Douleurs abdominales chroniques

La clarification et la prise en charge des patients souffrant de douleurs abdominales chroniques imposent des exigences élevées à toutes les personnes impliquées, tant au cabinet médical que dans la clinique externe gastro-entérologique. Cet article propose une approche sensée et discute des aspects actuels.

Les douleurs abdominales chroniques se situent dans le champ de tension entre les maladies organiques et fonctionnelles. En effet, la probabilité de la présence de maladies fonctionnelles augmente avec la durée de la maladie, mais la possibilité de maladies organiques n’  est jamais exclue. Ce fait peut être une cause constante d’ inquiétudes et de demandes d’ éclaircissements, en particulier pour les patients sensibles. Il n’ existe pas de définition établie de la chronicité de la douleur. C’ est plutôt dans l’ évaluation clinique qu’ il faut déterminer si l’ on est confronté à un processus progressif, un processus intermittent à long terme, une recrudescence d’ un problème chronique ou un nouveau problème indépendant. Cependant, les nouveaux critères de ROME IV exigent que les symptômes durent pendant au moins 6 mois afin de diagnostiquer le syndrome de douleur abdominale (1).

Premiers pas (2)

Identification positive des maladies fonctionnelles
Étant donné la prévalence élevée des troubles gastro-intestinaux fonctionnels, nous pourrions supposer qu’ un patient présentant des douleurs abdominales chroniques souffre d’ une forme commune de maladie gastro-intestinale fonctionnelle, comme le syndrome du côlon irritable (SCI) ou le syndrome de douleur abdominale à médiation centrale. Cependant, cette hypothèse peut être trompeuse. En effet, il faut essayer d’ identifier positivement les maladies fonctionnelles et ne pas simplement les diagnostiquer en utilisant la procédure d’ exclusion sous la devise « Vous n’ avez rien ». Une anamnèse psychosociale avec des questions telles que «Pourquoi êtes-vous venu au cabinet aujourd’ hui ? », « Quelles expériences traumatisantes se sont produites ?», « Comment interprétez-vous vos plaintes ?», «Votre qualité de vie souffre-t-elle à cause de ces troubles ? » ainsi que la clarification des diagnostics psychiatriques associés, du rôle de la famille et de la culture servent ce but (3). L’ examen physique tient compte de l’ absence de signes végétatifs typiques des maladies fonctionnelles (tachycardie, élévation de la tension artérielle ou transpiration lors de la provocation de la douleur), de la présence de cicatrices multiples sans indication claire, de l’ expression de la douleur avec les yeux fermés et de la diminution des expressions de la douleur lorsque la douleur sous pression est contrôlée au stéthoscope. Le test de Carnett convient à la détection des douleurs de la paroi abdominale, là où la douleur maximale est d’ abord palpée au repos. Si la douleur augmente avec la tension simultanée des muscles abdominaux, nous parlons d’ un test positif, ce qui peut être interprété comme un argument contre la douleur viscérale (3). La question de savoir si les troubles sont principalement basés sur des flatulences ainsi que sur une augmentation de la teneur en gaz abdominal peut être clarifiée sur le plan anamnestique et clinique.

Exclusion des maladies organiques
Pour exclure les maladies organiques, il faut tenir compte des symptômes d’ alarme tels qu’ un âge de 50 ans ou plus, un saignement rectal, une perte de poids ou des changements récents dans les habitudes intestinales. Les caractéristiques suivantes s’ appliquent plutôt aux maladies organiques : durée plus courte de la maladie, description des qualités sensorielles et non des émotions, affectation anatomique plus précise aux structures neuroanatomiques, et relations interpersonnelles le plus souvent plus simples. En plus d’ une palpation abdominale discrète, avec en particulier l’ exclusion des masses ou de l’ hépatomégalie, un diagnostic basal avec statut sanguin, CRP / calprotectine dans les selles et une sérologie cœliaque sont nécessaires. Les endoscopies sont indiquées pour les symptômes d’ alarme et pour les symptômes clairement associés au tractus gastro-intestinal. Cependant, le diagnostic du syndrome du côlon irritable basé sur les critères de ROME IV en l’ absence de symptômes d’alarme est considéré comme sûr en pratique (2, 3). D’ autres examens sont effectués spécifiquement en fonction de la clinique.

La pierre angulaire du traitement de la douleur abdominale fonctionnelle chronique
La base du traitement des troubles gastro-intestinaux fonctionnels chroniques est d’ abord, et avant tout, d’ établir une bonne relation médecin-patient avec de l’ empathie, de prendre les plaintes du patient au sérieux, de calmer, d’ éduquer et de fixer des objectifs thérapeutiques cohérents. Puis, il faut élaborer un plan de traitement spécifique et compréhensible pour le patient en offrant différentes options. Le patient peut être conseillé à assumer ses responsabilités, par exemple dans les domaines du mode de vie, de l’ entraînement physique, de la réduction du stress et des habitudes de sommeil. Le traitement doit être adapté à la gravité des symptômes et de l’ invalidité, avec une aide psychiatrique le cas échéant. Le traitement peut être diététique, médical ou psychologique.
Bien que la quasi-totalité des patients atteints de troubles gastro-intestinaux fonctionnels sentent un lien entre leur alimentation et les douleurs abdominales, les bienfaits de la thérapie nutritionnelle ont très peu d’  évidence. Les études sur le régime FODMAP sont celles ayant donné les meilleurs résultats ; l’ importance d’ un régime à teneur réduite en gluten est controversée, après avoir exclu la maladie cœliaque (4, 5).
Les analgésiques et opioïdes périphériques ainsi que les benzodiazépines ne se sont pas avérés efficaces. L’ utilisation de mucilages comme des fibres est également discutée en cas de constipation ; seuls les agents gonflants solubles se sont avérés être d’ une efficacité modeste. Le polyéthylène glycol n’ a fait aucune preuve contre la douleur fonctionnelle, cependant son effet laxatif est avéré. Il y a une faible évidence que les spasmolytiques aient des effets à court terme, mais ils peuvent avoir des effets secondaires anticholinergiques selon la substance. L’ huile de menthe poivrée semble pouvoir atténuer l’ hypersensibilité viscérale avec une preuve moyenne en plus d’ un effet spasmolytique. L’ utilisation d’ antidépresseurs, qu’ il s’ agisse de médicaments tricycliques ou d’ ISRS, est, de forte évidence (NNT = 4), et est particulièrement efficace chez les personnes présentant des symptômes dépressifs pour influencer les symptômes des maladies fonctionnelles. Cependant, leur utilisation est faiblement recommandée en raison des effets secondaires fréquents et souvent limitants pour les patients (4). De plus, de nombreux patients se sentent stigmatisés par la prescription d’ un médicament psychiatrique, ce qui explique leur mauvaise observance (2).

« Quand la normalité devient menaçante »
Dans la perpétuation des trouboes gastro-intestinaux fonctionels chroniques, les angoisses spécifiques aux symptômes gastro-intestinaux jouent un rôle important. Elles sont un facteur permanent des troubles gastro-intestinaux et se caractérisent par des inquiétudes ainsi qu’ une hypervigilance face aux sensations gastro-intestinales, allant des fonctions corporelles normales (faim, saturation, gaz) aux symptômes associés à un événement gastro-intestinal (douleur abdominale, diarrhée, urgence). Les inquiétudes et l’ hypervigilance se généralisent normalement au fur et à mesure que les craintes se manifestent. Elles débutent avant même l’ éventuelle apparition de sensations ou de symptômes, et ensuite lors des situations les plus probables où les symptômes se manifestent. Les états d’ anxiété liés à des symptômes gastro-intestinaux spécifiques peuvent conduire à un comportement disproportionné par rapport aux symptômes (6). Ces mécanismes et d’ autres se prêtent à un traitement psychologique comme la thérapie comportementale, et les méta-analyses ont montré que les traitements psychologiques avec un NNT de 2 à 4 sont au moins modérément efficaces pour diminuer les symptômes des troubles gastro-intestinaux fonctionnels chroniques (6).
Quelques modifications aux critères de ROME de la version III à IV
Maladies de l’ interaction cerveau-intestinal
Pour beaucoup de gens, qualifier la douleur et autres symptômes sans corrélation anatomique pathologique évidente de « fonctionnels » signifie une stigmatisation sous le prétexte erroné « n’ est que psychologique ou imaginaire ». Cette compréhension s’ avère également de plus en plus erronée, car la recherche scientifique a démontré que de nombreuses maladies dites fonctionnelles se caractérisent par des modifications organiques, qu’ il s’ agisse d’ inflammations de bas grade dans le cas du côlon irritable, de modifications du microbiome de l’ intestin, de troubles de la motilité ou de modifications du traitement central des afférences du système gastro-intestinal. Pour cette raison, les troubles gastro-intestinaux fonctionnels sont maintenant définis comme des maladies de l’ interaction entre le cerveau et l’ intestin (7, 8) et sont évalués dans le cadre d’ un concept biopsychosocial (6).

Critères de diagnostic du syndrome du côlon irritable et du syndrome de douleur abdominale à médiation centrale
La nouveauté, c’ est que, pour diagnostiquer le SCI, le symptôme « douleur » doit être présent et que les sous-catégories du SCI d’ aujourd’ hui sont plutôt considérées comme un continuum avec un spectre changeant de symptômes tels que la diarrhée ou la constipation au fil du temps. Les critères diagnostiques actuels C1 pour le SCI et D1 pour le syndrome de douleur abdominale à médiation centrale sont résumés dans le tableau 1.

Dr. med. Hans-Kaspar Schulthess

Facharzt FMF Innere Medizin und Gastroenterologie
Neuhausstrasse 18
8044 Zürich

Schulthess_hk@swissonline.ch

L’ auteur n’ a déclaré aucun conflit d’ intérêts en rapport avec cet article.

  • En l’ absence de symptômes d’ alarme et d’ augmentation de la durée des états douloureux abdominaux, la probabilité que des états douloureux fonctionnels soient présents augmente.
  • La clarification et la prise en charge des patients présentant des douleurs abdominales fonctionnelles suspectées sont fondées sur une bonne relation médecin-patient. Sur cette base, nous nous efforcerons d’ établir un diagnostic positif et d’ exclure les maladies organiques de manière appropriée. Le respect des critères de ROME IV peut contribuer à la sécurité du diagnostic.
  • Le traitement comprend un plan thérapeutique spécifique et compréhensible pour le patient. En outre, il englobe des mesures modifiant le mode de vie ainsi que des conseils diététiques, des médicaments et diverses formes de traitement psychologique, par exemple la thérapie comportementale.

Références :
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Possibilité de thérapie pour les troubles fonctionnels de l’ organe masticatoire

L’  hypnose médicale est une méthode de thérapie psychosomatique qui a également fait ses preuves pour le traitement de la douleur cognitive et pour le changement des comportements dans les maladies de l’ organe masticateur liées à un dysfonctionnement. Cependant, l’ hypnothérapie ne doit pas être considérée comme une méthode de traitement autonome, mais doit être utilisée en combinaison avec d’ autres méthodes thérapeutiques éprouvées. Dans cet article, les principes scientifiques sont présentés dans une brève revue de la littérature et la procédure thérapeutique est illustrée par deux études de cas.

Étiopathogénèse

Les maladies liées au dysfonctionnement de l’ organe masticatoire, également appelées myoarthropathies (MAP) ou dysfonc-tionnements crânio-mandibulaires (CMD), sont caractérisées par une étiopathogenèse complexe et ont généralement des causes multiples (voir aussi le « der informierte arzt » 2014;4(11):20-22). Il existe un risque élevé de douleur chronique associée à la maladie. Cette dernière est basée sur une perturbation de l’ équilibre fonctionnel entre les muscles faciaux et masticatoires, les articulations temporomandibulaires et les arcades dentaires. Au centre de la maladie se trouve l’hypertonus musculaire (1, 2). Les facteurs prédisposants comprennent les conditions systémiques (état général), psychologiques (personnalité et comportement) et structurelles (3). L’ influence des facteurs de stress joue souvent un rôle central dans le développement de la MAP. La congestion affective causée par les facteurs de stress est évacuée par les arcades dentaires et/ou les tissus mous buccaux. Cela se produit sous forme de grincement et de pressage des dents, de morsures de la langue, des lèvres et des joues, ainsi que d’ autres habitudes (4, 5).

Approches hypnothérapeutiques

En raison de l’ étiopathogénèse démontrée de la MAP, l’ hypnose médicale convient à la thérapie de la douleur cognitive et au changement des modèles comportementaux (6-10). Diverses approches thérapeutiques sont disponibles :

  • Ainsi, le patient peut être dissocié de la phase douloureuse grâce à un état de transe. Le patient a ainsi la possibilité, sous la direction d’ un hypnothérapeute qualifié, d’ analyser la douleur à partir d’ une position neutre et de trouver des approches cognitives créatives pour modifier la qualité, la quantité et la fréquence de la douleur. Cette instruction d’ autohypnose permet, d’ une part d’ obtenir un soulagement clair et une meilleure prise en charge des douleurs, et, d’ autre part de favoriser l’ auto-compétence du patient en reprenant un certain contrôle sur le processus de la douleur (11).
  • En thérapie comportementale, l’ hypnose médicale sert à guider le patient vers l’ autohypnose et donc de renforcer ses compétences personnelles. L’ objectif est d’ accroître la prise de conscience du corps et du comportement du patient, ce qui permet d’ apporter des changements cognitifs aux modèles de comportement tels que les parafonctions orales et occlusales (11-17).
  • En outre, l’ hypnose peut fournir des solutions créatives pour mieux faire face aux facteurs de stress quotidiens et les réduire. En outre, l’ autohypnose peut être utilisée comme thérapie de relaxation efficace (8, 18, 19).

Études expérimentales sur le traitement de la MAP par l’ hypnose

Les études suivantes documentent, à titre d’ exemples, l’ efficacité des interventions hypnotiques dans le traitement de la MAP. Simon et Lewis (7) ont examiné 28 patients qui n’ avaient pas répondu au traitement conservateur. L’ intensité, la durée et la fréquence de la douleur ainsi que la fonction craniomandibulaire ont été évaluées pendant la phase d’ attente, immédiatement avant et après le traitement ainsi que pendant un suivi six mois plus tard. La thérapie par hypnose comprenait l’ éducation sur l’ hypnose médicale et cinq séances d’ induction de transe par la fermeture des yeux, des suggestions de relaxation, d’ analgésie et d’ anesthésie, ainsi que l’ utilisation de métaphores de relaxation et de comportement. On a également demandé aux patients de répéter quotidiennement le traitement sur des supports sonores sous autohypnose. L’ analyse des données a montré une réduction significative de la fréquence et de la durée de la douleur et une amélioration de la fonction craniomandibulaire. Il a également été démontré que le soulagement de la douleur et l’ amélioration de la fonction ont persisté pendant six mois.
Winocur et al (8) ont comparé l’ hypnorelaxation à la thérapie par attelle ou à des informations sur la MAP et son auto-thérapie en contrôlant l’ activité motrice et la nutrition. L’ hypnorelaxation comprenait des suggestions de relaxation musculaire progressive et d’ entraînement à l’ autohypnose dans le but de détendre les muscles de la mâchoire et du visage. 40 patientes ont été réparties au hasard dans les trois groupes d’ essai : Hypnorelaxation (n = 15), thérapie par attelle (n = 15) et éducation / maîtrise de soi (n = 10). L’ intensité de la douleur a été déterminée à l’ aide d’ une échelle visuelle analogique (EVA) avant et après le traitement. Le traitement actif par hypnose ou attelle occlusale s’ est avéré plus efficace que l’ éducation et l’ orientation du patient pour l’ autosurveillance. Cependant, seule l’ hypnorelaxation, mais pas le traitement par attelle, a permis une réduction significativement plus importante de l’ intensité de la douleur par rapport au guidage pur du patient et à l’ autosurveillance, soit 57 % de la moyenne et 51% de l’ intensité maximale de la douleur. Dans une étude comparable, Freesmeyer & Pfanne (19) ont également observé une diminution significative de l’ intensité de la douleur et de la déficience due à l’ autohypnose et au traitement par attelle. Les patients avec une charge de stress élevée dans la situation initiale ont obtenu des résultats de traitement plus positifs que les patients avec une précharge plus faible.
Abrahamsen et ses collaborateurs (17) ont examiné 40 femmes qui ont été assignées au hasard à un groupe d’ hypnointervention et à un groupe témoin recevant une thérapie de relaxation classique. Les deux groupes ont suivi quatre séances individuelles d’ une heure sur plusieurs semaines ainsi qu’ un CD contenant des instructions pour l’ auto-thérapie à domicile. Cela comprenait des suggestions hypnotiques et des instructions pour l’ auto-hypnose dans un groupe et des instructions pour l’ application indépendante de techniques de relaxation dans l’ autre. La traçabilité des changements de symptômes de la suggestibilité ou de l’ hypnotisabilité des sujets du groupe d’ hypnose a été étudiée à l’ aide de l’ échelle Harvard Group Scale of Hypnotic Susceptibility (20). Tous les sujets ont tenu un journal de la douleur pendant toute la durée de l’ étude, en commençant sept jours avant la première intervention thérapeutique. L’ intensité quotidienne moyenne de la douleur a été comparée entre les deux groupes. Les stratégies de changement de la douleur des sujets ont été analysées avant et après le traitement à l’ aide d’ un questionnaire spécial. L’ état fonctionnel et psychologique, la qualité du sommeil et toute la pharmacothérapie ont également été évalués.
Il a été démontré que l’ intensité de la douleur pouvait être significativement réduite dans le groupe hypnose avec 50,4 %, mais pas dans le groupe témoin, dans lequel une augmentation de la douleur de 0,7 % a été observée. 26 % des sujets du groupe hypnose ont obtenu une baisse de la douleur de 75 %. Aucun membre du groupe témoin n’ a atteint ce niveau de réduction de la douleur. 52 % dans le groupe hypnose et seulement 5 % dans le groupe contrôle ont obtenu une diminution de la douleur de 50 %. Les sujets du groupe hypnose étaient nettement plus créatifs et plus aptes à optimiser leurs stratégies de changement de la douleur que ceux du groupe témoin. Dans ce dernier groupe, aucun changement dans l’ application des méthodes prescrites n’ a été observé. Les deux groupes ont montré une réduction significative du nombre de palpations des sites musculaires douloureux et de la fréquence des interruptions du sommeil liées à la douleur. Les symptômes d’ anxiété ont diminué de façon similaire dans les deux groupes. Quatre interventions d’ hypnose ont donc été suffisantes pour améliorer significativement la prise en charge de la douleur et pour obtenir une réduction significative de l’ intensité de la douleur quotidienne. Il n’ y a eu aucun effet secondaire. Dans une étude antérieure similaire, Stam et ses collaborateurs (18) n’ ont constaté aucune différence dans la diminution de la douleur entre la thérapie comportementale hypnotique et conventionnelle. L’ hypnose médicale semble donc être une méthode thérapeutique efficace et comparable pour traiter la douleur liée à la MAP (21, 22).
Dans une autre étude, Abrahamsen et ses collaborateurs (16) ont démontré que l’ hypnose médicale est un traitement efficace contre la douleur oro-faciale idiopathique. L’ intensité de la douleur déterminée avec un SVA a obtenu une baisse de 33,1 % dans le groupe hypnose et de seulement 3,2 % dans le groupe témoin. Les sujets présentant une suggestibilité et une hypnotisabilité élevées ont obtenu une baisse de la douleur plus importante (55 %) que ceux présentant des valeurs inférieures (17,9 %). Il y avait également des différences significatives entre les deux groupes en ce qui concerne les zones douloureuses et l’ utilisation d’ analgésiques. Les rapports sur la qualité de vie étaient comparables.

Présentation de cas 1 : L’ intervention en hypnose avec métaphore d’ un changement de comportement

Anamnèse : Une patiente de 43 ans souffrait de bruxisme, principalement en raison d’ un grave stress mental professionnel. Il en a résulté une surcharge des muscles masticateurs avec des maux de mâchoire, de visage et de tête. Les instructions pour l’ auto-observation et l’ auto-thérapie avec la chaleur et le massage musculaire n’ ont conduit que temporairement à un soulagement des plaintes, car la coopération du patient était insuffisante pour diverses raisons. C’  est pourquoi une intervention en hypnose a été décidée dans le but de renforcer l’ attention envers les facteurs de stress psychologiques et la réaction d’ un corps propre à ceux-ci. On espérait également que cela réduirait l’ intensité et la fréquence des crises de migraine, auxquelles le patient était aussi fréquemment exposé. Comme métaphore dans la transe, les meules d’ un moulin devaient être utilisées par analogie au bruxisme.

Protocole de transe : En transe, on a suggéré au patient d’ observer un moulin dont la roue à eau était entraînée par le ruisseau. Dans le moulin, le patient pouvait observer le broyage du grain entre les meules, tout comme le broyage des aliments par les dents. Leur attention intérieure était concentrée sur un levier qui pouvait être utilisé pour séparer les meules lorsqu’ il n’ y avait pas de grain entre elles. La patiente s’ est alors vu offrir de construire un levier qui lui permettrait de s’ assurer que ses rangées de dents étaient séparées chaque fois qu’ il n’ y avait pas de nourriture à mastiquer. Enfin, elle ancrerait ce levier quelque part soit en elle soit sur elle-même afin qu’ il soit à sa disposition en tout temps pour éviter le bruxisme.

Evolution : Dans les deux premiers jours après la séance d’ hypnose, le patient était constamment accompagné par le bruissement d’ un ruisseau et le cliquetis d’ un moulin. Elle voyait aussi son levier dans chaque objet allongé. Puis, les bruits et l’ image du levier disparurent. Le patient n’ était plus capable de visualiser le levier, mais, il n’ y avait plus de bruxisme et la douleur faciale a diminué. La fréquence et l’ intensité des crises migraineuses ont également diminué. Le patient n’ a observé aucune activité parafonctionnelle pendant plus d’ un an. Puis, le bruxisme est réapparu. Une seule répétition de la transe a conduit à une nouvelle absence de symptômes.

Présentation de cas no 2 : Intervention en hypnose pour améliorer la gestion du stress

Anamnèse : Une patiente de 46 ans s’ est plainte de maux de mâchoire, de maux de visage et de tête ainsi que de tension dans le cou, les épaules et la région du cou pendant son anamnèse. Les résultats ainsi que l’ auto-observation prescrite au début ont permis de diagnostiquer un syndrome douloureux myofascial dont les facteurs de stress étaient la cause principale. Bien que l’ auto-thérapie permette de reconnaître les situations stressantes de la vie quotidienne, elle n’ est pas suffisante pour détendre les muscles. Par conséquent, une intervention hypnotique visant à modifier le comportement ou à mieux gérer le stress a été envisagée.

Protocole de transe : Les deux premières séances de transe ont servi à ancrer et à approfondir un lieu sûr de retraite dans le subconscient. En se basant sur les inclinaisons du temps libre évaluées lors de la discussion préliminaire, on a suggéré au patient d’ utiliser un voilier en mer comme lieu sûr. L’ évaluation de cette première transe a montré que le patient était surmené en dirigeant le voilier. Par conséquent, la deuxième session a travaillé avec l’ image d’ un oiseau de mer qui pouvait voler librement et en toute sérénité au-dessus de la grande mer, où qu’ il aille. Deux aspects ont été décisifs : d’ une part, la conscience que l’ oiseau n’ avait besoin de pratiquement aucune force pour voler et pouvait être transporté complètement détendu par l’ air chaud de la mer, et d’ autre part, la possibilité de créer une distance entre lui-même et les problèmes sur terre (dissociation) en volant dans le ciel.
En transe, on a travaillé sur l’ utilisation de la posture détendue de l’ oiseau de mer pour détendre toute la musculature du corps, en particulier la tête, le cou et les muscles du cou. De plus, on a eu recours à la dissociation pour analyser les défis stressants d’ un point de vue différent et non pas directement impliqué. On a demandé à la patiente de répéter régulièrement dans la vie quotidienne la transe qu’ elle avait vécue. Lors de la troisième session, le contexte protégé du lieu sûr, c’ est-à-dire survoler la haute mer, a été utilisé pour analyser à distance une situation quotidienne difficile afin de développer de nouvelles stratégies pour mieux y faire face.
Bien sûr, grâce à ce guide d’ autohypnose, la patiente a pu mettre son corps, et en particulier les muscles de la tête et du cou eux-mêmes, sous pression.

Prof. Dr. med. dent. Christian E. Besimo

Riedstrasse 9
6430 Schwyz

christian.besimo@bluewin.ch

L’ auteur n’ a déclaré aucun conflit d’ intérêts en rapport avec cet article.

  • L’ hypnose médicale peut être considérée comme une méthode appropriée pour le traitement durable de la MAP sur la base des preuves disponibles issues d’ études scientifiques.
  • Cependant, il faut souligner que l’ hypnose médicale ne doit pas être comprise comme une méthode de traitement autonome, mais doit être considérée conjointement avec d’ autres méthodes thérapeutiques éprouvées.
  • Enfin, il faut souligner que l’ application de l’ hypnose médicale dans la pratique dentaire quotidienne nécessite une bonne formation à ce traitement. Une liste des thérapeutes appropriés peut être obtenue auprès de la Société Médicale Suisse d’ Hypnose SMSH
    http://www.smsh.ch).

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Un modèle genevois novateur

Le service d’  urgences gériatriques genevois est un nouveau modèle de structure de soins d’ urgences implantées dans un hôpital gériatrique, qui a pour but d’ offrir aux seniors une prise en charge interdisciplinaire par une équipe sensibilisée aux particularités des patients âgés. L’ environnement adapté à cette population et l’ absence de délai d’ attente permettent de rendre le passage aux urgences moins pénible pour le patient.

Introduction

Avec le vieillissement de la population, le Service d’ urgences adultes site Cluse-Roseraie (SU) accueille de plus en plus de personnes âgées ; en effet, les chiffres de 2015 montrent que les patients âgés d’ au moins 80 ans constituent 13 % des passages au SU, alors que ce groupe d’ âge représente actuellement 5 % de la population du Canton de Genève selon l’ OFS (1).
Il est bien connu que la population âgée recourt plus souvent aux services d’ urgences que la population jeune (2) et qu’ elle y reste plus longtemps (2-7). Ce milieu n’ est pas adapté aux patients âgés fragiles (8) qui relèvent d’ une prise en charge complexe, prenant en compte à la fois la pathologie aiguë mais aussi les comorbidités qui peuvent décompenser un équilibre précaire. Une bonne évaluation doit explorer de plus, les performances fonctionnelles, cognitives et le contexte social de chaque patient, afin d’ établir la meilleure orientation, les médecins urgentistes généralistes devant pouvoir se consacrer aux urgences vitales qui restent prioritaires.

Des solutions

Pour répondre au vieillissement démographique et à l’ afflux de personnes âgées aux urgences, les Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG) créent dans un premier temps en 2005 la « voie grise » (unité de gériatrie de liaison) dédiée aux seniors: il s’ agit d’ une équipe de gériatres implantés dans un service d’ urgence qui évaluent les
patients âgés non urgents en première intention ; si cette unité gériatrique apporte des améliorations, celles-ci sont insuffisantes, car les patients âgés non urgents doivent rester parfois plusieurs heures sur un brancard, et pour ceux qui doivent être hospitalisés, être transférés le lendemain à l’ Hôpital des Trois-Chêne (3C), situé à 6,8km.
Dès ce moment, la question d’ implanter directement une structure d’ urgences gériatriques au sein même d’ un hôpital de gériatrie, s’ impose comme une évidence.

Création des urgences gériatriques des Trois-Chêne

Le 1er novembre 2016, les Urgences Trois-Chêne (U3C) ont ouvert leurs portes au sein d’ un hôpital de gériatrie de près de 300 lits. Cette structure est la première du genre en Suisse. Elle est ouverte tous les jours de 8h à 19h et est dédiée à l’ accueil des patients de 75 ans et plus, en degré d’ urgence médicale non vitale, non chirurgicale, et ne nécessitant pas de spécialiste.
La mission première de ce service est d’ assurer la qualité de l’ accueil des patients âgés aux urgences, en leur apportant des soins spécifiques et adaptés ; ce projet s’ inscrit également dans le plan stratégique vision 20/20, où les HUG se sont engagés notamment à « diminuer l’ attente aux urgences ». La création de ces urgences gériatriques directement sur le site de l’ Hôpital de gériatrie, permet de plus de diminuer les transferts intersites et participe au désengorgement du SU.
Pour la conception de ce centre d’ urgences, nous nous sommes aidés de la littérature afin d’ éviter au mieux les écueils architecturaux: logique de flux dans les couloirs, contrastes de couleurs murssol, luminosité (lumière du jour et lumières indirectes dans les couloirs), espaces apaisants pour les patients agités, chambres individuelles (accompagnant bienvenu) pour les isolements, respect du rythme nycthéméral et distribution de repas 3x/j, respect de l’ intimité et calme ambiant, signalétique adéquate des WC et salles de bain, main courante (9,10).
L’ ergonomie des lieux a été pensée en tenant compte des contraintes d’ un bâtiment existant, auquel nous avons pu ajouter une nouvelle construction de 130m2, servant d’ accueil et d’ évaluation aux nouveaux patients ; elle permet de favoriser le flux des patients dans le même sens, de l’ extérieur du bâtiment vers l’ intérieur. Dès leur arrivée, les patients sont installés dans un lit, lit qu’ il garderont durant tout leur séjour s’ ils sont hospitalisés, et évalués par l’ infirmière qui prend les paramètres vitaux, évalue le degré d’ urgence du patient et assure les premiers soins ; le patient est ensuite rapidement acheminé dans une chambre (à un ou deux lits) afin d’ être examiné par son médecin. Il restera dans une chambre aux urgences durant toute la durée de son évaluation et pourra aussi y passer la nuit si nécessaire, en vue de déterminer son orientation le lendemain matin.
L’ Hôpital 3C est de plus pourvu d’ un service d’ imagerie hors pair depuis 2014 : scanner, IRM, échographie, radiologie standard. Cet équipement dernier cri permet de pouvoir effectuer un bilan complet du patient, sans le déplacer sur un autre site. Cependant, si celui-ci nécessite en urgence l’ avis d’ un spécialiste ou d’ un chirurgien, il est préférable qu’ il se rende directement au SU.
Lorsque le patient âgé est transporté en ambulance, son degré d’ urgence (donnant une indication du temps maximal d’ attente avant une prise en charge médicale) est évalué par les ambulanciers selon l’ échelle suisse de tri (EST). Cette échelle a été mise en place aux HUG en 1997 et est maintenant largement utilisée en Suisse et dans certains pays limitrophes. Les ambulanciers du canton de Genève ont été formés à son utilisation (11), afin de, non seulement quantifier la gravité du cas, mais aussi d’ indiquer l’ orientation du patient âgé vers le SU ou vers les U3C.

Typologie des patients des U3C en 2017 et 2018

En 2017, les U3C ont accueilli un peu moins de 3000 patients, pour la plupart des femmes (65 %), d’ un âge médian de 85 ans. 10 % des patients étaient âgés de moins de 75 ans. La moitié des patients est arrivée en ambulance, l’ autre moitié par ses propres moyens. Le temps de passage moyen passé en zone d’ évaluation était de 4,7h, et les patients ont été immédiatement pris en charge, sans délai d’ attente.
En 2018, la typologie des patients est en tout point comparable hormis une augmentation du flux de patients de 12 %. Malgré cette augmentation de flux, tous les patients ont pu, là encore, être pris en charge sans délai, même lors des mois chargés de décembre et janvier, propices au développement d’ infections virales (grippe, RSV, gastro-entérite,…).
Alors que nous devrions accueillir des urgences non vitales, 30 % des patients sont arrivés en 2017 en degré d’ urgences 1 ou 2 selon l’ EST, c’ est-à-dire en urgence vitale nécessitant une prise en charge immédiate ou dans les 20 minutes. Cette proportion s’ est maintenue en 2018 ; malgré cela, très peu de transferts vers le SU ont dû être effectués, indiquant que ces urgences vitales ont pu être gérées sur le site, démontrant ainsi les compétences des équipes médico-soignantes à gérer des situations de soins plus aiguës.
La dyspnée/ tachypnée/bradypnée constitue le principal motif d’ hospitalisation (assimilé au motif d’ admission et non pas au diagnostic médical retenu), suivi par la baisse de l’ état général, la chute, la douleur de dos, le malaise, la confusion, la fièvre. Les diagnostics principaux les plus fréquemment retenus sont : des causes cardiaques (principalement décompensation cardiaque), des causes pulmonaires (principalement pneumonie) et des causes ostéo-articulaires (chutes, fractures, arthrite, ostéoporose).
Le motif d’ admission de « baisse de l’ état général » étant fréquemment retrouvé, nous nous sommes penchés sur les dossiers pour voir si une pathologie se démarquait ; les diagnostics principaux étaient divers, sans qu’ aucune pathologie ne se singularise : delirium/ troubles cognitifs, infection, malaise et fatigue, tumeur maligne, pathologie cardiaque, dépression, dénutrition,….
A l’ issue du passage aux U3C, 62 % des patients sont hospitalisés aux 3C, 5 % sur des sites périphériques de réadaptation et 22 % retournent dans leur lieu de vie. Pour ceux qui passent 24h aux U3C et qui sont réévalués par l’ équipe médico-soignante le lendemain, ce chiffre de retour à domicile s’ élève à 26 %, grâce notamment à la réévaluation par nos infirmières de liaison qui sont étroitement associées à la prise de décision concernant l’ orientation du patient. Ceux qui rentrent à domicile sont en moyenne un peu plus jeunes que la moyenne d’ âge aux U3C (78,5 ans versus 83 ans) et vivent à domicile en couple sans encadrement. L’ évaluation du retour à domicile est un sujet complexe qui nécessite une vision globale du malade : il faut non seulement avoir clairement cerné sa pathologie principale, mais aussi diagnostiqué les comorbidités qui peuvent être décompensées ainsi qu’ avoir évalué l’ environnement à domicile. Des échelles gériatriques peuvent aider à la prise de décision (12) ainsi que des équipes interdisciplinaires réactives pour organiser la mise en place d’ un encadrement à domicile. La communication avec les structures ambulatoires et les proches aidants prend ici tout son sens. Ainsi, le médecin traitant reçoit le jour–même ou le lendemain, un courrier lui signifiant que son patient est hospitalisé aux 3C ou a contrario qu’ il est rentré à la maison ; sur ce courrier figurent les diagnostics principaux et le traitement de sortie.

Conclusion

Les U3C ont accueilli près de 3000 patients la 1ère année de leur ouverture et augmenté de 12 % leur flux de patients la 2e année à 3330 ; la capacité d’ accueil maximale n’ est cependant pas encore atteinte et d’ autres patients âgés pourraient encore bénéficier de cet accueil spécialisé.

Dr Véronique Trombert

Hôpital des Trois-Chêne
Service de médecine interne de l’ âgé
Chemin du Pont-Bochet 3
1226 Thônex

veronique.trombert@hcuge.ch

Dr Daiana Donca

Hôpital des Trois-Chêne
Service de médecine interne de l’ âgé
Chemin du Pont-Bochet 3
1226 Thônex

daiana.donca@hcuge.ch

Pr Dina Zekry

Hôpital des Trois-Chêne
Service de médecine interne de l’ âgé
Chemin du Pont-Bochet 3
1226 Thônex

Les auteurs n’ ont déclaré aucun conflit d’ intérêts en relation avec cet article

  • Les U3C ont fondé au sein même d’ un hôpital de gériatrie une
    structure d’ urgences ouverte 7/7j de 8h à 19h permettant d’ accueillir et d’ évaluer les patients âgés de 75 ans et plus, en urgence non vitale, ne nécessitant ni chirurgie, ni spécialiste.
  • Les patients peuvent s’ y rendre soit spontanément, soit adressés par un professionnel de santé, soit orientés par les ambulanciers.
  • Point fort : pas de délai d’ attente aux U3C. Les patients bénéficient dès leur arrivée d’une prise en charge gériatrique spécifique par une équipe interdisciplinaire.

Références:
1. OFS – Recensements fédéraux de la population / OCSTAT – Statistique cantonale de la population https://www.ge.ch/statistique/tel/publications/2018/informations_statistiques/autres_themes/is_population_13_2018.pdf https://www.ge.ch/statistique/tel/publications/2018/donnees_generales/memento/dg-ms-2018.pdf
2. Aminzadeh et al. Older adults in the emergency department: a systematic review of patterns of use, adverse outcomes, and effectiveness of interventions. Ann Emerg Med. 2002;39:238-247.
3. Jarrar M.S. et al. L’ Accueil et la durée de la prise en charge des patients au service des urgences du CHU Journal Maghrébin d’ Anesthésie-Réanimation et de Médecine d’ Urgence 2008 ; (15) : 251-257.
4. Le Spégagne Temps d’ attente et de passage aux Urgences. Paris: Mission nationale d’ expertise et d’ audit hospitaliers; mai2005.
5. Hosseininejad S.M. et al. Determinants of Prolonged Length of Stay in the Emergency Department; a Cross-sectional Study. Emerg (Tehran). 2017;5(1):e53.
6. Ye L. et al. Prolonged length of stay in the emergency department in high-acuity patients at a Chinese tertiary hospital. Emerg Med Australas.
2012 Dec ;24(6) : 634–40.
7. Bobrovitz N. et al. Who breaches the four-hour emergency department wait time target? A retrospective analysis of 374,000 emergency department attendances between 2008 and 2013 at a type 1 emergency department in England.
BMC Emerg Med. 2017 Nov 2;17(1):32.
8. Sarasin F. et al. Difficulté de la prise en charge des patients âgés aux urgences. Rev Med Suisse 2003;
9. Büla C. et al. Personnes âgées aux urgences : défis actuels et futurs. Rev Med Suisse 2012 ; 8 : 1534-8.
10. New York Times, April 10th & May 13th,2012; http://newoldage.blogs.nytimes.com/2011/03/14/hospitals-building-emergency-rooms-for-the-elderly/
11. Grosgurin O. et al. Reliability and performance of the Swiss Emergency Triage Scale used by paramedics. Eur J Emerg Med. 2017.
12. Graf C. et al. Evaluation gériatrique aux urgences : boîte à outils pour les nuls. Rev Med Suisse 2012; 8: 1544-7.

Quel type de diabète sucré est présent ?

Situation de départ

Un employé de commerce de 49 ans a reçu un diagnostic de diabète sucré de type 2 par hasard lors d’ un examen de routine en 2015. On lui a alors prescrit 2 x 1 g de metformine par jour à un taux d’ HbA1c de 6,6% et, par la suite, du Janumet 50/1000 mg 2 x par jour. Sous ce régime, l’ HbA1c est restée pratiquement inchangée. Il y a environ 5 mois, du Jardiance 10 mg/jour lui a été administré en plus de Janumet. Il a bien toléré les deux préparations, mais l’ HbA1c est resté stable à environ 6,5 %.
Le patient est athlétique, et joue au football régulièrement. Il est dérangé par le fait d’ avoir perdu environ 6 kg depuis qu’ il a été diagnostiqué diabétique en 2015, bien qu’ il se soit entraîné à peu près au même niveau et ait un peu réduit sa consommation de glucides. Il se sent toujours fatigué et épuisé. Il boit peu d’ alcool (au maximum un verre standard par semaine) et n’ a jamais eu de douleurs abdominales dans le passé.

Anamnèse personnelle

Diabète sucré de type 2 sans atteinte secondaire des organes depuis 2015. Goutte.

Anamnèse familiale

Père atteint de diabète sucré de type 2, diagnostiqué à l’ âge de 35 ans, actuellement sous insulinothérapie, a toujours été mince.

Médicaments actuels

Allopurinol 300 mg p.o. 1-0-0 prise irrégulière
Janumet 50/1000 mg p.o. 1-0-1
Jardiance 10 mg p.o. 1-0-0

État clinique

Taille 183 cm, 69 kg, IMC 20,6 kg/m2, PA 118/75, pouls 56/min, réflexes rotulien et achilléen symétriques, monofilament 10/10 des deux côtés, sens de vibration 7/8 des deux côtés, tour de taille 84 cm.

Résultats de laboratoire

HbA1c 6,3 %
eGFR selon CKD-EPI 72 ml/min
LDL 2,6 mmol/L HDL 1,5 mmol/L
triglycérides 1,13 mmol/L

Y a-t-il des doutes quant au diagnostic du diabète de type 2 Autres considérations thérapeutiques et diagnostiques ?
l Il n’ y a pas de syndrome métabolique avec un IMC de 20,6 kg/m2 et un tour de taille de < 94 cm.
l La perte de poids non désirée sous traitement par antidiabétiques oraux avec la metformine, la sitagliptine et l’ empagliflozine avec un taux d’ HbA1c inchangé n’ est pas typique pour un diabète sucré classique de type 2. Avec une perte de poids de 6 kg, nous pourrions nous attendre à une réduction de l’ HbA1c d’ au moins 1-2 %.
l Le taux de cholestérol HDL élevé et les triglycérides dans la norme plaident contre le diabète sucré de type 2. Typiquement, le diabète sucré de type 2 présente wun cholestérol HDL bas (< 0,9 mmol/L) et des triglycérides élevés (> 1,7 mmol/L) dans le statut lipidique à jeun. Le cholestérol LDL n’ est pas aussi pertinent pour la différenciation.
l Anamnèse familiale : père mince, atteint de diabète sucré de type 2 depuis son jeune âge, ce qui soulève des doutes sur le type de diabète de son père.
l L’ indication d’ un bloqueur SGLT-2 est-elle bonne pour le patient ? Si la sécrétion d’ insuline est potentiellement faible, l’ inhibiteur SGLT-2 peut entraîner une augmentation du glucagon, de la cétogenèse et de l’ acidocétose euglycémique.

En résumé

Le diagnostic de diabète sucré de type 1 est probable si l’ on se base sur l’ anamnèse. Les anticorps spécifiques du diabète (anti-GAD, -IA2, -ZnT8, -cellules des îlots pancréatiques) étaient négatifs. Ceux-ci sont positifs chez 10 à 15 % de tous les patients atteints de diabète sucré de type 1. Il n’ existe aucune preuve anamnestique d’ un diabète sucré spécifique (la saturation normale en ferritine /  transferrine exclut l’ hémochromatose ; l’ absence de douleurs abdominales et les selles normales (pas de stéatorrhée) plaident contre une pancréatite chronique).
L’ arrêt des antidiabétiques oraux établis ainsi que l’ administration d’ insuline de base tout d’ abord, et ensuite l’ insuline en bolus, a permis à notre patient de reprendre son poids corporel athlétique comme avant le diagnostic du diabète sucré. De plus, la fatigue a disparu.

Prof. Dr. med.Roger Lehmann

UniversitätsSpital Zürich
Rämistrasse 100
8091 Zurich

Roger.Lehmann@usz.ch

Dr. med. Matthias Ernst

USZ Zürich

matthias.ernst@usz.ch

RL: Participation d‘Advisory Boards et honoraires de conférencier
avec Novo
Nordisk, Sanofi, MSD, Boehringer Ingelheim, Servier et Astra Zeneca.
ME: Frais de voyage et de congrès d’Eli Lilly et Ipsen.

  • Pensez à un diabète sucré de type 1 chez des patients minces ou à un diabète spécifique (diabète pancréatoprive) en cas de douleurs abdominales récurrentes, de stéatorrhée ou de consommation accrue d’ alcool. Si une insuffisance pancréatique est suspectée, nous pouvons déterminer la présence d’ élastase-1 pancréatique dans les selles.
  • Dans l’ anamnèse, demandez toujours le poids / l’ IMC des personnes diabétiques de la famille du patient et renseignez-vous plus précisément sur les diabétiques maigres. Il faut aussi considérer qu’ un enfant, dont l’ un des parents est atteint de diabète sucré de type 1, a un risque d’ environ 3 à 6 % de développer un diabète de type 1.
  • L’ état lipidique à jeun aide à différencier le diabète sucré de type 2 du diabète sucré de type 1 ou d’ un diabète spécifique.

Les effets secondaires des thérapies oncologiques

Les effets secondaires des thérapies oncologiques sont souvent remarqués pour la première fois dans le cabinet du médecin de premier recours. Des situations d’ urgence peuvent survenir à tout moment dans toutes les thérapies oncologiques. En particulier, l’ urgence oncologique d’ une neutropénie fébrile ne doit en aucun cas être négligée. Chez les patients sous immunothérapie, la diarrhée et les endocrinopathies graves sont des urgences potentielles. En outre, il existe également de nombreux symptômes assez rares ou peu spécifiques. Ces symptômes ne peuvent pas toujours être identifiés en détail comme, par exemple, un effet secondaire ou qui peuvent être distingués des complications tumorales ou des maladies concomitantes. Si de nouveaux symptômes inhabituels apparaissent, il faut communiquer avec l’ oncologue traitant. En effet, une bonne communication entre le médecin de premier recours et l’ oncologue est la clé du succès du traitement de nos patients.

Le traitement des patients en oncologie est complexe et nécessite une bonne coopération entre les médecins de premier recours et les médecins des différentes disciplines concernées. Les patients cancéreux peuvent être confrontés à une multitude de symptômes, pouvant être causés par la maladie sous-jacente, comme l’ effet secondaire des thérapies oncologiques, ou même par des facteurs complètement différents. Il n’ est pas rare que les symptômes soient traités pour la première fois et que les situations d’ urgence soient reconnues en premier dans le cabinet du médecin de premier recours. Compte tenu du nombre sans cesse croissant de traitements oncologiques, il n’  est pas facile de suivre les effets secondaires typiques. Cependant, en plus d’ un grand nombre d’ effets secondaires rares, certains sont très courants et devraient donc être connus du médecin de premier recours.

Les principes du traitement oncologique

Afin d’ aborder la question des effets secondaires oncologiques, il est d’ abord nécessaire de distinguer quel ty pe de thérapie est impliqué. En effet, l’ oncologie s’ est considérablement diversifiée ces dernières années. Alors qu’ il y a quelques années, la chimiothérapie classique représentait la majorité des traitements, les thérapies moléculaires ciblées et les immunothérapies ont maintenant été ajoutées et joue un rôle de plus en plus important. En outre, il existe d’ autres formes de thérapie telles que les thérapies endocriniennes, la radiothérapie et les procédures d’ ablation locale. Les combinaisons thérapeutiques sont également courantes. Une distinction importante dans le traitement des effets secondaires est de savoir si la thérapie est curative ou palliative. Le but du traitement palliatif est de prolonger la vie du patient tout en préservant sa qualité de vie. Il est donc très important d’ éviter les effets secondaires qui affectent le patient. D’ autre part, les effets secondaires puissants sont plus susceptibles d’ être acceptés dans le cadre d’ une thérapie curative afin de pouvoir poursuivre la thérapie aussi complètement que possible.

Effets secondaires

Fréquence des effets secondaires
Il est difficile de se prononcer sur la fréquence des effets secondaires des thérapies oncologiques, car les enquêtes et les publications systématiques ne sont généralement effectuées que dans le cadre d’ études d’ enregistrement clinique. Les groupes de patients inclus dans les études diffèrent cependant souvent de la population de patients effectivement traités dans la vie clinique quotidienne, par exemple concernant l’ âge et les comorbidités. C’ est pourquoi, on observe parfois des fréquences d’ effets secondaires différentes. Cependant, les effets secondaires fréquemment attendus peuvent généralement être clairement différenciés des effets secondaires rares. C’ est le cas, par exemple, de la chute des cheveux, qui est très probable avec certaines chimiothérapies et peut presque être exclue avec d’ autres traitements. Des mesures préventives pour la gestion de la toxicité sont fermement intégrées dans les traitements actuels, par exemple l’ utilisation prophylactique d’ antiémétiques, prévenant généralement les nausées sévères. Un guide de pratique (1) publié par l’ European Society of Medical Oncology (ESMO) est disponible spécifiquement pour la prophylaxie antiémétique.

Classification des effets secondaires
Une autre distinction importante dans le cas des effets secondaires des thérapies oncologiques est la question de la durée ou de la réversibilité. Bien que de nombreux symptômes soient d’ une toxicité aiguë, il existe aussi des effets toxiques cumulatifs qui sont retardés, à long terme et parfois irréversibles. C’ est le cas, par exemple, de la neurotoxicité liée à l’ oxaliplatine, qui n’ apparaît souvent qu’ après quelques mois ou même après la fin du traitement et qui peut conduire à une altération significative de la vie quotidienne (2). En oncologie, les CTCAE (Common Terminology Criteria for Adverse Events) du National Institute of Health sont utilisés pour classifier le type et la gravité des effets secondaires (3). La gravité des effets secondaires est divisée en 5 degrés (tableau 1). En règle générale, seuls les effets secondaires du deuxième et du troisième degré sont cliniquement pertinents, car ils nécessitent souvent une pause ou un ajustement posologique de la chimiothérapie et doivent aussi souvent être traités. L’ exemple de la diarrhée le démontre bien. En effet, à partir d’ une diarrhée du deuxième degré (définie comme 4 à 6 selles liquides par jour), il y a une certaine baisse du niveau de vie quotidienne du patient. A partir d’ une diarrhée du troisième degré (définie comme > 7 selles liquides par jour), une perte importante de liquide est probable et une hospitalisation devrait être envisagée. Le tableau 2 résume les urgences oncologiques, nécessitant en général une hospitalisation.

Effets secondaires courants de la chimiothérapie
Les effets secondaires les plus fréquents de la chimiothérapie, quelle qu’ en soit la nature, sont certainement des changements dans la numération globulaire ainsi que des troubles gastro-intestinaux tels que la diarrhée et la nausée. La raison vient du principe général de l’ inhibition de la prolifération, selon lequel les organes en régénération continuelle tels que la muqueuse gastro-intestinale ou le système hématopoïétique sont affectés au même titre que la tumeur. En raison de la fréquence de ces effets secondaires, il est logique que les médecins de premier recours traitants soient également familiers avec la façon de les traiter. Les directives de pratique librement accessibles de la Société européenne d’ oncologie médicale (ESMO) ainsi que la directive S3 sur la thérapie de soutien de la DGHO (4, 5) offrent une bonne assistance à cet égard. En outre, une brochure gratuite de la ligue Suisse contre le cancer sur le thème des thérapies tumorales médicamenteuses peut être utilisée comme un bon guide pour les patients et leurs proches (6).Pour le traitement de la diarrhée liée à la chimiothérapie, des mesures de soutien telles que des médicaments antidiarrhéiques tel que le lopéramide sont conseillées. Un autre bon exemple est la neutropénie. Une neutropénie passagère est un effet secondaire attendu pour de nombreuses chimiothérapies. On distingue la neutropénie modérée (neutrophiles entre 500 et 1000 / μl) et la neutropénie sévère (neutrophiles < 500 / μl). En principe, la neutropénie n’ exige aucune mesure obligatoire. Toutefois, l’ oncologue traitant doit être informé des valeurs de laboratoire avec preuve de neutropénie. S’ il y a un risque élevé de neutropénie fébrile, l’ oncologue traitant considérera déjà l’ utilisation du G-CSF au moment de planifier la chimiothérapie. Les facteurs de risque de neutropénie fébrile sont énumérés au tableau 3. Une neutropénie fébrile, c’ est-à-dire une simultanéité de la neutropénie et de fièvre (> 38,5°C ou > 38°C mesurés deux fois en périphérie), est une urgence oncologique et nécessite une hospitalisation immédiate, un diagnostic d’ infection ainsi qu’ un traitement par un antibiotique à large spectre. En principe, la fièvre est donc un signal d’ alarme chez les patients sous chimiothérapie et doit toujours être clarifié immédiatement.

Effets secondaires spéciaux
Certains des agents chimiothérapeutiques fréquemment utilisés ont un profil d’ effets secondaires très spécifique. Des mesures ou des contrôles concrets sont donc nécessaires. Les anthracyclines comme la doxorubicine sont souvent utilisées dans le traitement du cancer du sein. Ils sont susceptibles d’ être cardiotoxiques, avec une cardiotoxicité aiguë et cumulative. Par conséquent, les patients traités par des anthracyclines doivent être surveillés pour déceler d’ éventuels symptômes cardiaques. La cisplatine étant néphrotoxique, des contrôles réguliers de la fonction rénale sont nécessaires. Le traitement à la capécitabine (5-FU par voie orale) peut entraîner le syndrome main-pied : une kératinisation souvent douloureuse des surfaces internes des mains et des pieds. L’ utilisation de crèmes contenant de l’ urée peut être utile à cet égard. L’ oxaliplatine et les taxanes (docétaxel, paclitaxel) peuvent à leur tour provoquer des polyneuropathies périphériques avec engourdissements et des paresthésies des doigts et des orteils.

Les effets secondaires des agents immunothérapeutiques
Le principe d’ action de l’ immunothérapie diffère sensiblement des autres méthodes de traitement oncologique. Les inhibiteurs dits « checkpoint » sont des anticorps monoclonaux permettant de surmonter l’ immunité des lymphocytes T aux cellules tumorales en bloquant les récepteurs/ligands inhibiteurs. Cela conduit à la désinhibition du système immunitaire, qui peut désormais reconnaître la tumeur comme étrangère à l’ organisme et l’ attaquer. Selon ce principe d’ action, le spectre des effets secondaires des immunothérapies diffère considérablement des thérapies conventionnelles. L’ activation du système immunitaire peut entraîner des inflammations auto-immunes de divers organes. Les manifestations possibles sont une dermatite, une pneumonite, une colite, une hépatite ou une inflammation d’ organes endocriniens tels que la glande thyroïde ou la glande pituitaire. La fréquence des effets indésirables de haut grade liés au système immunitaire causés par les thérapies mono-immunes est de 7 à 18 % (7). Par conséquent, les patients sous immunothérapie doivent toujours faire l’ objet d’ une surveillance pour déceler les symptômes cliniques ainsi que les valeurs hépatiques. La TSH doit également être surveillée régulièrement. En ce qui concerne les urgences cliniques, il convient d’ insister en particulier sur la diarrhée, qui nécessite toujours une clarification chez les patients sous immunothérapie. En effet, une diarrhée persistante peut rapidement entraîner une déshydratation importante. Une cause infectieuse doit être écartée et, si l’ on soupçonne une colite auto-immune, un traitement aux corticostéroïdes doit être envisagé à un stade précoce. Par conséquent, en cas de diarrhée persistante, il faut toujours communiquer avec l’ oncologue traitant ou hospitaliser le patient.

Dr. med. Till Wallrabenstein

St. Claraspital AG
Tumorzentrum
Kleinriehenstrasse 30
4058 Basel

tumorzentrum@claraspital.ch

Prof. Dr. med. Dieter Köberle

St. Claraspital AG
Tumorzentrum
Kleinriehenstrasse 30
4058 Basel

tumorzentrum@claraspital.ch

Les auteurs n’ ont déclaré aucun conflit d’ intérêt en relation avec cet article

  • L’ évaluation initiale et le traitement des effets secondaires légers à modérés relèvent de la responsabilité du médecin de premier recours.
  • La neutropénie fébrile sous chimiothérapie ou la diarrhée persistante sous immunothérapie sont des exemples d’ urgences oncologiques graves nécessitant une hospitalisation.
  • En cas d’  incertitude concernant les effets secondaires rares et spéciaux, il faut communiquer avec l’  oncologiste traitant.

Thrombose veineuse profonde

La thrombose veineuse profonde est l’ une des deux manifestations (l’ autre est l’ embolie pulmonaire) de la maladie thromboembolique veineuse qui représente une des principales causes de morbidité et mortalité cardiovasculaire.
Le but de cet article est de réviser les connaissances concernant la prévention et le traitement de la TVP.

La thrombose veineuse profonde (TVP) est l’ une des deux manifestations (l’ autre est l’  embolie pulmonaire) de la maladie thromboembolique veineuse (MTEV) qui représente une des principales causes de morbidité et mortalité cardiovasculaire avec une prévalence dans la population générale de 1 - 2/1000 (1).
Bien qu’ une TVP puisse survenir secondairement à un facteur de risque transitoire (p.e. chirurgie, traumatisme, immobilisation prolongée, etc.) ou persistant (cancer, antécédents MTEV, thrombophilie, etc.), dans 20 à 40% des cas il n’ y a pas de facteur déclenchant évident. Dans ce cas nous parlons de TVP idiopathique ou non provoquée (2).
Les symptômes classiques d’ une TVP (douleur, œdème et rougeur) sont très aspécifiques et pour cette raison la suspicion de TVP doit toujours être confirmé par un test objectif. Le duplex veineux est le test de choix pour confirmer une TVP (3). Le but de cet article est de réviser les connaissances concernant la prévention et le traitement de la TVP.

Prévention

La plupart des patients hospitalisés ont au moins un facteur de risque de MTEV, et environ 40% ont trois facteurs de risque ou plus (tab. 1) (4). Sans une thromboprophylaxie adéquate, la prévalence de TVP chez les patients hospitalisés est d’ environ 10-20% chez les patients médicaux, 10 - 40% après chirurgie générale et 40-60% après chirurgie orthopédique majeure (notamment chirurgie pour prothèse de hanche, prothèse de genou et fracture du fémur) (tab. 2) (4).
En chirurgie orthopédique majeure, les héparines de bas poids moléculaire (HBPM) ont longtemps représenté la pierre angulaire de la prévention de la MTEV (5). Les guidelines proposaient comme deuxième choix également l’ héparine non fractionnée à doses abaissées (HNF - DB), le fondaparinux, les AVK et même l’ Aspirine (5). La durée de la prophylaxie recommandée est de 35 jours post opératoires. Depuis quelques années, des nouveaux anticoagulants oraux directes (ACOD) sont disponibles (6). Rivaroxaban, apixaban et dabigatran ont démontré une efficacité et sécurité au moins superposable aux HBPM dans la prévention de la MTEV après chirurgie orthopédique (7, 8). A noter néanmoins que le dabigatran n’ a pas encore été autorisé en Suisse dans cette indication.
Dans les cas de chirurgie non orthopédique, les HBPM, le fondaparinux et l’ HNF-DB se sont révélés efficaces (9). Les ACOD n’ ont pas été testés et ne sont donc pas recommandés. La durée de l’ anticoagulation après chirurgies majeures telles que gastro-intestinales, gynécologique, cardio-thoracique, neurologique ou urologique devrait être d’ au moins 5 - 7 jours, mais à poursuivre jusqu’ à remobilisation complète (9). En cas de risque thrombotique élevé (p.e. chirurgie oncologique abdominale ou pelvienne), une prolongation de la prophylaxie jusqu’ à 4 semaines est recommandée (9).
Chez les patients médicaux, une thromboprophylaxie est également recommandée en cas de pathologie sévère aiguë (pneumonie, décompensation cardiaque, etc.), à mettre en balance avec le risque hémorragique du patient. Plusieurs modèles (scores) pour identifier les patients à risque thrombotique élevé ont été développés (10). HBPM, fondaparinux et HNF-DB sont recommandées par les guidelines (11) pour une durée de 10-14 jours. Les ACOD ne sont pas autorisés en Suisse dans cette indication.
Le bénéfice d’ une extension de la prophylaxie jusqu’ à 4 semaines a été démontré chez les patients âgés > 75 ans, de sexe féminin et avec mobilité réduite (12).
En parallèle d’ une prophylaxie pharmacologique ou en cas de contre-indication à celle-ci, des mesures de prophylaxie mécanique peuvent être utilisées de routine (11). Les bas de compression graduée, les appareils à compression intermittente, ou des pompes au niveau des pieds sont les systèmes les plus utilisés avec une efficacité équivalente (11).

Traitement

Traitement anticoagulant

Le traitement de la TVP se compose de trois phases (fig. 1):
initiale correspondant aux premiers 5 - 21 jours après le diagnostic ; au long terme (les premiers 3 - 6 mois) et traitement prolongé au-delà des premiers 3 - 6 mois. Les deux premières phases sont obligatoires pour tous les patients avec TVP, la troisième est à considérer pour les patients avec risque élevé de récidive thrombotique (3, 13).
Durant la phase initiale les patients bénéficient d’ un traitement parentéral (par HBPM, Fondaparinux ou HNF) avec un relais par AVK ou utilisent les ACOD à doses élevées (fig.1). L’ HBPM est le traitement parentéral de choix, mais le fondaparinux est une alternative également efficace. L’ HNF est préférable chez les patients avec insuffisance rénale sévère (clairance de la créatinine < 30 mL / min) (3, 13).
Pour le traitement au long terme les AVK ou les ACOD peuvent être utilisés. Ces derniers se sont révélés au moins aussi efficaces que les héparines et AVK avec l’ avantage d’ être donnés à dose fixe, sans nécessité de monitoring de laboratoire et avec moins d’ interactions avec la nourriture ou d’ autres médicaments pris en parallèle. Ils sont, de plus, probablement plus sûrs que le traitement par héparine / AVK, notamment en terme de risque hémorragique (14). Les ACOD doivent donc être considérés comme premier choix chez les patients présentant un épisode de TVP aiguë (3, 13). Etant éliminés principalement par les reins ils sont contre-indiqués en cas d’ insuffisance rénale sévère. Ils ne sont également pas recommandés en cas de poids supérieurs à 120 kg (6). Dans ces situations, les AVK sont préférables (3, 6, 13). Enfin, chez les patients avec TVP dans un contexte de cancer actif, un traitement avec HBPM seule pour au moins 3 - 6  mois est recommandé (3, 13). Le traitement par HBPM seule est supérieur au traitement par héparine / AVK avec une réduction du risque de récidive thrombotique d’ environ 50% (15). Deux études ont récemment démontré une non-infériorité de l’ edoxaban (16) et du rivaroxaban (17) par rapport aux HBPM dans le traitement des TVP cancer-associés mais au prix d’ une augmentation significative du risque de saignement majeur, surtout au niveau gastro-intestinal (15-17).

Thrombolyse

Le rationnel pour l’ utilisation de la thrombolyse dans les patients avec TVP est qu’ une résolution précoce de la thrombose pourrait empêcher le développement du syndrome post-thrombotique (SPT). Toutefois, le rôle de la thrombolyse a été considérablement réduit après la publication de l’ étude ATTRACT (18). Dans cette grande étude clinique, qui a recruté 692 patients avec TVP proximale aiguë, l’ ajout d’ une thrombolyse par cathéter à l’ anticoagulation n’ a pas réduit le risque de SPT mais a, par contre, accru le risque de saignement majeur (18). La thrombolyse doit donc être réservée à des cas sélectionnés (p.e. risque vital pour le membre à la suite d’ une TVP avec phlegmasie) (3, 13).

 Filtre veine cave inférieure

La pose d’ un filtre dans la veine cave inférieure est indiquée chez les patients présentant une TVP proximale aiguë avec contre-indication absolue à l’ anticoagulation thérapeutique. En dehors de cette indication la pose d’ un filtre n’ est pas indiquée (3, 13). Parmi les complications majeures nous retrouvons la thrombose du filtre et son déplacement qui peut compromettre un retrait ultérieur. Pour cette raison, l’ anticoagulation doit être débutée et le filtre retiré dès que possible.

Compression élastique

Le but de la compression est de soulager les symptômes veineux et éventuellement de prévenir le SPT. L’ efficacité des bas de compression dans la prévention du SPT a été remise en question par l’ étude SOX qui n’ a pas montré des bénéfices dans la prévention du SPT (19).
Toutefois, le port de bas de compression reste une option raisonnable pour contrôler les symptômes de TVP proximale aiguë (20). A noter que la compression doit être utilisée avec prudence chez les patients avec artériopathie grave des membres inférieurs.

Durée anticoagulation/prolongation du traitement

Après un premier épisode de TVP, le risque de récidive à 12 mois après arrêt de l’ anticoagulation est faible (1%) si l’ évènement était secondaire à un risque transitoire majeur (p.e. chirurgie); intermédiaire (4-5%) si secondaire à un facteur transitoire médical (p.e. maladie inflammatoire aiguë); élevé (jusqu’ à 9-10%) en cas de TVP non provoquée; très élevé (jusqu’ à 15-20%) en cas de facteurs de risque persistants (cancer actif, syndrome anticorps antiphospholipides et autre thrombophilie sévère).
Une durée d’ anticoagulation de 3 mois est recommandée après le premier épisode de TVP pour les patients avec faible risque de récidive (3, 13). Pour tous les autres patients, la durée de l’ anticoagulation doit être individualisée en considérant le risque de récidive sans anticoagulation (tab. 3), le risque hémorragique sous anticoagulation et les préférences du patient (3, 13).
En cas de prolongation du traitement, les ACOD à dosage standard et les AVK (INR 2,0-3,0) peuvent être utilisés. Deux études cliniques récentes ont montré l’ efficacité et la sécurité de l’ apixaban (21) et du rivaroxaban (22) à dosage abaissé (apixaban 2,5 mg, 2 x / j et rivaroxaban 10 mg, 1 x / j) après 6 mois de traitement standard (cf fig. 1).

Conclusion

La TVP représente une des principales causes de morbidité et mortalité cardiovasculaire. Chez les patients hospitalisés une prophylaxie adéquate doit être adopté en cas de facteurs de risque thromboemboliques. Les ACOD et les HBPM sont les molécules de premier choix en chirurgie orthopédique majeure. Les HPBM lors de toutes autre conditions de risque thromboembolique. Des mesures de prophylaxie non-pharmacologiques peuvent être utilisées en association avec les médicaments chez les patients à risque élevé ou comme alternative en cas de contre-indication à l’ anticoagulation.
Les ACOD ainsi que l’ association HBPM / AVK et l’ HBPM seule (chez les patients avec cancer actif) sont les options thérapeutiques disponibles pour le traitement de la TVP. La durée de l’ anticoagulation recommandée est de 3 mois si risque faible de récidive. Pour tous les autres patients, la durée de l’ anticoagulation doit être individualisée.

Cet article a été publié dans “info@coeur+vaisseau 5/2018.”

Dr Adriano Alatri

Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
Service d’ Angiologie
Chemin de Mont-Paisible 18
1011 Lausanne

adriano.alatri@chuv.ch

Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.

  • Chez les patients hospitalisés une prophylaxie adéquate doit être adoptée en cas de facteurs de risque thromboemboliques.
  • Les ACOD et les HBPM sont les molécules de premier choix pour la thromboprophylaxie en chirurgie orthopédique majeure. Les HPBM lors de toutes autres conditions de risque thromboembolique.
  • Les ACOD ainsi que l’ association HBPM/AVK sont les options thérapeutiques disponibles pour le traitement de la TVP.
  • L’  HBPM seule est le traitement de choix chez les patients avec TVP et cancer actif. L’ edoxaban et le rivaroxaban sont une alternative possible chez les patients à risque hémorragique faible.
  • La durée de l’ anticoagulation recommandée est de 3 mois en cas de faible risque de récidive. Pour tous les autres patients, la durée de l’ anticoagulation doit être individualisée.

Références :
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