1. Quelle est la cause de l’ enrouement ?
A. Polype des cordes vocales
B. Parésie des cordes vocales
C. Œdème de Reinke
D. Aucun diagnostic clinique ne peut être posé.
2. Quelles sont vos prochaines étapes ?
A. Pas de traitement, contrôle dans 3 semaines
B. Laryngoscopie ou orientation vers un médecin ORL ou un phoniatre
C. CT du larynx et du cou
D. IRM du larynx et du cou
Discussion
Nous avons devant nous une femme de 58 ans, fumeuse, présentant un enrouement chronique, sans autres symptômes. L’échelle GRB est utilisée pour décrire le type d’ enrouement (G = grade de la dysphonie, R = raucité, B = breathyness/souffle). Des valeurs de 0 à 3 sont attribuées. Une voix normale est évaluée avec G0R0B0, chez notre patiente avec une voix moyennement enrouée, modérément rauque et non voilée, le score sur l’échelle GRB est de G2R2B0.
Les causes d’un enrouement sont très variées, allant de l’ infection banale à la tumeur maligne. Un diagnostic peut être posé uniquement sur la base des résultats acoustiques de la voix. Quoique l’histoire et la durée de l’enrouement permettent quelques suppositions, une laryngoscopie par un médecin ORL ou un phoniatre est indispensable. Une laryngoscopie est généralement recommandée si un enrouement nouvellement apparu persiste pendant plus de 3 semaines sans s’améliorer. L’ urgence dépend également des circonstances concomitantes (stridor, hémoptysie) et des facteurs de risque (abus de nicotine et d’ alcool).
Chez notre patiente qui a une voix rauque depuis des mois, les diagnostics suivants sont les plus vraisemblables:
Laryngite chronique (Fig. 1) :
En cas de consommation chronique de nicotine (d’autres facteurs étiologiques à envisager sont le reflux gastro-œsophagien, les allergies, l’ irritation par un air sec et poussiéreux ou des fumées corrosives, la respiration buccale ou la mise au repos de la voix manquante après une laryngite aiguë).
Carcinome des cordes vocales (Fig. 2) :
Ici, on s’ attendrait plutôt à une durée plus courte des symptômes, de 2 à 4 mois. Cependant, une dégénérescence due à une laryngite chronique avec une anamnèse plus longue serait également possible. Dans le cas d’ un carcinome des cordes vocales, la détection précoce par une laryngoscopie est importante et également possible, car même les petits carcinomes des cordes vocales se manifestent en général rapidement par un enrouement. Aux stades précoces, un pronostic favorable peut être attendu suite à une résection microlaryngoscopique seule ou par une irradiation primaire ciblée.
Polype des cordes vocales (Fig. 3) :
Des facteurs mécaniques tels que la surcharge vocale et le tabagisme jouent un rôle causal.
L’ œdème de Reinke (Fig. 4):
Il s’agit d’un oedème des cordes vocales dans l’ espace étroit entre l’ épithélium des cordes vocales et le tissu conjonctif sous-jacent. L’ œdème de Reinke est facilement reconnaissable lors d’une laryngoscopie à la loupe comme tuméfaction vitreuse pour la plupart des deux cordes vocales (plis vocaux).
Papillomatose laryngée (Fig. 5) :
Cette maladie virale du larynx, causée par le papillomavirus humain (HPV), peut survenir à tout âge. On observe de petits papillomes ayant l’aspect d’une framboise sur les cordes vocales. Une biopsie est recommandée, d’ une part pour déterminer le type de virus (6 et 11 appartiennent au « groupe à faible risque » pour le potentiel de malignité, 16 et 18 en revanche appartiennent au « groupe à haut risque »), d’ autre part pour détecter des dysplasies déjà existantes. Les autres diagnostics différentiels sont la presbyphonie, la dysphonie fonctionnelle ou les kystes des cordes vocales.
Notre patiente avait les résultats laryngostroboscopiques suivants :
Cette tuméfaction translucide et lisse des deux cordes vocales permet clairement de diagnostiquer un œdème de Reinke. Les patients typiques sont des femmes fumeuses et communiquantes âgées de 50 à 60 ans. La dégénérescence maligne n’ est pas à craindre. Pour le pronostic, l’ arrêt de la consommation de nicotine est important. En cas de faible souffrance ou de stade initial, une certaine amélioration peut être obtenue avec la thérapie vocale logopédique et l’ arrêt de la nicotine, mais dans la plupart des cas, une ablation phonochirurgicale sous anesthésie de courte durée est nécessaire. L’ ablation est notamment indiquée lorsque de gros œdèmes entraînent déjà une dyspnée à l’effort.
Cet article est une traduction de « der informierte arzt » 07_2021
Copyright Aerzteverlag medinfo AG
Dre Andrea Rambousek
Département d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie faciale
Hôpital cantonal de Lucerne, LUKS,
6000 Lucerne 16
Dr Seo Simon Ko
médecin cadre
Département d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie faciale
Hôpital cantonal de Lucerne, LUKS,
6000 Lucerne 16
Les auteurs n’ont pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.
◆ Un enrouement persistant pendant plus de 3 semaines sans amélioration devrait être investigué par laryngoscopie, de préférence par un médecin spécialiste en ORL / phoniatrie en particulier en présence de facteurs de risque tels que l’abus de nicotine et d’alcool.
◆ Les œdèmes de Reinke se trouvent typiquement chez des femmes fumeuses âgées de plus de 40 ans ayant une charge vocale importante et une voix grave et rauque. Selon la souffrance subjective causée par la dysphonie, ils peuvent être enlevés par microlaryngoscopie.
Les encéphalites auto-immunes sont des maladies rares mais traitables qui se manifestent par un tableau associant généralement troubles cognitifs, psychiatriques, crises épileptiques et autres manifestations neurologiques. Le diagnostic est difficile chez la personne âgée, en raison d’une présentation clinique et biologique moins « inflammatoire ». Le diagnostic repose sur l’IRM cérébrale, la ponction lombaire et la mise en évidence d’anticorps antineuronaux dans le sang et/ou le liquide céphalo-rachidien, et un traitement immunosuppresseur précoce est essentiel.
Autoimmune encephalitis is a rare but treatable disease and usually presents with cognitive and psychiatric symptoms, seizures and other neurological manifestations. Diagnosis is difficult in the elderly because of a less “inflammatory” clinical and biological presentation. Diagnosis is based on brain MRI, lumbar puncture and the detection of antineuronal antibodies in the serum and/or cerebrospinal fluid, and early immunosuppressive treatment is essential. Key Words: autoimmune encephalitis, cognitive/psychiatric symptoms, immunosuppression
Introduction
Chez les patients présentant des troubles neurocognitifs, il est essentiel de chercher les causes réversibles et traitables. Les encéphalites auto-immunes peuvent se présenter sous forme d’ une atteinte cognitive. Elles ont une prévalence estimée de 13.7/100’000 habitants (1), représenteraient jusqu’ à 20 % des troubles neurocognitifs chez les patients jeunes (<45 ans) (2) et entre 4 et 46 % des démences rapidement progressives (3). L’ âge médian est très variable, variant de 21 ans pour l’ encéphalite à anti-NMDAR à 64 ans pour celle à anti-LGI1 (4,5).
Il existe deux types d’ encéphalites auto-immunitaires, selon la cible de l’ anticorps dans la cellule : 1) des protéines à la surface membranaire des neurones (récepteur de surface/synaptique), par exemple les anti-NMDAR, LGI1 ou 2) des antigènes intracellulaire, dit « onconeuronaux », par exemple AK5, GAD-65 (tab. 1). Dans les encéphalites à anti-récepteur de surface, l’ anticorps détecté est pathogénique et perturbe directement les fonctions neuronales; les symptômes sont en général réversibles, reflétant une meilleure réponse à l’ immunothérapie (4,5). Au contraire, les encéphalites associées à des anticorps ciblant des protéines intracellulaires sont principalement des syndromes paranéoplasiques ; l’ anticorps détecté est un reflet de la réponse immunitaire, sans être pathogénique en soi. Ces syndromes sont responsables de tableaux cliniques très variés, avec en général une mauvaise réponse à l’ immunothérapie. Plus récemment, des cas d’ encéphalite immune ont été décrits après traitements oncologiques par inhibiteur des checkpoints immunitaire, dont l’ apparition peut être retardée, parfois jusqu’ à 1 année après l’ arrêt de la thérapie (7).
Présentation clinique
Présentation cognitive
La présentation cognitive est fréquente, souvent sous la forme d’ une « encéphalite limbique », avec une atteinte prédominant sur le versant mnésique antérograde et parfois associée à des manifestations psychiatriques (anxiété). La progression est généralement subaiguë (semaines à mois), remplissant les critères d’ une démence rapidement progressive (démence apparu en <12 mois après le début des troubles cognitifs). Dans une étude récente, 39 % des sujets avec encéphalite à anti-LGI1, NMDAR et GABABR remplissaient les critères de démence, parmi lesquels 76 % ceux d’ une démence rapidement progressive. Le tableau neuropsychologique permet difficilement de distinguer une encéphalite auto-immune d’ une atteinte neurodégénérative. Les formes à anti-LGI1 et GABABR semblent associées à une atteinte visuo-spatiale et exécutive prédominante, similaire au tableau de la démence à corps de Lewy, alors que dans les formes à anti-NMDAR seraient plutôt associées à une atteinte langagière et comportementale, au même titre qu’ une démence fronto-temporale (8).
Manifestations associées
Les crises épileptiques, focales ou généralisées, sont fréquentes et souvent précoces. On peut retrouver typiquement des crises focales d’ origine mésiotemporale, dont les manifestations sont difficiles à reconnaitre (sensation épigastrique ascendante, sensation de déjà-vu, hallucinations olfactives etc.). Les crises dystoniques facio-brachiales, épisodes fréquents (jusqu’ à 40-50x/j) de contractions musculaires brèves facio-brachiales ipsilatérales, sont pathognomoniques de l’ encéphalite à anti-LGI1, et peuvent parfois précéder les troubles cognitifs (5).
Les manifestations psychiatriques sont fréquentes, en particulier dans l’ encéphalite à anti-NMDAR avec des troubles psychotiques et une catatonie (4). Des mouvements anormaux sont rencontrés, comme les dyskinésies orofaciales dans l’ anti-NMDAR ou la chorée dans l’ anti-CRMP5/CV2 (4, 9). Le tableau 2 résume les caractéristiques anamnestiques, cliniques et paracliniques suggestives d’ une encéphalite auto-immune.
Examens complémentaires
En cas de suspicion d’ encéphalite auto-immune, le bilan complémentaire doit comprendre une IRM cérébrale injectée, un bilan sanguin, une analyse du LCR et la recherche d’ anticorps antineuronaux dans le sang et le LCR. Une recherche de néoplasie sous-jacente doit être discutée.
L’ atteinte radiologique est variable selon l’ anticorps incriminé, avec une IRM qui peut être normale, comme dans la moitié des cas d’ anti-NMDAR (Fig. 1A) (4). En cas d’ encéphalite limbique comme celle à anti-LGI1, l’ IRM cérébrale peut trouver un hypersignal T2 FLAIR de la région mésiotemporale uni- ou bilatéral, parfois associées à une tuméfaction et prise de contraste hippocampique (Fig. 1B-E) (5). Ce tableau radiologique n’est cependant pas spécifique, et peut se voir dans des encéphalites infectieuses (HSV-1), des gliomes ou des états de mal épileptiques. D’ autres images ont été décrites, comme des atteintes multifocales, une atteinte des ganglions de la base ou une atteinte diencéphalique. L’ IRM permettra également d’ exclure des diagnostics alternatifs, comme une atteinte infectieuse, tumorale ou une maladie à prion.
Le bilan biologique de base comprend un bilan hématologique, métabolique, infectieux et immunologique. La présence d’ une hyponatrémie évoque une encéphalite à anti-LGI1 (5). L’ analyse du LCR doit comporter les analyses de routine (répartition cellulaire, protéines, glucose, quotient d’ albumine, recherche de bandes oligoclonales), des recherches infectieuses, une cytologie et une cytométrie de flux. Selon le contexte, le dosage des marqueurs phospho-tau, total-tau et Abeta 42 peut être effectué en cas de suspicion de maladie d’ Alzheimer, et le RT-QuIC pour l’ évaluation d’ une maladie à prions. Dans le LCR, on peut trouver une pléocytose lymphocytaire légère à modérée, une hyperprotéinorachie et parfois une synthèse intrathécale d’ immunoglobuline. Un LCR normal n’ exclut cependant pas une encéphalite auto-immune.
La recherche des anticorps antineuronaux permet de confirmer le diagnostic d’ encéphalite auto-immune puis de guider le traitement et la recherche oncologique. Les anticorps doivent être cherchés avant l’ introduction d’ une immunothérapie, dans le sang et le LCR. La sensibilité de ces anticorps est plus élevée pour certains dans le sang (ex : anti-LGI1) ou d’ autres dans le LCR (ex : anti-NMDAR) (10). L’ absence d’ anticorps retrouvé n’ exclut pas le diagnostic d’ encéphalite auto-immune (formes séronégatives).
L’ électroencéphalogramme (EEG) peut montrer des signes aspécifiques d’ encéphalopathie et parfois un caractère irritatif expliquant les phénomènes épileptiques. Il permet d’ exclure un état de mal épileptique. Certains signes peuvent orienter vers une étiologie, comme l’ « extreme delta brush » présents jusqu’ à chez 30% des patients avec encéphalite à anti-NMDAR (11). L’ EEG peut également retrouver des arguments pour d’ autres étiologies comme celui d’ une maladie de Creutzfeldt-Jakob (12).
Prise en charge
Dès qu’ une encéphalite auto-immune est suspectée, la prise en charge s’ articule en deux phases ; la recherche de néoplasie et le traitement immunomodulateur. La recherche de néoplasie se fait au moment du diagnostic, lors de rechute et est répétée durant 5 ans, une néoplasie pouvant s’ exprimer des années après l’ encéphalite (13). Si un cancer est retrouvé, son traitement permet parfois de maitriser à lui seul l’ encéphalite.
Le traitement immunomodulateur doit être le plus précoce possible et débuté dès une étiologie infectieuse exclue, sans attendre la positivité d’ un anticorps. Plusieurs études récentes ont montré qu’ un retard dans l’ introduction de l’ immunothérapie influence le pronostic fonctionnel et le risque de rechute (14). Un traitement de phase aiguë (méthylprednisolone à haute dose, immunoglobulines intraveineuses, plasmaphérèses, rituximab, cyclophosphamide) puis d’ un traitement de maintenance (corticothérapie dégressive, rituximab, azathioprine, mycophenolate mofetil) est recommandé. Le traitement sera adapté en fonction de l’ anticorps retrouvé, des comorbidités du patient, de la sévérité et du risque de récidive de l’ encéphalite (15).
Difficultés diagnostiques et thérapeutiques chez la personne âgée
Les encéphalites auto-immunes expriment moins de caractéristiques inflammatoires chez la personne âgée, avec moins de signe inflammatoire à l’ IRM cérébrale ou dans le LCR (16). Le diagnostic peut être encore plus difficile lorsque les biomarqueurs de démence du LCR sont anormaux. Dans une étude récente, presque 50% des patients avec encéphalites auto-immunes (LGI1, GABABR et NMDAR) se manifestant par des démences avaient des anomalies des biomarqueurs du LCR suggestive d’ une maladie neurodégénérative (8).
Les traitements immunosuppresseurs sont associés à des effets secondaires potentiellement problématique chez la personne âgée. Les glucocorticoïdes au plus ou moins long cours entrainent un risque d’ ostéoporose, d’ hypertension artérielle, de troubles digestifs et d’ infections entre autres. Les immunosuppresseurs d’ épargne corticostéroïdes, en particulier le rituximab, sont également associés à un risque infectieux accru dont une augmentation du risque d’ infection sévère à SARS-CoV-2 (17). Au vu d’ une présentation de la maladie moins « inflammatoire », probablement en lien avec l’ immunosénescence, on pourrait également suspecter une moins bonne réponse à l’ immunothérapie chez la personne âgée (18).
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Dr Valentin Loser
Médecin assistant
Service de neurologie, Département des neurosciences cliniques
Centre hospitalier universitaire vaudois et Université de Lausanne
Rue du Bugnon 46
CH-1011 Lausanne
Valentin.Loser@chuv.ch
Pre Caroline Pot
Professeure associée et médecin associée
Service de neurologie, Département des neurosciences cliniques
Centre hospitalier universitaire vaudois et Université de Lausanne
Rue du Bugnon 46
CH-1011 Lausanne
Caroline.Pot-Kreis@chuv.ch
Les auteurs de cet article ne déclarent aucun conflit d’ intérêt.
◆ Les encéphalites auto-immunes sont des causes rares mais traitables de démence. Ce diagnostic doit être évoqué particulièrement en cas de démence chez un patient jeune, de forme rapidement progressive ou en cas de symptômes neurologiques associés, en particulier des crises épileptiques. Le diagnostic est plus difficile chez la personne âgée, en raison d’une présentation clinique et paraclinique moins « inflammatoire ». Le diagnostic repose sur plusieurs examens, en particulier le dosage des anticorps antineuronaux qui doit se faire dans le sang et le LCR. Ceci souligne l’importance d’une évaluation neurologique des patients présentant des démences, en particulier en cas d’atypie.
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Le dépistage précoce du cancer de la prostate a longtemps été controversé en raison des craintes justifiées de surdiagnostic et de surtraitement. Les données à long terme des études internationales les plus importantes ont pu montrer que le dépistage par dosage du PSA peut réduire efficacement la mortalité due au cancer de la prostate, si bien que la Commission européenne a recommandé récemment l’ introduction de programmes de dépistage nationaux. Grâce à l’ imagerie par résonance magnétique multiparamétrique (IRM) de la prostate permet de réduire le nombre de biopsies inutiles et d’ augmenter le taux de détection des tumeurs cliniquement significatives.
Prostate cancer screening has long been controversial due to legitimate concerns about overdiagnosis and overtreatment. Long-term data from the largest international studies have shown that PSA-guided screening can effectively reduce prostate cancer mortality, and the European Commission has recently recommended the introduction of national screening programs. The multiparametric magnetic resonance imaging (MRI) of the prostate can reduce the number of unnecessary biopsies and simultaneously increased the detection of clinically significant prostate tumours. Key Words: PSA, Prostate Cancer, Screening, Preventive Medicine
Le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent chez les hommes et la deuxième cause de mortalité liée au cancer en Suisse. Depuis le début des années 1990, le dépistage du cancer de la prostate est possible grâce à la détermination de l’ antigène prostatique spécifique (PSA) dans le sérum (test PSA). Dans le même temps, la mortalité due au cancer de la prostate a diminué dans la plupart des pays occidentaux (1), mais l’ utilité du dépistage de ce cancer a longtemps été controversée en raison des risques associés au diagnostic invasif et du risque de surtraitement des cancers de la prostate non pertinents sur le plan clinique (2, 3). En 2012, le groupe de travail des services préventifs des États-Unis (US Preventive Services Task Force, USPSTF) a publié une recommandation déconseillant le dépistage par dosage du PSA (4). A la même époque, le rôle du dépistage basé sur le PSA a fait l’ objet d’ un débat tout aussi intense en Suisse, avec des recommandations divergentes du Swiss Medical Board et de la Société suisse d’ urologie (5, 6). Depuis, les données à long terme de l’ importante étude européenne « European Randomized Study of Screening for Prostate Cancer » (ERSPC) ont été publiées et ont démontré une réduction significative de la mortalité associée au cancer de la prostate grâce au dépistage par dosage du PSA (7). Ces données ont été en partie déterminantes pour le changement de la recommandation de l’ USPSTF en 2017, vers un processus de prise de décision individuel relatif au dépistage à l’ aide du PSA chez les hommes âgés de 55 à 69 ans.
L’ importance du dépistage du cancer de la prostate a été soulignée récemment (le 20 septembre 2022) par la Commission européenne, qui a recommandé de promouvoir ce dépistage chez les hommes de moins de 70 ans (8). L’ article suivant aborde plus en détail les recommandations actuelles en matière de dépistage du cancer de la prostate.
Le dépistage
Les objectifs primaires du dépistage du cancer de la prostate sont la réduction de la mortalité ainsi que le maintien de la qualité de vie. Conformément aux recommandations de l’ Association Européenne d’ Urologie (EAU), il est recommandé de commencer le dépistage du cancer de la prostate dès l’ âge de 50 ans. En cas de risque accru, un dépistage est recommandé à partir de 45 ans, notamment pour les hommes ayant des antécédents familiaux positifs pertinents (père ou frère atteint d’ un cancer de la prostate avant l’ âge de 70 ans) et les hommes d’ origine africaine. Chez les hommes porteurs d’ une mutation BRCA2, le dépistage est recommandé dès l’ âge de 40 ans (tableau 1). Le carcinome de la prostate étant une tumeur maligne qui se développe lentement, le dépistage n’ est recommandé que si l’ espérance de vie restante est d’ au moins 10 à 15 ans. C’ est pourquoi la limite supérieure de 70 ans est souvent mentionnée dans la littérature, bien qu’ il soit judicieux de repousser le dépistage pour les patients plus jeunes d’ un point de vue biologique ou en très bonne santé. Inversement, chez les patients plus jeunes présentant des comorbidités importantes, il convient également de renoncer à un dosage du PSA après une évaluation appropriée (ce que l’ on appelle les « competing risks »). Ces réflexions devraient avoir lieu idéalement avant un dosage du PSA, afin d’ éviter des tests superflus ainsi que des traitements inutiles.
Le cancer de la prostate
Un taux de PSA élevé, un toucher rectal (TR) suspect ou une imagerie par résonance magnétique (IRM) anormale de la prostate conditionnent une biopsie. De multiples prélèvements du tissu de la prostate sont alors effectués et envoyés pour une analyse histopathologique. En cas de détection d’ un carcinome, celui-ci est classé selon la classification de la Société Internationale d’ Uropathologie (ISUP) par grades de 1 à 5, ce qui remplace l’ ancien score de Gleason. ISUP1 correspond à un cancer de la prostate avec score de Gleason 3+3=6, classé « cancer de la prostate à faible risque » (tableau 2). Pour une grande majorité des cancers de la prostate ISUP 1, une surveillance active suffit, ce qui permet aux patients d’ éviter les effets secondaires risqués d’ un traitement curatif.
Les cancers de la prostate ISUP 2 et plus sont considérés comme des « cancers de la prostate cliniquement significatifs », pour lesquels un traitement actif est souvent indiqué. (Certes, les patients avec des tumeurs ISUP 2, strictement sélectionnés, peuvent également être pris en charge avec succès par une surveillance active (9), mais la majorité des patients doivent être traités de manière curative (10).)
Le PSA
Le PSA (l’antigène spécifique de la prostate) est une peptidase qui est produite exclusivement dans les cellules épithéliales de la prostate (cellules glandulaires). On peut le détecter en grande quantité dans l’éjaculat et, en faibles concentrations, également dans le sang. Le PSA dilue l’éjaculat et soutient la motilité des spermatozoïdes. Dans le sang, le PSA n’a aucune fonction. La première description du PSA a eu lieu en 1979 (11), et la première description pour l’utilisation dans le dépistage du cancer de la prostate a été faite en 1991 (12). Comme le PSA n’est pas spécifique de la tumeur, mais un biomarqueur spécifique à l’organe, le taux de PSA peut être élevé non seulement dans le cadre d’un cancer de la prostate, mais également en cas d’hypertrophie bénigne de la prostate (hyperplasie bénigne de la prostate [HBP]), d’une inflammation de la prostate (souvent subclinique), après une activité sexuelle, ainsi que par une pression exercée sur le périnée (par exemple en faisant du vélo). La probabilité d’un cancer de la prostate augmente avec le PSA, mais il n’existe pas de valeur standard universelle du taux de PSA (13). Il augmente avec l’âge de sorte que les valeurs de PSA considérées «normales» sont adaptées à l’âge (p. ex. taux limite de PSA de 2.5 μg/l pour les hommes âgés de 40 – 49 ans, et de 6.5 μg/l pour les hommes âgés de 70 à 79 ans) (14). En cas de taux de PSA élevé, il est toujours recommandé de procéder à un deuxième dosage de PSA. De plus, il est conseillé de s’abstenir de toute activité sexuelle et de ne pas faire du vélo pendant les 37 jours qui précèdent l’examen, afin d’exclure tout impact possible sur le taux de PSA. Dans notre clinique, nous parlons d’un “taux de PSA élevé” en cas de détection répétée d’un taux supérieur à 3,0 μg/l (pour les hommes jusqu’à 50 ans : 2,5 μg/l), et recommandons de procéder à un examen plus approfondi.
Il convient en outre de mentionner la densité du PSA (PSAD), qui se calcule sur la base du taux de PSA et du volume de la prostate. Le risque de cancer de la prostate cliniquement significatif augmente avec un taux de PSAD croissant, à l’inverse il est moindre en cas de PSAD en baisse (4% de risque de cancer de la prostate cliniquement significatif avec un PSAD <0,09 μg/l/cc) (15).
Le toucher rectal
Historiquement, 18% de tous les cancers de la prostate ont été diagnostiqués seulement sur la base du toucher rectal (TR), indépendamment de la valeur du PSA (16). La valeur prédictive positive d’un TR suspect en cas d’un taux de PSA <4 μg/l est de 5 – 30% (PSA 0 – 1,0 μg/l : 5% ; PSA 1,1 – 2,5 μg/l : 14% ; PSA 2,6 – 4,0 μg/l : 30%) (17). Les données de l’ERSPC montrent que la probabilité de détection d’un cancer est doublée chez les hommes présentant un taux de PSA élevé et un TR suspect, par rapport à un taux de PSA élevé sans TR (48,6% vs 22,4%) (18). En cas de TR suspect de la prostate, il est recommandé, indépendamment du taux de PSA, d’envoyer le patient chez un urologue pour une nouvelle évaluation clinique plus approfondie, aussi à l’aide d’une IRM multiparamétrique.
Imagerie par résonance magnétique (IRM) de la prostate
L’introduction de l’IRM multiparamétrique de la prostate a révolutionné le diagnostic du cancer de la prostate au cours de la dernière décennie. L’évaluation de différentes séquences permet de classer les lésions suspectes de la prostate selon la classification “Prostate Imaging Reporting and Data System” (PIRADS). L’échelle va de 1 (cancer de la prostate très improbable) à 5 (cancer de la prostate très probable). Dans la pratique, il est recommandé de faire une biopsie des lésions PIRADS 3 et plus. Mais en cas de PSAD faible, il est possible de renoncer à une biopsie des lésions PIRADS 3 dans certaines situations (10). Cette sélection permet de réduire le nombre de biopsies de plus de 30%, sans pour autant diminuer le taux de détection des cancers de la prostate cliniquement significatifs (19). Selon une méta-analyse Cochrane, l’IRM a démontré par rapport aux biopsies de saturation (>20 biopsies), une sensibilité en commun de 0,91 (IC à 95 % : 0,83 0,95) et une spécificité en commun de 0,37 (IC à 95 % : 0,290,46) pour les cancers de la prostate cliniquement significatifs (ISUP≥2) (20). L’IRM est moins sensible pour la détection des carcinomes de la prostate ISUP 1 (21), ce qui est en fait voulu, car ces carcinomes ne nécessitent normalement pas de traitement. Cette imagerie aide non seulement à décider si une biopsie de la prostate est nécessaire, mais également à fournir des informations sur la dimension spatiale qui aident pour la biopsie ultérieure et du traitement si nécessaire.
Biopsie de la prostate
De manière classique, la biopsie de la prostate s’effectuait par échographie transrectale (ETR) et prélèvement transrectal de 12 fragments de prostate (biopsie dite “systématique”). Cette intervention peut provoquer, entre autres, une hémospermie, une hématurie ou une rétention urinaire. En outre, malgré une désinfection locale et une antibiothérapie préventive, une infection post-interventionnelle peut se produire dans jusqu’à 3% des cas.
Des infections des voies urinaires ainsi qu’une uro-septicémie peuvent également se développer (22), ce qui constitue un problème majeur en raison de la résistance croissante d’E. coli aux antibiotiques. Pour réduire le taux d’infection, il est donc recommandé de faire les biopsies par voie transpérinéale dans la mesure du possible. La sécurité du diagnostic est la même que pour la biopsie transrectale, avec un risque nettement plus faible d’infection des voies urinaires.
Comme mentionné précédemment, l’IRM permet d’identifier des zones suspectes dans la prostate. Pour pouvoir biopsier ces lésions de manière ciblée, il existe aujourd’hui diverses possibilités de fusionner l’IRM et les images de l’ETR, par exemple avec des appareils spécialisés (p. ex. Artemis ou BiopSee), ou par fusion cognitive. Cela permet de prélever des “biopsies ciblées” des lésions suspectes, ce qui entraîne un taux de détection nettement plus élevé des cancers de la prostate cliniquement significatifs (ISUP≥2). L’EAU recommande donc la réalisation simultanée d’une biopsie systématique et ciblée de la prostate dès la première biopsie (10).
Biomarqueurs
En raison du manque de spécificité du PSA, plusieurs biomarqueurs sanguins, urinaires et tissulaires ont été développés au cours des trois dernières décennies. Ces biomarqueurs utilisent souvent des variables cliniques (par exemple le volume de la prostate ou l’âge du patient) et peuvent aider à évaluer la nécessité d’une biopsie de la prostate afin d’éviter un surdiagnostic et un surtraitement (23). Jusqu’à présent, l’utilisation de ces biomarqueurs n’est pas encore largement répandue en Suisse. Les raisons possibles sont le coût parfois élevé des tests, le manque de disponibilité ou le manque de prise en charge par les caisses d’assurance-maladie. Actuellement, l’utilisation de biomarqueurs n’est pas encore recommandée pour le dépistage de routine (10). Ils peuvent toutefois être très utiles pour certains patients, comme c’est le cas par exemple pour le SelectMDx® chez les patients qui ne peuvent pas être examinés par IRM (claustrophobie ou artefacts de prothèses de hanche) (24).
Le PSA libre est l’un des rares biomarqueurs à être largement utilisé. En combinaison avec le PSA total, il peut être utile pour évaluer le risque. En raison de l’instabilité relative du PSA libre, l’utilisation du rapport PSA libre/total n’est que partiellement recommandée (10). Une option plus récente, également disponible en Suisse, est l’utilisation du Proclarix® Risk Score. Ce test sanguin inclut non seulement l’âge du patient, le PSA et le PSA libre, mais aussi deux autres protéines. Il a été démontré qu’il permet de réduire le nombre de biopsies nécessaires (25).
Calculateurs de risque
Il existe différents calculateurs de risque qui permettent d’estimer le risque individuel de cancer de la prostate à l’aide de paramètres cliniques (notamment l’âge, le TR et le taux de PSA) basés sur de grandes cohortes (par exemple, la cohorte ERSPC (26)). Le facteur prédictif le plus fort dans les calculateurs de risque est la PSAD (10).
Les calculateurs de risque sont très utiles pour évaluer le risque individuel d’un patient et peuvent aider à éviter des biopsies inutiles (27).
Risques associés au dépistage du cancer de la prostate par PSA
Les hommes doivent être informés des risques potentiels associés au dépistage de la prostate par PSA. Les risques immédiats de la mesure du PSA (prise de sang) et du TR sont faibles, mais les examens complémentaires peuvent représenter une cause de morbidité. Une biopsie peut entraîner des complications telles qu’une infection des voies urinaires, une hémorragie ou une rétention urinaire (22). En outre, des effets secondaires peuvent survenir dans le cadre du traitement d’un cancer de la prostate diagnostiqué, tels que l’incontinence urinaire, la dysfonction érectile et les douleurs, ainsi qu’une mortalité associée au traitement (28).
Résumé
La détection précoce du cancer de la prostate par le dépistage par PSA a longtemps fait l’objet de controverses. Les données à long terme de l’étude ERSPC ont entre-temps pu montrer que le dépistage par PSA permet de réduire de manière significative la mortalité associée au cancer de la prostate. L’IRM de la prostate a permis de réduire de manière significative les biopsies inutiles de la prostate et d’améliorer simultanément la sécurité du diagnostic grâce à des biopsies ciblées. De même, le risque de surtraitement des cancers de la prostate à faible risque détectés a été réduit grâce à la surveillance active largement répandue. L’organigramme ci-joint illustre le déroulement systématique partant d’un taux élevé de PSA, sur la base des recommandations de l’EAU sur le cancer de la prostate (10) (fig. 1). Le dépistage du cancer de la prostate est basé sur des preuves, la décision de procéder à un dépistage ne doit être prise qu’après avoir pris en considération les avantages ainsi que les risques potentiels.
Cet article est une traduction de « der informierte arzt » 12_2022
Copyright Aerzteverlag medinfo AG
Dr Manolis Pratsinis, MSc
médecin cadre
Clinique d’urologie, Hôpital cantonal de St-Gall
Rorschacher Strasse 95
9007 St. Gall
PD Dr Daniel Engeler, MA
Médecin-chef adjoint
Clinique d’urologie, Hôpital cantonal de St-Gall
Rorschacher Strasse 95
9007 St. Gall
Les auteurs n’ont pas déclaré de conflits d’ intérêt en rapport avec cet article.
◆ Un dépistage par TR et dosage du taux de PSA pour la détection précoce du cancer de la prostate est utile et fondé sur des données probantes.
◆ Le PSA est un biomarqueur spécifique à un organe, mais pas à une tumeur. Il peut donc être élevé également en raison d’ une hypertrophie bénigne de la prostate ou d’une inflammation de la prostate.
◆ De nouvelles technologies, telles que l’ IRM multiparamétrique ainsi que des calculateurs de risque, permettent d’ éviter des biopsies inutiles et ainsi de réduire la morbidité lors du dépistage précoce du cancer de la prostate.
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La Suisse compte environ 5000 patients dialysés. Il s’ agit d’ une population vulnérable et de plus en plus âgée. Les patients dialysés présentent souvent de multiples comorbidités ; par conséquent, les soignants de différentes disciplines sont régulièrement confrontés à ces patients, ce qui nécessite des connaissances spécifiques, également en matière de leur alimentation.
Dans cette revue, nous ferons le point sur les possibles déficits et excès alimentaires qu’ on peut rencontrer chez les patients hémodialysés et les dernières recommandations thérapeutiques pour y remédier.
There are about 5000 dialysis patients in Switzerland. They represent a vulnerable and increasingly elderly population. Dialysis patients often have multiple co-morbidities ; therefore, caregivers from different disciplines are regularly confronted with these patients, which requires specific knowledge, also with regard to their nutrition. In this review, we will discuss possible dietary deficits and excesses in hemodialysis patients and the latest therapeutic recommendations. Key Words: hemodialysis, co-morbidities, dietary, nutritional supplements, vitamins
Les patients hémodialysés en Suisse: une population vulnérable
Selon le registre national « srrqap » (Swiss renal registry and quality assessment program) on dénombre environ 5000 patients dialysés sur toute la Suisse. Ce registre inclut également depuis 2014 les caractéristiques cliniques de cette population. La plupart (90 %) effectue l’ hémodialyse et le reste (10 %) la dialyse péritonéale. Dans les deux cas de figure, il s’ agit d’ un traitement lourd. En effet, les patients hémodialysés doivent suivre en moyenne 3 séances d’ hémodialyse par semaine, à savoir que chaque séance dure 3 à 4 heures. Les patients traités par dialyse péritonéale doivent quant à eux, effectuer 2 à 5 cycles de traitement de 30 minutes par jour.
Le nombre de patients dialysés augmente lentement mais sûrement, de 1 à 2 % par an. Au niveau mondial, il y a actuellement approximativement 2 millions de patients dialysés. Cette situation est surtout liée à l’ épidémie mondiale de diabète, la cause majeure d’ insuffisance rénale terminale, mais aussi à la conséquence du vieillissement de la population. L’ âge médian des patients dialysés est de 72 ans, et 20 à 25 % ont ≥ 80 ans (données srrqap).
Les séances de dialyse et les restrictions nécessaires pour maintenir l’ homéostasie interne mettent à rude épreuve l’ état nutritionnel de cette population qui est souvent déjà fragilisée par le fait que l’ insuffisance rénale diminue l’ appétit, à cause des toxines urémiques. A savoir que le risque de dénutrition est aussi réel que le risque d’ excès de certains aliments. La frontière entre ces deux états est mince. C’ est pourquoi, il est essentiel que l’ état nutritionnel de cette population soit suivi de près et de préférence par des diététiciennes spécialisées.
Les recommandations discutées dans cet article s’ appliquent en grosses lignes aussi aux patients traités par dialyse péritonéale, mais une discussion détaillée de ce groupe serait au-delà de la portée de cet article.
Rappel technique
L’ hémodialyse est un traitement hautement technique, qui utilise des filtres semi-perméables, de l’ eau ultra-pure, un mélange d’ électrolytes et un système de circulation extracorporelle permettant d’ épurer le sang (Figure 1). Même s’ il s’ agit d’ un système très puissant, la clairance obtenue des substances clés telles que l’ urée et la créatinine ne dépasse pas 15 ml/min. Le traitement par dialyse ne remplace donc pas de loin toutes les fonctions du rein. En conséquence, les patients doivent continuer à prendre beaucoup de médicaments et combiner cela à des restrictions alimentaires. De plus, la plupart des patients développent une oligurie ou anurie, et doivent également respecter une restriction hydrique.
L’ épuration des substances se fait grâce au principe de diffusion. Pendant une séance d’ hémodialyse, le sang du patient vient au contact d’ un filtre nommé dialyseur (membrane artificielle semi-perméable). Lorsque le sang et la solution de dialyse présentent une concentration différente en molécules, les molécules diffusent à travers la membrane vers la concentration la plus faible. Ceci est par exemple le cas pour le potassium (concentration dans le dialysat: 2-4 mmol/l), l’ urée et le phosphate (concentration dans le dialysat: 0 mmol/l) ; leur concentration baissera fortement pendant chaque séance de dialyse, pour rebondir les heures et jours suivants, jusqu’ à la prochaine séance.
Le vieux démon n’ est pas mort : potassium
Le trouble électrolytique le plus craint chez les patients dialysés et source de multiples restrictions alimentaires, est probablement l’ hyperkaliémie. L’ hyperkaliémie est effectivement en grande partie due à l’ accumulation du potassium provenant de l’ alimentation (fruits, légumes, pommes de terre).
Il est moins connu que la constipation peut également induire ou aggraver l’ hyperkaliémie. L’ élimination du potassium par le colon est trois fois plus élevée chez les patients hémodialysés que chez les volontaires sains. Cela est probablement dû à une conductivité augmentée compensatrice des canaux potassiques des cellules épithéliales du colon(1). Il est donc important d’ éviter et/ou de traiter la constipation, de préférence avec un régime riche en fibres, et/ou avec des laxatifs osmotiques tels que le lactulose ou le polyéthylène glycol (2).
Un certain degré d’ hyperkaliémie est souvent toléré chez les patients dialysés, basé sur des études observationnelles qui ont montré que le risque de mortalité augmente seulement si la kaliémie est >5.6 mmol/l (3). En cas d’ hyperkaliémie conséquente, le néphrologue essaiera dans un premier temps d’ optimiser l’ épuration du potassium par les séances de dialyse, avant d’ insister sur des restrictions alimentaires plus sévères. Le National Kidney Foundation recommande une consommation de <3g (<77 mmol) de potassium par jour pour tous les patients hémodialysés. Afin d’ atteindre ce but, les patients dialysés doivent souvent limiter la consommation
d’ aliments riche en potassium, tels que certains fruits (bananes, abricots,) et légumes (épinards, avocats, haricots, pommes de terre). Les aliments riches en potassium sont également riches en fibres donc leur restriction peut augmenter le risque de constipation, engendrant ainsi un cercle vicieux.
Afin de palier cela, l’ utilisation des chélateurs du potassium est théoriquement une solution intéressante. Les chélateurs disponibles en Suisse sont le polystyrène sulfonate sodique (Résonium®), le polystyrène sulfonate calcique (Sorbisterit®) et plus récemment le patiromer (Veltassa®). Il s’ agit de résines ou polymères (Veltassa®) sous forme de poudre à diluer avec de l’ eau. Au niveau colique, le potassium est échangé contre le sodium ou le calcium présent dans les produits qui sont ensuite éliminés par les selles.
Malheureusement, le Sorbisterit® et le Résonium® peuvent induire dans de rares cas une nécrose et/ou une perforation du côlon (incidence rapportée de 0.27 %), notamment pendant la période post-opératoire (4). Pour cette raison, leur prescription doit être limitée dans le temps. A l’ inverse, cet effet secondaire n’ a pas été décrit pour le Veltassa®. Des études sont en cours afin d’ établir si la prise à long terme de Veltassa® permet de maintenir une alimentation plus riche en fruits, légumes et fibres.
Malnutrition, protéines et acides aminés :
La dénutrition est considérée comme l’une des complications majeures de l’ hémodialyse. Nommée « Protein-energy wasting (PEW) » dans la littérature anglophone, la dénutrition est la conséquence d’ un catabolisme des protéines corporelles supérieur à l’anabolisme. PEW est particulièrement fréquente chez les patients hémodialysés à cause des pertes protéiques dans le dialysat, les restrictions alimentaires limitant l’ hyperphosphatémie et l’ anorexie urémique qui peut persister malgré les séances de dialyse. En revanche, chez les patients avec une insuffisance rénale avancée qui ne sont pas (encore) dialysés, une alimentation trop riche en protéines est associée à un déclin plus rapide du débit de filtration glomérulaire (DFG) et ce, à cause de l’ hyperfiltration et de l’ hyperpression exercée par le régime riche en protéines sur les néphrons résiduels, déjà fortement diminués en nombre.
De manière générale, il est recommandé de consommer 0,6 à 0,8 g/kg/j lorsque le DFG est en dessous de 45 ml/min (5). Les patients en hémodialyse doivent idéalement consommer 1,0 à 1,2 g/kg/j de protéines. La transition vers la dialyse nécessite donc une augmentation importante de la quantité de protéine consommée, sans faire « exploser » le taux de phosphate. A nouveau, l’ implication des diététiciennes est primordiale pour une prise en charge optimale.
Au vu des pertes en acides aminés pendant les séances d’ hémodialyse, le dernier consensus d’ ISRNM ( International Society of Renal Nutrition and Metabolism) a conclu que les repas et les suppléments pendant l’ hémodialyse doivent être offerts à tous les patients sans contre-indications, sur la base d’ études démontrant les bienfaits sur l’ état nutritionnel et le potentiel d’ amélioration d’ autres résultats clés (p. ex., qualité de vie, satisfaction des patients, survie)(6).
Les recommandations KDOQI (Kidney Diases Outcome Quality Initiative) 2020, conseillent également chez les adultes atteints d’ IRT à risque ou présentant une perte protéino-énergétique, un essai d’ au moins 3 mois de suppléments nutritionnels oraux. Ceci améliorerait leur état nutritionnel, le cas échant où les conseils diététiques seuls ne permettraient pas d’atteindre l’ apport énergétique et protéique suffisant aux besoins nutritionnels de base. Pour les patients avec un apport chroniquement insuffisant malgré les suppléments nutritionnels oraux, il est raisonnable d’envisager un essai d’alimentation par sonde entérale (5).
Vitamines :
Les patients hémodialysés ont un risque accru de carences en vitamines. Les causes des carences en vitamines comprennent (a) la prescription de régimes pauvres en potassium et phosphate qui limite la consommation des fruits et légumes frais, des produits laitiers et d’autres produits riches en vitamines ; (b) un métabolisme altéré, comme c’est le cas de la pyridoxine et éventuellement du folate ; (c) une synthèse altérée (par exemple, pour 1,25-dihydroxyvitamine D) ; (d) une possible diminution de l’absorption intestinale (p. ex. la diminution de l’ absorption de riboflavine, de folate et de vitamine D a été constatée chez des rats insuffisants rénaux chroniques) ; et (e) les pertes des vitamines hydrosolubles dans le dialysat, en raison de leur faible poids moléculaire (<1 kDa) (7).
Au cours des dernières décennies, plusieurs avancées technologiques et changements dans la pratique clinique ont été mis en œuvre pour la thérapie HD, y compris l’utilisation de membranes à haut-flux (high-flux) et l’ introduction d’ hémodiafiltration (HDF) (2). Une étude récemment effectuée à Lausanne montre que les pertes vitaminiques sont encore plus importantes en mode HDF qu’ en mode HD, notamment pour la vitamine C (Figure 2) (8) La supplémentation en vitamines hydrosolubles après chaque séance de dialyse est une pratique courante chez les patients hémodialysés chroniques et compense les pertes. Les préparations le plus souvent prescrites sont le Dialvit® (contenant 50mg de vit B1, 10mg de vit B2, 40mg de vit B6, 3 mg d’ acide folique et 200mg de vit C) ou une combinaison de Becozyme forte®, d’ acide folique et de vitamine C. En complément, la plupart des patients reçoivent régulièrement des préparations de vitamine D (cholécalciférol, calcitriol).
En résumé, les patients hémodialysés présentent de multiples altérations métaboliques, des troubles électrolytiques, ainsi qu’ un risque accru de déficit vitaminique et de dénutrition protéo-énergétique. Une discussion détaillée de tous les aspects est au-delà de la portée de cet article, mais les différentes recommandations alimentaires sont résumées dans le Tableau 1.
Futur : un rôle pour le microbiote ?
Le microbiote intestinal, défini comme l’ ensemble des microorganismes présent dans l’ intestin, a été le sujet de nombreuses recherches au cours de la dernière décennie. Il est devenu clair que le microbiote exerce de nombreuses fonctions bénéfiques au niveau intestinal et systémique, dont la synthèse de la vitamine K, la dégradation de l’ oxalate et la maturation du système immunitaire. Les patients souffrant de maladie rénale chronique ont une composition altérée probablement en réponse à l’ urémie, la prescription fréquente d’ antibiotiques, et les modifications alimentaires. Leur microbiote altéré conduit à une augmentation de la production de molécules telles que le p-crésyl sulfate et l’ indoxyl sulfate, qui ont des effets pro-inflammatoires et pro-calcifiants (9). A son tour, une séance d’hémodialyse est associée à une augmentation passagère de la perméabilité de la barrière intestinale et une augmentation des taux circulants des cytokines. Plusieurs études sont actuellement en cours afin de voir si la prise régulière de probiotiques (microorganismes vivants qui exercent des effets positifs sur la santé) ou prébiotiques (ingrédients alimentaires non digestibles possédant un effet bénéfique sur la composition ou l’ activité du microbiote intestinal) est capable de modifier la composition du microbiote et de retarder ou d’ inverser le trend de la PEW et de perte musculaire.
Conclusions :
L’ insuffisance rénale induit des changements majeurs dans le métabolisme et le milieu interne des patients. Il ne s’ agit pas seulement de troubles électrolytiques, de déficits vitaminiques, de risques accrus en malnutrition mais également de dénutrition protéino-énergétique. L’ hémodialyse peut aggraver le déficit en vitamines et acides aminés, à cause des pertes induites par les filtres hautement perméables. Les conseils et suivis diététiques occupent aujourd’ hui une place majeure dans la prise en charge des patients hémodialysés. D’ autant plus que les connaissances en la matière ne cessent d’ augmenter, permettant ainsi le déploiement de nouvelles stratégies afin d’ atteindre un équilibre homéostatique convenable pour les patients dialysés.
Une collaboration étroite entre néphrologues, diététicien(-ne)s, généralistes, endocrinologues et internistes est essentielle pour une prise en charge optimale de cette catégorie de patients particulièrement vulnérables. L’ avenir nous dira si la manipulation du microbiote s’ imposera comme nouvel outil dans le combat quotidien contre la dénutrition protéino-énergétique.
Copyright Aerzteverlag medinfo AG
Dre Erietta Polychronopoulou
Service de Néphrologie et d’ Hypertension
Centre hospitalier universitaire vaudois et
Université de Lausanne
Rue du Bugnon 17
1011 Lausanne
PD Dr Menno Pruijm
Service de Néphrologie et d’ Hypertension
Centre hospitalier universitaire vaudois et
Université de Lausanne
Rue du Bugnon 17
1011 Lausanne
menno.pruijm@chuv.ch
Nous remercions Mme Wendy Brito pour sa relecture de l’ article.
◆ L’ hyperkaliémie peut être induite ou aggravée par la constipation; en cas d’ hyperkaliémie persistante, une restriction alimentaire de <3g/j s’ impose. Les chélateurs de potassium (à l’ exception du patiromer) ne peuvent pas être prescrits pendant de longues périodes à cause du risque de perforation du côlon.
◆ Les apports protéiniques jouent un rôle important dans le pronostic des patients souffrant de maladies rénales et doivent être adaptés au stade de leur maladie.
◆ Une alimentation optimale pour les patients hémodialysés nécessite une prise en charge spécialisée et multidisciplinaire.
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Le surpoids et l’ obésité représentent l’ un des plus grands défis mondiaux pour le système de santé de notre époque (1-4). Selon les derniers chiffres du « Rapport régional européen de l’ OMS sur l’ obésité 2022 », près de 60 % des adultes et 1/3 des enfants en Europe sont déjà touchés par le surpoids ou l’ obésité (5) – et les chiffres en Europe et dans le monde continuent d’ augmenter. L’ obésité est un facteur de risque majeur pour de nombreuses maladies telles que les maladies cardio-vasculaires, le diabète de type 2 et les cancers les plus divers, et elle est associée à une mortalité accrue (6, 7). Pour enrayer l’ épidémie d’ obésité actuelle et future, il est important de comprendre que l’ obésité est une maladie et que les personnes souffrant d’ obésité ont besoin d’ un traitement spécifique et sur mesure.
Obesity represents a global socioeconomic health burden with epidemic dimensions worldwide (1-4). According to the WHO European Regional Obesity Reports 2022, already now 60% or adults and 1/3 of all children are affected in Europe (5) – and the numbers keep increasing in Europe and worldwide. Obesity is a major risk factor for multiple comorbidities such as type 2 diabetes, cardiovascular disease and cancer, and is associated with an increased overall mortality (6, 7). To successfully fight this epidemic now and in the future, it is important to understand that obesity is a disease and that people with obesity need a specific, tailored treatment. Key Words: obesity, GLP-1 analogues, stigmatization, tailored treatment
Il est dramatique de constater que l’ idée fausse selon laquelle le surpoids et l’ obésité résultent d’ un manque d’ effort et de volonté et que les personnes concernées doivent « simplement faire plus d’ efforts, manger moins et bouger plus » est encore largement répandue. Cela a pour conséquence que les personnes souffrant d’ obésité subissent une stigmatisation massive, non seulement dans notre société, mais aussi et surtout dans le secteur de la santé. Cette stigmatisation se fait d’ abord ressentir à l’ extérieur et s’ intériorise avec le temps, c’ est-à-dire que les personnes obèses se font très souvent de gros reproches sur l’ évolution de leur poids et se dévalorisent elles-mêmes. Cela entraîne un cercle dangereux qui est à la fois la conséquence et la cause de l’ obésité et qui favorise les comportements alimentaires émotionnels. La nourriture représente un moyen de « gérer ses émotions » (coping) et les personnes concernées évitent de se montrer dehors pour faire du sport car cela engendre encore plus de stress psychologique (fig. 1).
La stigmatisation dans le secteur de la santé et par les médecins, qui a été vécue au moins une fois par près de 70 % des personnes concernées dans une grande étude multinationale et multicentrique (12), peut avoir des conséquences graves telles qu’ un éloignement complet du système de santé, un abus de substances et une suicidalité accrue (12-14).
Diagnostic et pathogenèse
Le surpoids et l’ obésité sont largement classifiés selon l’ indice de masse corporelle (IMC, kg/m2), bien qu’ il ne s’ agisse que d’ une classification très vague, qui peut être complétée par l’ application supplémentaire du « Endmonton obesity staging system », qui tient compte des maladies suite à l’ obésité (fig. 2).
L’ obésité est une maladie multifactorielle, c’ est-à-dire que des facteurs (épi)génétiques, (neuro)biologiques et externes, appelés facteurs de « style de vie », jouent un rôle. Les processus neurobiologiques modifiés jouent ici un rôle décisif, car le cerveau détermine de manière largement autonome ce que nous mangeons, quand et comment nous le faisons, et comment se déroulent nos processus métaboliques. Ces processus, comme beaucoup d’ autres processus du corps humain, ne peuvent être influencés que de manière très marginale par la volonté. En d’ autres termes, le patient souffrant d’ obésité n’ est pas en surpoids parce qu’ il mange trop, il mange trop parce qu’ il est atteint d’ obésité !
Traitement de l’ obésité avec des analogues du GLP-1
Aujourd’ hui encore, une alimentation adaptée et équilibrée et suffisamment d’ activité physique sont les piliers du traitement de l’ obésité. Mais l’ obésité doit avant tout être traitée là où elle se développe, c’ est-à-dire au niveau neurobiologique. Avec les analogues du GLP-1, nous disposons pour la première fois dans l’ histoire du traitement de l’ obésité de médicaments qui nous permettent de traiter l’ obésité de manière ciblée, avec une bonne tolérance et des effets secondaires acceptables. Les analogues du GLP-1 provoquent au niveau du cerveau un renforcement de la sensation de satiété et une diminution de la sensation de faim, ce qui fait que l’ on mange moins. Des études ont montré une diminution moyenne du poids corporel de 10 % par rapport au poids initial (17,18). Les effets individuels peuvent toutefois être plus ou moins importants.
Les patients sous traitement avec des analogues du GLP-1 mentionnent surtout qu’ ils sont plus vite rassasiés et qu’ ils ne veulent ou ne peuvent plus manger que de petites portions. De nombreux patients affirment ressentir une grande détente générale, car ils ne doivent plus dépenser autant d’ énergie pour « éviter de manger ». Outre la réduction du poids, le traitement par les analogues du GLP-1 a d’ autres effets positifs sur les processus métaboliques, par exemple au niveau du foie, et a aussi des effets positifs sur le système cardiovasculaire.
En Suisse, l’ analogue du GLP-1, le liraglutide (Saxenda®), est autorisé pour le traitement de l’ obésité. Les coûts d’ un traitement avec l’ analogue du GLP-1 liraglutide (Saxenda®) sont pris en charge par la caisse maladie en Suisse depuis le 01.04.2020 sous certaines conditions. Il est important de savoir que ce médicament ne peut être prescrit que par des médecins endocrinologues/diabétologues FMH ou des spécialistes de l’ obésité (selon la liste de l’ OFSP). Cela signifie que les patients doivent être envoyés aux spécialistes concernés pour un traitement.
Les conditions pour une prise en charge des coûts du traitement avec l’ analogue du GLP-1 Saxenda® (liraglutide) sont les suivantes :
IMC ≥ 28kg/m2 avec pathologies associées liées au poids (prédiabète, diabète sucré de type 2, dyslipidémie, hypertension artérielle) OU
IMC ≥ 35kg/m2 indépendamment de pathologies associées.
Suivi approuvé d’ un régime déficitaire de 500kcal par jour.
Augmentation documentée de l’ activité physique, par ex. à l’ aide d’ un compteur de pas.
Contrôle des résultats et décision concernant la poursuite de la prise en charge des coûts au bout de 4 mois et ensuite tous les 6 mois
Prise en charge des coûts pendant 3 ans maximum
Le liraglutide (Saxenda®) doit être injecté quotidiennement par le patient par voie sous-cutanée. L’ injection est simple et se fait à l’ aide d’ un stylo. Il est toutefois important de bien instruire le patient concernant la technique d’ injection correcte. Il est également important de commencer par une faible dose (0,6mg/jour) et de n’ augmenter la dose que lentement, chaque semaine, jusqu’ à une dose maximale de 3mg par jour, afin de permettre au corps de s’ habituer lentement au médicament. Ainsi, les effets secondaires possibles tels que les nausées et, très rarement, les vomissements peuvent être minimisés ou totalement évités. D’ autres effets secondaires possibles sont la diarrhée ou la constipation. Tout comme la réponse au médicament, l’ émergence d’ effets secondaires varie considérablement d’ un patient à l’ autre.
Outre le traitement par des analogues du GLP-1, la chirurgie bariatrique représente pour des patients sélectionnés une méthode très efficace et sûre de réduction de poids. Ainsi on peut traiter ou même guérir complètement les maladies associées à l’ obésité. Quelle que soit la forme de thérapie, le patient doit être au centre du traitement et il faut trouver une approche individuelle et sur mesure pour chaque patient. Pour qu’ un traitement de l’ obésité soit efficace, il faut plutôt suivre la devise « state of the heart » que « state of the art » : le patient doit sentir que l’ on prend en compte ses besoins et ses souhaits individuels et qu’ il est perçu dans la réalité de la vie avec son vécu.
Cet article est une traduction de « der informierte arzt » 09_2022
Copyright Aerzteverlag medinfo AG
Pre Katharina Timper
Clinique d’endocrinologie, de diabétologie et
de métabolisme Hôpital universitaire de Bâle
Petersgraben 4
4031 Bâle
Département de biomédecine, Université de Bâle
L’ auteur n’ a pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.
◆ L’ obésité est une maladie ➞ Les patients souffrant d’ obésité ont besoin d’ un traitement spécifique.
◆ « State of the heart » : une attitude respectueuse, empathique et non stigmatisante envers le patient est primordiale, Entretien motivationnel – médecin-patient=équipe.
◆ Prise en compte : des troubles alimentaires, de l’ alimentation émotionnelle, de la santé mentale, du classement de l’ obésité (IMC et Edmonton Obesity Scale), des maladies associées à l’ obésité ; exclusion de causes endocrinologiques de l’ obésité.
◆ Établir ensemble avec le patient un plan d’ action et de traitement incluant les objectifs de celui-ci.
◆ Élaborer des changements de mode de vie pour chaque patient et les mettre en pratique de manière interdisciplinaire (avec éventuellement le transfert du patient à un centre de l’ obésité).
◆ Traiter l’ obésité de manière ciblée avec des analogues du GLP-1
(consultation d’ un médecin endocrinologue/diabétologue FMH ou d’ un spécialiste de l’ obésité selon la liste de l’ OFSP).
◆ Prendre en considération la chirurgie bariatrique (transfert au centre de l’ obésité).
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Pour les patients, il est décisif de savoir si le traitement de leurs problèmes de santé est pris en charge par l’ assurance-accidents ou par l’ assurance-maladie, car cette dernière prévoit une participation du patient aux frais engagés (franchise, quote-part). Cet article donne un aperçu des atteintes à la santé couvertes par l’assurance-accidents.
Due to the patient’s participation in the costs incurred as provided for in the health insurance (franchise, deductible), it is decisive whether the treatment of the health impairment is covered by the health insurance or the accident insurance. This article gives an overview of which health impairments are covered by accident insurance. Key Words: accident definition, bodily injury similar to that sustained in an accident, occupational disease, causality
La loi fédérale sur l’ assurance-accidents (LAA) prévoit que les prestations d’ assurance sont accordées conformément à cette loi en cas d’ accident professionnel, d’ accident non professionnel, de maladie professionnelle ou de lésions corporelles assimilées à un accident (art. 6 LAA). L’ assurance-maladie sociale accorde en revanche des prestations en cas de maladie, d’accident, pour autant qu’ aucune assurance-accidents n’en assume la prise en charge, et de maternité (art. 1a de la loi fédérale sur l’ assurance-maladie ; LAMal).
Accidents
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) définit quand il est présumé qu’il y a accident au sens du droit de l’ assurance-accidents. Toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort, est considérée comme accident (art. 4 LPGA). En revanche, toute atteinte à la santé physique, mentale ou psychique qui n’ est pas due à un accident et qui exige un examen ou un traitement médical ou qui provoque une incapacité de travail, est réputée maladie (art. 3 al. 1 LPGA). La question de savoir si la notion d’ accident est remplie est une question juridique et doit donc être résolue par l’ application du droit; il ne s’ agit pas d’ une question médicale (1). Pour qu’ un accident soit reconnu par la loi, tous les critères énumérés doivent être remplis. La jurisprudence du Tribunal fédéral est particulièrement riche en ce qui concerne la question de l’ existence d’ un facteur extérieur extraordinaire (2). Dans le cadre du travail médical, il est souvent difficile de déterminer s’ il s’ agit d’ un accident au sens de la loi, de sorte que le terme d’ accident devrait être évité.
Il ressort de la définition de l’ accident qu’ il doit y avoir un certain lien entre l’ événement accidentel et l’ atteinte à la santé. Le Tribunal fédéral et la doctrine juridique définissent à cet égard que l’ assureur-accidents est obligé d’ allouer des prestations lorsqu’ il existe un lien de causalité naturelle et adéquate entre l’ événement accidentel et l’ atteinte à la santé (3).
La causalité naturelle permet d’ examiner le lien effectivement explicable entre la cause et les symptômes. Des aspects scientifiques et techniques sont pris en considération. Il s’ agit d’ une question médicale ou scientifique. A ce sujet le Tribunal fédéral retient que les causes au sens de la causalité naturelle sont toutes les circonstances sans lesquelles le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu’il ne serait pas survenu de la même manière. Conformément à cette description, il n’ est pas nécessaire qu’ un accident soit la cause unique ou immédiate de l’atteinte à la santé pour que le lien de causalité naturelle soit établi ; il suffit que l’ événement dommageable, associé éventuellement à d’ autres facteurs, ait porté atteinte à l’ intégrité physique ou mentale de la personne assurée ; en d’ autres termes, l’ accident ne peut être supprimé sans que le trouble de la santé survenu ne disparaisse également (3).
Ce lien de causalité naturelle doit être établi avec le degré de preuve de la vraisemblance prépondérante. La simple possibilité d’ un lien ne suffit pas pour que l’ assureur-accidents soit tenu de fournir des prestations (3).
Selon le degré de preuve de la vraisemblance prépondérante, une preuve est considérée comme apportée lorsque des raisons objectives plaident en faveur de l’ exactitude de l’ allégation de fait, à tel point que d’ autres possibilités envisageables n’ entrent raisonnablement pas en ligne de compte de manière déterminante (4).
En d’ autres termes, le tribunal doit suivre l’ exposé des faits qu’ il considère comme le plus probable parmi tous les événements possibles (5).
Il convient de distinguer la causalité adéquate de la causalité négative. Celle-ci est examinée lorsque, à la suite de l’accident, aucune preuve organique n’a été apportée et que des troubles persistent malgré tout (6). A titre d’ exemple, on peut citer la persistance de douleurs cervicales sans preuve d’ une modification structurelle objectivable par une radiographie ou une IRM après un léger accident par l’ arrière. Par rapport à la causalité naturelle, il ne s’ agit pas d’ une théorie de la causalité logique, mais d’ une théorie de l’ imputation évaluative.
En conséquence, la question du lien de causalité adéquate, contrairement à la question du lien de causalité naturelle, est une question juridique (1).
Selon la jurisprudence, un événement est considéré comme la cause adéquate d’ un résultat, si, d’après le cours ordinaire des choses et l’expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s’est produit, la survenance de ce résultat paraissant de manière générale favorisée par une telle circonstance (3). Le Tribunal fédéral a développé deux listes de critères différents que l’ application du droit doit examiner en fonction de la situation présente lorsqu’ il s’ agit de déterminer le lien de causalité adéquate (7).
Même si un assureur-accidents a affirmé son obligation de prestation, cela ne signifie pas dans tous les cas une prise en charge à vie des prestations. Un assureur-accidents doit par exemple suspendre ses prestations lorsqu’ il n’ y a plus de lien de causalité naturelle entre les troubles d’ une personne assurée et l’ événement accidentel ou que ce lien a disparu avec une probabilité prépondérante. Il convient de mentionner en particulier les constellations dans lesquelles l’ événement porte atteinte à une partie du corps déjà affectée par un état antérieur, souvent inconnu de la personne assurée (usure ou maladie). Pour que l’ obligation de verser des prestations soit illimitée dans le temps, il faut qu’ il y ait, à la suite de l’ accident, une aggravation durable ou déterminante d’ un état antérieur donné. Dès qu’ un état de santé atteint celui qui existait immédiatement avant l’ accident (statu quo ante) ou celui qui existerait même sans l’accident par suite d’un développement ordinaire (statu quo sine), l’ assureur-accidents doit suspendre ses prestations (8).
Une chute sur le genou après laquelle une gonarthrose est constatée, mais une rupture du ligament croisé antérieur est également diagnostiquée, peut servir d’ exemple d’ aggravation durable ou déterminante. Avec ou sans traitement chirurgical, il faut partir du principe que la rupture du ligament croisé antérieur a une influence négative sur l’ évolution de la gonarthrose. En revanche, on peut s’ attendre à une aggravation limitée dans le temps si une gonarthrose devient symptomatique à la suite d’une contusion sans lésion supplémentaire des ligaments ou du ménisque. Selon la sévérité de la contusion, l’ assurance-accidents est tenue de verser des prestations pendant quelques semaines à quelques mois. Il est dans la nature de l’ usure que des douleurs puissent apparaître indépendamment d’ un accident.
Lésions corporelles assimilées à un accident
Outre l’ octroi de prestations d’ assurance en cas d’ accidents professionnels et non professionnels, l’ assurance-accidents fournit également ses prestations pour une liste exhaustive de huit diagnostics (tab. 1), pour autant qu’ ils ne soient pas dus principalement, c’ est-à-dire à plus de 50 % (9), à l’ usure ou à une maladie (art. 6 al. 2 LAA).
La condition préalable à une obligation de prestation est la présence de l’ un des diagnostics mentionnés. L’ examen de la pathogenèse de la pathologie à discuter dans le cas particulier est central dans l’ évaluation de la médecine des assurances. Si l’ examen de la pathogenèse conduit à la conclusion qu’ il existe une pathologie principalement due à l’ usure ou à une maladie, la compétence de l’ assureur-accidents doit être niée (10).
Maladie professionnelle
Enfin, l’ assureur-accidents est tenu de fournir des prestations en cas de maladie professionnelle. Dans ce contexte, il faut évaluer s’ il s’ agit d’ une maladie causée exclusivement ou de manière prépondérante, dans l’ activité professionnelle, par des substances nocives ou certains travaux (art. 9 al. 1 LAA). Le Conseil fédéral a établi une liste de ces substances et travaux ainsi que des maladies liées au travail (annexe 1 de l’ ordonnance sur l’ assurance-accidents ; OLAA).
Selon le Tribunal fédéral, les substances nocives ou certains travaux ne sont à l’ origine d’ une maladie de manière « prépondérante » que si elles pèsent plus lourd que toutes les autres causes impliquées, c’ est-à-dire si elles représentent plus de 50 % de l’ ensemble des causes. Par contre, la causalité « exclusive » signifie pratiquement 100 % de la part causale des substances nocives ou de certains travaux dans la maladie professionnelle (11). Mais d’ autres maladies dont il est prouvé qu’ elles ont été causées exclusivement ou de manière fortement prépondérante par l’ activité professionnelle sont également considérées comme des maladies professionnelles (art. 9 al. 2 LAA).
La maladie professionnelle doit être causée à 75 % au moins par l’ activité professionnelle. Ce sont surtout ces maladies, qui ne figurent pas sur la liste, qui donnent lieu à des discussions répétées dans la pratique quotidienne.
Pour qu’ une maladie professionnelle soit reconnue selon l’ art. 9 al. 2 LAA, il faut que le taux d’ incidence dans le groupe professionnel spécifique soit quatre fois plus élevé que celui de la population en général, afin de pouvoir affirmer le critère de la causalité exclusive ou nettement prépondérante de l’ activité professionnelle (12, 13).
Cet article est une traduction de « der informierte arzt » 06_2022
Copyright Aerzteverlag medinfo AG
Dr Josef Grab
MAS Médecine des assurances
EMBA HSG Insurance et Financial Services
Spécialiste en chirurgie, membre FMH
Suva
Fluhmattstrasse 1
6004 Lucerne
josef.grab@suva.ch
Nicole Pfrunder MLaw, avocate
Suva
Fluhmattstrasse 1
6004 Lucerne
nicole.pfrunder@suva.ch
Les auteurs n’ ont pas déclaré de conflits d’intérêts en rapport avec cet article.
◆ L’ assurance-accidents prend en charge les prestations en cas d’ accident, de lésions corporelles assimilées à un accident et de maladies professionnelles.
◆ L’ application du droit dépend, dans de nombreuses questions, d’ une évaluation médicale lors de l’ examen de l’ obligation de prestation. Il incombe notamment au corps médical de prendre position sur les questions de causalité naturelle.
◆ La notion d’ accident est définie dans la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales La question de savoir si elle est remplie est une question juridique et doit donc être résolue par l’ application du droit. Il ne s’ agit pas d’ une question médicale.
◆ L’ affirmation de l’ obligation de prestation par un assureur-accidents ne signifie pas dans tous les cas une prise en charge des prestations à vie.
Jurisprudence et littérature :
1. Urteil des Bundesgerichts (BGer) 8C_298/2016 vom 30.11.2016 E. 5.2
2. zum ungewöhnlichen äusseren Faktor: BGE 134 V 72 E. 4.1
3. BGE 129 V 177 E. 3
4. BGE 140 III 610 E. 4.1
5. BGE 138 V 218 E. 6
6. BGE 140 V 356 E. 3.2
7. BGE 115 V 133 und BGE 134 V 109
8. Urteil des BGer 8C_589/2017 vom 21.2.2018 E. 3.1
9. BGE 146 V 51 E. 8.2.2.1
10. Koch H, Henseler S. Zur versicherungsmedizinischen Bewertung des Art. 6 Abs. 2 und der hiermit angegebenen Listendiagnosen im Bundesgesetz über die Unfallversicherung (UVG) der Schweiz. Der medizinische Sachverständige. 2020;116 (4):187-92.
11. BGE 117 V 354 E. 2a
12. BGE 116 V 136 E. 5c
13. Urteil des BGer 8C_746/2012 vom 29.10.2012 E. 5