannique a montré que seules 68 % des femmes de plus de 65 ans ont parlé de la sexualité des personnes âgées, alors que 97 % des personnes interrogées auraient aimé en parler et qu’ une grande partie (80 %) aurait même été prête à fixer un deuxième rendez-vous sur ce thème (10). Le résultat de la même enquête montre que tant les médecins que les femmes ont certains préjugés, connaissent peu la sexualité des personnes âgées, sont pressés par le temps et réduisent souvent la sexualité aux troubles de l’ érection. D’ autre part, les patients ont honte et espèrent que le sujet sera abordé par leur « vis-à-vis » (10).

Et dans le domaine du long terme ?

En Suisse, environ 90’ 000 personnes âgées vivent dans des institutions de long séjour, dont les trois quarts ont 80 ans et plus (11). Malheureusement, la pratique de la sexualité dans ces institutions est souvent perturbée, par exemple par une intimité insuffisante, le manque de partenaire, l’ attitude (négative) des propres membres de la famille, des soignants, mais aussi des médecins de famille, ainsi que des connaissances insuffisantes sur la sexualité des personnes âgées (12).

Conseils pour la vie quotidienne

Nous n’ apprenons certaines choses que si nous les demandons activement. Cela signifie toutefois que nous devons surmonter notre propre pudeur, saisir le « bon moment » et apprendre à lire entre les lignes. Il n’ est pas rare que le thème de la sexualité soit abordé à la fin d’ une conversation. Idéalement, il devrait faire partie d’ une anamnèse « typique », même chez les personnes âgées. Il est en outre décisif de savoir qui est la personne idéale pour aborder le sujet. Il faut être conscient de sa propre attitude et de ses propres valeurs (13). Une bonne option est également de « s’ entourer d’ une personne idéale » pour aborder le sujet. Les questions directes, claires et ouvertes constituent une bonne entrée en matière : « Comment va votre vie sexuelle » ? Êtes-vous encore sexuellement actif ? » Dans le contexte des troubles psychiques et de leur médication, on peut par exemple mentionner en introduction la maladie de base ou les effets secondaires potentiels des médicaments sur la sexualité. Chez les femmes en péri-ménopause, les questions sur les troubles de la ménopause sont une bonne introduction à la thématique (13). Des questions sur l’ orientation sexuelle (si elle n’ est pas déjà connue) ou des contacts avec des travailleuses du sexe (en particulier chez les hommes) peuvent en outre aider à comprendre le problème.

Comment continuer ?

En levant le tabou sur la sexualité lors d’ un entretien personnel et en réaffirmant que le sexe est un facteur important de la satisfaction de la vie, même à un âge avancé, on a déjà fait beaucoup sur le plan thérapeutique. Il est tout à fait possible que les femmes reçoivent des conseils sur l’ œstrogénisation de la muqueuse vaginale ou sur les lubrifiants. Selon les troubles, un suivi gynécologique est indiqué. Chez les hommes, la dysfonction érectile peut être au premier plan des plaintes, mais la sexualité des personnes âgées ne se résume pas au Viagra. La prudence est de mise avec les substances destinées à augmenter la libido, car les effets sont anecdotiques. Dans les cas d’ hyperactivité sexuelle, on utilise parfois des anti-androgènes chez les hommes souffrant de troubles cognitifs, dont les effets sur les taux de testostérone déjà physiologiquement bas sont très discutables.

Existe-t-il des centres de consultation ou des établissements modèles ?

Malgré des recherches intensives sur Internet, nous n’ avons pas trouvé de recueil spécifique à la thématique de la sexualité des personnes âgées. La page d’ accueil Santé sexuelle Suisse (www.sante-sexuelle.ch) contient toutefois une liste de centres de conseil régionaux et de thérapeutes actifs dans le domaine de la sexualité. Pour les personnes homosexuelles, le site de l’ association www.queerAltern.ch est tout indiqué. Tant Pro Senectute Suisse que l’ association suisse des homes Curaviva traitent de cette thématique en ligne. Les institutions modèles, qui sont considérées comme un exemple de concept sexuel vécu, ne sont toutefois pas répertoriées. Les facteurs suivants peuvent toutefois contribuer à la qualité de vie « sexuelle » dans les maisons de retraite et les établissements médico-sociaux (tab. 3).

Cet article est une traduction de « der informierte arzt » 02_2023

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

PD Dr méd. Thomas Münzer

Clinique gériatrique de Saint-Gall
Rorschacher Str. 94
9000 St. Gallen

Dre méd. Annette Ciurea

Age Medical – Zentrum Gesundheit im Alter
Hardturmstrasse 131
8005 Zürich

L’ auteur n’ a pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.

1. World Health O. World report on ageing and health. Geneva: World Health Organization; 2015 2015.
2. Freak-Poli R, Kirkman M, De Castro Lima G, Direk N, Franco OH, Tiemeier H. Sexual Activity and Physical Tenderness in Older Adults: Cross-Sectional Prevalence and Associated Characteristics. J Sex Med. 2017;14(7):918-27.
3. Bauer M, Haesler E, Fetherstonhaugh D. Let’s talk about sex: older people’s views on the recognition of sexuality and sexual health in the health-care setting. Health Expectations. 2016;19(6):1237-50.
4. Wang V, Depp CA, Ceglowski J, Thompson WK, Rock D, Jeste DV. Sexual health and function in later life: a population-based study of 606 older adults with a partner. Am J Geriatr Psychiatry. 2015;23(3):227-33.
5. Srinivasan S, Glover J, Tampi RR, Tampi DJ, Sewell DD. Sexuality and the Older Adult. Curr Psychiatry Rep. 2019;21(10):97.
6. Kolodziejczak K, Rosada A, Drewelies J, Duzel S, Eibich P, Tegeler C, et al. Sexual activity, sexual thoughts, and intimacy among older adults: Links with physical health and psychosocial resources for successful aging. Psychol Aging. 2019;34(3):389-404.
7. Calabrò RS, Cacciola A, Bruschetta D, Milardi D, Quattrini F, Sciarrone F, et al. Neuroanatomy and function of human sexual behavior: A neglected or unknown issue? Brain Behav. 2019;9(12):e01389.
8. He Z, Ferguson SA, Cui L, Greenfield LJ, Paule MG. Development of the sexually dimorphic nucleus of the preoptic area and the influence of estrogen-like compounds. Neural Regen Res. 2013;8(29):2763-74.
9. Faubion SS, Rullo JE. Sexual Dysfunction in Women: A Practical Approach. Am Fam Physician. 2015;92(4):281-8.
10. Morton L. Sexuality in the Older Adult. Prim Care. 2017;44(3):429-38.
11. (BAG) BfG. Sozialmedizinische Betreuung in Institutionen und zu Hause 2019 [Medienmitteilung]. 2019 https://www.bfs.admin.ch/bfs/de/home/statistiken/gesundheit/gesundheitswesen.assetdetail.14817268.html.
12. Richardson JP, Lazur A. Sexuality in the nursing home patient. Am Fam Physician. 1995;51(1):121-4.
13. Taylor A, Gosney MA. Sexuality in older age: essential considerations for healthcare professionals. Age Ageing. 2011;40(5):538-43.

Diabète de type 2 et néphropathie 2022

Depuis le dernier article paru dans la Gazette Médicale en 2017 (01 _ 2017 _ la gazette médicale _ info@geriatrie), il y a eu un changement historique de la prise en charge de patients diabétiques de type 2 présentant une néphropathie diabétique albuminurique. En effet des études randomisées contrôlées de haute qualité ont été publiées entre 2019 et 2022 et ont changé l’ algorithme de prise en charge (1,2). Cet article a pour but de refaire le point par rapport à la néphropathie diabétique

Epidémiologie et dépistage

La prévalence de la néphropathie diabétique est en augmentation en raison du vieillissement de la population et de l’ augmentation de la prévalence du diabète de type 2. Le médecin de premier recours et le diabétologue restent en première ligne pour le dépistage de la néphropathie diabétique. Une évaluation annuelle avec une estimation de la filtration glomérulaire (eGFR selon CKD-EPI basé sur la créatinine) et un rapport albumine/créatinine urinaire sur un spot est recommandée chez tout adulte diabétique. Un stix ou sédiment urinaire sera fait pour compléter ce bilan et d’ autres causes d’ atteinte rénale seront recherchées en cas de sédiment pathologique. La fréquence des contrôles sera augmentée chez les personnes présentant déjà une néphropathie (Tab.1). On parle de maladie rénale chronique en cas d’ eGFR < 60ml/min/année et/ou lors d’ un stade A2-A3 de l’ albuminurie. Mais adapté à l’ âge, cette classification peut être affinée (si âge<40 ans <75ml/min/1.73 m2, si âge >65 ans <45ml/min/1.73 m2). Finalement tout patient avec un stade A3 de l’ albuminurie présente un déclin accéléré de la fonction rénale et nécessite une prise en charge multifactorialle intensive (contrôle glycémique, tensionnelle, lipidique, poids, tabac, adhésion au traitement…).

Algorithme de prise en charge

La prise en charge du patient avec une néphropathie diabétique est multiple et complexe. Un consensus suisse sur la néphropathie diabétique résume en détail les connaissances actuelles et la prise en charge thérapeutique (Fig.1) (2). Il y aura des objectifs chiffrés (glycémique, tensionnelle, lipidique) mais aussi des objectifs de protection rénale (IEC ou Sartan, SGLT2i, finérénone). Il sera important d’ exclure d’ autres causes d’ atteinte rénale (dans 20% des cas) et d’ adresser le patient au néphrologue en cas de doute. L’ objectif thérapeutique est d’ améliorer la qualité de vie tout en ralentissant le déclin de la fonction rénale et en diminuant le risque cardiovasculaire. La très grande majorité de patients diabétiques avec une néphropathie vont mourir de maladie cardiovasculaire avant d’ atteindre l’ insuffisance rénale terminale. La prise en charge multidisciplinaire s’ impose parfois avec un suivi médical, infirmier, diététique, pharmacien et podologique. L’ amélioration de l’ auto-soin et l’ adhésion au traitement sont aussi des facteurs qui peuvent avoir un impact positif sur le pronostic.

Médicaments néphroprotecteurs

IEC/Sartans: Le blocage du système rénine-angiotensine par les inhibiteurs de l’ enzyme de conversion ou les sartans sont en première ligne lors de néphropathie albuminurique. Les études qui remontent il y a plus de 20 ans montrent une diminution des événements rénaux. Par contre leur association (IEC, sartan, inhibiteur de la rénine) n’ est pas proposée car les études ont montré une augmentation des effets indésirables. Un dosage de la créatinine et de la kaliémie est proposé 1-2 semaines après le début du traitement qui sera mis en suspens en cas d’ élévation de la créatinine de plus de 30%. Une kaliémie élevée fera rechercher d’ autres causes favorisants comme les AINS, l’ acidose métabolique et l’ alimentation riche en potassium.

SGLT2 inhibiteurs (SGLT2i) (3,4,5,6) : Les SGLTi induisent une glucosurie en inhibant la réabsorption rénale de glucose/sodium. Ces médicaments améliorent le contrôle glycémique lors de eGFR>45ml/min/1.72 m2, diminuent le risque d’ hospitalisation pour insuffisance cardiaque (lors de eGFR > 20ml/min/1.73m2) et ralentissent le déclin de la fonction rénale et l’ albuminurie (lors de eGFR > 25ml/min/1.73m2). L’ introduction d’ un SGLT2i dès un stade KDIGO G2A3 de l’ albuminurie peut retarder la survenue de l’ insuffisance rénale terminale de plus de 10 ans. Ces médicaments de prix moyen sont pris en une prise orale par jour. La tolérance est le plus souvent bonne. Il est néanmoins important d’ informer le patient des effets secondaires, en particulier le risque de mycose génitale (5-10% de risque) et l’ importance d’ une bonne hydratation. Leur utilisation est contre-indiquée pour l’ instant chez les diabétiques de type 1 en raison du risque d’ acido-cétose. Ce risque est bas chez le diabétique de type 2 mais doit être recherché en cas de douleurs abdominales /nausées. Finalement, comme pour les bloqueurs du système rénine-angiotensine, un contrôle de la créatinine/kaliémie est recommandée 1-2 semaines après l’ introduction d’ un SGLT2i chez les personnes avec une atteinte rénale ou des antécédents d’ insuffisance rénale aigue. Il faut relever que les analyses récentes montrent une diminution du risque d’ insuffisance rénale aigue et d’ hyperkaliémie sous SGLT2i.

Finérénone (7-9) : La finérénone est un antagoniste non stéroïdien des récepteurs minéralocorticoïdes (MRA). Il se distingue des MRA stéroidiens (aldactone, eplérénone) par l’ absence d’ effets secondaires sexuels collatéraux. C’ est le premier MRA avec preuve de néphro- et cardio-protection des patients diabétiques de type 2 avec une néphropathie albuminurique. Le risque d’ hyperkaliémie est par contre un facteur limitant, ce traitement ne peut être introduit lors de kaliémie ≤4.8mmol/l et nécessite un monitoring fréquent avec retrait lors de kaliémie au dessus de 5.5mmol/l. Son utilisation chez des patients diabétiques avec une atteinte rénale (jusqu’ à 25ml/min/1.73m2) est reconnue par Swissmedic mais son prix est encore en négociation. En raison de l’ abondance d’ étude positives avec les SGLT2i, le recours à la finérénone se fera en 2ème intention, après l’ introduction des SGLT2i. Même si les études manquent, leur association pourrait être intéressante avec des effets synergiques et une diminution du risque d’ hyperkaliémie.

Cibles thérapeutiques

Contrôle glycémique : en prévention primaire de la néphropathie diabétique, une cible d’ HbA1C <6.5-7% est recommandée. Dès un eGFR<60ml/min, les cibles peuvent être assouplies, comme le risque d’ hypoglycémie augmente lors d’ atteinte rénale et de traitement d’ insuline, de sulfonyurées ou de glinides. Une personne âgée en dialyse avec une espérance de vie limitée aura une cible de <8.5%. Si les SGLT2i seront choisis en priorité chez les personnes avec une néphropathie albuminurique, ce traitement ne suffira pas toujours à obtenir un bon contrôle glycémique. En cas de BMI au-dessus de 28kg/m2, un GLP1a sera proposé comme il apporte une protection cardiovasculaire et ralentit la progression de l’ albuminurie. L’ association GLP1a et SGLT2i nécessite cependant un accord préalable de l’ assurance maladie.

Contrôle tensionnelle : chez la personne diabétique de 18-64 ans la cible est une pression artérielle systolique de 130mmHg au cabinet ou plus bas si cela est toléré. Pour les personnes de 65ans ou plus, la cible est une pression artérielle systolique de 130-139mmHg. En cas d’ atteinte rénale, la cible est de 130-139mmHg si toléré avec une cible pour la pression artérielle diastolique de 70-79mmHg.

Contrôle lipidique : lors de diabète et d’ atteinte rénale (non dialysé, selon KDIGO >G3b ou G3aA2 ou A3) le risque cardiovasculaire est considéré comme très élevé. Dans ce cas, la cible initiale est un Ldl cholesterol <1.8mmol/l avec 50% de réduction. Dans un deuxième temps, une cible <1.4mmol/l est proposée surtout en cas de maladie cardiovasculaire avérée. Les statines restent en première ligne thérapeutique lors de néphropathie diabétique.

Bilan des complications

Dès une atteinte rénale significative, un bilan plus étendu des complications est proposé, incluant le bilan de l’ anémie, l’ acidose métabolique, le bilan phosphocalcique. Une collaboration étroite avec le néphrologue est indiquée en cas d’ altérations.

Conclusions

De nouvelles thérapies efficaces dans la néphropathie diabétique albuminuriques sont à présent disponibles, comme les SGLT2i et la finérénone. Ces nouvelles thérapies diminuent le risque rénal et cardiaque chez ces patients à haut risque. La prise charge de ces patients est complexe, doit être multifactorielle et multidisciplinaire, avec un accompagnement thérapeutique pour améliorer l’ adhésion au traitement.

Dre Anne Zanchi Delacrétaz

Médecin adjoint, PD
Service d’endocrinologie, diabétologie et métabolisme
et Service de néphrologie
Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV)
Rue du Bugnon 17
CH-1011 Lausanne

L’ auteur n’ a pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.

1. ElSayed NA, Aleppo G, Aroda VR, Bannuru RR, Brown FM, Bruemmer D,
Collins BS, Hilliard ME, Isaacs D, Johnson EL, et al. 11. Chronic Kidney Disease and Risk Management: Standards of Care in Diabetes-2023. Diabetes Care. 2023;46:S191-S202.
2. Zanchi A, Jehle AW, Lamine F, Vogt B, Czerlau C, Bilz S, Seeger H and de Seigneux S. Diabetic kidney disease in type 2 diabetes: a consensus statement from the Swiss Societies of Diabetes and Nephrology. Swiss Med Wkly. 2023;153:40004.
3. Perkovic V, Jardine MJ, Neal B, Bompoint S, Heerspink HJL, Charytan DM, Edwards R, Agarwal R, Bakris G, Bull S, et al. Canagliflozin and Renal Outcomes in Type 2 Diabetes and Nephropathy. N Engl J Med. 2019.
4. Heerspink HJL, Stefansson BV, Correa-Rotter R, Chertow GM, Greene T, Hou FF, Mann JFE, McMurray JJV, Lindberg M, Rossing P, et al. Dapagliflozin in Patients with Chronic Kidney Disease. N Engl J Med. 2020;383:1436-1446.
5. The E-KCG, Herrington WG, Staplin N, Wanner C, Green JB, Hauske SJ, Emberson JR, Preiss D, Judge P, Mayne KJ, et al. Empagliflozin in Patients with Chronic Kidney Disease. N Engl J Med. 2023;388:117-127.
6. Nuffield Department of Population Health Renal Studies G and Consortium SiM-AC-RT. Impact of diabetes on the effects of sodium glucose co-transporter-2 inhibitors on kidney outcomes: collaborative meta-analysis of large placebo-controlled trials. Lancet. 2022;400:1788-1801.
7. Bakris GL, Agarwal R, Anker SD, Pitt B, Ruilope LM, Rossing P, Kolkhof P, Nowack C, Schloemer P, Joseph A, et al. Effect of Finerenone on Chronic Kidney Disease Outcomes in Type 2 Diabetes. N Engl J Med. 2020;383:2219-2229.
8. Rossing P, Filippatos G, Agarwal R, Anker SD, Pitt B, Ruilope LM, Chan JCN, Kooy A, McCafferty K, Schernthaner G, et al. Finerenone in Predominantly Advanced CKD and Type 2 Diabetes With or Without Sodium-Glucose Cotransporter-2 Inhibitor Therapy. Kidney Int Rep. 2022;7:36-45.
9. Pitt B, Filippatos G, Agarwal R, Anker SD, Bakris GL, Rossing P, Joseph A, Kolkhof P, Nowack C, Schloemer P, et al. Cardiovascular Events with Finerenone in Kidney Disease and Type 2 Diabetes. N Engl J Med. 2021;385:2252-2263.