Chez un patient de 71 ans, un diabète sucré de type 2 est connu depuis 20 ans. Le patient souffre en outre d’ une maladie coronarienne bitronculaire avec une fraction d’ éjection du ventricule gauche légèrement réduite (FEVG 49 %). Comme autre diagnostic, le patient présente une maladie rénale chronique (DFG 48 ml/min), DD dans le cadre d’ une néphropathie diabétique. L’ IMC du patient est de 31,8 kg/m2.
Son traitement antidiabétique se compose de metformine, de sitagliptine (Januvia), un inhibiteur de la DDP4, de sémaglutide (Ozempic), un analogue du GLP1, et d’ insuline dégludec (Tresiba). Le patient obtient ainsi une HbA1c de 6,9 %.
Les éléments importants de l’ anamnèse personnelle
Diagnostic de diabète sucré il y a 20 ans avec actuellement un bon contrôle de la glycémie (HbA1c 6,9 %) sous un traitement par Janumet, Ozempic et Tresiba. Le patient présente cependant un profil de risque cardiovasculaire élevé avec les facteurs de risque obésité, diabète sucré de type 2, hypercholestérolémie et hypertension artérielle. Il a dans son anamnèse personnelle une maladie coronarienne bitronculaire, une fonction cardiaque légèrement diminuée et une insuffisance rénale chronique.
Questions à poser
Le traitement antidiabétique peut-il être optimisé ?
Faut-il pour cela une garantie de prise en charge spéciale ?
Conclusions
Le patient présente un risque cardiovasculaire élevé. Il pourrait bénéficier d’ un traitement supplémentaire par un inhibiteur du SGLT2 en ce qui concerne les paramètres rénaux et cardiovasculaires (notamment en vue de l’ insuffisance rénale et cardiaque).
Un traitement combiné par analogue du GLP1/inhibiteur du SGLT2 nécessite une garantie de prise en charge par l’ assurance maladie.
Mesures à prendre et traitement proposé
Demande de garantie de prise en charge des coûts pour une thérapie combinée avec un analogue du GLP1 et un inhibiteur du SGLT2.
Si celle-ci est obtenue, le traitement antidiabétique du patient sera adapté comme suit :
Arrêt du Janumet
Remplacer ce dernier par un traitement combiné de metformine et SGLT2 (p.ex. Xigduo 10/1000 1-0-0) (CAVE en cas de DFG de 48 ml/min). Dose journalière maximale de metformine de 1000 mg)
Le sémaglutide peut être augmenté à 1 mg par semaine si la tolérance est bonne.
Tresiba 14 E continuer dans un premier temps, selon la réponse au traitement. Eventuellement réduction de la dose au fil du temps.
Copyright Aerzteverlag medinfo AG
PD Dre méd. Claudia Cavelti-Weder
Clinique d’ Endocrinologie, de Diabétologie et de Nutrition clinique
Hôpital Universitaire de Zurich
Rämistrasse 100
8091 Zurich
Claudia.Cavelti-Weder@usz.ch
L’ auteure a déclaré n’ avoir aucun conflit d’ intérêt en relation avec cet article.
Les préparations à base de cannabis contenant du THC sont employées en particulier chez les patients souffrant de douleurs et/ou de spasticité, tandis que le CBD est principalement utilisé dans les formes d’ épilepsie de Dravet et de Lennox-Gastaut. En Suisse, deux médicaments à base de chanvre sont homologués, le Sativex et l’ Epidyolex. Des préparations de cannabis non enregistrées peuvent être prescrites en tant que préparations magistrales.
Cannabis preparations containing THC are primarily used to treat chronic pain and spasticity, while CBD is mainly prescribed to patients suffering from refractory epilepsy, such as Dravet and Lennox-Gastaut syndrome. In Switzerland, two cannabis-based drugs are approved by the authorities, namely Sativex and Epidyolex. Besides these, cannabis preparations can be prescribed as extemporaneous formulations. Key Words: Cannabis, Tetrahydrocannabinol (THC), Dronabinol, Cannabidiol (CBD), douleurs chroniques
Depuis quelques années, les préparations à base de cannabis ou les médicaments contenant des cannabinoïdes s’ affirment comme des alternatives possibles dans un grand nombre d’ indications. Les effets médicaux sont attribuables principalement aux deux principaux cannabinoïdes, le THC (tétrahydrocannabinol ou dronabinol*) et le CBD (cannabidiol). Seuls ces deux cannabinoïdes sont actuellement utilisés à des fins thérapeutiques, soit comme substances pures, soit comme composants de mélanges de plusieurs substances (par ex. extraits de cannabis contenant du THC ou du CBD). La substance active THC est mieux étudiée que le CBD. De nombreuses études sur l’ animal et l’ homme ont démontré que le THC possède des propriétés analgésiques, antispasmodiques, stimulantes de l’ appétit, supprimant la nausée et réduisant la pression intraoculaire. À cela s’ ajoutent d’ autres propriétés agissant au niveau central, qui peuvent s’ avérer utiles dans différentes maladies telles que le syndrome de la Tourette, les tics, les jambes sans repos (Restless Legs), la maladie de Parkinson, etc. Les preuves scientifiques de l’ efficacité du THC dans les indications susmentionnées sont par contre variées. Pour de nombreuses maladies, les études à grande échelle font largement défaut. Il existe tout au plus des résultats de petites études avec un petit nombre de patients ou des présentations de cas (case reports). L’ ouvrage de référence « The Health Effects of Cannabis and Cannabinoids : The Current State of Evidence and Recommendations for Research » (1), cite de bonnes preuves dans les domaines d’ application suivants : douleurs chroniques chez l’ adultes, nausées et vomissements associés à la chimiothérapie et spasticité dans la sclérose en plaques. D’ autres méta-analyses (2, 3, 4), ne trouvent pas toujours le même niveau d’ évidence par indication en raison de l’ hétérogénéité des préparations de cannabis utilisées.
Quant au CBD, il est certes utilisé en partie pour les mêmes indications que le THC, notamment pour les douleurs (inflammatoires) et certains troubles moteurs. Les données scientifiques montrent cependant que le CBD a surtout des effets antiépileptiques, antipsychotiques, anti-inflammatoires et neuroprotecteurs (5, 6). Par conséquent, le CBD est principalement utilisé dans les formes d’ épilepsie résistantes aux traitements chez les enfants (surtout avec le syndrome de Dravet ou de Lennox-Gastaut), mais aussi dans les troubles anxieux, les attaques de panique, les troubles du spectre autistique, le TDAH, etc.
Les cannabinoïdes dans la douleur chronique
Des études les plus diverses ont démontré que le système endocannabinoïde (ECS) ou les deux récepteurs cannabinoïdes (CB1 et CB2) jouent un rôle dans la gestion de la douleur (7). Cependant, les processus sont très complexes et il semble clair que le soulagement de la douleur ne résulte pas uniquement de l’ activation des récepteurs CB1 (périphériques) (8). Une revue systématique des manifestations cliniques datant de 2019 a livré les principales conclusions suivantes : l’ efficacité des cannabinoïdes dans le traitement de la douleur chronique a été fréquemment étudiée au cours des dernières années. Une difficulté générale des études avec le cannabis est d’ une part l’ hétérogénéité des préparations utilisées, ainsi que les différentes formes d’ application (orale vs inhalation). Dans la méta-analyse sur l’ efficacité des cannabinoïdes et des douleurs chroniques de Whiting et al. (2015), 28 études randomisées et contrôlées ont été prises en compte entre 1975 et 2015. 2 454 patients ont été inclus. Différents médicaments à base de cannabis ont été analysés (chanvre médical avec différentes teneurs en THC, extraits de cannabis contenant du THC ou du THC/CBD – le plus souvent du nabiximol, du dronabinol ainsi que du nabilone, un dérivé du THC). Les auteurs concluent que les cannabinoïdes peuvent parfois arriver à réduire la douleur d’ environ 30%, mais qu’ il n’ existe actuellement aucune preuve d’ une réduction des symptômes d’ au moins 50 %. Toutes les études fournissent cependant d’ autres preuves d’ efficacité secondaires (par ex. réduction de la durée moyenne de la douleur, amélioration forte ou très forte du bien-être général) en faveur des cannabinoïdes (9). Les cannabinoïdes ont été le mieux étudiés dans les douleurs neuropathiques. Les effets des différentes préparations de cannabis étaient plus marqués qu’ en cas de douleurs chroniques. A cet égard, l’ effet du nabiximol (sativex ) est le mieux étudié. Les cannabinoïdes sont également utilisés dans la pratique courante pour d’ autres formes de douleurs telles que les douleurs tumorales, les douleurs rhumatismales, les fibromyalgies et autres.
En résumé : les cannabinoïdes peuvent soulager des douleurs chroniques, les principaux bénéficiaires étant les patients souffrant de douleurs neuropathiques et de spasticité douloureuse (Whiting et al. 2015). En cas de douleurs nociceptives, les cannabinoïdes semblent être moins efficaces (10).
Complément tiré de la pratique de la Bahnhof Apotheke à Langnau : au cours des 14 dernières années, plusieurs milliers de patients ont reçu une préparation de cannabis par prescription magistrale. Environ ¾ étaient des préparations contenant du THC et donc soumises à l’ autorisation de l’ OFSP (dronabinol, teinture de cannabis, huile de cannabis). Plus de 80 % des prescriptions concernaient des patients souffrant de douleurs chroniques/de spasticité Pour certains patients, les cannabinoïdes peuvent constituer un complément efficace dans le sens d’ une thérapie «add on» (par ex. aux opiacés) ; mais il arrive aussi que les cannabinoïdes soient plus efficaces en monothérapie que les médicaments établis.
Dosages : Le dosage des cannabinoïdes chez les patients souffrant de douleurs est très individuel. Pour le THC, les doses quotidiennes typiques (réparties en 2 à 3 doses unitaires) se situent entre 10 et 30 mg par jour. Pour le CBD (seul ou en combinaison avec le THC), elles peuvent être plusieurs fois supérieures.
Effets secondaires/potentiel de dépendance : Tant le THC que le CBD sont considérés comme ayant relativement peu d’ effets secondaires. Les effets secondaires typiques du THC peuvent être : fatigue, sédation, sécheresse de la bouche, yeux rouges, vertiges, tachycardie, nausées, troubles cognitifs. Pour des doses élevées de CBD sont décrites : fatigue, sédation, manque d’ appétit, troubles gastro-intestinaux, augmentation réversible des transaminases hépatiques (en particulier en combinaison avec d’ autres médicaments affectant la fonction hépatique). Aux doses thérapeutiques, le risque d’ addiction et de dépendance est négligeable (tant pour le THC que pour le CBD). Dans la pratique, de même, le développement d’ une tolérance ou un syndrome de sevrage ne jouent pas de rôles importants.
Interactions : Le THC et le CBD sont des substrats des enzymes CYP dans le foie. En cas de combinaison avec des inhibiteurs et des inducteurs des CYP, une adaptation de la dose peut être nécessaire. Ce qui est pertinent pour la pratique, c’ est que le CBD peut potentiellement inhiber les enzymes CYP. La prudence est donc de mise, en particulier avec des doses élevées de CBD, en cas d’ association avec des substrats des CYP avec une marge thérapeutique étroite, comme certains antiépileptiques (clobazam, rufinamide, topiramate) (11) et des anticoagulants oraux de type antagonistes de la vitamine K (phenprocoumone, acénocoumarol) (12).
Compositions disponibles en Suisse : Actuellement, deux médicaments à base de cannabis ont reçu une autorisation de Swissmedic. D’ une part, le spray Sativex (nabiximol), à appliquer par voie sublinguale et soumis à la loi sur les stupéfiants (LStup), pour une utilisation en cas de spasticité dans la SEP ; et d’ autre part, le sirop Epidyolex (CBD), délivré sur ordonnance, pour le traitement des formes rares d’ épilepsie que sont les syndromes de Dravet et de Lennox-Gastaut. Toutes les autres préparations à base de chanvre actuellement prescriptibles sont des préparations dites magistrales (p. ex. solution de dronabinol à 2,5 %, teinture ou huile de cannabis CANNAPLANT, huile de sativa, entre autres). Contrairement aux médicaments autorisés par la loi, ces préparations confectionnées individuellement pour le patient bénéficient de la liberté thérapeutique, c’ est-à-dire que le médecin n’ est pas lié à une indication précise.
Bases légales : La prescription de la seule préparation de cannabis autorisée en Suisse par Swissmedic se fait de manière analogue à celle des autres stupéfiants. La préparation ne peut être prescrite que pour l’ indication autorisée de spasticité chez les patients atteints de SEP, mais d’ autres indications sont possibles « off label ». Toutes les préparations magistrales contenant du THC (> 1 %) nécessitaient jusqu’ à présent une autorisation exceptionnelle de l’ OFSP, c’ est-à-dire que le médecin prescripteur doit impérativement déposer une demande (par exemple au moyen du formulaire existant), qui était généralement acceptée en quelques jours. Dans la nouvelle LStup, dont l’ entrée en vigueur vient d’ être fixée par le Conseil Fédéral au premier août 2022, cette réglementation d’ exception ne figure plus.
Qu’ est-ce que cela signifie ? À l’ avenir, les médicaments à base de chanvre contenant du THC, avec une teneur > 1 %, pourront être prescrits sans autorisation de l’ OFSP, mais une enquête dite d’ accompagnement sera obligatoire.
Les préparations à base de CBD pur nécessitent une ordonnance mais ne sont pas soumises à la LStup. Pour tous les « extraits de CBD » en vente libre avec une teneur maximale en THC de < 1 %, qui étaient jusqu’ à présent soumis à la législation sur les produits chimiques, de nouvelles dispositions seront également applicables à l’ automne 2022. Ces préparations (surtout les teintures de CBD, les huiles de CBD) devront obligatoirement être mélangées à un dénaturant, de sorte qu’ elles ne pourront plus être ingérées (13). Les extraits de cannabis non dénaturés contenant du CBD, mais non soumis à la LStup devraient pouvoir être prescrits, le sont ou le resteront dans la mesure où ils répondent aux exigences des BPF (bonnes pratiques de fabrication). Malgré des preuves cliniques encore insatisfaisantes, les préparations à base de cannabis occupent d’ ores et déjà une place considérable dans le traitement des douleurs chroniques. Dans un avenir proche la prescription des préparations contenant du THC ou du CBD restera probablement l’ exception, mais dans certains cas elle peut représenter une alternative et/ou un complément efficace pour les patients concernés. Il est à souhaiter que le grand potentiel thérapeutique des cannabinoïdes fasse l’ objet de plus d’ études cliniques, afin que le cannabis puisse enrichir la palette thérapeutique dans le traitement de la douleur sur la base de données probantes.
(*Le dronabinol est la dénomination commune internationalement reconnue pour le THC, qui désigne généralement le THC synthétique ou semi-synthétique.)
Article traduit de « der informierte arzt » 06-2022
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Dr. pharm. Manfred Fankhauser
Bahnhof Apotheke Langnau AG
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3550 Langnau
034 402 12 55
manfred.fankhauser@cannabis-med.ch
L’ auteur est propriétaire et directeur de la pharmacie Bahnhof Apotheke Langnau AG , une pharmacie pionnière spécialisée dans le cannabis médical. La pharmacie Bahnhof Apotheke Langnau AG dispose des autorisations nécessaires pour pouvoir fabriquer des préparations magistrales à base de cannabis.
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13. BBl: Bundesblatt 2022 668 Allgemeinverfügung der Anmeldestelle Chemikalien zum Inverkehrbringen von CBD-haltigem Duftöl, gestützt auf Artikel 10 Absätze 1 und 2 in Verbindung mit Artikel 1, Absätze 1-3 PrSG, 24.3.2022.
La thérapie par ondes de choc fait aujourd’ hui partie intégrante de la médecine de la douleur. Les ondes de choc générées de manière extracorporelle sont utilisées dans différents domaines d’ application. La distinction entre ondes de choc focales et ondes de choc radiales est essentielle. Le présent article a pour but d’ expliquer plus en détail cette méthode de traitement de la douleur en médecine.
L’ utilisation des ondes de choc est très variée. Les domaines d’ application les plus connus sont la fragmentation des calculs rénaux en urologie, les troubles de la cicatrisation des plaies en dermatologie et l’ épine calcanéenne en orthopédie. Moins connu par contre est comment les ondes de choc sont générées et comment elles agissent. D’ un point de vue physique, les ondes de choc sont des ondes sonores. Dans l’ atmosphère, elles se produisent lors de processus explosifs, comme le coup de foudre par exemple. Cela explique également le bruit typique qui se produit lors de la focalisation d’ une onde de choc. La focalisation obtenue est très concentrée et peut varier, comme la profondeur de pénétration, en fonction de la puissance appliquée (énergie et fréquence). Ceci est essentiel pour traiter la source de la douleur.
En revanche, les ondes de choc radiales, ou plus précisément les ondes de pression radiales, sont beaucoup plus larges. La profondeur de pénétration est beaucoup plus faible, mais l’ énergie à la surface est plus importante que pour l’ onde de choc focale. Elle déploie donc son effet sur une large surface de tissu, alors que l’ onde de choc focale déploie son effet au niveau cellulaire de manière très ciblée.
Les ondes de choc dans le traitement conservateur de la douleur
Dans le traitement conservateur de la douleur, on travaille avec des ondes de choc à faible densité d’ énergie. Cela permet de traiter de manière optimale la structure douloureuse sans affecter les zones non concernées. L’ hypothèse de la destruction des tissus comme mécanisme d’ action de la thérapie par ondes de choc, que l’ on a longtemps crue, s’ est avérée inexacte. Il s’ avère que l’ irritation des tissus entraîne, entre autres, la stimulation de la microcirculation. Les cellules souches sont également stimulées et une libération de NO est provoquée, ce qui stimule le métabolisme et exerce un effet anti-inflammatoire. Lors de l’ application de la thérapie par ondes de choc sur la musculature, le mécanisme d’ action consistant à détacher les filaments d’ actine-myosine fixés se surajoute. Le même principe permet de dissoudre les points de déclenchement (« trigger points ») myofasciaux.
Indications
L’ une des indications les plus fréquentes est la tendinite calcifiante de la coiffe des rotateurs, ou l’ épicondylopathie radiale et cubitale (tennis elbow/golfeur). L’ épine calcanéenne (fasciite plantaire) fait également partie du grand répertoire. Le traitement du syndrome tibial antérieur, des pseudarthroses, des syndromes douloureux myofasciaux cervicaux et lombaires, sont moins connus, mais ne constituent pas un traitement exceptionnel dans les mains d’ un médecin de la douleur expérimenté.
Contre-indications et effets secondaires
Les contre-indications absolues sont les tumeurs et les thromboses dans la zone de traitement. Les ondes de choc peuvent mobiliser des cellules cancéreuses ou des thrombus et les disséminer dans le reste du corps. Les contre-indications relatives sont l’ anticoagulation ou les troubles de la coagulation. Des lésions de petits vaisseaux peuvent se produire provoquant des saignements dans les tissus.
L’ effet secondaire le plus fréquent est une rougeur dans la zone de traitement due à une augmentation de l’ inflammation, qui peut entraîner des pétéchies dans la zone traitée et même provoquer une aggravation initiale des douleurs. Ces effets secondaires sont toutefois inoffensifs et disparaissent d’ eux-mêmes.
Traitement
Le concept de traitement de la thérapie par ondes de choc a beaucoup évolué ces dernières années. Alors qu’ au début, on traitait encore selon la méthode « Là où ça fait mal », on procède aujourd’ hui de manière beaucoup plus systématique. On ne s’ attaque plus seulement à la zone douloureuse, mais on traite également les points de déclenchement correspondants. Par exemple, dans le cas de l’ épine calcanéenne, on ne se contente plus de traiter uniquement la zone douloureuse avec des ondes de choc, mais on traite également les points de déclenchement de la musculature correspondante (muscles du pied et du mollet), en allant de la périphérie vers le centre. De plus, des connaissances sur les triggers (déclencheurs) satellites au sens d’ une douleur référée « referred pain » sont nécessaires pour un traitement efficace. Ces déclencheurs satellites sont des points de déclenchement qui de prime abord n’ ont rien à voir avec la structure concernée. Le traitement simultané de ces points peut toutefois être décisif pour le succès de la thérapie.
Pour localiser les chaînes myofasciales associées au point déclencheur, on utilise aujourd’ hui les ultrasons. Il est essentiel de reconnaître la musculature associée au point déclencheur, de même que son insertion et son origine. Ce n’ est qu’ ainsi que l’ unité myofasciale périphérique appartenant à la zone douloureuse peut être traitée de façon efficace.
Le choix de la méthode de traitement dépend fortement du domaine d’ application. Condition pour une thérapie différenciée par ondes de choc suppose un appareil moderne (fig. 1). Sur ces appareils, tant l’ énergie que la fréquence sont librement réglables. Ceci est essentiel pour définir la profondeur de pénétration et la distribution de la pression sur le lieu d’ action. De même, différentes pièces à main avec différents embouts sont nécessaires pour obtenir un résultat efficace.
Domaines d’ application
Dans les zones myofasciales (musculo-squelettiques), on utilise des applicateurs relativement grands et on travaille principalement avec des ondes de choc radiales. Ceci afin de traiter une zone aussi large que possible. Cela permet d’ améliorer la mobilité des fascias « collés ». Comme déjà mentionné, cela peut entraîner une sensation similaire aux courbatures, ce dont le patient doit être informé au préalable. Cette sensation désagréable est spontanément régressive.
Dans les zones tendineuses et aux insertions tendomusculaires, des applicateurs spécialement conçus sont utilisés. Ces applicateurs fonctionnent avec une force de frappe moindre, mais atteignent la même énergie. Ils conviennent donc particulièrement bien à la thérapie de structures plus souples comme les tendons, mais aussi de points déclencheurs spécifiques.
Avec des ondes de choc focales on traite des points douloureux isolés, notamment ceux situés en profondeur. Parmi les structures à traiter, on peut citer le muscle iliopsoas ou les petites articulations vertébrales. Mais aussi des structures plus superficielles, comme l’ épicondyle latéral ou médial, bénéficient du traitement aux ondes focales.
Points forts et points faibles
Les avantages les plus évidents de ce traitement sont qu’ il est complètement non invasif et, de plus, sans aucune utilisation de médicaments. Des effets secondaires tels que des réactions allergiques ou des infections à l’ endroit traité sont donc impossibles. Il n’ y a pas non plus d’ exposition aux rayons X. D’ autres méthodes physiques telles que la physiothérapie, le massage ou le « taping » kinésiologique, ou la médecine traditionnelle chinoise (acupuncture) se prêtent bien à l’ intégration dans un concept global de traitement des syndromes de douleurs myofasciales.
Une faiblesse réside dans le nombre de séances de traitements. Bien que les méthodes invasives puissent présenter des effets secondaires importants, un seul traitement est généralement nécessaire (par ex. infiltrations de corticostéroïdes).
La thérapie par ondes de choc consiste en quatre à six séances de 30 minutes chacune, espacées d’ une semaine. Si le thérapeute ne prend pas assez de précautions, le traitement peut être douloureux. En résumé, il convient de mentionner une fois encore que la thérapie par ondes de choc devrait être intégrée dans tout concept multimodal de traitement de la douleur. C’est la seule façon de garantir un traitement global des patients souffrant de douleurs.
Article traduit de « der informierte arzt » 06-2022
Copyright Aerzteverlag medinfo
Dr. med.Patrick Nordmann
Praxisklinik Urania
Löwenstrasse 28
8001 Zürich
L’ auteur n’ a pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.
◆ La thérapie par ondes de choc est une méthode polyvalente de traitement des douleurs musculo-squelettiques. Toutes les régions du corps concernées peuvent être traitées et il n’ existe pratiquement aucune contre-indication.
◆ La méthode est entièrement non invasive et aucun médicament n’ est utilisé.
◆ En raison de l’ évolution constante des connaissances scientifiques sur les douleurs musculo-squelettiques et du développement continu des appareils, la thérapie par ondes de choc est une méthode essentielle dans la médecine moderne de la douleur.
Goertz O, Hauser J, Hirsch T, von der Lohe L, Kolbenschlag J, Stricker I et al.
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La pandémie de la Covid-19 a entrainé une augmentation de la prévalence des troubles psychiatriques dans le monde. Après la phase aigüe, en outre, certains individus souffrent du syndrome post-Covid-19 marqué par des symptômes neuropsychiatriques invalidants au quotidien. La peur liée à la Covid-19, au-delà du confinement, semble avoir participé à l’ apparition de ces complications. Le dépistage des troubles psychiatriques, la réduction de la peur et la promotion de l’ activité physique permettraient de lutter contre les complications psychologiques liées à la Covid-19.
The Covid-19 pandemic has led to an increase in the prevalence of psychiatric disorders worldwide. In addition, after the acute phase, some individuals suffer from post-Covid-19 syndrome marked by disabling neuropsychiatric symptoms on a daily basis. The fear associated with Covid-19, beyond the confinement, seems to have contributed to the development of these complications. Screening for psychiatric disorders, reducing fear, and promoting physical activity would help combat the psychological complications associated with Covid-19. Key Words: Syndrome post-Covid-19 , Peur , Asthénie , Dépistage
Introduction
La maladie due au coronavirus-2019 (Covid-19) s’est rapidement propagée dans le monde et la pandémie qui en a découlé a constitué une grave menace pour la santé physique mais aussi, et de manière moins prévisible, la santé mentale. L’ infection per se (notamment via l’ entité nouvellement décrite de syndrome post-Covid-19 ou Covid long), mais aussi les mesures sanitaires restrictives qui en ont découlé (telles que le confinement et les différentes mesures de distanciation sociale), ont été à l’ origine de problématiques psychologiques et psychiatriques conséquentes.
Contexte épidémiologique
Plusieurs études relèvent la majoration de symptômes anxiodépressifs de faible intensité et du sommeil suite à la pandémie (1–4). Une méta-analyse se focalisant sur la phase précoce de la pandémie retrouve ainsi une prévalence des symptômes anxiodépressifs et des troubles du sommeil dans la population générale avoisinant les 30-40%, soit environ un tiers de la population. Ces pourcentages sont largement supérieurs – environ le double – que les taux de prévalence habituellement retrouvés dans la population générale hors périodes d’ épidémie ou de catastrophe naturelle (3).
D’ autre part, au-delà de ces symptômes, de nombreux troubles du comportement et signes de souffrance psychique ont vu leur prévalence augmenter et leur pronostic s’ aggraver dans le contexte de la pandémie. Les idées suicidaires, les tentatives de suicide et les actes autodommageables (notamment les automutilations) ont ainsi augmenté de façon alarmante (5, 6). Par exemple, une méta-analyse publiée en 2021, qui inclue des études localisées principalement en Asie, en Amérique du Nord et en Europe de l’ Ouest, a rapporté un taux de suicide avoisinant les 5% dans la population générale du début de la pandémie jusqu’ à fin 2020 (6). Les symptômes obsessionnels compulsifs se sont aussi majorés, en particulier chez les personnes atteintes de troubles obsessionnels compulsifs liés à la contamination. De plus, de nombreux individus ont présenté de symptômes inauguraux de type obsessionnel-compulsif centrés sur la Covid-19 (7). On retrouve aussi dans la littérature scientifique une augmentation des décès liés aux abus de substances après le début de la Covid-19, de même qu’ une augmentation des troubles du comportement alimentaire (8, 9). Chez les personnes âgées atteintes de troubles neurocognitifs, une aggravation des symptômes psycho-comportementaux a aussi été constaté, en particulier pendant les périodes de confinement (10).
Les professionnels de la santé ont été particulièrement touché par les conséquences psychologiques de la pandémie de la Covid-19. Les infirmiers, médecins, et autres professionnels de santé, directement ou indirectement impactés par la crise sanitaire, ont présenté une augmentation de plusieurs troubles psychiatriques, notamment les troubles anxiodépressifs, le burnout (ou syndrome d’ épuisement professionnel), et l’ état de stress post-traumatique (ce dernier étant particulièrement présent pour le personnel des soins intensifs) (2, 11–15). On considère que le burnout au cours de la pandémie a ainsi touché plus de la moitié des soignants. Ce taux très important est bien supérieur aux taux habituels des études sur le burn-out chez les professionnels de santé hors contexte de pandémie, qui avoisinent normalement les 30% (14). De même, il existe une augmentation de la prévalence de l’ état de stress post-trauma-tique parmi les professionnels de santé en première ligne pendant la pandémie, avec une méta-analyse retrouvant un taux conséquent de plus de 13 % pendant la période de la pandémie s’ étalant jusqu’ à mars 2021 (12).
Mis à part les patients et les professionnels de santé, la Covid-19 a touché l’ équilibre psychique des proches et des familles des personnes atteintes, notamment celles qui ont effectué des séjours prolongés aux soins intensifs luttant pour leur survie. Des symptômes d’ état de stress post-traumatique ont été ainsi décrits chez des proches avec faible niveau d’ éducation développant de la méfiance face aux soins administrés dans un contexte médical aussi mouvant (16).
Syndrome Post-Covid-19
La Covid-19 peut générer, après la phase aigüe, des symptômes neuropsychiatriques persistants et pouvant être invalidants au quotidien. Cette association de symptômes neuropsychiatriques a été nommé « syndrome post-Covid-19 » ou encore « Covid long ». Il n’ y a pas encore de consensus clair quant aux critères diagnostiques, pronostiques et thérapeutiques de cette entité. Les recommandations du NICE (National Institute for Health and Care Excellence) font référence au syndrome post-Covid-19 en cas de persistance de symptômes 12 semaines après le début de l’ infection, et ne pouvant pas être expliqués par un diagnostic alternatif (17). L’ Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a récemment proposé le qualificatif de «affection post-Covid-19 », qu’ elle définit comme une maladie qui survient chez les personnes qui ont des antécédents d’infection probable ou confirmée par le SARS-CoV-2, survenant habituellement dans les trois mois suivant l’infection, et avec des symptômes qui durent au moins deux mois. Bien que l’ entité Covid long est désormais reconnue comme un syndrome à part entier, les facteurs favorisants et la prise en charge de cette dernière restent encore peu connus (18).
Les principaux symptômes neuropsychiatriques fréquemment retrouvés dans le syndrome post-Covid-19 sont l’ asthénie, les troubles cognitifs, les troubles du sommeil et les symptômes anxiodépressifs (18–20). Une méta-analyse récente a cherché à quantifier plus précisément la prévalence de ces symptômes neuropsychiatriques post-Covid. En se basant sur les critères temporels du NICE, elle a distingué la période entre 3 et 6 mois et celle après 6 mois post-infection. La fatigue, les troubles cognitifs (notamment troubles de mémoire et de l’attention) et les troubles du sommeil étaient les symptômes du syndrome post-Covid-19 les plus présents, et étaient identifiés chez près d’un tiers des patients trois mois après le début de l’ infection. L’ étude relevait que ces symptômes persistaient et étaient encore plus fréquents à long terme (six mois ou plus après l’infection) qu’ à moyen terme (trois à six mois après l’ infection). A contrario, l’anosmie, la dysgueusie et les céphalées, qui sont des manifestations neurologiques courantes lors de la Covid-19, n’étaient pas des symptômes majeurs du syndrome post-Covid-19 (19). Par ailleurs, si les symptômes post-Covid-19 tels que la fatigue et les troubles cognitifs affectent à la fois les patients hospitalisés et non hospitalisés, il n’ est notamment pas encore clair jusqu’ à quel degré la gravité et la durée de l’ infection à son stade aigu sont corrélés à l’ apparition et/ou la sévérité du syndrome post-Covid-19 chez les survivants (18).
Enfin, plus généralement, la fatigue, qu’ elle soit ou non corrélée au syndrome post-Covid-19, est un symptôme récurrent dans le contexte de pandémie, avec un impact économique et social important (20–22). Ainsi, plus de 50 % des patients sortis des soins hospitaliers ont signalé des symptômes de fatigue au cours des deux premiers mois suivant la récupération, et 10% des patients qui n’ ont pas été hospitalisés ont signalé de la fatigue au cours du premier mois après leur guérison (22).
Peur liée au Covid-19
La peur du virus et de ses conséquences semble avoir directement impacté un nombre de personnes pendant la pandémie sanitaire (23). Une méta-analyse s’ est intéressée précisément à l’ association entre la peur de la Covid-19 et une variété de facteurs liés à la santé mentale. Plus précisément, l’ étude s’ est intéressée au lien potentiel entre la peur de la Covid-19 et la dépression, l’anxiété, le stress et les problèmes de sommeil. Il a été retrouvé une association modérée entre le degré de peur du Covid-19 chez un individu et les complications psychologiques qui en découlent. De plus, la peur de la Covid-19 a été associée avec le sexe féminin, la présence d’ un trouble anxieux et la préoccupation excessive par rapport à la santé physique (24).
Plusieurs questionnaires validés permettent d’ évaluer l’impact psychologique de la Covid-19. La FCV-19S (Fear of Covid-19 Scale) est un outil psychométrique permettant d’ estimer, à l’ aide de 7 items, la peur ressentie par le patient en lien à la pandémie de la Covid-19.
Il s’ agit d’ un hétéro-questionnaire simple et rapide (moins de 5 minutes) ayant montré sa fiabilité et sa validité dans l’ évaluation et la quantification du degré de peur du patient (25). Une autre échelle, la C19P-S (Covid-19 phobia scale), consiste en un auto-questionnaire comprenant 20 items et évaluant plus spécifiquement les manifestations de la phobie en lien à la Covid‐19. Il s’ agit d’ une échelle aux propriétés psychométriques robustes qui cible de façon spécifique quatre domaines dans lesquels peut se manifester la phobie de la Covid-19 : psychologique, somatique, économique et social (26). A l’ aide de ces outils, une évaluation plus systématique de la peur en lien à la Covid-19 pourrait permettre une meilleure prévention et prise en charge des complications psychologiques en lien à l’ infection (23, 25, 26).
Perspectives de prise en charge
Plus de deux ans après le début de la pandémie, le constat des complications psychologiques liées à la Covid-19 est éloquent. Après le choc de la première vague, mais aussi des seconde, troisième, et même quatrième vagues dans certains pays, l’ infection et les mesures sanitaires restrictives qui ont suivi ont épuisé les populations et augmenté la prévalence de nombreuses pathologies psychiatriques. Un des moyens qui semble avoir contribué à limiter cette augmentation est le recours à la télémédecine. En effet, l’ accent est de plus en plus mis dans la littérature scientifique sur l’ efficacité des nouvelles méthodes de prise en charge à distance, surtout lors des périodes de confinement ou l’ accès aux soins est fortement impacté. Ainsi donc, la mise en œuvre de la télémédecine a permis une meilleure continuité des soins pendant la pandémie de Covid-19 et a été très utile dans les situations d’urgence (27).
D’ autre part, la dédramatisation des risques par une explication claire et systématique de l’ infection et des mesures sanitaires pourrait permettre de diminuer la peur liée au Covid-19, et donc de diminuer le risque de développer les complications psychologiques qui en découlent (24). L’ activité physique et la pleine conscience ont aussi prouvé leur utilité comme moyens pour lutter contre les complications psychologiques liées à la Covid-19 (28, 29). Les études suggèrent qu’une activité physique plus élevée en cette période de pandémie est associée à un bien-être et à une qualité de vie supérieurs, ainsi qu’à une diminution des symptômes dépressifs et de l’ anxiété, et ce indépendamment de l’ âge. De plus, le sport permettrait d’ améliorer les défenses immunitaires pour lutter contre l’ infection. Ainsi donc, la promotion de l’ activité et de la pleine conscience par les politiques de santé publique apparait primordiale, surtout en période de confinement (28).
Chez les soignants, qui sont particulièrement exposés au risque d’ infection, la bonne utilisation des gestes barrières permettrait de réduire voire prévenir les conséquences psychologiques. Par ailleurs, un dépistage de l’ état de stress post-traumatique et du syndrome d’ épuisement professionnel dans cette population apparait tout spécialement indiqué (12, 14, 30, 31). En médecine de premier recours, l’ utilisation d’ outils psychométriques tels que le MBI (Maslach Burn Out Inventory) et le PCL-5 (Post-Traumatic Stress Disorder Checklist for DSM-5) peuvent aider à ce dépistage (32, 33). De façon plus générale, l’ usage des outils de dépistages des maladies psychiatriques en majoration depuis la pandémie est conseillé (34).
Enfin, les études ont montré que les interventions psychologiques avaient un bénéfice statistiquement significatif dans la gestion de la dépression et de l’anxiété pendant la pandémie. Des programmes s’appuyant sur une base psychothérapeutique éprouvée (telle que la thérapie cognitivo-comportementale) doivent être spécifiquement conçus pour lutter contre la peur de la Covid-19 et des symptômes anxiodépressifs associés (30, 31, 35).
Copyright Aerzteverlag medinfo
Dr M’ hiri Taher
Chemin de Champ-Dollon 20
1241 Puplinge
tmhi@hcuge.ch
Pr Panteleimon Giannakopoulos
Service des mesures institutionnelles
Direction médicale et qualité
Hôpitaux universitaires de Genève
Avenue Rosemont 12b
1208 Genève
panteleimon.giannakopoulos@hcuge.ch
Les auteurs déclarent n’ avoir aucun conflit d’ intérêt en rapport avec cet article.
◆ De nombreuses pathologies psychiatriques ont vu leur prévalence augmenter dans le contexte de la pandémie de la Covid-19.
◆ Une augmentation des taux de prévalence du burnout et de l’ état de stress post-traumatique a été retrouvée chez les professionnels de la santé suite à la pandémie.
◆ Les symptômes neuropsychiatriques retrouvés fréquemment dans le syndrome post-Covid-19 sont l’ asthénie, les troubles cognitifs, les
troubles du sommeil et les symptômes anxiodépressifs.
◆ Il a été retrouvé une association modérée entre le degré de peur du Covid-19 chez un individu et les complications psychologiques qui en découlent.
◆ La mise en œuvre de la télémédecine a permis une meilleure
continuité des soins pendant la pandémie de Covid-19.
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Le traitement médicamenteux de l’ insuffisance cardiaque avec fonction systolique réduite (heart failure with reduced ejection fraction, HFrEF) a considérablement évolué au cours des dernières années. Désormais, chez tous les patients avec HFrEF, l’ objectif est d’ instaurer au plus vite un traitement de base dit des quatre piliers qui se compose d’un inhibiteur de l’ enzyme de conversion de l’ angiotensine (IECA), d’ un bêtabloquant, d’ un antagoniste du récepteur des minéralocorticoïdes (ARM) et d’ un inhibiteur du cotransporteur 2 du glucose sodique (SGLT2-I). Ce n’ est que par la suite que l’ on procède au titrage de ces piliers thérapeutiques et qu’ on remplace l’ IECA par l’inhibiteur du récepteur de l’ angiotensine et de la néprilysine (ARNI). En fonction de l’ effet de ces étapes de médication, des options médicamenteuses et non médicamenteuses supplémentaires seront à évaluer. L’ article présent aborde en particulier les aspects pratiques importants de la mise en œuvre des nouvelles directives thérapeutiques.
Drug therapy options for patients with heart failure with reduced ejection fraction (HFrEF) have increased substantially over the past years. The latest proposed therapy concept consists of a basic quadruple therapy including low doses of an angiotensin converting enzyme inhibitor (ACE-I), a betablocker, a mineralocorticoid receptor antagonist (MRA) and a sodium glucose co-transporter-2 inhibitor (SGLT2-I). Only after establishing all four therapy pillars, the drugs are up-titrated, and the ACE-I is changed to an angiotensin receptor neprilysin inhibitor (ARNI). Depending on the response to the quadruple therapy additional therapeutic options need to be considered. This article discusses practical aspects of implementing the new therapeutic guidelines. Key Words: heart failure with reduced ejection fraction (HFrEF), quadruple therapy
Vignette clinique
Un homme de 48 ans, sans antécédents médicaux et sans médication préalable, se présente au cabinet médical en raison d’ une dyspnée d’ effort progressive depuis quelques semaines. Il a en outre constaté un œdème bilatéral des chevilles et une prise de poids de 3 kg en deux semaines. La tension artérielle mesurée au cabinet médical est à 152/86 mmHg, avec une fréquence cardiaque de 97/min. À l’ examen clinique, des œdèmes des chevilles sont confirmés des deux côtés, et un reflux hépato-jugulaire positif est observé. Des râles crépitants sont présents au niveau pulmonaire basal bilatéral. L’ auscultation cardiaque est sans particularité. L’ électrocardiogramme montre un rythme sinusal avec des troubles discrets de la repolarisation en V4-V6. Le laboratoire révèle une fonction rénale normale avec une créatinine de 96 µmol/l et un potassium normal de 4,1 mmol/l. Le NT-proBNP est élevé à 1075ng/l.
En raison d’ une forte suspicion d’ insuffisance cardiaque avec des signes de surcharge volémique, un traitement diurétique oral est débuté et le patient est adressé au cardiologue pour une échocardio-graphie. Cet examen révèle une fraction d’ éjection du ventricule gauche (FEVG) massivement diminuée à 28 % avec une hypokinésie diffuse et le ventricule gauche dilaté. Il n’ y a pas de lésions valvulaires significatives.
Des causes spécifiques pour l’ insuffisance cardiaque sont ensuite exclues par des examens de laboratoire, une IRM cardiaque et une angio-CT coronarienne. Le patient nie l’ usage de toxines, les antécédents familiaux sont vierges en ce qui concerne des cardiomyopathies. Le diagnostic de cardiomyopathie dilatée d’ étiologie indéterminée est posé et un traitement doit maintenant être mis en place.
Introduction
Le traitement médicamenteux de l’ insuffisance cardiaque dépend de manière décisive de la fraction d’ éjection du ventricule gauche (FEVG), même si celle-ci n’est pas le paramètre optimal pour évaluer la fonction systolique du ventricule gauche.
Dans les nouvelles lignes directrices 2021 de la Société Européenne de Cardiologie (ESC) sur l’ insuffisance cardiaque (1), des modifications mineures ont été apportées à la définition des trois phénotypes d’ insuffisance cardiaque précédents (fig. 1). Il convient de noter que des symptômes +/- signes cliniques sont toujours nécessaires pour établir le diagnostic d’ une insuffisance cardiaque. Désormais, les trois phénotypes sont définis comme suit:
1. insuffisance cardiaque avec FEVG réduite ≤40 % (Heart Failure with reduced Ejection Fraction, HFrEF).
2. insuffisance cardiaque avec FEVG légèrement réduite de 41 % à 49 % (Heart Failure with mildly reduced Ejection Fraction, HFmrEF).
3. insuffisance cardiaque avec fraction d’ éjection préservée de ≥50 % et des signes supplémentaires de cardiopathie structurelle et/ou des signes d’ une pression de remplissage augmentée, respectivement d’ une dysfonction diastolique de plus haut degré (Heart Failure with preserved Ejection Fraction (HFpEF).
Par conséquent, une échocardiographie est donc toujours nécessaire pour poser le diagnostic précis d’ une insuffisance cardiaque.
Pour le phénotype HFrEF, il existe de nombreux médicaments qui améliorent le pronostic, mais la thérapie des quatre piliers constitue désormais la base. C’ est elle qui est abordée dans cet article.
Des analyses post hoc d’ « études HFpEF » (incluant typiquement non seulement des patients avec une FEVG ≥50 %, mais aussi des patients avec une FEVG allant jusqu’ à 40 %) indiquent que les médicaments efficaces dans les HFrEF le sont également chez les patients avec HFmrEF.
Une première étude conclusive sur l’ HFpEF publiée récemment (2) a démontré un bénéfice pronostique d’ une thérapie avec l’ empagliflozine (inhibiteur du SGLT2) versus placebo. Le bénéfice était plus important en cas de FEVG « plus basse ». Comme cette étude a été publiée en même temps que les nouvelles directives, elle n’ a pas encore été prise en compte.
Principe du traitement de l’ HFrEF
Outre la mise en route d’ un traitement médicamenteux de l’ insuffisance cardiaque, il convient de rechercher et, si possible, de traiter les causes spécifiques de l’ insuffisance cardiaque, comme indiqué dans la vignette clinique (par ex. maladie coronarienne, tachycardie, valvulopathie, hémochromatose, hypothyroïdie, consommation excessive d’ alcool). De plus, une éducation optimale des patients en ce qui concerne la compréhension de la maladie et de la médication ainsi que les changements de comportement sont essentiels pour optimiser l’ observance et le pronostic. Jusqu’ à présent, le traitement médicamenteux de l’ HFrEF suivait un schéma par paliers (3), en utilisant un inhibiteur de l’ enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA) (ou un antagoniste du récepteur de l’angiotensine (ARA) en cas d’ intolérance à l’ IECA) et un bêtabloquant. Les doses devaient être titrées si possible jusqu’ à la dose cible. Uniquement si la FEVG ≤35 % et la dyspnée NYHA ≥ II persistaient, on ajoutait comme palier suivant un antagoniste du récepteur aux minéralocorticoïdes (ARM), qui devait alors également être titré jusqu’à la dose cible.
Désormais, à la place de ce schéma clair par paliers, déjà dès le départ et indépendamment de la réponse à l’ IECA et/ou au bêtabloquant, un traitement de base comportant quatre piliers est recommandé. Un inhibiteur du co-transporteur 2 du glucose sodique (SGLT2-I) est inclus en plus des substances citées (IECA, bêtabloquant, ARM) (1). Dans des études à grande échelle contrôlées contre placebo, les deux SGLT2-I dapagliflozine (4) et empagliflozine (5) montraient un bénéfice significatif net sur le critère d’ évaluation combiné décès et hospitalisations pour cause d’ insuffisance cardiaque, ceci principalement en raison d’ une réduction des hospitalisations par rapport au placebo. Un bénéfice significatif pour la mortalité n’ a pu être observé, à proprement parler, que pour la dapagliflozine (4). Ces quatre piliers thérapeutiques – tous avec une recommandation thérapeutique de classe I – sont à administrer en parallèle et à de faibles doses le plus tôt possible à tous les patients HFrEF. Ce n’ est qu’ ensuite que les différents piliers sont titrés et que l’ IECA est remplacé, si possible, par l’ inhibiteur du récepteur de l’ angiotensine et de la neprilysine (ARNI) (fig. 2).
La question de savoir si l’ on ne peut pas aussi commencer directement par l’ ARNI fait souvent l’ objet de controverses. L’ utilisation de l’ ARNI après l’ établissement préalable d’ un IECA correspond à la procédure de l’ étude PARADIGM-HFS (6), qui a démontré le bénéfice de l’ ARNI par rapport à l’ IECA. Un début direct avec un traitement ARNI peut être envisagé chez les patients hospitalisés : Il a été démontré que cette manière de pratiquer produit une réduction plus importante du NT-proBNP que l’ IECA et qu’ elle est sûre (7). Cette étude (PIONEER-HF) était cependant trop petite pour fournir des données significatives sur l’ outcome. Par conséquent et compte tenu des données, il est logique de classifier cette procédure comme une recommandation de classe IIb (« may be considered »). Néanmoins, contrairement aux directives européennes, les directives américaines sur l’ insuffisance cardiaque recommandent l’ ARNI comme traitement de première ligne (8).
En Suisse, il faut également tenir compte du fait qu’ il existe une limitation des assurances maladie de base pour le remboursement de l’ association de l’ ARNI avec un SGLT2-I chez les patients non diabétiques, jusqu’ à l’ automne 2022 au moins. D’ un point de vue médical, cette position est incompréhensible, car rien ne prouve que les inhibiteurs de SGLT-2 soient moins efficaces en cas de traitement de fond par l’ ARNI.
La nouvelle stratégie des quatre piliers repose sur l’ hypothèse disant qu’ il est important d’ inhiber le plus tôt possible les quatre voies physiopathologiques (« pathways »), même si les doses maximales ne devaient pas être atteintes pour toutes les substances (9, 10). Il est important de réaliser que les quatre piliers ne constituent non seulement un traitement des symptômes, mais aussi une thérapie qui améliore fortement le pronostic. Étant donné que l’ insuffisance cardiaque, aujourd’ hui encore, a un mauvais pronostic (parfois même pire que de nombreuses maladies tumorales), la mise en place entière du traitement de l’ insuffisance cardiaque est essentielle (11).
Si, après l’ établissement et le dosage optimal du traitement de base, la FEVG persiste à ≤35 % avec une symptomatologie NYHA ≥ II, d’ autres étapes thérapeutiques entrent en jeu. Il s’ agit notamment de thérapies « à l’ aide de dispositifs » (notamment la thérapie de resynchronisation (CRT) ainsi que les défibrillateurs (ICD)) et d’ autres options médicamenteuses pour le traitement de l’ insuffisance cardiaque jusqu’ à des dispositifs d’ assistance ventriculaire gauche et une transplantation cardiaque en cas d’ insuffisance cardiaque avancée (fig. 2). Si par contre, avec le traitement de base des quatre piliers, la FEVG s’ améliore à >35 % et que le patient ne présente plus de symptômes, il n’ y a aucune indication pour une extension du traitement. Toutefois, le traitement établi ne doit pas être réduit ou même arrêté (sauf en cas d’ effets secondaires). Cela entraînerait une nouvelle aggravation de l’ insuffisance cardiaque dans une proportion importante des patients (12).
La mise en place de la thérapie de base des quatre piliers dans la pratique quotidienne
Les lignes directrices n’ expliquent pas concrètement comment le traitement des quatre piliers doit être mis en place dans la pratique quotidienne. Les experts recommandent de commencer la thérapie avec tous les quatre piliers, et d’ arriver à leur titrage en l’ espace de 6 semaines (13). Cependant, dans la pratique, souvent cela ne peut pas être atteint si rapidement. Nous recommandons d’ administrer, dans la prise en charge ambulatoire, les quatre substances en l’ espace de 3 à 4 semaines au maximum, en commençant par un faible dosage, et d’ augmenter les doses par la suite. En milieu hospitalier, les quatre piliers devraient être établis à la sortie, au moins dans un dosage faible (fig. 2).
La séquence exacte de l’ instauration est également laissée en suspens dans les guidelines. Elle doit se faire en fonction des facteurs spécifiques au patient. Ci-après, quelques exemples de scénarios et les réflexions correspondantes concernant la mise en route du traitement :
1. Tension artérielle normale/haute au départ, fonction rénale et potassium normaux : cela favorise un début de traitement avec une dose déjà relativement élevée d’ un IECA en combinaison avec un ARM. Ensuite, un bêtabloquant à faible dose est administré. Le SGLT2-I peut y être combiné à tout moment.
2. Tension artérielle initialement basse et FEVG très limitée : ici on peut commencer le traitement par un IECA à très faible dose et un SGLT2-I, avant d’ajouter au fur et à mesure un bêtabloquant à très faible dose et l’ ARM.
3. Fonction rénale initialement nettement réduite et FEVG modérément réduite : cela favorise le début du traitement par un SGTL2-I (à condition que eGFR >20ml/min/1.73m2) et un bêtabloquant à faible dose. En fonction de l’ évolution de la fonction rénale et du potassium, un IECA à faible dose et, si possible enfin, un ARM sont ajoutés.
Le patient de la vignette clinique, avec les caractéristiques et les résultats décrits, correspond le mieux à l’ exemple du scénario 1. Par conséquent, son traitement a été initié par un IECA et un ARM pratiquement en même temps pour être complété dans les 10 à 14 jours sans problème avec un bêtabloquant à faible dose et un SGTL2-I.
Titration du traitement de base des quatre piliers et passage de l’ IECA à l’ ARNI dans la pratique quotidienne
Une fois les quatre piliers thérapeutiques introduits, trois d’ entre eux (l’ IECA, le bêtabloquant, l’ ARM) doivent être titrés jusqu’ aux doses cibles respectives ou à la dose maximale tolérée (fig. 3). Les deux médicaments SGLT2-I autorisés en Suisse, empagliflozine et dapagliflozine, sont administrés à une dose fixe de 10mg/d et ne sont pas à titrer. Mais seulement la dapagliflozine figure sur la liste des spécialités dans cette indication sans diabète sucré présent, (4, 5). L’ objectif est d’ ajuster la posologie de l’ IECA et de l’ ARM en surveillant la clinique, la créatinine et le potassium tous les 14 jours (14).
En milieu hospitalier avec de meilleures possibilités de surveillance, cela doit se faire plus rapidement. Il n’ est pas rare que le titrage de ces deux piliers thérapeutiques ne soit possible que de manière limitée. Les facteurs suivants y jouent un rôle important (14) :
1. L’ hypotension : elle survient surtout chez les patients sans hypertension préexistante et ne doit pas conduire d’ emblée à une réduction du traitement de l’ insuffisance cardiaque. Les valeurs tensionnelles hypotensives asymptomatiques peuvent être admises sans modification de la médication (sauf éventuellement réduction du dosage des diurétiques). En cas d’ hypotension symptomatique, les antihypertenseurs qui n’ apportent aucun bénéfice à l’ insuffisance cardiaque doivent être arrêtés en premier lieu (par ex. l’ amlodipine, les nitrates, les alpha-bloquants), et un éventuel traitement diurétique doit être limité au dosage minimal nécessaire au maintien d’ une normovolémie. Ce n’ est qu’ en cas d’ hypotension symptomatique persistante qu’ une réduction de la dose de l’ IECA/ARM est nécessaire, au moins temporairement. Chez les patients avec indication pour une CRT, un tel appareil doit être implanté précocement, car il peut conduire à une augmentation de la pression artérielle via l’ amélioration du débit cardiaque, et ainsi permettre une extension ultérieure du traitement. 2. L’ Insuffisance rénale : en principe, une augmentation de la créatinine en cas d’ amélioration clinique ne doit pas entraîner une réduction du traitement. Les directives recommandent de tolérer une augmentation de la créatinine de 50 % par rapport à la ligne de base ou jusqu’ à 266 µmol/l (ou eGFR 25 ml/min/1.73 m2) avant de modifier la dose d’ IECA, d’ ARA ou d’ ARNI (1). Si la créatinine est supérieure à 100% de la ligne de base ou à 310 µmol/l (ou eGFR <20 ml/min/1.73 m2), le traitement par IECA, ARA ou ARNI doit être arrêté (1). Il s’ agit-là seulement de valeurs indicatives et la procédure exacte dépend du setting correspondant. Dans tous les cas, le statut volumique doit être clarifié (soit hypovolémie, soit hypervolémie, toutes deux peuvent entraîner une détérioration de la fonction rénale), et d’ éventuels médicaments néphrotoxiques (p. ex. AINS) doivent être remplacés par d’ autres analgésiques. 3. L’ Hyperpotassémie : L’ ARM en particulier peut entraîner une hyperkaliémie importante (surtout en cas d’ insuffisance rénale concomitante). Une augmentation du potassium jusqu’ à 5.5 mmol/l peut être tolérée sous surveillance adéquate. En cas de valeurs de potassium de 5,5-6 mmol/l, il faut réduire la dose de l’ ARM, et si le potassium est >6 mmol/l, il faut l’ arrêter. Par ailleurs, d’ autres stratégies de réduction du potassium doivent également être évaluées. Il s’ agit notamment de remplacer l’ IECA par l’ ARNI (ce dernier entraîne une augmentation légèrement moins importante du potassium (15)), de donner en dose fixe un diurétique de l’ anse (une hypovolémie doit absolument être évitée) ou d’ utiliser de nouveaux chélateurs du potassium comme le patiromère (cave : limitation pour l’ indication) (16) afin de réduire le potassium sérique et permettre un traitement par IECA/ARM maximal.
L’ augmentation du dosage du bêtabloquant doit se faire avec prudence, en particulier chez les patients avec une FEVG sévèrement altérée, afin de minimiser notamment le potentiel effet inotrope négatif. Un doublement de la dose ne devrait pas se faire plus rapidement que toutes les 2 semaines, voire même plus. En principe, il est essentiel aussi pour le bêtabloquant de viser le dosage le plus élevé possible. L’ effet pronostique en cas d’ HFrEF est proportionnel à la réduction de la fréquence cardiaque ou inversement proportionnel à la fréquence cardiaque atteinte sous traitement, la fréquence cardiaque cible au repos étant <70/min. Un effet thérapeutique indépendant de la fréquence cardiaque est toutefois toujours présent. La dose ne doit être réduite que lors d’ apparition sous traitement bêtabloquant d’ une bradycardie symptomatique avec une fréquence cardiaque <50/min (ou un bloc AV de degré supérieur).
Après le titrage des piliers susmentionnés le passage précoce et si possible standard de l’ IECA à l’ ARNI s’ impose, s’ il existe encore au moins une symptomatologie NYHA II. Lors du passage d’ un IECA à l’ ARNI, une pause thérapeutique de 36 heures doit être observée en raison du risque d’ angio-œdème. Lors du passage d’ un ARA à l’ ARNI, cette pause thérapeutique n’ est pas nécessaire. Si un IECA a été toléré à au moins la moitié de la dose cible, on peut commencer par le sacubitril/valsartan 2x100mg/d et passer à 2x200mg après 2 semaines. Sinon, la dose de départ est de 2x50mg/d. La réduction de la pression artérielle sous sacubitril/valsartan peut être plus importante que sous IECA (6). Cependant, même chez les patients avec une pression artérielle relativement basse le changement de médicaments doit être effectué. La réduction absolue du risque de décès cardiovasculaire ou d’ hospitalisation pour insuffisance cardiaque dans ce groupe de patients est particulièrement élevée si l’ ARNI est utilisé avec succès (17). Pourtant, l’ introduction doit se faire à très faible dose et de manière lente.
Chez le patient de la vignette clinique initiale, l’ ensemble du traitement des quatre piliers a pu être mis en œuvre jusqu’ aux doses cible et l’ IECA remplacé avec succès par l’ ARNI. La FEVG s’ est améliorée de manière substantielle. Elle a été évaluée à 40 % lors de l’ échocardiographie de suivi après 6 mois de traitement. Le patient ne présente plus de symptômes cardiaques. La poursuite du traitement sans réduction des doses est maintenant essentielle.
Dr méd. Marc Buser
Dr méd. Christian Gall
Dre méd. Eva Scheler
Pr Dr méd. Hans Rickli
Pr Dr méd. Micha T. Maeder
Clinique de Cardiologie, Hôpital Cantonal de St. Gall
Rorschacherstrasse 95, 9007 St. Gall
Correspondance : micha.maeder@kssg.ch
Article traduit de « der informierte arzt » 04-2022
Copyright Aerzteverlag medinfo AG
Dr méd. Marc Buser
Clinique de Cardiologie
Hôpital Cantonal de St. Gall
Rorschacherstrasse 95
9007 St. Gall
Pr Dr méd. Micha T. Maeder
Clinique de Cardiologie
Hôpital Cantonal de St. Gall
Rorschacherstrasse 95
9007 St. Gall
micha.maeder@kssg.ch
Les auteurs n’ ont déclaré aucun conflit d’ intérêt en relation avec cet article.
◆ Le traitement médicamenteux moderne de l’ insuffisance cardiaque avec fonction systolique réduite (HFrEF) consiste en un traitement de base à quatre piliers, efficace sur le plan pronostique et symptomatique.
◆ Les quatre piliers thérapeutiques doivent d’ abord être établis en
parallèle à faible dose et ne seront titrés qu’ ensuite à la dose cible
respective. Ensuite, on passe de l’IECA à l’ARNI.
◆ Si la FEVG ≤35 % persiste sous traitement de base établi, avec une dyspnée NYHA ≥II, d’ autres options doivent être envisagées (thérapies à l’ aide de dispositifs, autres possibilités de traitement médicamenteux et non médicamenteux).
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Les médicaments à activité anticholinergique sont utilisés chez le patient âgé dans un large éventail d’ indications et sont associés à une palette d’ événements indésirables centraux et périphériques. L’ estimation de la charge anticholinergique sur la base d’ échelles permet d’ identifier les patients à risque et proposer des interventions sur la (dé)-prescription. Bien que toutes les échelles soient de qualité variable, leur utilisation dans la révison médicamenteuse est indispensable en prévention de la iatrogénie.
Drugs with anticholinergic activity are used in the older population in a wide range of indications and are associated with a variety of central and peripheral adverse events. Estimation of anticholinergic load on the basis of scales allows the identification of patients at risk and proposes interventions on (de)-prescription. Although all scales are of variable quality, their use in medication review is essential in preventing iatrogenicity. Key Words: anticholinergic burden scale, adverse drug event, geriatric population, medication review
Les médicaments à activité anticholinergique : à risque chez le patient âgé
Les médicaments dits « à activité anticholinergique » comprennent des médicaments utilisés intentionnellement pour leur action anticholinergique (anti-ACh), comme l’ atropine, et d’ autres qui ne sont pas catégorisés comme des anti-ACh, tels les antihistaminiques, les antipsychotiques et certains antidépresseurs (tab. 1). D’ un point de vue pharmacologique, les médicaments anti-Ach sont des antagonistes muscariniques dont il existe cinq sous-types de récepteurs (1). Les récepteurs M2 et M3 se situent davantage dans la périphérie, comme le cœur et la vessie, et les récepteurs M1, M4 et M5 se retrouvent principalement dans le cerveau, où ils jouent un rôle crucial dans les fonctions cognitives et la mémoire (2).
Alors que les patients âgés sont largement exposés aux médicaments à activité anti-ACh, ceux-ci sont particulièrement susceptibles de subir leurs effets indésirables, notamment en raison de la diminution des fonctions rénales et hépatiques, d’ une augmentation de la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique (BHE) et d’ une hypersensibilité anticholinergique qui accroît leur vulnérabilité (3-4). Les effets indésirables peuvent être périphériques (sécheresse buccale, atonie intestinale, rétention urinaire) et centraux (confusion, troubles de la mémoire, vertiges, chutes, insomnie) selon la capacité du médicament à passer la BHE (5). Une claire association entre ces médicaments et le délirium, les chutes, les troubles cognitifs et une mortalité accrue a été démontrée chez des patients âgés de 65 ans et plus (6-7). A noter que les résidents des maisons de retraite consomment beaucoup plus de médicaments anticholinergiques que les personnes âgées vivant à domicile et que la prescription augmente avec l’ admission à l’ hôpital (8-11).
Les différentes facettes de la mesure de l’ activité anticholinergique des médicaments
La quantification de l’ activité anticholinergique d’ un médicament peut être déterminée par plusieurs approches, dont la détermination in silico de la relation structure-activité sur les différents sous-types de récepteurs muscariniques, les analyses de liaisons aux récepteurs, tel que le SAA (serum radioreceptor anticholinergic activity assay) sur des échantillons de sang de patients, ou sur la base de la surveillance in vivo des effets indésirables induits par des médicaments anti-ACh (1). A l’heure actuelle 19 échelles de charge anticholinergique établies par des consensus d’ experts et basées sur ces différentes sources d’ information ont été développées au cours des dernières décennies pour guider la (dé)-prescription chez le patient âgé (12). Ces échelles attribuent généralement un score de 1 à 3 pour une faible et forte activité anticholinergique, respectivement, sur la base d’ une seule ou en combinant différentes approches de mesure, ce qui se traduit par une concordance faible à moyenne entre les différents échelles (corrélation de 0,60 à 0,82) (12). Une récente revue systématique a relevé des différences marquées dans la qualité de ces échelles, notamment en ce qui concerne la dose/concentration nécessaire à l’ effet antagoniste, le type de sous-récepteur le plus affecté, les aspects de lipophilie, de perméabilité de la BHE et la capacité à être transporté hors du cerveau par les pompes d’ efflux (PgP), qui ne sont pas systématiquement pris en considération (13). Parmi les 19 échelles évaluées, l’ échelle ACB (anticholinergic cognitive burden) (14) et le GABS (German anticholinergic burden scale) (15) ont atteint la meilleure évaluation globale, définie par la rigueur dans le développement de l’ échelle, la clarté de présentation et l’ applicabilité en clinique.
Bénéfice clinique des échelles de mesure de l’ activité anticholinergique des médicaments
La plupart des 19 échelles ont été validées en termes d’ efficacité clinique, en particulier pour la prédiction du risque de délirium, sur la cognition, les chutes et la mortalité (13). Globalement, les résultats indiquent une association positive, avec des évidences parfois contradictoires entre études, probablement en raison de leur qualité variable, de la grande hétérogénéité des populations étudiées et du design sous-optimal de la majorité d’ entre elles pour la détection des effets indésirables médicamenteux (13). Une seule méta-analyse évaluant l’ association entre la charge anticholinergique déterminée par les échelles ACB et ARS (Anticholinergic Risk Scale) et la mortalité toutes causes confondues a indiqué une tendance à une association positive malgré une hétérogénéité significative des études (16).
Les études récentes conduites dans diverses populations de patients indiquent qu’ un score cumulatif de 3 points et plus de charge anticholinergique mesuré avec n’ importe quelle échelle est l’ élément déterminant du risque de délirum, d’ une augmentation de la mortalité hospitalière et de la durée des séjours hospitaliers (17-19). Une étude de cohorte comparant la capacité prédictive de 19 échelles sur la mortalité et de la durée d’ hospitalisation indique qu’ une charge anticholinergique élevée à l’ admission (score≥3) était associée à une augmentation de 1,32 à 3,03 fois de la mortalité hospitalière par rapport une charge nulle ou faible (20). Parmi les 19 échelles étudiées, l’ Anticholinergic Toxicity Scale (ATS) (21) a montré l’ association la plus forte. Cette échelle a l’ avantage de mesurer l’ activité inhibitrice pour chaque sous-type de récepteur muscarinique et permet par conséquent une prédiction plus ciblée des effets indésirables (13).
Réduction du fardeau anticholinergique en prévention de iatrogénie
Le « fardeau anticholinergique » est défini comme l’ effet cumulatif de la prise d’ un ou de plusieurs médicaments susceptibles d’ induire des effets indésirables de l’ ACh (22). La première étape du calcul de la charge en ACh consiste à identifier tous les médicaments à activité anti-ACh, puis à additionner le score de chaque substance (fig. 1). Le score obtenu permet d’ identifier les patients présentant un risque élevé d’ effets indésirables. A noter toutefois que les échelles se basent sur une simple addition du score 1, 2 ou 3 de chaque médicament pour établir le fardeau anticholinergique global chez un patient polymédiqué sans qu’ aucun élément ne permette de déterminer si l’ effet anticholinergique cumulé peut se traduire par une simple addition des scores, comme c’ est généralement proposé.
En pratique clinique, nous recommanderions l’utilisation des échelles récentes comportant un plus large panel de médicament lors de toute révision médicamenteuse chez le patient âgé (13). Des articles de revue proposant des listes de médicaments avec leur score anti-ACh tirés de toutes les échelles, et des calculateurs (http://www.acbcalc.com/; https://medichec.com/; https://www.anticholinergicscales.es/) sont des sources d’information utiles et pratiques (5, 23-24). A l’ hôpital et dans les établissements de soins, l’ élaboration par une équipe interprofessionnelle de médecins, pharmacien.nes et infirmier.ères d’ une liste personnalisée de médicaments avec leur score anticholinergique offrant des conseils clairs sur les alternatives possibles aurait un impact positif sur la diminution du risque iatrogène lié aux effets sur le système cholinergique. L’ arrêt des médicaments ayant des propriétés anticholinergiques élevée à l’ admission pourrait être une intervention ciblée pour réduire la mortalité hospitalière et la durée de séjour (20).
Lors de la révision médicamenteuse, une attention particulière doit être portée sur les médicaments à haute activité anti-Ach (niveau 3)
ou si le cumul des médicaments conduit à une charge anticholinergique de 3 et plus. Les anti-ACh de niveau 3 sont à éviter dans la mesure du possible au profit de médicaments avec moins d’ effet anticholinergique ou être prescrit à la plus faible dose efficace et pour une courte durée, bien que l’ efficacité cette intervention n’ ait pas été formellement établie. Au sein d’ une même classe, des différences de tolérance important existent entre substances d’ un point de vue de leur tropisme vers le cerveau dépendant de leur lipophilie et de leur capacité à se fixer à la PgP. Les anti-ACh de niveau 2 doivent être prescrits avec prudence et nécessitent une évaluation des autres facteurs de risque du patient (troubles de la marche, insuffisance rénale, cognition, continence). Le risque des molécules de niveau 1 est plus faible mais devient élevé en présence d’ un cumul de substances à activité anti-ACh. En présence de symptômes susceptible d’ être mise en lien avec un effet anti-ACh potentiel, une révision médicamenteuse doit alors rechercher la prescription d’ une molécule à effet anti-ACh. Il convient de mentionner que les effets indésirables délétères sur le SNC dans la population vieillissante ne sont pas uniquement liés à la charge de l’ ACh, mais sont probablement multifactoriels. L’ ACh est l’ une des composantes à prendre en compte lors de l’ évaluation du risque d’ effets médicamenteux liés au SNC.
Conclusion
Bien qu’ aucune des échelles n’ apportent l’ ensemble des éléments nécessaires à l’ identification du risque lié à une charge anticholinergique élevée, ces échelles restent des outils simples, rapides et utiles pour mesurer le fardeau anticholinergique. Sa détermination par L’estimation de la charge anti-ACh est indispensable lors de la révision des traitements en raison des nombreux effets indésirables et la morbi-mortalité qui lui est associée.
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Pre Chantal Csajka
Centre de Recherche et d’ Innovation en Sciences Pharmaceutiques
Cliniques
Centre Hospitalier Universitaire et Université de Lausanne
Rue du Bugnon 17
1011 Lausanne
Chantal.Csajka@chuv.ch
Angela Lisibach, PhD
pharmacienne diplômée
Service de Pharmacie, Département des Services Médicaux
Hôpital Cantonal de Baden
Im Ergel 1
5404 Baden
angela.lisibach@ksb.ch
Monika Lutters, PhD
pharmacienne-cheffe
Service de Pharmacie, Département des Services Médicaux
Hôpital Cantonal de Aarau
Tellstrasse 25
5001 Aarau
monika.lutters@ksa.ch
Les auteures déclarent n’ avoir aucun conflit d’ intérêt en rapport avec cet article.
◆ Il existe environ 19 échelles de mesure reconnues comme les seuls outils cliniquement utiles pour mesurer la charge anti-Ach au niveau central.
◆ Malgré certaines limitations, leur utilisation pour déterminer la charge anti-ACh cumulée de l’ensemble du traitement d’un patient est bénéfique dans la prévention de la iatrogénie, en particulier du délirium, des chutes, des troubles cognitifs et dans la diminution de la mortalité.
◆ Un score de charge anticholinergique cumulé de 3 points et plus est considéré comme élevé et doit être réduit en substituant des médicaments ayant une activité anti-ACh moindre.
◆ La détermination de la charge anti-ACh est recommandée en amont de toute prescription, lors d’une démarche de révision des traitements ou lors de la survenue d’un effet indésirable pouvant être expliqué par un effet anti-ACh comme, par exemple, une confusion, un trouble cognitif, une rétention urinaire, une chute.
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