ABI et risque cardiovasculaire

L’  ankle-brachial index (ABI), appelé aussi index cheville-bras voire index de pression systolique, permet de poser le diagnostic d’ artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI), et est un marqueur puissant de maladies cardiovasculaires. La pertinence clinique de cet index permet au médecin traitant de suivre avec une attention particulière surtout les patients âgés, souvent peu symptomatiques du fait d’ une mobilisation limitée, mais à haut risque de complications. Le risque évolutif vers des événements cardiovasculaires majeurs (major adverse cardiovascular events, MACE), ainsi des événements majeurs aux membres inférieurs (major adverse limb events, MALE) est réel. Nous ne traiterons pas de la prise en charge de l’ AOMI, mais proposerons des notions récapitulatives sur l’ utilité et l’ interprétation de la mesure de l’ ABI, thème principal de cet article.

L’ ABI correspond au rapport entre la pression systolique la plus élevée mesurée par Doppler continu au niveau pédieux et tibial postérieur, et la valeur tensionnelle systolique la plus haute au niveau huméral. Il est primordial de mesurer la pression humérale bilatéralement, une asymétrie significative pouvant témoigner d’ une sténose sous-clavière même asymptomatique. La valeur de l’ ABI serait erronée en cas d’ utilisation de la pression la plus basse.
Les études ont montré que la mesure de l’ ABI est en principe reproductible (1) . Toutefois, comme pour tout examen opérateur-dépendant, l’ expérience est un facteur déterminant pour une mesure fiable et précise, ceci en particulier chez des patients avec une atteinte oblitérante significative. Le personnel non expérimenté devra s’ entraîner au-delà de quelques essais, même après supervision initiale par un spécialiste (2).

ABI et diagnostic d’ AOMI

Le tableau 1 détaille la correspondance clinique en fonction des valeurs de l’ ABI. Une valeur d’ ABI inférieure ou égale à 0.90 est retenue comme posant le diagnostic d’ AOMI. Des études ont montré une excellente spécificité et une bonne sensibilité, par rapport à l’ angiographie montrant des lésions sténosantes (3). Un ABI est considéré normal entre cette valeur et 1.40 (4). Des valeurs supérieures témoignent d’ une rigidité artérielle, la pression de compression à la cheville étant supérieure à la pression effective dans le vaisseau. La médiacalcose, qui se manifeste principalement en cas de diabète et d’ insuffisance rénale terminale, en est l’ une des causes. Elle n’ est pas en elle-même à l’ origine de sténose intraluminale, mais peut sans autre être associée à une condition oblitérante athéromateuse.
Une valeur d’ ABI dans la norme ne permet pas d’ exclure formellement une AOMI. Une rigidité artérielle débutante peut surestimer partiellement la pression distale. La concordance de la valeur de l’ ABI avec la morphologie des courbes Doppler permettrait de mieux nuancer cet aspect. Toutefois, cette notion nécessiterait d’ analyser des courbes spectrales en plus de la valeur tensionnelle systolique mesurée pour le calcul de l’ ABI. En cas de diabète et/ou d’ insuffisance rénale chronique, la prudence d’ interprétation d’ un ABI dans la norme est donc de mise. Dans ces conditions, la mesure de l’ index orteil/bras (toe/brachial index, TBI) est précieuse. En effet, les artères digitales sont rarement touchées par des calcifications (3), et la valeur de pression mesurée correspond à celle effective dans le vaisseau. Une valeur du TBI inférieure à 0.70 est considérée comme pathologique. Une étude récente a montré que, sur 3760 patients inclus, le 20.5% avait un ABI dans la norme mais un TBI diminué (5). Seule une partie de ces patients avait toutefois un diabète voire une insuffisance rénale chronique, la présence d’ une vasculite pouvant aussi être à l’ origine de cette constellation.

ABI : marqueur d’ AOMI et de risque cardiovasculaire systémique

Ces dernières années ont vu une évolution significative non seulement dans la prise en charge de l’ AOMI, mais aussi dans la prise de conscience que l’ AOMI est un témoin potentiel d’ une atteinte vasculaire plurilocalisée. La pathologie athéromateuse présente en effet un caractère systémique, et n’ est pas seulement spécifique aux membres inférieurs.
Sans entrer dans les détails, rappelons qu’ en cas d’ AOMI, 25-70% des patients présentent une atteinte coronarienne associée, jusqu’ à 20 % une atteinte sténosante carotidienne supérieure à 70%, sans oublier les lésions pouvant survenir dans d’ autres territoires vasculaires, notamment mésentérique et rénal (4).
Un ABI ≤ 0.90 témoigne d’ une AOMI, et est donc associé à une augmentation du risque cardiovasculaire, tant en ce qui concerne la morbidité que la mortalité cardiovasculaire et totale (6). Il est, par ailleurs, intéressant de noter que les informations données par l’ ABI se révèlent significatives au-delà de scores habituellement utilisés pour déterminer le risque cardiovasculaire des patients, comme par exemple le Framingham risk score (3). Un ABI diminué permet, par conséquent, non seulement de poser le diagnostic d’ AOMI, mais représente aussi un puissant marqueur du risque cardiovasculaire, mettant le patient dans une catégorie à haut risque (3, 6-9).
L’ association entre un ABI > 1.40 et une augmentation du risque cardiovasculaire est reconnue (3, 6, 8). Rappelons que, parmi les pathologies associées à des valeurs élevées de l’ ABI, le diabète et l’ insuffisance rénale terminale représentent en elles-mêmes des facteurs de risque cardiovasculaire. Un ABI > 1.40 est surtout associé à des complications cérébrovasculaires (3, 10).

Le patient asymptomatique est aussi à risque

Il serait erroné de penser que les patients asymptomatiques ne sont pas concernés par l’ augmentation du risque cardiovasculaire. Le concept que la majorité des patients avec une AOMI sont asymptomatiques, doit être nuancé. On estime qu’ environ 30% de ces patients présentent une AOMI dite « masquée ». Il s’ agit de patients présentant une pathologie (orthopédique, rhumatologique, neurologique, etc) limitant l’ effort, et empêchant l’ expression d’ une claudication artérielle. D’ autres patients présentent une neuropathie, par exemple diabétique, supprimant la sensation douloureuse à l’ effort, mais aussi au repos. Il s’ agit donc de patients particulièrement fragiles, avec un risque important de passer d’ un stade asymptomatique à un stade avancé et grave de l’ AOMI.
Même chez les sujets asymptomatiques, un ABI pathologique est associé à un risque cardiovasculaire augmenté (7, 10, 11). L’ évaluation de l’ ABI serait donc en principe à proposer non seulement aux patients symptomatiques, mais aussi à d’ autres classes de patients, comme recommandé par des directives récentes (tableau 2) (4).

L’ ischémie critique : une condition à ne pas sous-estimer

L’ ischémie critique est une condition à haut risque de complications. Il s’ agit d’ une ischémie au repos, symptomatique généralement sous forme de douleurs à l’ avant-pied. Les patients peuvent être réveillés la nuit par les douleurs. Une amélioration, voire une régression de la symptomatologie, peut se manifester lors du passage de la position couchée à assise ou debout, témoignant d’ une réserve de perfusion. Du point de vue des paramètres hémodynamiques, elle se confirme par un ABI < 0.40, par une pression à la cheville < 50 mmHg, une pression digitale < 30 mmHg, ainsi qu’ une mesure transcutanée de pression d’ oxygène < 30 mmHg (4). En cas de symptomatologie au repos, une prise en charge de revascularisation doit être considérée.
Il y a toutefois des patients, en particulier gériatriques, qui restent asymptomatiques, y compris à l’ effort (moindre au vu d’ une mobilisation limitée). Une intervention de revascularisation préventive n’ est pas proposée, hormis dans les cas d’ une menace d’ occlusion d’ un geste interventionnel préalable (occlusion par exemple d’ un pontage qui amènerait le patient à un stade symptomatique). Ces patients asymptomatiques nécessitent toutefois un suivi clinique strict, et une prise en charge immédiate par exemple lors d’ une blessure même minime ou d’ une infection débutante. Ces conditions sont en effet à haut risque évolutif, y compris vers une amputation. L’ état initialement asymptomatique doit être considéré comme particulièrement fragile chez ces patients.
Concernant les complications vasculaires systémiques, lors de condition d’ ischémie critique des membres inférieurs, l’ évolution vers un infarctus du myocarde, un décès cardiovasculaire, et un accident vasculaire cérébral est deux fois plus fréquente par rapport aux stades moins graves d’ AOMI(12).

Dr Luca Calanca

Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
Service d’ Angiologie
Ch. de Mont-Paisible 18
1011 Lausanne

Dr Marco Fresa

Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
Service d’ Angiologie
Ch. de Mont-Paisible 18
1011 Lausanne

Pr Lucia Mazzolai

Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
Service d’ Angiologie
Ch. de Mont-Paisible 18
1011 Lausanne

lucia.mazzolai@chuv.ch

Les auteurs n’ ont déclaré aucun conflit d’ intérêts en relation à cet article

  • Un ABI ≤ 0.90 permet de poser le diagnostic d’ AOMI et est un marqueur d’ augmentation du risque cardiovasculaire.
  • Les patients avec une AOMI asymptomatique présentent aussi un risque cardiovasculaire augmenté.
  • L’ AOMI est une condition pouvant évoluer vers des complications systémiques et/ou locales graves.
  • Les personnes âgées asymptomatiques, surtout en cas de mobilité réduite, nécessitent un suivi strict et une prise en charge rapide en cas de complications même débutantes.
  • L’ ischémie critique est une condition à haut risque de complications.

1. Casey, S., et al., The reliability of the ankle brachial index: a systematic review. J Foot Ankle Res, 2019. 12: p. 39.
2. Monti, M., et al., Accuracy of in-patients ankle-brachial index measurement by medical students. Vasa, 2016. 45(1): p. 43-8.
3. Aboyans, V., et al., Measurement and interpretation of the ankle-brachial index: a scientific statement from the American Heart Association. Circulation, 2012. 126(24): p. 2890-909.
4. Aboyans, V., et al., Editor’s Choice – 2017 ESC Guidelines on the Diagnosis and Treatment of Peripheral Arterial Diseases, in collaboration with the European Society for Vascular Surgery (ESVS). Eur J Vasc Endovasc Surg, 2018. 55(3): p. 305-368.
5. Hoyer, C., et al., Risk factors and haemodynamic variables in patients with low toe-brachial index but normal ankle-brachial index. Atherosclerosis, 2019. 289: p. 21-26.
6. Resnick, H.E., et al., Relationship of high and low ankle brachial index to allcause and cardiovascular disease mortality: the Strong Heart Study. Circulation, 2004. 109(6): p. 733-9.
7. Diehm, C., et al., Mortality and vascular morbidity in older adults with asymptomatic versus symptomatic peripheral artery disease. Circulation, 2009. 120(21): p. 2053-61.
8. O’Hare, A.M., et al., Mortality and cardiovascular risk across the ankle-arm index spectrum: results from the Cardiovascular Health Study. Circulation, 2006. 113(3): p. 388-93.
9. Sasaki, M., et al., Low ankle brachial index predicts poor outcomes including target lesion revascularization during the long-term follow up after drug-eluting stent implantation for coronary artery disease. J Cardiol, 2019.
10. Criqui, M.H., et al., The ankle-brachial index and incident cardiovascular events in the MESA (Multi-Ethnic Study of Atherosclerosis). J Am Coll Cardiol, 2010. 56(18): p. 1506-12.
11. Alves-Cabratosa, L., et al., Role of Low Ankle-Brachial Index in Cardiovascular and Mortality Risk Compared with Major Risk Conditions. J Clin Med, 2019. 8(6).
12. Norgren, L., et al., Outcomes of Patients with Critical Limb Ischaemia in the EUCLID Trial. Eur J Vasc Endovasc Surg, 2018. 55(1): p. 109-117.

Mycose, prurit et dyspareunie

Le prurit génital et la dyspareunie sont des symptômes à la fois courants et complexes dans la vie gynécologique quotidienne. Les symptômes et les tableaux cliniques se chevauchent largement, ce qui peut parfois rendre le diagnostic extrêmement difficile et retarder le début d’ une thérapie adéquate. Cet article vise à donner un aperçu des diagnostics différentiels et se concentre sur la genèse infectieuse.

Prurit génital comme symptôme principal

Le prurit vulvaire ou vaginal est un symptôme majeur courant en gynécologie, en gynécologie de l’ enfant et de l’ adolescent c’ est même le symptôme le plus courant avec plus de 60 % (1). La liste des causes possibles est longue et ce n’ est pas toujours une infection fongique qui en est responsable. Moins de 50 % des femmes ayant un prurit vulvaire ou vaginal souffrent en fait de candidose vulvovaginale. Cependant, en présence de cette dernière, le prurit est le symptôme cardinal qui, dans 90 % des cas, est associé à une candidose vulvo-vaginale (2). En cas de prurit génital, le diagnostic différentiel doit prendre en compte les allergies, les irritations cutanées (produits de soin et d’ hygiène, etc.), les infections de la vulve et/ou du vagin, les maladies internes (par exemple diabète sucré, polyarthrite rhumatoïde, lupus érythémateux disséminé), l’ atrophie génitale (carence en œstrogènes), les néoplasies, les maladies cutanées chroniques non infectieuses (par exemple lichen scléreux) ou une genèse psychologique (3). Un aperçu des diagnostics différentiels est donné au tableau 1. Le traitement est généralement basé sur la maladie sous-jacente ou, si aucune cause spécifique ne peut être trouvée, il peut être pour une période temporaire de nature purement symptomatique (par exemple, corticostéroïdes locaux, lotion de lavage au pH neutre, crème grasse).

Dyspareunie

La dyspareunie, le rapport sexuel douloureux, touche environ 8-22 % de toutes les femmes (4). Il faut distinguer la dyspareunie superficielle (souvent près de l’ introïtus, lors de la pénétration) de la dyspareunie profonde. Les causes les plus courantes de dyspareunie chez les femmes de moins de 50 ans sont la dermatose vulvaire, l’ endométriose, le syndrome de douleur vulvaire provoquée, le syndrome de douleur pelvienne myofasciale (myofacial pelvic pain syndrome) et la cystite interstitielle / le syndrome vésical douloureux (painful bladder syndrome). L’ atrophie urogénitale est la cause la plus fréquente chez les femmes de plus de 50 ans (5), (6). Le tableau 2 donne un aperçu des diagnostics différentiels les plus importants.
Une classification purement psychologique de la dyspareunie doit être évitée, car différentes composantes sont souvent présentes. Généralement, une sensation de brûlure ou une douleur lancinante se produit avant, après ou pendant les rapports sexuels. L’ intensité peut varier et dépend de la position sexuelle choisie, surtout dans les cas d’ adhérences et d’ endométriose (7).
Une anamnèse détaillée et l’ examen gynécologique constituent la base du diagnostic. Il faut certainement exclure une genèse inflammatoire, infectieuse ou néoplasique (6).
Thérapie : Comme il s’ agit d’ un symptôme, la thérapie est basée sur la maladie sous-jacente. Le traitement symptomatique comprend l’ utilisation de lubrifiants contre la sécheresse vaginale ainsi que l’ utilisation d’ anesthésiques locaux contre les troubles de la vulve. Une attention particulière doit également être accordée à l’ éducation et à l’ information des patientes.

Colpite et vulvovaginite

La vaginite ou colpite est une inflammation du vagin. Souvent, elle s’ accompagne d’ une inflammation des organes génitaux externes, dans ce cas, on parle de vulvovaginite. L’ inflammation peut être causée par une infection, une inflammation ou des changements dans la flore vaginale physiologique (3). La vulvovaginite peut être asymptomatique, mais dans la plupart des cas, elle se manifeste par des symptômes tels que des démangeaisons ou des brûlures vulvovaginales prononcées, une rougeur des parois vaginales ou des organes génitaux externes et des pertes vaginales, parfois malodorantes. La dysurie ou la dyspareunie peuvent également se produire (8).
Les causes les plus courantes sont de nature infectieuse. Les trois causes infectieuses les plus courantes, la vaginose bactérienne, la vulvovaginite à candida et la trichomonase, représentent ensemble environ 90 % des infections (9) (tableau 3). Les causes non infectieuses de la vaginite comprennent l’ atrophie vaginale, les corps étrangers (restes de tampon ou de préservatif), les allergènes et les irritants et d’ autres entités moins courantes comme les maladies systémiques.

Flore vaginale physiologique

La flore normale du vagin est formée par des lactobacilles (bactéries Döderlein), des bâtonnets Gram-négatifs. Le glycogène est stocké dans les cellules épithéliales squameuses du vagin par action œstrogénique. Le glycogène des cellules épithéliales éliminées est métabolisé par les lactobacilles en lactate, qui est responsable de l’ environnement acide du vagin (8), (9). Ceci maintient la flore vaginale normale et supprime la croissance des germes pathogènes (3). Le fluor vaginal est essentiellement produit par transsudation. Le fluor physiologique vaginal a un pH de 4,0 – 4,5, est blanchâtre, mince, acide, non malodorant et asymptomatique. La quantité normale est < 5 ml/24h.

Vulvovaginite à Candida

La candidose vulvovaginale est la cause la plus courante de prurit et de pertes vulvovaginales et la deuxième cause la plus courante de colpite après la vaginose bactérienne. Cependant, la prévalence exacte est difficile à déterminer, car les espèces de Candida se trouvent dans le tractus génital d’ environ 20 % de toutes les femmes ne présentant pas de signes cliniques d’ infection (colonisation), de sorte que la détection de Candida ne suffit pas à elle seule pour poser un diagnostic (2). Dans une étude américaine récente, 77,5  % des femmes ont déclaré avoir eu une candidose vulvovaginale au moins une fois dans leur vie, dont 34,6 % ont souffert de candidose vulvovaginale récurrente (≥ 4 épisodes par an) (10). La prévalence de la candidose vulvovaginale est la plus élevée chez les femmes en âge de procréer. Au-delà de la ménopause, l’ apparition de la candidose vulvovaginale est inhabituelle, sauf chez les femmes sous œstrogénothérapie. Elle est également inhabituelle chez les filles pré-pubères, chez qui la candidose vulvovaginale est parfois surdiagnostiquée (11).
Contrairement à la vaginose bactérienne, la candidose vulvovaginale ne réduit pas le nombre de lactobacilles vaginaux. Les espèces de Candida sont facultativement pathogènes. Environ 80 % des infections sont causées par Candida albicans, les autres infections sont principalement causées par Candida glabrata ou tropicalis (2). Une infection fongique cliniquement manifeste à Candida ne se développe que si, en plus d’ une numération bactérienne suffisante, il existe une disposition ou des facteurs de risque (2). Les facteurs de risque comprennent le diabète sucré (surtout en cas de mauvais contrôle de la glycémie), l’ utilisation d’ antibiotiques, des taux élevés d’ œstrogènes (contraceptifs oraux, grossesse, œstrogénothérapie) et l’ immunosuppression (11).
Le symptôme dominant est le prurit. Mais on décrit aussi souvent une sensation de brûlure, une rougeur vaginale et une sensation de douleur prononcée. Les petites lèvres peuvent être oedémateuses et enflées. La dysurie et la dyspareunie peuvent également se produire (11). Les pertes sont généralement blanches, épaisses, friables et souvent collantes sur les parois vaginales (2). Mais parfois, elles peuvent être complètement absentes. Le pH vaginal est généralement normal, ce qui permet de distinguer la candidose de la vaginose bactérienne et de la colpite à trichomonas. L’ intensité des symptômes peut varier considérablement, par exemple des symptômes légers à minimes semblent se produire dans les infections à Candida glabrata ou parapsilosis (en particulier dans les infections associées aux cathéters) (11) (2). Le diagnostic se fait par l’ examen des organes génitaux externes, du vagin et du col de l’ utérus. Le col de l’ utérus présente habituellement des résultats normaux. En outre, le diagnostic microscopique doit être effectué à l’ aide de préparations natives. La microscopie optique révèle des fils hyphaliques typiques et ramifiés. Ceux-ci sont formés de spores de candida ellipsoïdes dans un environnement favorable à l’ hôte. En l’ absence de symptômes, leur apparition peut correspondre à une seule colonisation, alors que les fils hyphaliques sont souvent en corrélation avec une maladie symptomatique (2).
En cas de symptômes classiques ainsi qu’ en cas de détection microscopique de Candida, une culture n’ est pas absolument nécessaire. Toutefois, elle doit être effectuée si aucune détection microscopique n’ a été possible avec les symptômes correspondants et un pH normal, ou en cas de symptômes persistants ou récurrents (11). Bien que la détection par PCR montre une spécificité et une sensibilité élevées, elle n’ a guère été utilisée jusqu’ à présent dans le diagnostic de routine.
Comme aucun des symptômes n’ est pathognomonique de la candidose vulvovaginale, il faut tenter de détecter la maladie par microscopie native, coloration de Gram ou culture en cas de soupçon clinique afin d’ éviter un surdiagnostic et un surtraitement subséquent. Comme les autodiagnostics sont souvent erronés, ils doivent être faits avec prudence et l’ autothérapie avec des médicaments en vente libre n’ est pas recommandée. Dans une étude américaine, seule une minorité d’ environ 500 femmes sans formation médicale a pu établir un diagnostic correct (11 % des femmes sans et 35 % des femmes avec une candidose vulvovaginale antérieure) (11).
Thérapie : Il existe plusieurs médicaments disponibles sous différentes formes posologiques. Pour les infections non compliquées, un traitement local avec Clotrimazole ou Éconazole est recommandé (crème 7-10 jours et suppositoires vaginaux 3-6 jours). En cas d’ infection compliquée, un traitement systémique avec une dose unique de Fluconazole 150 mg 1x ou d’ Itraconazole 200mg 2x doit être administré en plus. Dans le cas d’ infections chroniques récurrentes, il existe des schémas thérapeutiques répétitifs.
L’ efficacité du traitement probiotique, par exemple avec les comprimés vaginaux Gynoflor pour restaurer la flore vaginale, n’ a pas été scientifiquement prouvée.
Le traitement du partenaire sexuel asymptomatique ne semble pas être bénéfique pour la patiente.

Dr. med. Jeannette Baldinger

Frauenklinik
Kantonsspital St. Gallen
Rorschacher Strasse 95
9007 St. Gallen

jeannette.baldinger@kssg.ch

Prof. Dr. med. René Hornung

Frauenklinik
Kantonsspital St. Gallen
Rorschacher Strasse 95
9007 St. Gallen

Les auteurs n’ ont déclaré aucun conflit d’ intérêts en rapport avec cet article.

  • Le prurit génital est un symptôme courant, mais moins de 50% des femmes présentant ce symptôme ont en fait une candidose vulvovaginale.
  • Dans la plupart des cas, la candidose vulvovaginale s’ accompagne de démangeaisons. Les autres symptômes possibles sont la rougeur, l’ œdème ou la douleur, alors que dans la vaginose bactérienne, les signes d’ inflammation sont généralement absents.
  • La dyspareunie peut avoir des causes multiples. Une anamnèse détaillée et un examen gynécologique soigneux mais précis sont essentiels. Une cause organique doit être spécifiquement recherchée ou exclue.

1. Goerke, K., Steller, J. und Valet, A. Klinikleitfaden Gynäkologie Geburtshilfe. 10. Auflage. München : Urban & Fischer Verlag, 2018.
2. Mylonas, I., Friese, K. und Lauper, U. EGONEplus. Infektiologische Krankheitsbilder. 22. April 2013.
3. Sobel, Jack D. UpToDate: Approach to women with symptoms of vaginitis. 27. Aug. 2018.
4. Latthe, P., Latthe, M., Say, L., Gülmezoglu, M. and Khan, S. WHO systematic review of prevalence of chronic pelvic pain: a neglected reproductive health morbidity. BMC Public Health. 2006.
5. Barbieri, Robert L. UpToDate: Differential diagnosis of sexual pain in women. 03. Oct. 2017.
6. Kingsberg, Sheryl und Kellogg Spadt, Susan. UpToDate: Approach to the woman with sexual pain. 04. Apr 2019.
7. Netter, Frank H. Gynäkologie. Stuttgart : Thieme, 2006.
8. Frobenius, W. and Bogdan, C. Diagnostic Value of Vaginal Discharge, Wet Mount and Vaginal pH – An Update on the Basics of Gynecologic Infectiology. Geburtshilfe und Frauenheilkunde. 2015.
9. Mylonas, I., Friese, K. und Montavon, C. EGONEplus. Allgemeine Infektiologie. 22. April 2013.
10. Yano, Junko und Sobek, Jack D. Current patient perspectives of vulvovaginal candidiasis: incidence, symptomes, management and posttreatment outcomes. BMC Women’ s Health. 2019.
11. Sobel, Jack D. UpToDate: Candida vulvovaginitis: Clinical manifestations and diagnosis. 16. Nov. 2018. Candida vulvovaginitis: Clinical manifestations and diagnosis.
12. [Online] https://www.msdmanuals.com/de/profi/gynäkologie-und-geburtshilfe/symptome-gynäkologischer-erkrankungen/vaginaler-juckreiz-und-ausfluss#v1061219_de.
13. Sobel, Jack D. UpToDate: Bacterial vaginosis: Clinical manifestations and diagnosis. 11. Feb. 2019.
14. [Online] http://imdlab.ch/wp-content/uploads/2016/03/Trichomonas-vaginalis.pdf.
15. Petersen, Eiko E. Farbatlas der Vulvaerkrankungen. Freiburg/Br. : Kaymogyn GmbH, 2007.

Les foyers naturels de la FSME sont-elles en expansion en Suisse?

Pour une définition pertinente des foyers naturels de la méningo-encéphalite à tiques ou verno-estivale (FSME), il faut considérer, à part les cas enregistrés cliniquement, aussi les infections d’ animaux provenant de zones où l’ agent pathogène n’ est pas encore apparu chez l’ homme. Les résultats d’ études sur le terrain (1), complétés par des données de cas cliniques, pourraient combler d’ importantes lacunes dans les connaissances sur la propagation du virus FSME. Une approche interdisciplinaire (2) est nécessaire et devrait être mise en œuvre au-delà des frontières départementales et des disciplines scientifiques.

Cet article est consacré à la répartition géographique des zones endémiques de la FSME. Un autre article paru dans le numéro 04_2019 de « der informierte arzt » informe au sujet des pathogènes à tiques fréquents et moins fréquents (3).

Virus de l’ encéphalite à tiques et zones d’ endémie

Le virus FSME a été détecté et isolé pour la première fois en Sibérie orientale en 1937. Déjà en 1931, le médecin Hans Schneider a décrit, dans sa publication « Epidemische akute < Meningitis serosa > », une accumulation de foyers de FSME en Basse Autriche (4). Le virus FSME circule dans un système complexe. Il est maintenu en cycle avec les tiques et les vertébrés dans des foyers dits naturels. La circulation du virus dépend de la coïncidence de certaines conditions botaniques, zoologiques, climatiques et éco-géologiques (4). La tique (Ixodes ricinus) joue un rôle central dans le cycle naturel du virus FSME. Toutes les espèces animales ne sont pas des hôtes sanguins appropriés pour les tiques (chevreuils, cerfs, sangliers) et seule une sélection de ces espèces (rongeurs, insectivores) est capable de servir de réservoir au virus FSME. Le rapport « hôte sanguin » sur « hôte réservoir » détermine si le virus FSME circule ou non à un endroit donné (5).

Expansion de la FSME en Suisse

La première détection d’ anticorps anti-FSME a été réalisée en Suisse en 1969 dans le sérum de deux personnes malades. Ceci est décrit par Thomas Krech dans sa thèse de doctorat de 1980 (6). L’ Office fédéral de la santé publique (OFSP) enregistre l’ incidence des infections à FSME depuis 1984.
Les zones à risque ont été identifiées sur la base des cas cliniques de FSME en 2011 qui se situaient dans le nord-est de la Suisse (cantons TG, SH, SG, ZH), le Mittelland, l’ Oberland bernois et l’ Alpenrheintal / FL (cf. fig. 1). Dans le cadre de la plus grande campagne suisse de surveillance de la FSME, l’ armée a collecté plus de 65 000 tiques en 2009. Le laboratoire de Spiez a analysé les tiques pour détecter la présence du virus FSME. Les résultats uniques de cette étude sur le terrain (9) ont été intégrés dans la carte actualisée des zones présentant un risque accru de FSME en 2013 (cf. fig. 2) afin d’ améliorer l’ évaluation de ce risque. Parallèlement, l’ OFSP et la Commission fédérale pour les questions de vaccination (CFV) ont décidé de ne plus considérer « la seule détection des tiques infectées » dans leur présentation des zones à risque de FSME et de publier deux cartes, l’ une visualisant les zones d’ accumulation locale de la FSME, l’ autre montrant les zones pour lesquelles la vaccination contre la FSME est recommandée (8).

Recommandation de vaccination contre la FSME 2019 – extension spatiale

La figure 3 montre l’ expansion spatiale des zones à risque de FSME entre 2009 et 2018 avec les sites où l’ on soupçonne des piqûres de tiques (rouge) et, si cette information fait défaut, la commune de résidence (rose) des personnes atteintes de FSME. La figure 4 présente les zones pour lesquelles la recommandation de vaccination contre la FSME est en vigueur depuis février 2019 (10) comme résultat de la gestion pragmatique, par la politique de santé, du nombre croissant des cas de FSME. La vaccination protège contre l’ infection à FSME, mais pas contre la maladie de Lyme. L’ expérience de plus de 40 exposés sur la prévention montre que plus de la moitié du public intéressé ne connaît pas cette distinction (11). La conclusion inverse signifie qu’ une grande partie de la population interprète mal la carte des zones à risque de FSME et estime qu’ il n’ y a aucun risque de tiques en dehors des zones rouges. L’ une des raisons pourrait être l’ utilisation imprécise du terme « vaccination contre les tiques » pour désigner la protection vaccinale contre la FSME.

Zones avec recommandation d’ immunisation contre la FSME ≠  Foyers naturels

Les zones cartographiées où la vaccination contre la FSME est recommandée ne prennent en compte que les cas cliniques. Cette approche médicale présente deux lacunes majeures. Premièrement, la méthode de prendre les cantons comme entité la plus petite pour identifier des foyers naturels de très petite taille est insuffisante. Les foyers naturels sont aussi grands qu’ un demi-terrain de football et ne peuvent être identifiés qu’ à l’ issue de recherches approfondies sur le terrain (12) (13). Deuxièmement, pour le virus FSME, l’ homme est un hôte sans issue qui ne joue aucun rôle dans la propagation du virus. L’ enregistrement des seuls cas humains de FSME donne une image déformée de la propagation spatiale de la FSME (2).

Résultats de la recherche sur la FSME datant de septembre 2019

Le collègue allemand Dobler est internationalement considéré comme une référence dans la recherche sur les tiques (4). Au bout de quarante ans, il a été en mesure d’ identifier des sous-types identiques de FMSE dans les foyers naturels en balisant les sites connus. Ceci est une indication claire de la stabilité du cycle naturel de l’ encéphalite à tiques. D’ autre part, l’ étendue spatiale prouve que les zones endémiques « localisées » de la FSME réagissent aux influences de la nature et de l’ homme.

Paysage, environnement et hôtes

L’ inclusion du paysage dans l’ épidémiologie de la FSME est plus marquée en Europe de l’ Est qu’ en Europe occidentale. La méthode d’ observation de Pavlovsky pour décrire les foyers naturels de FSME (Nidus) n’ est pas moins pertinente aujourd’ hui qu’ en 1939 (14). Les éléments du paysage tels que les vallées fluviales ont une influence sur la propagation du virus (Dobler, données non publiées). Des études sur des animaux sauvages et domestiques montrent que le virus de l’ encéphalite à tiques est plus répandu qu’ on ne le pensait auparavant et qu’ il est présent dans les régions où aucune maladie humaine n’ est apparue (2). Au Kazakhstan et au Kirghizistan, on connaît des régions endémiques situées entre 1 000 et 2 100 mètres d’ altitude (15). Des études menées en République tchèque (16) et en Autriche (17) indiquent que la distribution du vecteur « tique » – parfois infecté par le virus FSME – augmente à des altitudes supérieures à 1000 m. Le changement climatique avec des températures annuelles moyennes plus élevées affecte les tiques et les agents pathogènes. La tendance du taux d’ infection à FSME sous l’ influence du changement climatique est à la hausse (18).

Activités de plein air et de voyage

La FSME est importante dans la médecine de voyage car de plus en plus de cas cliniques surviennent dans des régions non endémiques (ex-Benelux, actuellement Etats-Unis) (4). Plusieurs vaccins bien tolérés sont recommandés pour la protection des voyageurs contre les infections dans les destinations hautement endémiques en Europe, en Russie et en Asie (19). Les destinations touristiques alpines seraient bien avisées de s’ attaquer (pro-)activement au problème des tiques. L’ information sur l’ évolution de la situation de la FSME à haute altitude devrait être inclue dans les informations aux clients. L’ hôte prudent doit fournir des informations sur les risques potentiels existants et les mesures de protection préventive qui contribueront à des vacances actives sans soucis en montagne.

Présentation alternative du risque potentiel associé aux tiques

Les informations actuelles sur la distribution des piqûres de tiques sont publiées sur le géoportail fédéral sous le nom de « Modèle de piqûres de tique 2018 » (20). Le modèle représente le risque d’ attraper une piqûre de tique par temps doux et humide au début de l’ été : zones à forte, moyenne et faible activité des tiques (zones rouges, jaunes et bleues respectives). Il n’ est pas possible de déterminer si les tiques des zones indiquées sont vecteurs d’ agents pathogènes. Les données anonymes relevées de piqûres de tiques (cf. fig. 5, points noirs) de l’ App de prévention « Zecke – Tique – Tick » (21) servent à valider le modèle.
Le projet de recherche de la ZHAW, « Fighting bites with bytes », utilise ces points de données pour développer un modèle dynamique du risque potentiel associé aux tiques (22). Les premiers résultats sont attendus au début de l’ été 2020.

La FSME en Autriche / en Suisse

La population autrichienne est vaccinée entre 82 % et 90 % (23). En Suisse, le taux de vaccination contre l’ encéphalite à tiques chez les enfants de 2, 8 et 16 ans se situe entre 22 % et 75 % (24). La moyenne suisse pour les adultes est de 32,9 % (25).
Entre 2010 et 2017, de nouvelles infections à FSME ont été enregistrées en Autriche, principalement dans l’ Ouest (Tyrol et Vorarlberg) et en partie à des altitudes supérieures à 1000 m. En Suisse, les cas cliniques se sont également propagés dans le sens est-ouest. On peut supposer que le virus FSME circule en Suisse à plus de 1000 m d’ altitude. La détection est une question de temps.

Werner Tischhauser

Umweltingenieur FH ZHAW
A&K Strategy GmbH
ZHAW Wädenswil
Grüental
8820 Wädenswil

tischhauser@ak-strategy.ch

Dr. Rahel Ackermann-Gäumann

Co-Leiterin Molekulare Analytik
Institut für Infektionskrankheiten der Universität Bern
Friedbühlstrasse 51
3010 Bern

En tant que co-fondateur et directeur de la spin-off de la ZHAW « A&K Strategy GmbH », Werner Tischhauser est responsable avec Jürg Grunder de l’ exploitation et du développement de l’ App de prévention « Zecke – Tique – Tick Prevention », qui est soutenue financièrement par l’ OFSP. L’ auteur est impliqué dans le projet de la ZHAW « Fighting bites with bytes – promoting public health with crowdsourced tick prevention ». La Dre Rahel Ackermann n’ a déclaré aucun conflit d’ intérêts en rapport avec cet article.

  • L’ extension des zones à risque de FSME, qui a eu lieu lors de la révision de la recommandation de l’ immunisation contre la FSME, est une mise en œuvre pragmatique de la politique sanitaire par les autorités pour attirer l’ attention sur le risque accru d’ infection à FSME et pour inciter davantage de personnes à se faire vacciner contre cette maladie.
  • La dissémination effective des foyers naturels de la FSME – c’ est-à-dire des très petites zones dans lesquelles le virus FSME circule – n’ est pas connue. Jusqu’ à présent, seuls des sites individuels ont été identifiés et décrits de manière aléatoire (9).
  • Dans les zones d’ endémie de la FSME en Suisse, environ 1% (0,5% – 5,5% selon le foyer naturel) des tiques sont infectées et vecteurs du virus FSME (26). Le risque de contracter une infection à FSME après une piqûre de tique est faible. Néanmoins, il convient de se souvenir que chaque année, environ 300 personnes sont atteintes d’ une méningo-encéphalite à tiques accompagnée de symptômes cliniques et que, chaque année, quelques infections à FSME se soldent par un décès. Cela pourrait être évité grâce à la vaccination anti-FSME.
  • Les chiffres montrent que des efforts supplémentaires sont nécessaires pour garantir que les personnes exposées prennent des mesures préventives et soient vaccinées. Le rôle des médecins en tant que médiateurs des connaissances de base est très important dans ce contexte.

1. C. Bregnard, O. Rais, L. Gern, und M. J. Voordouw, «Increase of tick density over a 15-year period on Chaumont Mountain in Switzerland», University of Neuchâtel, Laboratory of Ecology and Evolution of Parasites, Neuchâtel, 2019.
2. G. Dobler, D. Gniel, R. Petermann, und M. Pfeffer, «Epidemiology and distribution of tick-borne encephalitis», Wien. Med. Wochenschr., Bd. 162, Nr. 11–12, S. 230-238, Juni 2012.
3. R. Ackermann-Gäumann und G. Greub, «Der informierte Arzt», Medinfo Arztverlag, 04.2019, Apr. 2019.
4. G. Dobler, W. Erber, und H.-J. Schmitt, The TBE book, Bd. 2nd Edition. 2019.
5. G. T. Stewart, «Natural Nidality of Transmissible Diseases: by Evegeny N. Pavlovsky, edited by Norman D. Levine, translated by Frederick K. Plous. University of Illinois Press, Urbana and London, 1966. x + 227 pages with index, glossary, references and 126 figures or photographs. $8.00», Am. J. Trop. Med. Hyg., Bd. 16, Nr. 1, S. 120–121, Jan. 1967.
6. T. Krech, «Die Frühsommer-Meningoenzephalitis (FSME) in der Schweiz», Institut für Medizinische Mikrobiologie des Kantons St.Gallen, Arbeit unter der Leitung von prof. Dr. u. Krech, 1980.
7. «Zecken: Neue Gefahr – Beobachter», 2011. (Online). Disponible à: https://www.beobachter.ch/gesundheit/medizin-krankheit/zecken-neue-gefahr. (Consulté le 25-Sep-2019).
8. BAG Bulletin, «Aktualisierung und neue Darstellung der Karte mit Impfempfehlung für Frühsommer-Meningoenzepahlitis per April 2013», 18/2013, Apr. 2013.
9. R. Ackermann-Gäumann, «Molecular epidemiology of tick-borne encephalitis viruses in Switzerland», Bern, 2010.
10. BAG, «BAG Bulletin 06/19, Revision FSME-Impfempfehlung», S. 12–14, Feb. 2019.
11. Liga für Zeckenkranke Schweiz, Sandra Werth, «Liga für Zeckenkranke Schewiz, Kontakt». (Online). Verfügbar unter: http://www.zeckenliga.ch/kontakt.html. (Consulté le 04-Okt-2019).
12. G. Dobler u. a., «Gefahren der Übertragung von Krankheitserregern durch Schildzecken in Deutschland», Bundesgesundheitsblatt Gesundheitsforschung Gesundheitsschutz, Bd. 57, Nr. 5, S. 541–548, 2014.
13. T. Krech, «TBE foci in Switzerland», Int. J. Med. Microbiol., Bd. 291, S. 30–33, Juni 2002.
14. E. N. Pavlovskij, On the natural focality of infectious and parasitic diseases, Bd. 10. Vestn. Akad. Nauk SSSR, 1939.
15. J. Hay u. a., «Biosurveillance in Central Asia: Successes and Challenges of Tick-Borne Disease Research in Kazakhstan and Kyrgyzstan», Front. Public Health, Bd. 4, Feb. 2016.
16. V. Danielová, S. Kliegrová, D. Milan, und B. Čestmír, «Influence of Climate Warming on Tick-borne Encephalitis Expansion to Higher Altitudes during the Last Decade (1997-2006) in the Highland Region (Czech Republic)», S. 8.
17. F. X. Heinz u. a., «Emergence of tick-borne encephalitis in new endemic areas in Austria: 42 years of surveillance», Eurosurveillance, Bd. 20, Nr. 13, Apr. 2015.
18. M. Daniel, V. Danielová, A. Fialová, M. Malý, B. Kříž, und P. A. Nuttall, «Increased Relative Risk of Tick-Borne Encephalitis in Warmer Weather», Front. Cell. Infect. Microbiol., Bd. 8, März 2018.
19. R. Steffen, «Tick-borne Encephalitis—Need to know for Professionals outside Endemic Areas», Dr Sulaiman Al Habib Med. J., 2019.
20. Bundesamt für Gesundheit, BAG und A&K Strategy GmbH, Werner Tischhauser, «Swiss Geoportal – Zeckenstichmodell 2018», geo.admin.ch. (Online). Verfügbar unter: https://map.geo.admin.ch. (Consulté le 02-Okt-2019).
21. «Startseite Präventions-App ’ Zecke – Tick Prevention’ », zecke-tique-tick.ch. .
22. «Fighting bites with bytes: Promoting public health with crowdsourced tick prevention», ZHAW Zürcher Hochschule für Angewandte Wissenschaften. (Online). Verfügbar unter: https://www.zhaw.ch/no_cache/de/forschung/forschungsdatenbank/projektdetail/projektid/2966/. (Consulté le 02-Okt-2019).
23. «The Austrian Vaccination Paradox: Tick-borne Encephalitis Vaccination Versus Influenza Vaccination», Cent. Eur. J. Public Health, Bd. 23, Nr. 3, S. 223–226, Sep. 2015.
24. BAG, «Kantonales Durchimpfungsmonitoring Schweiz». (Online). Disponible à: https://www.bag.admin.ch/bag/de/home/gesund-leben/gesundheitsfoerderung-und-praevention/impfungen-prophylaxe/informationen-fachleute-gesundheitspersonal/durchimpfung.html. (Consulté le 30-Okt-2019).
25. P. Sinniger, J. Fehr, und P. Lang, «Analysis of TBE vaccination coverage and compliance in adults in Switzerland, 2018», University of Zurich, Department of Public Health, Epidemiology, Biostatistics and Prevention Insitute, Vienna, 21st ISW-TBE Meeting, May 16-17, 2019.
26. R. Ackermann-Gäumann, «Zecken. Die Zecken in der Schweiz. Die durch Zecken übertragenen Krankheiten. Schutz vor Zecken.», Bundesamt für Bevölkerungsschutz BABS, Labor Spiez, Aug. 2019.

Troubles cognitifs chez les personnes âgées

Les troubles cognitifs chez les personnes âgées sont courants et, s’  ils sont diagnostiqués tôt et correctement, ils peuvent être influencés de façon décisive par des mesures médicamenteuses et non médicamenteuses actuellement disponibles. L’  examen clinique ainsi que la thérapie sont adaptés à chaque patient et dépendent dans une large mesure du consentement du patient, de son état de santé et de sa situation sociale.

Nous pouvons être confrontés à des plaintes de patients concernant des troubles cognitifs chez les jeunes adultes, mais surtout chez les gens du 3ème et 4ème âge. Dans tous les cas, ces plaintes doivent être prises au sérieux, car si le diagnostic est correct et que des mesures thérapeutiques sont prises à un stade précoce, l’ évolution de la maladie peut être considérablement influencée. Bien que le terme « démence » n’ existe plus depuis l’ introduction du DSM-5,
ce tableau clinique commun chez les personnes âgées (une personne sur trois âgée de plus de 85 ans !) n’ a bien sûr pas disparu. Bien que l’ incidence de la démence ait chuté de près de 50 % au cours des 20 dernières années grâce à un meilleur traitement des facteurs de risque vasculaire, l’ évolution démographique a pratiquement neutralisé ce progrès médical en termes de nombre. La prise en charge moderne des troubles cognitifs dans le développement de la démence repose sur 4 piliers (fig. 1) : diagnostic précoce et précis, pharmacothérapie, mesures non pharmacothérapeutiques et soutien ciblé des proches et des aidants (1).

Y a-t-il des troubles cognitifs « normaux » chez les personnes âgées ?

Les patients – comme nous les médecins – ont tendance à expliquer l’ oubli progressif et d’ autres « petits » échecs cérébraux par le processus de vieillir ou la vieillesse en général. La réalité est différente. Le vieillissement cérébral normal a été scientifiquement très bien étudié et n’ est associé qu’ à un ralentissement discret des processus de réflexion et de réaction. Donc, si un nom ne peut pas être mémorisé immédiatement, mais avec un certain délai, c’ est toujours « normal ». Si l’ on a toujours eu une mauvaise mémoire des noms, il ne faut pas s’ attendre à une amélioration dans la vieillesse ! Mais si l’ oubli est nouveau et que la pression subjective de souffrance des patients causée par l’ oubli est présente (même avec un examen neuropsychologique avec des résultats normaux), il faut l’ évaluer en fonction des résultats les plus récents comme « Subjective Cognitive Decline », qui conduit à la démence dans 25 % des cas en 6 ans (2). Malheureusement, les troubles cérébraux sont encore principalement réduits à la mémoire et à l’ oubli par de nombreuses personnes. Mais notre cerveau fait beaucoup plus ! De nombreux processus de démence commencent également dans d’ autres domaines de la performance cérébrale, où les détériorations (la capacité mémorielle étant préservée) deviennent visibles principalement à travers différents comportements (par exemple, davantage de problèmes avec des tâches complexes telles que la gestion des affaires financières ou la préparation de repas plus compliqués). De tels changements ne sont pas normaux et doivent être clarifiés !

Distinction entre « normal » et « pathologique »

Dans la pratique quotidienne, il doit être possible de décider en peu de temps si les troubles cognitifs doivent être clarifiés plus promptement, si d’ autres observations sont nécessaires ou s’ il n’ est pas nécessaire de prendre des mesures ! Le dépistage précoce (coûteux en temps) des troubles cognitifs à l’ aide du MMSE et du test de l’ horloge a été remplacé ces dernières années par un « dépistage des cas » plus sensible et plus ciblé à l’ aide d’ une « App» (fig. 2). L’ application payante « BrainCheck », développée par les « Swiss Memory Clinics » et les médecins de famille suisses, sépare « normal » et « pathologique » en quelques minutes avec une sélectivité de 90 % (3).
Le patient doit répondre à trois questions simples et passer un test d’ horloge. En même temps, on pose 7 questions brèves à la famille proche du patient ou à son partenaire. Tous les résultats peuvent être enregistrés et évalués immédiatement dans l’ application. La brève évaluation peut être facilement intégrée dans l’ historique médical électronique sous forme de fichier PDF !
Si des clarifications supplémentaires sont nécessaires, une décision doit être prise avec le patient et ses proches sur la manière dont le diagnostic doit être approfondi. Dans un premier temps, l’ exclusion (simple) des causes rapidement traitables est impérative. Un trouble thyroïdien peut être exclu par la détermination du taux de TSH, une dépression par l’ échelle GDS (Geriatric Depression Scale) et une situation de stress psychosocial (stress load) peut être détectée par une anamnèse attentive et, dans le cas positif, traitée par des mesures de prévention appropriées. En cas de suspicion fondée sur l’ anamnèse, il est également possible d’ examiner le statut en vitamine B et de faire une sérologie de la luès. Si l’ on trouve quelque chose dans les domaines mentionnés ci-dessus et que l’ on commence une thérapie, il est recommandé de contrôler la cognition au moyen de BrainCheck environ 6 mois plus tard.

Troubles cognitifs à clarifier

Le type de clarification supplémentaire des troubles cognitifs est très individuel et dépend du consentement du patient, de son état de santé, de son espérance de vie et de sa situation sociale. Les personnes âgées plus jeunes et plus en forme devraient toujours être examinées par un spécialiste de la démence ou en clinique de mémoire. Cela comprend un examen médical en laboratoire et avec des biomarqueurs ainsi qu’ un examen neuropsychologique par imagerie cérébrale (IRM). Chez les patients très âgés et fragiles, une évaluation cognitive raccourcie, par exemple par l’ évaluation MoCa (4) peut également être effectuée. Avec un peu d’ expérience, cela peut être réalisé dans le cabinet du médecin généraliste et être évalué sur le plan diagnostique. Ici aussi, l’ imagerie cérébrale (IRM ou CT) est impérative afin de déterminer la raison neuropathologique la plus probable du développement de la démence. Ceci est décisif pour le type de thérapie à initier.

Troubles cognitifs : Options thérapeutiques

Selon le DSM-5, les troubles cognitifs « légers » se situent dans les deux variations standard d’ un résultat cognitif normal. Sur le plan thérapeutique, outre les mesures médicamenteuses (ginkgo biloba 240 mg/j et vitamine D (24 000 unités par mois), les mesures non médicamenteuses sont particulièrement importantes : activité physique et sociale (cognitive) régulière, alimentation saine et adaptée à l’ âge (protéines régulières et suffisantes (1,2 g / kg par jour ; alimentation méditerranéenne avec une teneur suffisante en acides gras oméga 3) et bonne maîtrise médicale des facteurs de risque vasculaire (hypertension, diabète, hypercholestérolémie). Dans l’ étude finlandaise FINGER (5), ces mesures du mode de vie à elles seules ont permis d’ obtenir des améliorations cognitives significatives après 2 ans !

Options médicamenteuses

Avant d’ utiliser de nouveaux médicaments, toute polypharmacie existante doit faire l’ objet d’ un test de dépistage des substances anticholinergiques provoquant une altération cognitive. Selon le DSM-5, les troubles cognitifs « majeurs » (démence) sont définis par la neuropathologie sous-jacente au processus afin de déterminer la pharmacothérapie (généralement par imagerie et/ou biomarqueurs). S’ il s’ agit d’ un processus neurodégénératif (maladie d’ Alzheimer), le ginkgo, les inhibiteurs de la cholinestérase et la mémantine sont les médicaments de premier choix selon le stade (fig. 3). Lors de ce traitement symptomatique (s’ il est commencé tôt), l’ évolution de la maladie est considérablement améliorée en ce qui concerne le maintien de la fonctionnalité et de l’ indépendance. Ces médicaments agissent très lentement, mais ont un taux de réponse élevé grâce à un « nombre nécessaire à traiter » (NNT) de moins de 10 (pour les trois classes de substances !). Par rapport aux populations témoins non traitées, toutefois, les premières différences cliniques ne surviennent qu’ après un an de traitement ; toutefois, elles deviennent très pertinentes les années suivantes, car le traitement entraîne une réduction impressionnante du nombre d’ admissions dans les foyers de soins (6) (fig. 4). Le traitement combiné de la mémantine et des inhibiteurs de la cholinestérase (avec MMSE < 20) s’ est avéré très efficace. En Suisse, cela n’ est cependant possible que de manière « off-label » et n’ est pas entièrement couvert par l’ assurance de base en raison d’ une limitation. Néanmoins, de nombreux patients (compte tenu de la chute marquée des prix des médicaments antidémences) sont heureux de payer eux-mêmes les quelques centaines de francs par an si cela permet d’ économiser beaucoup plus de frais d’ institutionnalisation. En plus de leur capacité de maintenir la fonctionnalité quotidienne plus longtemps, les médicaments antidémentiels, permettent de réduire considérablement les anomalies comportementales associées à la démence (agressivité, pleurs, agitation motrice, etc.).
Si la pathologie sous-jacente à la démence est purement vasculaire, les médicaments antidémentiels ci-dessus (à l’ exception du ginkgo) ne sont pas efficaces et donc pas indiqués. L’ objectif est de ralentir la progression de la maladie par tous les moyens, avec des mesures de style de vie et le contrôle des facteurs de risque vasculaires. Dans les formes mixtes de démence d’ origine vasculaire et neurodégénérative, des agents anti-démence peuvent être utilisés. Dans les pathologies rares de la démence telles que la maladie de Lewis-Body, la maladie de Parkinson ou la démence fronto-temporale, il est utile de consulter les spécialistes appropriés.

Options non médicamenteuses

Excepté les situations d’ urgence, les interventions non médicamenteuses chez les patients atteints de démence sont recommandées par de grandes associations professionnelles et des groupes d’ experts comme approche primaire dans les symptômes comportementaux et psychologiques de la démence (SCPD) (7). Selon Cohen-Mansfield (8), la plupart des médecins sont formés et instruits pour l’ administration des médicaments lors de SCPD, mais seulement quelques-uns connaissent les thérapies non médicamenteuses et leur efficacité. Les antipsychotiques sont donc fréquemment utilisés avant toute tentative d’ intervention non médicamenteuse.
Contrairement aux capacités cognitives déjà limitées ou perdues au début de la démence, les compétences émotionnelles et psychosociales sont beaucoup moins affectées par ce déclin jusqu’ aux stades avancés de la démence. C’ est là que se situe l’ intervention non médicamenteuse en accédant aux ressources existantes du pouvoir cérébral – abandonnant la focalisation sur le déficit – pour les utiliser et consolider de manière ciblée. L’ activité physique, les activités musicales ainsi qu’ une alimentation riche en protéines et en vitamine D pour maintenir la santé musculaire en cas de démence se sont avérées les plus efficaces (9). L’ effet cérébral des activités motrices associées à la musique, comme la danse et le rythme, est passionnant et fait l’ objet de recherches répétées. Dans l’ étude de cohorte « Einstein Aging », la danse régulière comme activité de loisir a été associée à un risque réduit de démence pouvant
atteindre 80 % (10). Dans une étude d’ intervention utilisant la rythmique Dalcroze, la capacité motrice et cognitive des personnes âgées vivant à domicile a été améliorée et le risque de chute a été réduit de plus de 50 % (11). Aux stades avancés de la démence, la rythmique Dalcroze semble favoriser non seulement l’ influence positive sur les SCPD, mais aussi les aptitudes linguistiques (12). Les interventions non pharmacologiques chez les patients
atteints de démence sont un élément essentiel de la prise en charge moderne de la démence à 4 piliers. Le principal effet attendu de ces mesures est l’ influence positive et sans effet secondaire des SCPD. Les programmes d’ activité physique présentent des avantages supplémentaires pour le fonctionnement quotidien, qui peuvent être maintenus beaucoup plus longtemps, en particulier avec une alimentation riche en protéines et une supplémentation en vitamine D simultanée. La musique et les programmes de mouvements musicaux tels que la danse et le rythme semblent particulièrement qualifiés pour mobiliser les réserves cérébrales et ainsi améliorer significativement la cognition.

Prof. Dr. med. Reto W. Kressig

Ärztlicher Direktor & Klinischer Professor für Geriatrie
Universitäre Altersmedizin FELIX PLATTER & Universität Basel
Burgfelderstrasse 101
4002 Basel

RetoW.Kressig@felixplatter.ch

L’  auteur n’  a pas déclaré aucun conflit d’  intérêts en relation avec cet article.

  • La thérapie symptomatique non médicamenteuse et médicamenteuse lors de troubles cognitifs n’ est qu’ une composante de la prise en charge multifactorielle de la démence à 4 piliers.
  • Les approches non médicamenteuses ont des effets cognitifs marginaux à indétectables, mais elles sont efficaces dans les troubles du comportement, les symptômes psychiatriques et le stress du soignant.
  • En pharmacothérapie, il est important de réduire autant que possible une polymédication existante et d’ arrêter les substances potentiellement nocives (liste de Priscus).
  • Actuellement, il n’ y a aucune justification rationnelle de ne pas utiliser les médicaments antidémentiels symptomatiques disponibles aujourd’ hui (inhibiteurs de la cholinestérase, mémantine et extrait de ginkgo).
  • Dans le cas d’ effets cliniques immédiats relativement faibles au début du traitement, les avantages à long terme (institutionnalisation retardée de plusieurs années, troubles du comportement nettement moins fréquents) sont au premier plan.

1. Kressig RW. Aktuelle Pharmakotherapie der Alzheimer Demenz. der informierte Arzt 2015;10:30-33
2. Wolfsgruber S, et al. AgeCoDe Study Group. Differential Risk of Incident Alzheimer’s Disease Dementia in Stable Versus Unstable Patterns of Subjective Cognitive Decline.J Alzheimers Dis. 2016;54:1135-1146
3. Ehrensperger MM, et al. BrainCheck – a very brief tool to detect incipient cognitive decline: optimized case-finding combining patient- and informant-based data. Alzheimers Res Ther. 2014;6:69
4. Nasreddine ZS, et al. The Montreal Cognitive Assessment, MoCA: a brief screening tool for mild cognitive impairment. J Am Geriatr Soc. 2005;53:695-99
5. Kivipelto M et al. The Finnish Geriatric Intervention Study to Prevent Cognitive Impairment and Disability (FINGER): study design and progress. Alzheimers Dement. 2013;9:657-65.
6. Lopez OL et al. Long-term effects of the concomitant use of memantine with cholinesterase inhibition in Alzheimer disease. J Neurol Neurosurg Psychiatry. 2009 Jun;80(6):600-7
7. Savaskan E et al. Recommendations for diagnosis and therapy of behavioral and psychological symptoms in dementia (BPSD).Praxis (Bern 1994). 2014;103:135-48
8. Cohen-Mansfield J. Nonpharmacologic interventions for inappropriate behaviors in dementia: a review, summary, and critique. Am J Geriatr Psychiatry. 2001;9:361-81
9. Kressig RW. Non-pharmacological interventions in dementia. Internistische Praxis 2017;58:1-7
10. Verghese J et al. Leisure activities and the risk of dementia in the elderly. N Engl J Med. 2003;348:2508-16
11. Trombetti A et al. Effect of music-based multitask training on gait, balance, and fall risk in elderly people: a randomized controlled trial. Arch Intern Med. 2011 Mar 28;171:525-33.
12. Winkelmann A et al. La rythmique Jacques-Dalcroze. Une activité physique novatrice pour les personnes agées. Gériatrie Pratique 2005;3:52-55

Une infection commune, à ne pas banaliser et prévenable par la vaccination !

En dépit de décennies de surveillance et d’ interventions (pharmacologiques et non-pharmacologiques), les virus de la grippe saisonnière continuent de causer de lourdes épidémies dans le monde chaque année. Sous nos latitudes, les affections dues aux virus influenzae A/H1N1, A/H3N2 et influenzae B surviennent chaque hiver. Le processus clé qui sous-tend ces épidémies récurrentes est la capacité évolutive des virus à échapper à la mémoire immunitaire induite par les contacts antérieurs (infection et/ou vaccination).

Bien que nous commencions à comprendre les mécanismes qui sous-tendent cette dynamique, le moment et la nature de l’ émergence de nouvelles souches demeurent encore pour la plupart imprévisibles (1). Trop souvent considérée comme une affection bénigne, la grippe est très contagieuse et à l’  origine de 1000 à 5000 hospitalisations et 1500 décès chaque année en Suisse (www.bag.admin.ch). Sa prévention par la vaccination est actuellement la mesure la plus efficace (2-5) et les recommandations ont d’ ailleurs peu changé depuis 2013 (www.infovac.ch). Le vaccin est recommandé annuellement chez toutes les personnes dites à risque accru de complications (Tableau 1, 2) sans qu’ il y ait d’ évidence d’ une réduction de l’ efficacité de protection avec ce schéma de vaccination. En Suisse, les affections grippales sont surveillées par le système de déclaration Sentinella et toutes les infections confirmées en laboratoire sont enregistrées dans un système de déclaration obligatoire.
Cette surveillance et les données collectées permettent aux chercheurs de surveiller les tendances épidémiques des virus grippaux et d’ accumuler les séquences virales dans les bases de données publiques. Une meilleure sélection des virus candidats aux vaccins et la détection précoce des virus résistants aux médicaments en est une résultante directe tout comme les avancées prometteuses en matière de prévention et de traitement.

La saison grippale 2018/19 en chiffres

En Suisse, les virus qui ont circulé pendant la dernière saison étaient très majoritaire des virus influenzae A de type A/H1N1pdm09 et A/H3N2. La résultante a été que la couverture vaccinale était excellente (99.5%). Le vaccin quadrivalent n’ a présenté qu’ un très faible avantage, car les virus de la lignée influenzae B-Yamagata n’ ont que très peu circulé. Selon les études, l’ efficacité vaccinale chez les personnes non hospitalisées a été estimée à 32-68 %. Elle était nettement plus élevée vis-à-vis des virus A/H1N1pdm09 (45-72 %) qu’ A/H3N2 (-39 à 45 %).
Sur l’ ensemble de la saison 2018/19, la surveillance entre du 30 septembre 2018 au 20 avril 2019, a été estimé que 209 200 personnes (2.5% de la population Suisse) ont consultés un médecin de premier recours pour une affection grippale, soit une incidence globale de 2466 premières consultations pour 100 000 habitants. Ce chiffre est de 13% plus bas que l’ incidence saisonnière globale moyen sur les dix dernières saisons (2846/100 000). Le seuil épidémique pour la saison 2018/19 se situait à 68 cas de suspicion de grippe pour 100 000 habitants. L’ incidence des consultations hebdomadaire a dépassé ce seuil de la mi-janvier (semaine 2/2019) à la mi-mars (semaine 12/2019) pour une durée totale de 11 semaines avec un pic épidémique atteint à la sixième semaine de 2019 (306 consultations / 100 000 habitants) qui était le plus bas mesuré depuis 2012/13. Si l’ incidence était maximale chez les enfants de 0-4 ans (4993 consultations / 100 000 habitants), les 65 ou plus étaient la catégorie de la population qui a été la moins infectée avec tout de même 1426 consultations / 100 000 habitants (www.bag.admin.ch).

Cette catégorie d’ âge par contre, le nombre de décès a très légèrement dépassé les valeurs attendues au début mars 2019. Chaque année, cette surmortalité témoigne de la gravité de l’ épidémie dans cette population et du risque d’ évolution grave chez les personnes vulnérables. Parmi l’ ensemble des cas de grippe déclarés, 7.6% appartenait au groupe des personnes présentant un risque accru de complication et 36.6% aux 65+. La proportion la plus élevée d’ hospitalisation pour suspicion de grippe était aussi enregistrée dans cette population (4.7%) et le plus faible chez les 5-29 ans (0%). Une pneumonie a été diagnostiquée chez 3,4 % des cas de suspicion de grippe déclarés, le plus souvent chez les plus de 64 ans (10.5 %), le plus rarement chez les enfants de 0 à 4 ans (1.5 %) (www.bag.admin.ch).
Durant la saison 2018/19, environ 7.9% des personnes déclarées pour suspicion de grippe avec un statu vaccinal connu étaient vaccinés. Cette proportion était plus importante dans les groupes chez qui l’ OFSP recommande la vaccination (Tableau 1) avec 33.5% chez les 65+ et 40.1% avec un risque accru de complications. Un traitement antiviral, dans la plupart des cas par un inhibiteur de la neuraminidase a été administré chez 2.2% des personnes ayant déclaré une grippe ; 10.4% ont reçu un traitement antibiotique probablement en raison d’ une surinfection
bactérienne (www.bag.admin.ch).

La grippe est contagieuse avant les symptômes et parfois même asymptomatique

La grippe se transmet par contact direct avec une personne infectée (éternuement, toux jusqu’ à 1 mètre), notamment dans des espaces clos. Mais, les virus grippaux peuvent aussi rester vivants jusqu’ à 48 heures sur des surfaces inertes. Comme il a été estimé qu’ un individu adulte peut avoir jusqu’ à 40 contacts facial par heure avec ces mains, les contacts avec des objets et des surfaces inertes « contaminés » (table, poignées de portes, bouton d’ ascenseur, rampe d’ escalier, billet de banque, etc.) sont une voie de transmission à ne surtout pas banaliser (6). Les personnes contaminées peuvent transmettre les virus de la grippe à d’ autres même si elles ne se sentent pas (encore) malades (6). De plus, près d’ un tiers des personnes infectées ne présente aucun des symptômes spécifiques et ne se sent même pas malade (7). Ces personnes peuvent être des vecteurs de transmission qui s’ ignorent.
La vaccination contribue fortement à diminuer le risque de transmission chez les personnes vaccinés, mais aussi chez les non vaccinés lorsque le taux de couverture vaccinale est suffisant (≥ 75% de la population) par le biais de l’ immunité de groupe (8). Les professionnels de la santé sont parmi les personnes les plus fortement exposées au risque de contracter la grippe (9). De plus, les arrêts de travail pour maladie qui en résultent impliquent souvent une charge de travail supplémentaire pour les collègues en période épidémique et/ou des contraintes de réorganisation en rapport avec le recours à du personnel intérimaire notamment dans les EMS et les hôpitaux (10).

La grippe en clinique

Après contamination, les symptômes grippaux apparaissent généralement en un à trois jours. La grippe saisonnière se manifeste par une sensation de malaise général, une brusque poussée de fièvre, des frissons, des maux de tête, des arthro-myalgies, une perte d’ appétit et de vertiges. La seconde phase se caractérise par l’ intensification des symptômes respiratoires (toux sèche, maux de gorge, enrouement, rhinite). La fièvre dure en générale 3 à 8 jours et la convalescence 7 à 15 jours mais peut se prolonger au-delà (11). Cependant chez les personnes âgées et/ou celles présentant des affections chroniques, la grippe est loin d’ être une maladie bénigne et peut s’ accompagner des complications (12). Les complications les plus fréquentes sont les pneumonies infectieuses. Primaires, elles sont dues à la virulence directe du virus de la grippe ; secondaires, à une surinfection bactérienne (12).

La vaccination, recommandée chaque année reste la prévention la plus efficace

La vaccination reste la prévention la plus simple, efficace et économique chez les personnes à risque accru de complication et/ou de transmission de l’ infection grippale (Tableau 1). La diversité antigénique des virus grippaux humains représente cependant encore un défi pour le développement de vaccins dotés d’ une protection immunitaire durable (1).

Les alternatives à la vaccination – Les autres moyens de lutter contre la grippe, notamment les mesures d’ hygiène (même si elles sont indispensables) restent un complément à la vaccination et ne peuvent la remplacer. En l’ absence de vaccin ou de traitement spécifiques des autres infections respiratoires hivernales, les masques, les appareils de protection respiratoire et l’ hygiène des mains ainsi que les mesures barrières (isolement «’  gouttelettes’  », éloignement social) restent de ce fait les seules armes efficaces (13-15). De façon intéressante, les effets immunomodulateurs de la VitD ont été considérés dans la prévention de la grippe et des infections respiratoires saisonnières (16). Dans essai randomisé contrôlé en long séjour, il a été montré qu’ une supplémentation par 100 000 UI/mois de VitD réduisait l’ incidence des infections respiratoires aiguës (2) comparativement à une supplémentation standard (400-1000 UI/jour) (17). Si les effets anti-infectieux de la VitD sont de mieux en mieux documentés, aucune donnée actuellement ne confirme un effet de la VitD sur l’ immunogénécité des vaccins antigrippes (18).

Les vaccins actuellement disponibles et autorisés pour les adultes – Ils contiennent par dose de 0,5 ml, 15 µg d’ hémagglutinine (HA) de chacune des souches virales constitutives. Il existe des vaccins trivalent (3 souches grippales = A/H1N1pdm2009, A/H3N2, et B-Victoria – Agrippal®, Fluarix®, Influvac® et Mutagrip®) et un vaccin quadrivalent (4 souches virales = trivalent + B-Yamagata – Fluarix Tetra®). Chez l’ adulte, il n’ y a pas d’ arguments cliniques à privilégier un vaccin trivalent ou un vaccin tétravalent. Le vaccin trivalent Fluad® a la particularité de contenir un adjuvant (MF59C) qui en renforce l’ immunogénicité et l’ efficacité (19). Il est particulièrement recommandé pour les adultes à partir de 65 ans (www.sevaccinercontrelagrippe.ch) (20). Si les vaccins sont disponibles pour tous, la priorité est la vaccination des personnes appartement à un groupe à risque accru de complications (Tableau 1) (www.infovac.ch). Tous les vaccins autorisés en Suisse sont inactivés et exempts de mercure et d’ aluminium. En mars dernier, l’ Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié ses recommandations pour la composition des vaccins Influenza pour l’ hémisphère nord pour la saison 2019/2020. En comparaison avec les vaccins 2018/2019, la composition du vaccin trivalent a été modifiée en ce qui concerne les A/H3N2 (A/Kansas/14/2017) et A/H1N1 (A/Brisbane/02/2018) afin de mieux couvrir les virus en circulation. La souche B-Victoria (B/Colorado/06/2017) reste inchangée tout comme la souche supplémentaire influenzae B contenue dans le vaccin tétravalent (B / Phuket/3073/2013-like). Sans adjuvant, les vaccins sont disponibles depuis la fin du mois de septembre.

La controverse sur la vaccination annuelle – Plusieurs études observationnelles ont suggéré qu’ une vaccination annuelle répétée aurait un effet négatif sur la protection pendant certaines saisons. Cette interférence négative a été principalement observée pour l’ influenzae A/H3N2 (21, 22). Ce phénomène doit cependant être interprété avec prudence et ne doit pas encore conduire à modifier la pratique et la politique en matière de vaccination (23). En effet, le recul temporel est trop court et trop peu d’ études ont été réalisées. De plus, l’ hétérogénéité des résultats est très grande. Peu de travaux ont analysé l’ effet de plusieurs vaccinations annuelles sur l’ efficacité du vaccin, même si elles suggèrent que l’ efficacité antigrippale pourrait être influencée par le schéma de vaccination des saisons précédentes. Bien que l’ hypothèse de la «distance antigénique» offre un cadre théorique simplifié pour expliquer les effets d’ une vaccination répétée contre la grippe, des recherches supplémentaires sont nécessaires pour bien comprendre ce phénomène, et également dans un contexte où le vaccin serait administré sur plus de deux saisons consécutives (www.vaxinfopro.be/spip.php?rubrique28). D’ autres travaux ont confirmé que la vaccination répétée, tant chez les jeunes que les personnes âgées, contribuait à des réponses immunitaires largement réactives tant au sein de différents sous-types viraux que de réponses croisées entre sous-types antigéniques différents (24, 25, 26). Cela illustre l’ impact de l’ âge et des antécédents d’ exposition à la grippe sur la capacité d’ une personne à réagir à de futures infections grippales.

Quel est le futur en matière de vaccination ? – Les vaccins actuellement disponibles permettent en théorie de réduire de 70 % le risque de grippe chez un adulte en bonne santé lorsque les souches vaccinales correspondent bien aux souches circulantes (ce qui n’ a pas été le cas notamment durant la saison 2015/16 par exemple) (4). Cette réponse immunitaire spécifique aux souches vaccinales présente parfois une efficacité sous-optimale. Si l’ âge et les capacités immunitaires du vacciné (20) contribuent à expliquer pourquoi la protection vaccinale s’ abaisse à 30-40 % chez les seniors (2, 3), la qualité de la protection virale est dépendante aussi de la qualité de la reformulation annuelle du vaccin (27). L’ ajout d’ un adjuvant est un moyen simple et efficace d’ améliorer l’ immunogénicité, mais cela augmente de facto la réactogénicité. Si cela se résume le plus souvent à des réactions au point d’ injection plus intenses (28), cela induit surtout un rejet de la vaccination au sein des populations (29). De nouveaux vaccins dits «universels», sont actuellement en cours de développement. Ils devraient permettre de surmonter les problèmes liés à la forte variabilité des virus grippaux nécessitant la mise à jour annuelle de la composition des vaccins saisonniers et la revaccination. Ces vaccins sont actuellement principalement élaborés à partir des épitopes hautement conservés du domaine HA, NA ou extracellulaire de la protéine M2 de la grippe, ainsi que ceux basés sur les protéines internes telles que NP et M1. Ces vaccins devraient pouvoir induire une protection contre les souches homologues, dérivées et celles issues d’ un glissement antigénique du virus grippal en évitant ainsi la nécessaire reformulation annuelle et surtout atténuer le fardeau de la maladie. Si ces vaccins démontraient leur immunogénicité, efficacité et leur capacité à conférer une immunité durable, ils pourraient être intégrés à la composition des vaccins actuels voir les remplacer (29).

La place et l’ efficacité des antiviraux dans la lutte antigrippe

Des antiviraux contre la grippe sont disponibles et leur utilisation contribue en cas d’ infection à éviter des complications sévères dans les situations à risque. Ils doivent idéalement être administrés au plus tôt après le début des symptômes grippaux. Le traitement empirique des patients suspects d’ avoir une grippe n’ est habituellement pas recommandé. Un traitement antiviral est indiqué pour les patients dont la maladie respiratoire est sévère, durant la période d’ épidémie avec des symptômes grippaux de moins de 48 heures (30).
Les principaux antiviraux utilisés actuellement sont les inhibiteurs de la neuraminidase représentés par l’ oseltamivir, le zanamivir et le peramivir (non disponible en Suisse) (31). Ils limitent la diffusion des virus en dehors des cellules infectées. Les inhibiteurs de la protéine M2 tels que l’ amantadine et la rémantadine limitent la pénétration du virus dans la cellule. Ils réduisent efficacement les complications et plus généralement l’ évolution des symptômes. Si la grande majorité des virus y sont encore sensibles, certaines mutations conduisent à des résistances (neuraminidase : H275Y et E119V ; gène de la protéine M2 : Ser31). Les taux de résistance pour les virus grippaux en circulation sont sous étroite surveillance. L’ OMS peut fournir en temps réel les informations relatives à l’ utilisation possible dans la prise en charge thérapeutique ou prophylactique (par ex. épidémie en communautés fermées, institution, etc.) (30, 32). Durant la saison 2018/19, un seul frottis a montré une résistance contre l’ oseltamivir (www.bag.admin.ch).

Même si les cas de résistance sont rares (Europe < 0.3% et USA : 1% des A/H1N1pdm09, et 0% pour les autres virus) en raison de la possibilité de mutations virales et de résistance, une certaine énergie est engagée dans le développement d’ antiviraux dotés de différents mécanismes, surtout dans le cas d’ une nouvelle souche pandémique.

Les nouveaux antiviraux – Plusieurs nouveaux antiviraux en sont à divers stades de développement et peuvent représenter de nouvelles classes de traitements qui pourraient réduire les symptômes et les complications chez les patients à risque élevé (Tableau 1). Par exemple, le baloxavir est une molécule dotée d’ un nouveau mécanisme d’ action qui vient juste d’ être approuvée par la Food and Drug Administration aux États-Unis (31). Il est le premier agent d’ une nouvelle classe que sont les inhibiteurs de l’ endonucléase du virus influenza qui est nécessaire pour la réplication du virus dans la cellule hôte. D’ autres cibles sont encore à l’ étude, notamment les kinases virales, l’ endocytose et la fusion virale.

Les alternatives thérapeutiques – Au cours de la dernière décennie, un certain nombre d’ anticorps monoclonaux humains ont démontré leur capacité à se lier à une vaste gamme de virus grippaux A et B et surtout à les neutraliser. La plupart de ces anticorps monoclonaux sont dirigés contre la tige de l’ hémagglutinine virale et certains ont maintenant été évalués dans le cadre d’ essais cliniques de stade précoce à intermédiaire (33). Une conclusion importante de ces études cliniques est que ces anticorps sont sûrs et réduisent les symptômes de la grippe. Des anticorps antigrippaux bi- et multi-spécifiques ont également été identifiés, mais n’ ont par contre pas encore fait l’ objet d’ essais cliniques. À l’ avenir, les thérapies à base d’ anticorps pourraient faire partie intégrante de notre arsenal pour prévenir et traiter la grippe (33).

Conclusion

La grippe est l’ infection qui, en Suisse, cause chaque année le plus de décès et notamment parmi les plus vulnérables. Bien que les antiviraux et les vaccins contribuent à réduire le fardeau sanitaire et économique de la grippe, les épidémies continuent de faire des ravages. Si les mesures de protection individuelles (port de masque et hygiène des mains) sont un bon complément, la vaccination reste le pilier en matière de prévention. Il faut continuer à redoubler d’ effort pour améliorer les taux de couverture vaccinale chez les patients à risque et les professionnels de santé
(Tableaux 1, 3A et 3B).

Dr. med. Pierre-Olivier Lang, PhD

Genolier Klinik und Montchoisi Klinik
Route du Muids 3
1272 Genolier
plang@genolier.net

plang@genolier.net

L’ auteur n’ a déclaré aucun conflit d’ intérêts en relation avec cet article.

  • La grippe est une infection virale aiguë très contagieuse.
  • La grippe provoque des épidémies annuelles avec un pic hivernal.
  • La grippe est un problème majeur de santé publique notamment dans les populations dites à risque (cf. tableau 1).
  • Dans 30% des cas, la grippe peut rester asymptomatique mais la
    personne est contagieuse et donc potentiellement vecteur du virus au sein de son entourage.
  • Les professionnels de la Santé sont particulièrement à risque d’ être infectés et de transmettre la grippe.
  • La vaccination est actuellement le moyen de prévention le plus efficace ; les mesures de protection individuelles sont un bon complément
  • En cas de grippe, les antiviraux sont plus efficaces s’ ils sont administrés durant les 48 premières heures.

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Analgésiques non opioïdes en gériatrie

La pharmacocinétique et la pharmacodynamique de la pharmacothérapie liée à l’ âge en général et de la pharmacothérapie liée à la douleur en particulier doivent tenir compte des modifications de la pharmacocinétique et de la pharmaco-dynamique liées à l’ âge. Dans cet article, ces changements sont présentés et, en s’ appuyant sur eux, des suggestions pour l’ utilisation raisonnable des analgésiques chez les
personnes âgées sont proposées.

Pour avoir un effet sans restriction, les médicaments doivent être absorbés, distribués, métabolisés et éliminés selon les lois de la pharmacocinétique. Avec l’ âge, ces paramètres sont sujets à des changements significatifs : L’ absorption dans le tractus gastro-intestinal est habituellement retardée, la distribution et le métabolisme sont habituellement réduits et l’ élimination rénale ralentie. Cela peut mener à une évaluation négative des avantages et des risques d’ une médication à long terme pour les personnes âgées : Les risques de la thérapie peuvent dépasser les avantages.
Pour aggraver la situation, plusieurs maladies sont souvent traitées en même temps ; la probabilité d’ une polymédication avec un risque d’ interaction correspondant est élevée. A cela s’ ajoute la menace d’ une « cascade de prescriptions » : un effet indésirable médicamenteux (EI) est considéré comme un symptôme indépendant nécessitant un traitement pharmacologique, et la personne âgée en particulier reçoit un grand nombre de substances dont on ne peut guère se faire une idée d’ ensemble du bénéfice cumulé – et des interactions possibles.
De nombreuses publications et recommandations de traitement abordent la pharmacothérapie des patients gériatriques. Aux Etats-Unis, l’ American Geriatrics Society publie régulièrement les Beers Criteria®, qui ont identifié 65 substances dont les risques potentiels dépassent les bénéfices pour les personnes âgées. Dans les pays germanophones, par exemple, la liste PRISCUS des médicaments potentiellement inadéquats pour les personnes âgées peut être consultée de manière analogue.

Changements physiologiques chez les personnes âgées avec influence sur la pharmacocinétique
De nombreuses fonctions corporelles sont sujettes à des changements physiologiques dans le processus de vieillissement, qui ont une influence sur la pharmacocinétique et la pharmacodynamique. Par exemple, la masse corporelle et le métabolisme de base diminuent, le volume de distribution des substances lipophiles augmente avec l’ augmentation de la masse grasse, celui des substances hydrophiles diminue avec la réduction de l’ eau corporelle et la liaison aux protéines plasmatiques est réduite. La motilité gastro-intestinale et la sécrétion de prostaglandines protectrices sont réduites et l’ atrophie gastrique peut réduire la surface d’ absorption des substances. Une diminution de la sécrétion pancréatique exocrine s’ accompagne d’ une diminution du flux sanguin hépatique. En particulier, les réactions hépatiques de phase 1 sont ralenties, de sorte que les médicaments ne peuvent souvent être métabolisés que plus tardivement. Enfin, la filtration glomérulaire et le flux sanguin rénal sont réduits lors de la vieillesse, ce qui retarde l’ élimination.

Changements physiologiques avec l’  âge qui affectent la pharmacodynamique

Les changements dans le système nerveux autonome s’ accentuent avec l’ âge, de sorte que les substances anticholinergiques peuvent entraîner une augmentation des EI. Les substances sédatives augmentent le risque de chute et réduisent la cognition. Les opioïdes et les AINS en particulier font partie des médicaments qui augmentent le nombre de chutes (fall-risk-increasing drugs, FRIDs) qui devraient être évités dans ce contexte. La dysrégulation orthostatique avec étourdissements et syncope est plus facilement causée par l’ utilisation de substances hypotensionnelles. Au cours du processus de vieillissement, le système nerveux subit un changement dans le traitement de la douleur et l’ expérience de la douleur. Les processus endogènes inhibiteurs de la douleur et la vitesse de conduction nerveuse sont réduits. Par la diminution et l’ inhibition des fibres Aδ la tolérance à la douleur est augmentée, par une réponse renforcée des fibres C la douleur est retardée, mais perçue plus intensément. La distribution des neurotransmetteurs et le nombre de récepteurs postsynaptiques sont réduits, par exemple les récepteurs dopaminergiques ou les récepteurs adrénergiques α et β. L’ efficacité des opioïdes augmente.
Les changements physiologiques s’ accompagnent de symptômes fréquents chez les personnes âgées : Par exemple la dysphagie qui rend difficile l’ ingestion de comprimés et qui est fréquente – chez les personnes âgées vivant à domicile, la prévalence est supposée se situer entre 30 et 40 %; chez les patients âgés en institution, elle est de 60 %. Dans ce cas, l’  administration de substances sous forme de gouttes ou sous forme de système transdermique est avantageuse.

Analgésiques chez les personnes âgées

La douleur chronique est le symptôme le plus courant chez les personnes âgées qui nécessite un traitement, et sa prévalence augmente avec l’ âge. La douleur chronique a une énorme influence sur la qualité de vie et la compétence personnelle et favorise le risque de maladies affectives, de dysfonctionnements dans la vie quotidienne et le besoin permanent de soins. En plus de l’ analgésie, le traitement de la douleur chez les personnes âgées vise à éviter les EI pertinents, à favoriser l’ activité, la mobilité et à maintenir la qualité de vie. Dans le cadre d’ un concept de thérapie multimodale, on utilise à la fois des préparations sur ordonnance et en vente libre, telles que des analgésiques non opioïdes, des opioïdes faibles et forts ainsi que des adjuvants comme les corticostéroïdes, les antidépresseurs ou les antiépileptiques. Avant d’ utiliser des analgésiques non opioïdes, il faut évaluer les facteurs de risque individuels des effets indésirables gastro-intestinaux, hépatiques, rénaux, hématologiques et cardio-vasculaires et les inclure dans la décision thérapeutique.

Les opioïdes sont administrés avec plus de prudence et avec une indication stricte chez les personnes âgées : constipation, tendance accrue à tomber avec risque de fracture, danger de dépendance, de sédation, déficience cognitive jusqu’ à délirium limitent leur usage. L’ usage à long terme des AINS n’  est recommandé qu’  avec prudence en général et spécialement pendant la vieillesse. Dans ce groupe de patients, les saignements gastro-intestinaux et les ulcérations, une réduction de la fonction rénale et la favorisation d’  un délire ou d’ autres symptômes nerveux centraux font partie des risques. Une insuffisance rénale grave (DFG < 30 ml/min) doit être exclue avant l’ administration d’ AINS.
Les inhibiteurs sélectifs de la COX-2 se sont également avérés défavorables chez ce groupe de patients, principalement en raison de l’ incidence accrue d’ infarctus du myocarde et d’ AVC.
Des exemples d’ analgésiques non opioïdes administrés en gériatrie sont présentés dans le tableau 1.

Exemples d’  analgésiques non opioïdes administrés en gériatrie (tab. 1)

Acide acétylsalicylique, AAS

L’ AAS n’ est approuvé comme analgésique dans l’ automédication que pour le traitement à court terme sur trois jours. L’ utilisation prolongée doit être surveillée par un médecin. En plus de ses propriétés analgésiques, antiphlogistiques et antipyrétiques, l’ AAS a également une activité antiplaquettaire importante. Les effets rénaux comprennent la rétention d’ eau. Les patients âgés souffrant d’ hypertension artérielle ou d’ insuffisance cardiaque qui souffrent d’ insuffisance rénale et qui prennent éventuellement des diurétiques ou des inhibiteurs de l’ ECA devraient être traités très prudemment avec l’ AAS en doses analgésiques. L’  AAS montre la gamme complète d’  effets indésirables typiques des AINS. De plus, de faibles doses d’ AAS réduisent l’ excrétion d’ acide urique et peuvent causer des crises de goutte chez les patients prédisposés. L’ AAS est disponible sans ordonnance, même si selon Swissmedic 2018, les saignements gastro-intestinaux surviennent chez environ un patient traité sur 1 000 et peuvent être mortels.

Célécoxib

Bien que cet inhibiteur de la COX-2 soit approuvé pour le traitement de maladies chroniques telles que l’ arthrose, la polyarthrite rhumatoïde ou la spondylarthrite ankylosante, le fabricant déconseille son administration à long terme ou recommande une surveillance attentive et une évaluation répétée des avantages et des risques. Le risque de saignement gastro-intestinal est le même que pour les inhibiteurs non sélectifs de la COX. De plus, une incidence accrue d’ événements cardiovasculaires et cérébrovasculaires thrombotiques a été démontrée. Le risque d’ infarctus du myocarde augmente spécialement à des doses plus élevées. Le célécoxib n’ a pas de propriétés antiplaquettaires. Comme les autres AINS, le célécoxib peut être toxique pour les reins surtout chez les personnes âgées.

Diclofénac

Cette substance n’ est pas recommandée chez les patients atteints d’ une maladie cardiovasculaire. Si un traitement est nécessaire, il faut que les patients âgés ne reçoivent que des doses allant jusqu’ à 100 mg par jour pendant plus de 4 semaines. L’ insuffisance rénale, l’ insuffisance hépatique (classe C de Child Pugh) et l’ insuffisance cardiaque (NYHA III-IV) sont des contre-indications. Selon le fabricant, aucune donnée n’ est disponible sur l’ insuffisance hépatique ou rénale, et « la prudence est de mise ».

Etodolac

L’ étodolac est approuvé pour l’ analgésie à long terme chez les patients gériatriques. Aucune différence dans la pharmacocinétique ou le profil des EI n’ a pu être démontrée dans ce groupe de patients. De plus, la concentration d’ étodolac actif n’ est pas altérée par une insuffisance rénale ou hépatique. Selon le fabricant, une dysfonction hépatique grave, une insuffisance rénale ou une insuffisance cardiaque sont néanmoins des contre-indications. Selon le fabricant, l’ inhibition de la prostaglandine E2 dans l’ estomac est également faible et de courte durée. L’ étodolac s’ accumule dans le liquide synovial, ce qui offre des avantages dans le traitement de la douleur arthritique.

Ibuprofène

Il est approuvé uniquement pour le traitement à court terme de la douleur aiguë. Les contre-indications comprennent une dysfonction hépatique grave, une insuffisance rénale (clairance de la créatinine <30 ml/min) et une insuffisance cardiaque (NYHA III-IV). Il y a des indices que des doses élevées (2 400 mg/jour) augmentent le risque d’ événements thrombotiques artériels comme l’ infarctus du myocarde ou l’ AVC.

Indométacine

Parmi les AINS, il présente le risque le plus élevé de saignements gastro-intestinaux, d’ ulcérations et de perforations, y compris mortelles, chez les patients âgés, en outre, l’ incidence la plus fréquente d’ EI nerveux central de tous les AINS. Cette substance ne doit pas être utilisée dans les troubles gastro-intestinaux, l’ hypertension, l’ insuffisance cardiaque NYHA III-IV, les dysfonctionnements hépatiques graves et les états consécutifs à un pontage aortocoronarien.

Métamizole

Il agit par une combinaison d’ effets centraux et périphériques et a également des propriétés spasmolytiques. Si le profil de risque est positif, le métamizole est aussi fréquemment utilisé en gériatrie. Les risques manquants (voir les EI cardiaques, rénaux et gastro-intestinaux mentionnés ci-dessus), qui surviennent régulièrement sous traitement AINS, sont mis en balance avec les EI graves mais très rares d’ agranulocytose.

Paracétamol

Chez les personnes âgées, aucun ajustement posologique n’ est nécessaire tant que la fonction hépatique n’ est pas restreinte et qu’ il n’ y a pas d’ abus d’ alcool. En pareil cas, la monooxygénase hépatique CYP2E1 est induite et une production accrue du métabolite toxique NAPQI. Chez les individus en bonne santé, 2-4 % de la dose de paracétamol produit le NAPQI, qui est ensuite lié par le glutathion. Chez les patients atteints de cachexie gériatrique, les réserves de glutathion peuvent être réduites. En cas d’ insuffisance hépatocellulaire légère à modérée, le fabricant prescrit une dose maximale de 2 g/j ; en cas de dysfonction hépatique grave, le paracétamol est contre-indiqué. Les restrictions fonctionnelles rénales, par contre, ne sont normalement pas une contre-indication ; ce n’ est qu’ à une clairance de créatinine inférieure à 10 ml/min que l’ intervalle posologique est étendu à huit heures. Le paracétamol peut également être utilisé comme médicament à long terme. Cependant, une puissance relativement faible et l’ absence de propriétés anti-inflammatoires limitent le bénéfice.

Piroxicam

Le piroxicam a une biodisponibilité orale élevée et une longue demi-vie, donc une seule prise quotidienne est appropriée. Avec le piroxicam, le risque de saignements gastro-intestinaux, d’ ulcérations et de perforations est élevé chez les personnes âgées et sa prise entraîne également une augmentation de la tension artérielle. Les contre-indications comprennent les ulcères gastro-intestinaux, le dysfonctionnement rénal et hépatique, l’ hypertension, l’ insuffisance cardiaque NYHA III-IV, la condition après un pontage cardiaque.

Traitement de la douleur chronique chez les personnes âgées

Dans les établissements médico-sociaux, le paracétamol est le plus souvent utilisé dans le traitement de la douleur chronique, suivi de près par le métamizole, au deuxième rang des analgésiques. En Allemagne, le métamizole même est l’ analgésique le plus fréquemment administré dans les institutions de soins.
Le redouté EI sévère d’ agranulocytose sous métamizole, indépendant de la dose, est inférieur à 0,01 % des traitements. En Suisse, l’ incidence minimale de l’ agranulocytose associée au métamizole a été estimée entre 0,46 et 1,63 cas par million de traitements quotidiens, d’ après une récente étude de Bâle. Dans certains cas documentés d’ agranulocytose, on a observé une association avec une substance myélosuppressive. Tout patient à qui l’ on prescrit du métamizole doit être informé des premiers symptômes de l’ agranulocytose.
Le risque relatif d’ issue fatale du métamizole est plus faible que pour les autres analgésiques : Andrade et al. ont calculé le nombre de décès par 100 millions d’ utilisateurs pour une semaine d’ utilisation. Pour le diclofénac, ce sont 529 décès, pour l’  ASS 185, pour le métamizole 25 et pour le paracétamol 20. Si l’ on exclut les personnes souffrant d’ ulcère gastroduodénal de l’ anamnèse, on obtient 139 décès pour le diclofénac, 79 pour l’ ASS, 5,5 pour le métamizole et 3,6 pour le paracétamol. Ces dernières années, les besoins en analgésiques ont considérablement augmenté en Suisse. Le métamizole est affecté de façon disproportionnée : le nombre d’ ordonnances a plus que quadruplé entre 2006 et 2013. Cette substance pour le traitement des douleurs intenses est à privilégier chez les patients souffrant d’ insuffisance rénale qui ont développé des symptômes gastro-intestinaux dus aux AINS ou qui présentent d’ autres contre-indications pour ce groupe de substances.
En général, le gold standard pour le traitement analgésique des patients gériatriques, chez qui le succès du traitement à long terme et une fonctionnalité accrue dans la vie quotidienne devraient être atteints, est un comportement prudent en matière de prescription : Start Low, Go Slow. Dans la mesure du possible, les douleurs chroniques légères doivent être traitées avec du paracétamol et les douleurs plus intenses avec du métamizole. L’ utilisation à long terme d’ AINS devrait être évitée.
Bien sûr, l’ utilisation de coanalgésiques tels que les anticonvulsivants, les antidépresseurs, les stéroïdes, etc. devrait être envisagée dans le traitement de la douleur chronique chez les personnes âgées. Dans le cadre d’ un concept thérapeutique global, les thérapies physiques, la physiothérapie, la psychothérapie et la thérapie interventionnelle de la douleur sont fournies par une équipe de traitement interdisciplinaire. L’ effet global de ces mesures devrait garantir aux personnes âgées une thérapie de la douleur sûre et efficace, dans laquelle l’ évaluation des risques et des avantages est correcte.

Article traduit de « der informierte arzt » 09_2019

Dr. med. Antje Heck

Fachärztin für Klinische Pharmakologie und Toxikologie FMH
Fachärztin für Anästhesie FMH, Schmerzspezialistin SGSS
Leiterin Sprechstunde Medikamente in Schwangerschaft und Stillzeit
Oberärztin Psychiatrische Klinik Königsfelden
Postfach 432
5201 Brugg

antje.heck@pdag.ch

Prof. Dr. med. Eli Alon

Facharzt für Anästhesiologie FMH, Schmerzspezialist SGSS
Professor für Anästhesiologie und Schmerzmedizin an der
Universität Zürich
Praxis für Schmerztherapie
Arzthaus Zürich City
Lintheschergasse 3
8001 Zürich

eli.alon@arzthaus.ch

Une réunion d’ experts a été soutenue financièrement par Sanofi (sans participation). Le sponsor n’ a eu aucune influence sur le reportage.

  • Les changements physiologiques de la vieillesse entraînent une modification de la pharmacocinétique et de la pharmacodynamique. De plus, les effets désirés et non désirés des médicaments peuvent être influencés par des maladies à un stade avancé de la vie.
  • Les indications des fabricants concernant l’ indication, la posologie, l’ efficacité et les effets indésirables des analgésiques non opioïdes sont principalement fondées sur des études menées auprès de patients jeunes et plutôt en santé sur une période d’ observation relativement courte. Ces données ne sont pas transférables sans réserve à une utilisation chronique chez les personnes âgées.
  • Les maladies aiguës et chroniques des personnes âgées nécessitent également une évaluation des avantages et des risques modifiée dans le choix et la posologie d’ un analgésique.
  • Les opioïdes sont utilisés assez prudemment dans la vieillesse et avec des indications strictes : la constipation, la tendance accrue à tomber avec risque de fracture, le danger de dépendance, la sédation ainsi que la limitation cognitive jusqu’ au délire limitent leur usage.
  • En général, le gold standard pour l’ analgésie des patients gériatriques est le comportement de prescription restreint : Start Low, Go Slow. Les douleurs chroniques plus légères doivent être traitées avec du paracétamol si possible, et les douleurs plus intenses plutôt avec du métamizole. L’ utilisation à long terme d’ AINS devrait être évitée.
  • Si des AINS sont utilisés pour soulager la douleur inflammatoire aiguë, il est recommandé que les patients âgés reçoivent simultanément l’  administration d’  une protection gastrique dès le premier jour de la prescription.

S’  adresser aux auteurs.