Oncogériatrie: une collaboration bicéphale entre oncologue et gériatre

L’oncogériatrie est une discipline en plein essor fondée sur l’incidence croissante des cancers avec l’âge et le vieillissement de la population. Afin d’adapter les soins oncologiques aux patients âgés, les prises de décision imposent un niveau d’expertise complémentaire entre oncologue et gériatre, sans oublier le regard du médecin de famille et l’avis du patient: le tout étant validé au tumor board. Les sociétés savantes ont approuvé le score G8 qui permet à l’oncologue de sélectionner quel patient nécessite le recours au gériatre et la classification de Balducci qui guide le gériatre dans son positionnement concernant le traitement oncologique. Le suivi conjoint est primordial pour réévaluer la cohérence du plan de soins. «Primum non nocere» reste le principe fondamental tout au long de la prise en charge: on privilégiera la qualité de vie du sujet âgé.

Decision-making requires a complementary level of expertise between oncologists and geriatricians, as well as the views of the family doctor and the patient: all validated on the tumorboard. Learned societies approved the G8 score, which enables the oncologist to select patients who need to be referred to the geriatrician, and the Balducci classification, which guides the geriatrician in his position regarding oncological treatment. Joint follow-up is essential to reassess the coherence of the care plan. “Primum non nocere” remains the fundamental principle throughout the treatment process: the elderly patient’s quality of life remains our priority.
Key Words: Oncogeriatrics, G8 scale Oncodage, Balducci’s classification, Elderly people and cancer

Le cancer: pathologie du sujet âgé?

Du point de vue épidémiologique, l’incidence des cancers augmente avec l’âge et 80% sont diagnostiqués après 70 ans, selon les données de l’OFS (1). En parallèle on assiste à un vieillissement de la population avec l’allongement de l’espérance de vie (2) et une hétérogénéité des profils de séniors (3) : c’est l’âge physiologique qui importe (4).

Dans ce contexte, le plan cancer Suisse se positionne pour une vision intégrative sans discrimination de l’âge, chaque individu ayant le droit au même accès au dépistage, diagnostic et traitement (5). Les patients âgés peuvent être autant demandeurs de traitements curatifs que les plus jeunes (6). Mais en pratique, les sujets âgés ont moins d’investigation, sont diagnostiqués à des stades plus évolués, ils sont sous-traités par rapport aux plus jeunes et participent moins aux essais cliniques (7).

Au niveau international, Balducci, un des pionniers de l’oncogériatrie (8) a déterminé un modèle de management des cancers des sujets âgés (9) validé par la Société Internationale d’OncoGériatrie. En parallèle, Extermann développe le process du Geriatric Assessment en oncologie (10) avec update d’évaluation (11): le tout promouvant l’inclusion des patients âgés dans les protocoles de recherche. En France, un maillage territorial par des unités de coordination et antennes en oncogériatrie permet aux patients âgés de bénéficier d’une prise en charge spécifique avec recours aux réunions de concertation pluriprofessionnelle oncogériatrique pour les cas les plus complexes (12). Un programme spécifique de réadaptation appelée Récupération Améliorée Après Chirurgie a été implémenté et l’intergroupe de recherche en oncogériatrie, DIALOG a été labellisé (12).

Apports de l’évaluation gériatrique en oncologie (EGO)

L’EGO vise à éviter les risques de sur- ou de sous-traitement liés aux décisions thérapeutiques basées exclusivement sur l’âge ou sur le seul jugement clinique du médecin (13).

En 2011, Caillet et al (14) ont montré qu’une EGO peut apporter des changements importants dans la prise en charge pour 21% des 375 patients de l’étude sous forme d’une intensification de traitements (10%) ou d’une réduction d’intensité de traitement (81%). Ceci suppose néanmoins pour 9% du collectif d’une augmentation du délai de 15 jours de prise en charge gériatrique avant le traitement oncologique. Concernant les réductions d’intensité, il s’agit dans 86% des cas d’un retrait d’une chimiothérapie au bénéfice des soins de support. Les facteurs gériatriques significatifs en lien avec ces changements concernent la diminution de l’autonomie fonctionnelle (-0,5 point ADL) et la dénutrition.

En 2022, la méta-analyse de Hamaker et al (15), recueillant les résultats de 61 études, a souligné que l’EGO intégrée à la prise de décision oncologique induit des changements de traitements (31%), une diminution des taux de toxicités (60%), une probabilité améliorée d’achèvement du traitement (65%), une amélioration fonctionnelle (100%) et de la qualité de vie du patient (30%) par mise en place d’un plan d’aides personnalisé (70%).

Collaboration bicéphale: l’évidence du binôme oncologue et gériatre

L’hétérogénéité de la population âgée s’ajoute à celle des cancers justifiant l’expertise conjointe de l’oncologue ou spécialiste d’organe gérant des patients cancéreux âgés et du gériatre. Tous les patients âgés ayant un cancer ne peuvent être vus par un gériatre formé à l’oncogériatrie alors le principe de base est de cibler la collaboration entre oncologues et gériatres. Les compétences de chacun permettant d’être plus efficients.

Rôle de l’oncologue et questionnaire G8
Le patient âgé est vu par l’oncologue qui évalue le type de cancer et son stade d’évolution. Il dispose d’un outil de screening Quand l’oncologue réfère le patient au gériatre, le questionnement du choix du traitement oncologique prioritaire et ses alternatives doit être clairement explicité pour cibler l’évaluation du gériatre et ses réponses.

Rôle du gériatre et classification de Balducci
Le gériatre réalise une évaluation standardisée pour rechercher les syndromes gériatriques: dénutrition, trouble neurocognitif, dépression, troubles neuro sensoriels, chutes, polymédication par des tests validés pour déterminer l’autonomie fonctionnelle, décisionnelle, et le contexte de vie du patient. Une évaluation plus spécifique oncogériatrique détermine l’espérance de vie du patient selon tableaux OFS (2), les fragilités selon Fried (17) avec des tests d’expertise plus fine (vitesse de marche, force de préhension, asthénie, perte de poids, activité physique). La qualité de vie selon le patient est également définie avec une échelle d’autoévaluation numérique SF 36 (18) en précisant ce qui a du sens pour lui.
Le gériatre se focalise alors sur le risque en lien avec le traitement oncologique. L’échelle CIRS-G liste le niveau des comorbidités (19), sans oublier l’examen physique et la biologie en particulier la fonction rénale selon Cockroft, les posologies des médicaments étant basées sur ce calcul. Si l’option thérapeutique est une chimiothérapie, le score de CARG (20) ou CRASH (21) prédit le risque de survenue de toxicités de grade 3 à 5. Le risque chirurgical et péri-opératoire quant à lui, sera à évaluer au cas par cas en fonction du geste prévu et des éventuelles conséquences au décours, comme une colostomie définitive par exemple.

L’avis du patient et/ou de son référent thérapeutique par rapport au choix du traitement oncologique est capital : il faut clairement expliquer les effets secondaires et les bénéfices attendus. Le status réanimatoire sera discuté (fig 2).


Le gériatre est alors en mesure de classer le sénior selon Balducci modifié en 4 profils (22) pour guider la prise en charge oncologique. B1 représente les patients âgés robustes qui peuvent bénéficier des traitements oncologiques comme les plus jeunes. B2 concerne les patients pour lesquels une adaptation de traitement est nécessaire. B3 sont des patients relevant de soins de support alors que la classe B4 regroupe les patients en phase palliative. La classification initiale (23) comportait 3 niveaux, mais l’expérience a permis d’ajouter une classe supplémentaire intermédiaire (24) permettant de prendre en compte le bénéfice d’un programme nutritionnel pour le critère de réversibilité potentielle : un patient classé B2 peut être upgradé en B1. Le passage de B3 vers B2 nécessite un programme de réadaptation nutritionnelle intense et de physiothérapie en milieu stationnaire (fig 3).

Outre son positionnement par rapport au traitement oncologique, le gériatre fera aussi d’autres propositions comme une révision médicamenteuse, des conseils de traitement antalgique, des mesures de prévention d’un état confusionnel, un soutien psychologique… Les options de réhabilitation (physio -ergothérapie, programme nutritionnel, support social…) pré-thérapeutique et en intercures sont expliquées pour définir avec le patient un plan d’aides personnalisé en ambulatoire ou en réadaptation oncologique stationnaire. L’avis gériatrique est tout sauf un cumul de scores incompréhensibles aux non-initiés : les scores aboutissent à des diagnostics qui débouchent sur des propositions concrètes.
Les directives anticipées sont alors abordées et à rédiger avec le médecin de famille de préférence. La réflexion est au cas par cas avec comme principe fondamental «Primum non nocere» à tous moments de la prise en soin.

Synthèse oncogériatrique
Une discussion a alors lieu entre gériatre et oncologue et un rapport de la consultation oncogériatrique est adressé à l’oncologue et au médecin de famille. C’est au tumorboard que la décision finale est prise. L’oncologue présente alors au patient le plan de soin oncologique et gériatrique. L’organisation d’un suivi gériatrique conjoint à celui de l’oncologue ou à sa demande optimise la prise en charge, comme cela a été démontré pour l’évaluation gériatrique standardisée (25).

Expériences au RHNe: cas clinique et perspectives

La consultation ambulatoire oncogériatrique se développe depuis 2018 principalement avec l’équipe du département d’oncologie et au Centre du Sein labellisé. L’expérience en pratique montre que l’avis oncogériatrique peut être demandé par l’oncologue sur la base de son sens clinique quand la prise de décision thérapeutique est complexe avec la suspicion d’un trouble neuro cognitif, des chutes répétées. À l’inverse, arrive le questionnement vis-à-vis des theranostics (26) pour le profil des «supers robustes», outrepassant le score G8.

Nos axes d’amélioration concernent les patients oncologiques hospitalisés avec la sensibilisation au recours à l’avis oncogériatrique via l’équipe mobile de gériatrie. La spécificité de celle-ci est sa mixité avec des acteurs du secteur gériatrique et d’autres issus des soins palliatifs. Par ailleurs, la mise en place récente du score IDpall (27) constitue une avancée pour la prise de conscience que les soins palliatifs ne sont pas réservés à la phase terminale.

Vignette clinique

A titre de partage d’expérience et parce que les maladies hémato-oncologiques du sujet âgé représentent des situations particulièrement complexes, voici la situation de Me B, 82 ans.

Contexte oncologique
Me B. est hospitalisée suite à une dyspnée sur épanchement pleural paranéoplasique avec découverte d’une masse médiastinale et métastase osseuse costale gauche: lymphome à grandes cellules B stade IV. Me B. ne prend aucun traitement. Dans ses ATCD, on retient un lymphome du même type au niveau de l’oropharynx traité par RCHOP en rémission depuis 13 ans.

Le questionnement de l’oncologue au gériatre concerne la réalisation d’un traitement par mini R CHOP : Me B. est alors sous prednisone.

Résumé Evaluation gériatrique:
Me B. a présenté une perte d’autonomie brutale récente, elle était autonome pour ses actes de vie quotidienne et activités instrumentales. Elle avait pour habitude de faire 45 minutes de marche tous les matins. Actuellement, elle a besoin d’aide pour sa toilette et habillage et marche avec un rollator en participant activement aux thérapies de réadaptation. Elle est nouvellement incontinente. Du point de vue neuro-cognitif, la patiente est collaborante et orientée et sa capacité de discernement est conservée par rapport au choix du traitement : elle est capable d’expliquer sa pathologie oncologique et elle sait qu’elle a déjà eu un cancer du même type. Elle souhaite bénéficier d’un traitement lourd et demande qu’on lui donne cette chance. Elle s’est déjà battue contre le cancer, elle sait que le traitement sera difficile, mais elle insiste. L’alternative d’une prise en charge type soins de confort n’est pas envisageable pour elle. Ses directives anticipées sont rédigées et son fils est son représentant thérapeutique. Elle présente une dénutrition sévère compliquée d’une perte d’autonomie brutale avec trouble thymique qui en découle. Le tout relève de l’évolution de sa pathologie oncologique avec pronostic sévère.

Résumé évaluation oncogériatrique: Me B. n’a pas de comorbidité évolutive. Selon la classification de Balducci, elle est considérée comme fragile en B3 potentiellement réversible en lien avec sa dénutrition. Le score CARG est à 8 ce qui implique un risque de 55% de développement des toxicités de grade III à V. En parallèle le bilan cardiaque est rassurant et la patiente a une insuffisance rénale chronique modérée KDIGO G3a.

Proposition oncogériatrique: C’est bien l’autonomie antérieure de la patiente et sa détermination soutenue par sa famille qui font basculer la décision. Un cadre est alors posé au vu du pronostic sombre : reconditionnement par alimentation entérale et physiothérapie, adaptation posologie mini RCHOP à la fonction rénale et si effets secondaires majeurs, on stoppe le protocole. En intercure, sera envisagée une réhabilitation oncologique.

Tumorboard: L’option du mini RCHOP adapté à la fonction rénale est validée.

Evolution: Absence de syndrome de renutrition inappropriée. Le rituximab est mal toléré avec un syndrome de lyse tumorale dès J1 traité, une pneumonie de bronchoaspiration et état confusionnel sur rétention aiguë d’urines. À J4, la biologie est normalisée et la patiente bénéficie d’une phase « lune de miel » avec reprise d’autonomie : elle marche aux côtés de son fils et profite de sa famille.

Discussion entre oncologue et gériatre: Au vu des complications en cascade sur le rituximab, le gériatre préconise alors de stopper le protocole et de passer à des soins de confort. Au vu d’une diminution de la masse tumorale, l’oncologue défend une attitude curative. Après réflexion commune, un délai de pause de 48h est convenu.

Evolution: Une dyspnée brutale hypoxémiante apparait sur un épanchement pleural récidivant paranéoplasique de 1l, ponctionné à visée de confort. Le gériatre préconise le relais par l’équipe de soins palliatifs en concertation avec l’oncologue. La cytométrie de flux diagnostique la transformation leucémique : le tumorboard confirme l’arrêt des traitements curatifs.

Des soins de confort sont instaurés. Un réseau est organisé avec la patiente et sa famille, reconnaissantes de la prise en charge intégrative dont ils ont bénéficié. Me B. décèdera paisiblement entourée des siens.

Épilogue: La collaboration entre oncologue et gériatre permet d’assumer en binôme la charge décisionnelle complexe et offrir des soins sur mesure, adaptés et coordonnés : le questionnement éthique restant sous-jacent tout au long des prises en charge.

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Dre Laure Poudens-Gaudout

Médecin cheffe adjointe du Département de Gériatrie
Réadaptation et Soins Palliatifs RHNe Gériatre (F) avec
formation complémentaire en oncogériatrie

laure.poudens@rhne.ch

L’auteur n’a pas declaré de conflits d’intérêt.

◆ L’expertise conjointe de l’oncologue, spécialiste d’organe et du gériatre est indispensable pour les prises décisionnelles initiales et dans le
suivi du sujet âgé atteint d’un cancer, vue la disparité de la population âgée à laquelle s’ajoutent l’hétérogénéité des cancers et les avancées thérapeutiques. Le score G8 aide l’oncologue à dépister quel patient âgé peut bénéficier d’une évaluation oncogériatrique. Le gériatre doit déterminer si l’altération du patient âgé est en lien avec son cancer ou pré existant à une fragilité gériatrique et donner son avis concernant le traitement oncologique en se basant sur la classification modifiée de Balducci. Mais l’algorithme décisionnel ne doit pas enfermer le patient âgé dans une case, la notion de réversibilité potentielle offre des perspectives avec prise en charge adaptée aux besoins et à l’évolution du sujet âgé par ce binôme oncogériatrique.

1. Statistiques cancer Office Fédéral de la Statistique 2022 https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/sante/etat-sante/maladies/cancer.html
2. Espérance de vie OFS 2022 https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/population/naissances-deces/esperance-vie.html tableaux selon âge et sexe
3. Büla C, Beetschen P, David S et al. Rapport politique du canton de Vaud «Vieillissement et santé», 2012
4. Soubeyran P, Hœrni B, Progrès en oncogériatrie Med Hyg 2002;60:983-6
5. Stratégie nationale contre le cancer 2014-2020 https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home/strategie-und-politik/nationale-gesundheitsstrategien/nationale-strategie-gegen-krebs-2014-2017.html
6. Yellen SB, Cella DF, Leslie WT. Age and clinical decision making in oncology patients. J Natl Cancer Inst 1994; 86: 1766-70.
7. Handforth C, Burkinshaw R, FreemanJ et al. Comprehensive geriatric assessment and decision-making in older men with incurable but manageable (chronic) cancer. Support Care Cancer 2019;27:1755-63.
8. Balducci L, Ershler WB, Lyman GH, Comprehensive Geriatric Oncology, Harwood academic publishers 1998
9. Balducci L, Extermann M, Management of Cancer in the Older Person : A Practical Approach The Oncologist 2000;5:224-237
10. Extermann M, Aapro M, Bernabei R, et al. Use of comprehensive geriatric assessment in older cancer patients: Recommendations from the task force on CGA of the International Society of Geriatric Oncology (SIOG) Crit Rev Oncol Hematol. 2005;55:241–252.
11. Wildiers H, Heeren P, Puts M, Extermann M, Falandry C, Hurria A, International Society of Geriatric Oncology Consensus on Geriatric Assessment in Older Patients With Cancer J Clin Oncol. 2014 Aug 20; 32(24): 2595–2603
12. Institut National du Cancer https://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/L-organisation-de-l-offre-de-soins/Oncogeriatrie/Les-unites-de-coordination-et-antennes-d-oncogeriatrie
13. Bruno B, De Ramon Ortiz E, Ligozat S, SAMII K et Pr CHEVALLEY T, Le myélome multiple chez la personne âgée : impact d’une évaluation gériatrique Rev Med Suisse 2019 ; 15 : 2032-8
14. Caillet P, Canoui-Poitrine F, Vouriot J, Berle M, Reinald N, Krypciak S, Bastuji-Garin S, Culine S, Paillaud E, Comprehensive geriatric assessment in the decision-making process in elderly patients with cancer: ELCAPA study. J Clin Oncol 2011;29(27):3636-42
15. Hamaker M, Lund C, te Molder M, Soubeyran P, Wildiers H, Van Huis L, Rostoft S, Geriatric assessment in the management of older patients with cancer – A systematic review (update) J Geriatr Oncol 2022 Jul;13(6):761-777
16. Petit-Monéger A, Rainfray M, Soubeyran P, Bellera C, Mathoulin-Pélissier S, Detection of frailty in elderly cancer patients: Improvement of the G8 screening test, J Geriatr Oncol 2016 Mar;7(2):99-107
17. Fried LP, Tangen CM, Walston J, et al. Frailty in older adults: evidence for a phenotype. J Gerontol A Biol Sci Med Sci 2001;56:M146-56.
18. Bunevicius A. Reliability and validity of the SF-36 Health Survey Questionnaire in patients with brain tumors: a cross-sectional study Health Qual Life Outcomes 2017 May 4;15(1):92.
19. Extermann M, Overcash J, Lyman GH, Parr J, Balducci L. Comorbidity and functional status are independent in older cancer patients. J Clin Oncol 1998; 16: 1582-7.
20. Hurria A, Togawa K, Mohile SG et al, Predicting chemotherapy toxicity in older adults with cancer : a prospective multicenter study. J Clin Oncol. 2011 ;29(25) : 3457-65
21. Extermann M, Boler I, Reich RR, Lyman GH, Brown RH, DeFeliceJ, Levine RM, Lubiner ET, Reyes P, Schreiber FJ 3rd, Balducci L (2012) Predicting the risk of chemotherapy toxicity in older patients: the chemotherapy risk assessment scale for high-age patients score. Cancer 118(13):3377–3386
22. Ferrat E, Paillaud E, Caillet P, et al. Performance of Four Frailty Classifications in Older Patients With Cancer: Prospective Elderly Cancer Patients Cohort Study. J Clin Oncol. 2017;35(7):766-777.
23. Balducci L, Extermann M (2000) Management of cancer in the older person: a practical approach. Oncologist 2000;5(3):224–237
24. Droz JP, Balducci L, Monfardini S, Management of prostate cancer in older men: recommendations of a working group of the SIOG, BJUI 2010 (8) ; 462-9
25. Stuck A, Siu A, Wieland G, Adams J, Rubenstein L, Comprehensive geriatric assessment: a meta-analysis of controlled trials The Lancet 1993 Oct 23;342(8878):1032-6.
26. Turner J, Philosophy of Cancer Theranostics, Cancer Biother Radiopharm 2023 Feb;38(1):1-7
27. Segura J,Larkin P, Teike Lüthi F, Dépistage des besoins en soins palliatifs d’une population gériatrique : une étude descriptive transversale- Mémoire en Master ès sciences infirmières- Université de Lausanne, Haute Ecole spécialisée de Suisse Occidentale- juin 2021- en cours de validation.

Cancers invasifs du sein chez les femmes âgées de ≥ 80 ans

Breast cancer is the most common cancer in women, and increases considerably with age. Developments in oncological treatments have led to a reduction in breast cancer mortality. However, for patients ≥ 80 years, there are few treatment guidelines, that is why it is important to clearly define the objectives of the treatment as well as its potential effects on functionality and quality of life. Treatment recommendations based on available data must take into account the patient’s life expectancy, goals and geriatric assessment. This article summarizes the current literature and possible adaptations in patients ≥ 80 years with early or metastatic breast cancer.
Key words: oncogériatrie, patiente âgée et cancer du sein, cancer sein localisé, cancer du sein métastatique

Introduction

L’âge médian au diagnostic de cancer du sein est de 64 ans en Suisse; 36% des patientes ont 70 ans et plus, 15% 80 ans et plus. Le taux de survie spécifique à 5 ans augmente depuis des années et atteint 88% (1) tous stades confondus. En 2022, l’espérance de vie d’une femme de 80 ans est de 10,4 ans (2). Ces patientes très âgées ne sont pas représentées dans les études qui incluent sauf exception des patientes en bon état générale, sans dysfonction d’organe avec un status performance selon OMS 0 ou 1 soit activité normale ou restreinte pour des activités physiques importantes, mais patient ambulant et capable de fournir un travail léger. Il existe donc une incertitude quant à l’efficacité et à la toxicité des traitements oncologiques pour cette population qui, par ailleurs présente une forte prévalence de comorbidités et de polymédication. La Société internationale d’oncologie gériatrique (SIOG) a émis des recommandations pour la population âgée (3).

Évaluation gériatrique

Les bonnes pratiques recommandent une évaluation gériatrique pour tous les patients âgés ≥70 ans atteints de cancer (3). En routine le score de dépistage G8 permet d’identifier les patients nécessitant une évaluation gériatrique plus complète (4). Plusieurs essais randomisés ont montré que l’adaptation des prises en charge suite à cette évaluation réduisait la toxicité des traitements, diminuait les hospitalisations et améliorait la qualité de vie, tout en préservant la survie (5,6). Une évaluation de l’espérance de vie à l’aide d’outils validés et répertoriés sur ePrognosis (4) devrait être effectuée.

Cancer du sein localisé

Lorsque l’espérance de vie est <10 ans, le dépistage mammographique est futile car une réduction de la mortalité par cancer du sein est peu probable (7). La prise en charge standard est résumée dans le tableau 1. Le choix thérapeutique dépend essentiellement du stade TNM et du phénotype histologique tableau 2. Environ 90 % des patientes âgées de ≥ 80 ans présentent des tumeurs RH+ HER2- (8).

Traitement chirurgical du sein

Vu l’absence de différence de survie globale (SG) par rapport à la mastectomie, la chirurgie conservatrice du sein (CCS) avec radiothérapie adjuvante est devenue la référence (9). Une hormonothérapie première sans chirurgie devrait rester l’exception étant donné un moins bon contrôle local rendant parfois nécessaire une chirurgie de rattrapage (10) et le fait qu’une moins bonne SG après 5 ans est observée dans une étude récente chez des femmes de 80 ans et plus avec un cancer RH+(11).

Traitement chirurgical axillaire

L’essai de phase III NSABP-32, n’a pas trouvé de différence de survie ou de contrôle locorégional pour les patientes avec cancer du sein RH+ sans atteinte axillaire clinique, traitées par la technique du ganglion sentinelle (GS) versus un curage axillaire, faisant du GS la référence pour ces patientes (12). Cette pratique diminue les complications classiques du curage (douleur, engourdissement, gonflement et limitation des mouvements du bras).

Dès 2016, certaines guidelines recommandent de ne pas utiliser en routine la biopsie du GS chez les femmes de ≥70 ans avec un cancer RH+, HER2-, <2cm, grade 1 ou 2 (13). Récemment, l’essai SOUND (N=1405, 36% ≥ 65 ans) n’a pas montré de différence de survie sans maladie à distance, chez les femmes atteintes d’un cancer du sein <2cm, RH+, HER-(14).

Radiothérapie postopératoire

La radiothérapie (RT) postopératoire réduit la récidive locorégionale et, chez les patientes N+, diminue la mortalité par cancer du sein (15). Son indication chez les patientes âgées, doit être évaluée selon une stratification du risque (16). Deux essais randomisés, ont montré que la RT après une CCS n’améliorait pas la survie globale ou spécifique au cancer du sein chez les patientes âgées ≥ 70ans atteintes d’un cancer du sein RH+ (17,18) et recevant une hormonothérapie par tamoxifene (Tam). Dans ces 2 études, le taux de récidive locorégionale était plus élevé sans radiothérapie (10% Tam vs 2% Tam+RT à 10 ans (17) et 4,1% Tam vs 1,3% Tam+RT à 5 ans (18)). Cependant, l’étude prospective de cohorte LUMINA (âge médian 67,1 ans) a montré que la récidive locale à 5 ans était faible (2.3 %), malgré l’absence de RT chez les femmes ménopausées (8% ≥ 75 et 3% ≥ 80) avec cancer bas risque (luminal A, grade 1 ou 2, T1N0), traitées par CCS et hormonothérapie (19).

La radiothérapie du sein entier reste donc toujours recommandée après CCS, mais l’abstention est raisonnable lors de cancer à faible risque pour les patientes ayant une espérance de vie limitée.

Chimiothérapie néoadjuvante/adjuvante

En situation préopératoire, seul 6,3% des 8949 patientes incluses dans 8 études randomisées avaient 65 ans ou plus et aucune plus de 80 ans (20). L’expérience d’un centre de référence montre que des toxicités plus importantes conduisent à la réduction ou à l’arrêt prématuré du traitement dans 78% versus 57% (p < 0.001) chez les 74 patientes âgées de 71 à 76 ans (21). L’indication à un tel traitement ne devrait être envisagée que pour des patientes hautement sélectionnées, lors de risques accrus de récidives, sur la base de scores pronostiques (22), ou lors de cancers RH- pour lesquels la plupart des rechutes surviennent dans les 5 ans. Comme pour la chimiothérapie néoadjuvante, les schémas standard pouvant être proposés dans cette classe d’âge sont les suivants : 4 cycles de docétaxel et cyclophosphamide (TC), 4 cycles de doxorubicine – cyclophosphamide, ou 6 cycles de cyclophosphamide, méthotrexate et fluorouracile (CMF). Le paclitaxel hebdomadaire en particulier, peut être combiné au traitement antiHER2, et être administré également chez des patientes plus fragiles (22).

Traitements anti-HER2

Lors de cancers HER2+, un traitement anti-HER2 par trastuzumab devrait être introduit quel que soit l’âge, bien que les patientes âgées ≥60ans soient sous-représentées, 16% dans l’étude HERA (23), et présentent une augmentation de la toxicité cardiaque, nécessitant des interruptions du traitement dans près de 40 % des cas (24). La SIOG recommande une chimio adjuvante (docetaxel ou paclitaxel hebdomadaire) associée à 1 an de trastuzumab. Vu le risque accru de toxicité, notamment digestive, l’association avec le pertuzumab doit être réservée aux patientes en bonne santé (22). Un traitement plus court (6 mois) peut être envisagé pour les patientes plus fragiles ou présentant un risque cardiologique (25,26). L’essai de phase III Short-HER montre une survie sans maladie et une SG comparables avec 9 semaines de trastuzumab versus 1 an pour les risques faibles (N0) et intermédiaires (moins de 4 ganglions atteints) (27). L’utilisation du trastuzumab seul, sans chimio, peut également être discutée chez les patientes les plus fragiles (28).

Dans l’essai KATHRINE (âge médian 49 ans, moins d’1% ≥75 ans), le trastuzumab emtansine (T-DM1) adjuvant lors d’une maladie résiduelle après un traitement néoadjuvant à base de trastuzumab, réduit le risque de récidive et de décès par rapport au trastuzumab adjuvant. Des toxicités telles que la neuropathie et la pneumopathie questionnent le rapport bénéfice/risque chez les patientes âgées (29).

Hormonothérapie

L’efficacité du traitement endocrinien est indépendante de l’âge et le choix du traitement dépend du risque estimé de récidive, des comorbidités de la patiente et des effets secondaires attendus du traitement endocrinien dont l’ostéoporose et les douleurs musculo-squelettiques (inhibiteurs de l’aromatase (IA)) ou le risque thrombo-embolique et de cancer de l’endomètre (Tam) (30). Les IA sont légèrement supérieurs au Tam en termes de risque de récidive du cancer du sein et de mortalité, et devraient être privilégiés.

La non observance du traitement endocrinien est un problème majeur à tout âge et semble augmenter chez les 80 ans et plus 52% (n=100) contre 24,2% pour la population totale (n=1192). (31). Dans une étude portant sur 437 patientes de ≥ 60 ans, les patientes de ≥ 80 ans (n=79) ont plus souvent refusé de débuter l’hormonothérapie (13,0 % contre 4,5 %, P = 0,01) (32). Ce problème devrait être abordé avant de décider de ne pas opérer une maladie localisée.

Traitement des cancers métastatiques

Le traitement de toute patiente atteinte d’un cancer du sein métastatique, quel que soit son âge, est non curatif et vise à contrôler le cancer et à maintenir la qualité de vie. Nous nous limiterons aux premières lignes de traitements (tableau 2).

Tumeurs hormonosensibles RH+ HER2-

Plus l’expression des RH est importante, plus le cancer est susceptible de répondre à un traitement hormonal, qui constitue alors le premier choix. Si une menace de la fonction d’organes nécessite une réponse tumorale rapide, une chimio peut être discutée. Les inhibiteurs de la kinase 4/6 dépendante de la cycline (CDK4/6) (ribociclib, abemaciclib, palbociclib) associés à un IA ou au fulvestrant (anti oestrogénique), améliorent le taux de réponse et la survie sans progression (SSP) (33). Une meilleure survie globale est obtenue en 2ème ligne, mais à ce jour en première ligne, seul ribociclib plus létrozole a démontré un avantage de SG (médiane 63,9 mois contre 51,4 mois avec létrozole plus placebo) y compris chez les ≥ 75 ans (34). L’efficacité des inhibiteurs de CDK4/6 parait indépendante de l’âge (198 patientes ≥75 ans soit 10,8% de la population incluse), au prix de toxicités plus élevées (88.8% grades 3-4 si ≥ 75 ans versus 73,4 % si <75 ans), nécessitant des modifications de dose, voire l’arrêt du traitement (33). Au moment de la progression, un changement de thérapie endocrinienne (de IA à fulvestrant, de fulvestrant à IA) est proposé. La poursuite de l’inhibiteur CDK4/6 reste discutée (35), mais celui-ci devrait être débuté s’il n’a pas été introduit auparavant, étant donné le bénéfice de SG attendu (36). En cas de résistance à l’hormonothérapie, d’autres thérapies peuvent se discuter (chimio, thérapies ciblées (37)).

Cancers HER2+

Chez les patientes avec cancer HER2+, le traitement anti-HER2 par trastuzumab associé au pertuzumab et au paclitaxel hebdomadaire est recommandé comme traitement de première intention (38).

Pour les patients non éligibles aux taxanes, ou qui désirent des schémas moins toxiques (peu ou pas d’alopécie ou de complications digestives, infectieuses, et neurologiques), la vinorelbine ou la capécitabine peuvent être des alternatives (22,39,40). Chez les patientes très fragiles, le trastuzumab +/- pertuzumab seul ou associé à une hormonothérapie si RH+ peut être envisagé (41,42). Après traitement de première ligne par trastuzumab, l’anticorps conjugué trastuzumab-deruxtecan (T-dxd) est associé à une meilleure SG par rapport au T-DM1 (SG à 24 mois 77.4% vs 69.9%) (43). Chez les patientes de ≥ 65 ans on observe une augmentation des toxicités (digestives et hématologiques) amenant à un arrêt du traitement dans 25,4% des cas contre 18,7% chez les plus jeunes. Le risque de pneumopathie est également supérieur (17,5% contre 11,8%) (44). L’utilisation de ce traitement doit donc être très prudente chez les patientes âgées. Le T-DM1 pourrait être utilisé en cas d’intolérance (45).

Cancers triples négatifs (TN) ou hormonorésistants

Une chimio peut être proposée aux patientes avec cancer du sein métastatique TN-, ou lors de cancer RH+ résistant à la thérapie endocrinienne ou dont la maladie progresse rapidement ou menace la fonction d’organes. Une mono-chimiothérapie est préférable, étant donné le risque plus élevé d’effets secondaires (22). Le choix est basé sur le profil des effets secondaires, les comorbidités et les souhaits de la patiente.

L’ajout d’un inhibiteur des checkpoints (ICP) à la chimio de première ligne, lors de tumeurs TN exprimant PDL1, améliore la SG d’environ 7 mois (âge médian 55 ans, 23% ≥ 65ans (46) ; âge médian 53 ans, 21% > 65 ans (47)). L’utilisation de ces ICP est déjà bien établie dans la population âgée et/ou fragile. Le mauvais pronostic des tumeurs TN avec l’utilisation de la chimio seule, est également amélioré en 2ème ligne par l’anticorps sacituzumab ciblant le récepteur Trop2 conjugué au govitecan (un inhibiteur topoisomérase), avec une survie médiane 12,1 versus 6,7 mois (âge médian 54 ans, (29–82) (48)). Ces nouvelles thérapies doivent être utilisées avec la plus grande prudence chez les patientes âgées.

Conclusion

Les patientes atteintes d’un cancer du sein, âgées de ≥ 80 ans, représentent une proportion croissante de la population. Les décisions thérapeutiques doivent être basées sur l’espérance de vie, les bénéfices potentiels du traitement, les souhaits de la patiente et les effets secondaires potentiels du traitement.

Une collaboration étroite entre les oncologues et les gériatres est essentielle pour parvenir à un équilibre entre les objectifs du traitement oncologique et le maintien de la qualité de vie des patientes.

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Dre Marie-Gabrielle Courtès

Service d’oncologie
Hôpital du Valais – CHVR
Av. Grand-Champsec 86
1951 Sion

marie-gabrielle.courtes@hopitalvs.ch

PD Dr Sandro Anchisi

Service d’oncologie
Hôpital du Valais – CHVR
Av. Grand-Champsec 86
1951 Sion

sandro.anchisi@hopitalvs.ch

Les auteurs n’ ont pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.

◆ Les femmes âgées avec cancer du sein représentent une population croissante
◆ La mortalité par cancer du sein diminue, grâce à l’évolution des traitements oncologiques
◆ Les patientes ≥80 ans sont peu représentées dans les études cliniques, rendant l’élaboration de standards difficile dans cette population
◆ Une adaptation des traitements est nécessaire après une évaluation gériatrique en tenant compte de l’espérance de vie, des comorbidités et des souhaits des patientes

 

1. https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/sante/etatsante/maladies/cancer/specifiques.hml. Consulté le 12.11.2023
2. https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/population/naissances-deces/esperance-vie.html. Consulté le 12.11.2023
3. Dale W, Klepin HD, Williams GR, et al. Practical assessment and management of vulnerabilities in older patients receiving systemic cancer therapy: ASCO guideline update. J Clin Oncol 2023; 41:4293-312
4. Soubeyran P, Bellera C, Goyard J, et al. Screening for vulnerability in older cancer patients: the ONCODAGE Prospective Multicenter Cohort Study. PLoS One 2014 Dec 11;9:e115060
5. management on the toxic effects of cancer treatment (GAP70+): a cluster-randomised study. Lancet 2021; 398:1894-1904.
6. Li D, Sun C-L, Kim H, et al. Geriatric assessment–driven intervention (GAIN) on chemotherapy-related toxic effects in older adults with cancer: A randomized clinical trial. JAMA Oncol 2021; 7:e214158
7. Badgwell BD, Giordano SH, Duan ZZ, et al. Mammography before diagnosis among women age 80 years and older with breast cancer. J Clin Oncol 2008; 26:2482–8.
8. Jenkins EO, Deal AM, Anders CK, et al. Age-specific changes in intrinsic breast cancer subtypes: A focus on older women. Oncologist 2014; 19:1076-83
9. Fisher B, Anderson S, Bryant J, et al. Twenty-year follow-up of a randomized trial comparing total mastectomy, lumpectomy, and lumpectomy plus irradiation for the treatment of invasive breast cancer. N Engl J Med. 2002; 347:1233-41.
10. Hind D, Wyld L, Reed MW. Surgery, with or without tamoxifen, vs tamoxifen alone for older women with operable breast cancer: cochrane review. Br J Cancer 2007; 96:1025-9.
11. De Boer AZ, de Glas NA, Marang-van de Mheen PJ, et al. Effect of omission of surgery on survival in patients aged 80years and older with early-stage hormone receptor-positive breast cancer. Br J Surg 2020; 107:1145–53
12. Krag DN, Anderson SJ, Julian TB, et al. Sentinel-lymph-node resection compared with conventional axillary-lymph-node dissection in clinically node-negative patients with breast cancer: overall survival findings from the NSABP B-32 randomised phase 3 trial. Lancet Oncol 2010; 11:927-33
13. Grossi S, Le J, Armani A. Omitting axillary staging in selected patients: Rationale of Choosing Wisely in breast cancer treatment. Surgery 2023; 174:413-5.
14. Gentilini OD, Botteri E, Sangalli C, et al. SOUND Trial Group. Sentinel lymph node biopsy vs no axillary surgery in patients with small breast cancer and negative results on ultrasonography of axillary lymph nodes: The SOUND randomized clinical trial. JAMA Oncol 2023; 9:1557-64.
15. McGale P, Taylor C, Correa C, et al. Effect of radiotherapy after mastectomy and axillary surgery on 10 years recurrence and 20 years breast cancer mortality: metaanalysis of individual patient data for 8135 women in 22 randomised trials. Lancet 2014; 383: 2127-35.
16. Stueber TN, Diessner J, Bartmann C, et al. Effect of adjuvant radiotherapy in elderly patients with breast cancer. PLoS One 2020; 15: e0229518.
17. Hughes Hughes KS, Schnaper LA, Bellon JR, et al. Lumpectomy plus tamoxifen with or without irradiation in women age 70 years or older with early breast cancer: long-term follow-up of CALGB 9343.J Clin Oncol 2013; 31: 2382-7.
18. Kunkler IH, Williams LJ, Jack WJ, et al; PRIME II investigators. Breast-conserving surgery with or without irradiation in women aged 65 years or older with early breast cancer (PRIME II): a randomised controlled trial. Lancet Oncol 2015; 16:266-73.
19. Whelan TJ, Smith S, Parpia S, et al; LUMINA study investigators. Omitting radiotherapy after breast-conserving surgery in luminal A breast cancer. N Engl J Med. 2023; 389:612-9.
20. Von Waldenfels G, Loibl S, Furlanetto J, et al. Outcome after neoadjuvant chemotherapy in elderly breast cancer patients – a pooled analysis of individual patient data from eight prospectively randomized controlled trials. Oncotarget 2018; 9: 15168-79
21. Williams AD, Dang CT, Sevilimedu V, et al. Neoadjuvant chemotherapy for breast cancer in the elderly: Are we accomplishing our treatment goals? Ann Surg Oncol 2022; 29:8002-11.
22. Biganzoli L, Battisti NML, Wildiers H, et al. Updated recommendations regarding the management of older patients with breast cancer: a joint paper from the European Society of Breast Cancer Specialists (EUSOMA) and the International Society of Geriatric Oncology (SIOG). Lancet Oncol 2021; 22:e327-e340.
23. Meron D, Piccart-Gebhart MJ, Gelber RD, et al. 11 years’ followup of trastuzumab after adjuvant chemotherapy in HER2-positive early breast cancer: final analysis of the HERceptin Adjuvant (HERA) trial. Lancet 2017; 389: 1195–205
Références complètes: sur notre site internet www.medinfo-verlag.ch

24. Reeder-Hayes KE, Meyer AM, Hinton SP, et al. Comparative toxicity and effectiveness of trastuzumab-based chemotherapy regimens in older women with early-stage breast cancer. J Clin Oncol 2017; 35: 3298–305
25. Pivot X, Romieu G, Debled M, et al. 6 months versus 12 months of adjuvant trastuzumab for patients with HER2-positive early breast cancer (PHARE): a randomised phase 3 trial. Lancet Oncol 2013; 14:741-8.
26. Earl HM, Hiller L, Vallier AL, et al. 6 versus 12 months of adjuvant trastuzumab for HER2-positive early breast cancer (PERSEPHONE): 4-year disease-free survival results of a randomised phase 3 non-inferiority trial. Lancet 2019; 393:2599-2612.
27. Conte P, Bisagni G, Piacentini F, et al. Nine-week versus one-year trastuzumab for early human epidermal growth factor receptor 2-positive breast cancer: 10-year update of the ShortHER phase III randomized trial. J Clin Oncol. 2023; 41:4976-81.
28. Sawaki M, Taira N, Uemura Y, et al. Randomized controlled trial of trastuzumab with or without chemotherapy for HER2-positive early breast cancer in older patients. J Clin Oncol 2020; 38:3743–52.
29. Loibl S, Mano M, Untch M, et al. Phase III study of adjuvant ado-trastuzumab emtansine vs trastuzumab for residual invasive HER2-positive early breast cancer after neoadjuvant chemotherapy and HER2-targeted therapy: KATHERINE final IDFS and updated OS analysis. Presented at: 2023 San Antonio Breast Cancer Symposium; December 5-9, 2023; San Antonio, TX. Abstract GS03-12
30. Crystal JS, Rand J, Johnson J, et al. Adjuvant endocrine therapy is associated with improved overall survival in elderly hormone receptor-positive breast cancer patients. Breast Cancer Res Treat 2020;184:63–74.
31. Dragvoll I, Bofin AM, Søiland H, et al. Predictors of adherence and the role of primary non-adherence in antihormonal treatment of breast cancer. BMC Cancer 2022; 22:1247.
32. Guth U, Myrick ME, Kandler C, et al. The use of adjuvant endocrine breast cancer therapy in the oldest old. Breast 2013; 22:863-68.
33. Howie LJ, Singh H, Bloomquist E, et al. Outcomes of older women with hormone receptor-positive, human epidermal growth factor receptor-negative metastatic breast cancer treated with a CDK4/6 inhibitor and an aromatase inhibitor: an FDA pooled analysis. J Clin Oncol 2019; 37:3475-83.
34. Hart L, Im S, Tolaney SM, et al. Efficacy, safety, and quality of life with ribociclib + endocrine therapy in elderly patients with HR+/HER2– advanced breast cancer across the MONALEESA-2, -3, and -7 trials. Presented at the 2023 San Antonio Breast Cancer Symposium; December 5-9, 2023; San Antonio, TX; abstract PS02-01.
35. Kalinsky K, Accordino MK, Chiuzan C, et al. Randomized phase II trial of endocrine therapy with or without ribociclib after progression on cyclin-dependent kinase 4/6 inhibition in hormone receptor-positive, human epidermal growth factor receptor 2-negative metastatic breast cancer: MAINTAIN trial. J Clin Oncol 2023; 41:4004-13.
36. Sonke G, van Ommen-Nijhof, Wortelboer N, et al. Primary outcome of the phase 3 SONIA trial (BOOG 2017-03). J Clin Oncol 2023; 41: 17_suppl, LBA1000.
37. André F, Ciruelos EM, Juric D, et al. Alpelisib plus fulvestrant for PIK3CA-mutated, hormone receptor-positive, human epidermal growth factor receptor-2-negative advanced breast cancer: final overall survival results from SOLAR-1. Ann Oncol 2021; 32:208-17.
38. Miles D, Ciruelos E, Schneeweiss A, et al; PERUSE investigators. Final results from the PERUSE study of first-line pertuzumab plus trastuzumab plus a taxane for HER2-positive locally recurrent or metastatic breast cancer, with a multivariable approach to guide prognostication. Ann Oncol 2021; 32:1245-55.
39. Perez EA, López-Vega JM, Petit T, et al. Safety and efficacy of vinorelbine in combination with pertuzumab and trastuzumab for first-line treatment of patients with HER2-positive locally advanced or metastatic breast cancer: VELVET Cohort 1 final results. Breast Cancer Res 2016; 18:126.
40. Andersson M, López-Vega JM, Petit T, et al. Efficacy and safety of pertuzumab and trastuzumab administered in a single infusion bag, followed by vinorelbine: VELVET cohort 2 final results. Oncologist 2017; 22:1160-8.
41. Vogel CL, Cobleigh MA, Tripathy D, et al: Efficacy and safety of trastuzumab as a single agent in first-line treatmentof HER2-overexpressing metastatic breast cancer. J Clin Oncol 2002; 20:719-26
42. Huober J, Weder P, Ribi K, et al. Pertuzumab plus trastuzumab with or without chemotherapy followed by emtansine in ERBB2-positive metastatic breast cancer: A secondary analysis of a randomized clinical trial. JAMA Oncol 2023; 9:1381–89.
43. Hurvitz SA, Hegg R, Chung WP, et al. Trastuzumab deruxtecan versus trastuzumab emtansine in patients with HER2-positive metastatic breast cancer: updated results from DESTINY-Breast03, a randomised, open-label, phase 3 trial. Lancet 2023; 401:105-17.
44. Krop IE, Wildiers H, Hurvitz SA, et al. An age-specific pooled analysis of trastuzumab deruxtecan (T DXd) in patients (pts) with HER2-positive (HER2+) metastatic breast cancer (mBC) from DESTINY-Breast01, -02, and -03.J Clin Oncol 2023; 41:16_suppl, 1006
45. Krop IE, Kim SB, Gonzalez-Martin A, et al. Trastuzumab emtansine versus treatment of physician’s choice for pretreated HER2-positive advanced breast cancer (TH3RESA): a randomised, open-label, phase 3 trial. Lancet Oncol 2014; 15(7):689-69
46. Schmid P, Rugo HS, Adams S, et al; IMpassion130 Investigators. Atezolizumab plus nab-paclitaxel as first-line treatment for unresectable, locally advanced or metastatic triple-negative breast cancer (IMpassion130): updated efficacy results from a randomised, double-blind, placebo-controlled, phase 3 trial. Lancet Oncol 2020; 21(1):44-59
47. Cortes J, Rugo HS, Cescon DW, et al; KEYNOTE-355 Investigators. Pembrolizumab plus chemotherapy in advanced triple-negative breast cancer. N Engl J Med 2022; 387:217-26.
48. Bardia A, Hurvitz SA, Tolaney SM, et al; ASCENT clinical trial Investigators. Sacituzumab govitecan in metastatic triple-negative breast cancer. N Engl J Med 2021; 384:1529-41.

 

 

Presbyacousie, existe-t-il un entraînement?

Selon l’OMS, on estime qu’environ 1,5 milliard de personnes dans le monde sont touchées par une déficience auditive (21). La perte auditive est donc considérée comme la déficience sensorielle la plus fréquente chez l’homme. La probabilité statistique de souffrir d’une déficience auditive augmente considérablement avec l’âge. Les conséquences d’une capacité auditive et de communication réduite peuvent être l’isolement social, la perte d’autonomie et la dépression (2). La perte auditive est également considérée comme un facteur de risque important et influençable de la démence (13). Les causes sont des modifications de l’organe auditif périphérique et du système auditif central. Il est donc évident que les deux composantes doivent être pris en compte dans le cadre d’une thérapie de réhabilitation auditive optimale (8). Ce bref article a pour but de mettre en lumière les principaux aspects de la presbyacousie et d’aborder en particulier les différentes mesures thérapeutiques.

According to the WHO, it can be assumed that around 1.5 billion people worldwide are affected by hearing impairment. Hearing loss is therefore considered the most common sensory impairment in humans. With advancing age, the statistical probability of suffering from hearing loss increases significantly. Consequences of limited hearing and communication ability can include social isolation, loss of autonomy and even depression. Hearing loss is also considered an important modifiable risk factor for dementia. The causes are changes in the peripheral as well as in the central auditory system. It is therefore obvious that both components must be taken into account as part of optimal hearing rehabilitation therapy. This short overview is intended to shed light on the most important aspects of age-related hearing loss and, in particular, to address various therapeutic options.
Key Words: hearing impairment, hearing loss, hearing rehabilitation therapy

Les bases de l’audition

Pour qu’un événement acoustique puisse être perçu consciemment, des ondes de pression acoustique doivent atteindre le tympan et le faire vibrer. Ensuite, les osselets de l’oreille moyenne transmettent le signal sonore à la base de l’étrier. Cela est possible parce que le marteau est fermement en contact avec le tympan. Dans l’oreille moyenne, l’information acoustique n’est pas seulement transmise, mais aussi amplifiée. La base de l’étrier est reliée à l’oreille interne par la fenêtre ovale, qui est remplie de liquide (fig. 1). La vibration de la base de l’étrier génère des ondes de pression dans l’oreille interne qui, en fonction de la fréquence sonore, entraînent la déviation de la membrane basilaire à un endroit spécifique de l’oreille interne. L’organe de Corti, dans lequel sont intégrées les cellules sensorielles auditives (cellules ciliées), se trouve sur la membrane basilaire (fig. 2). La déviation de la membrane basilaire permet de générer des potentiels d’action dans les cellules ciliées, de sorte que le stimulus physique initial de la vibration acoustique est transformé en un signal neuronal. Le potentiel d’action est ensuite transmis par le VIIIe nerf crânien aux centres auditifs du tronc cérébral, puis au cortex auditif, où se produit la perception auditive consciente (15). Depuis le cortex auditif, des impulsions neuronales sont transmises à un réseau de régions cérébrales supérieures qui, à l’écoute du langage parlé, extraient et interprètent des informations acoustiques pertinentes à partir du signal acoustique, permettant ainsi de comprendre le contenu d’une phrase (9).

Les causes de la presbyacousie

L’étiologie de la presbyacousie est le plus souvent multifactorielle. Des études épidémiologiques ont montré par exemple, une forte association avec le diabète, l’obésité, le tabagisme et d’autres facteurs de risque cardiovasculaires, mais la causalité n’est pas prouvée. D’autres facteurs de risque sont l’exposition continue ou répétée au bruit. Des facteurs génétiques semblent également jouer un rôle dans la vulnérabilité aux traumatismes sonores et, plus généralement, dans la perte auditive chez les personnes âgées (3).

Il y a une trentaine d’années déjà, des efforts ont été faits pour mettre en évidence les modifications morphologiques de l’organe auditif périphérique responsables de la presbyacousie. Quatre sites principaux de lésions ont été mis en évidence. Des processus pathologiques ont pu être décelé dans l’organe de Corti, de même qu’une réduction des neurones des voies auditives périphériques et centrales. Dans certains cas, des épaississements et des calcifications de la membrane basilaire ont été mis en évidence, ce qui entrave sa capacité vibratoire. Cependant, l’atrophie de la stria vascularis, qui joue un rôle central dans l’équilibre de l’oreille interne, a été considérée comme la lésion la plus fréquente (5).

Des travaux plus récents ont pu montrer, au niveau moléculaire, que les processus hypoxiques et ischémiques semblent jouer un rôle, tout comme le stress oxydatif ou les mutations mitochondriales (8). En outre, on peut supposer qu’avec l’âge, la transmission des signaux entre les cellules nerveuses est de plus en plus perturbée, ce qui se traduit par des synaptopathies cochléaires. Malheureusement, l’audiogramme semble souvent peu sensible à ce type de modifications. Il est probablement beaucoup plus facile d’en saisir les effets en testant la compréhension de la parole dans le bruit (12).

Des modifications sont décelables avec l’âge non seulement dans l’organe auditif périphérique, mais aussi dans le système auditif central. Ainsi, le processus normal de vieillissement comprend une diminution de la densité des neurones et des synapses ainsi qu’un amincissement de la substance blanche dans la voie auditive du tronc cérébral, dans les aires auditives corticales et dans les réseaux temporaux et frontaux du cerveau, qui sont recrutés pour le traitement du langage parlé (6, 16). Ces changements structurels dans le système auditif central s’accompagnent d’une diminution de la qualité du traitement des signaux acoustiques. Pour compenser cette détérioration du traitement auditif, le cerveau des personnes âgées réagit différemment aux stimuli acoustiques que celui des jeunes. Dans des situations d’écoute particulièrement complexes, comme par exemple la compréhension de la parole dans le bruit, des zones motrices du langage sont activées en plus des réseaux auditifs pour compenser les parties floues, imprécises ou manquantes d’un signal de parole (1). Parallèlement, des régions préfrontales ou pariétales du cerveau, qui ne sont pas considérées comme faisant partie des réseaux auditifs et vocaux, sont recrutées. Les recherches actuelles partent du principe que ces régions “cognitives” soutiennent la mémoire de travail et la mémoire phonologique dans des situations d’écoute défavorables et compensent ainsi dans une certaine mesure la perte du traitement auditif (7, 20). Il se peut toutefois que cet effort supplémentaire du cerveau s’accompagne d’un effort et d’une fatigue subjectivement perceptibles.

L’examen médical

L’examen médical de l’audition commence généralement par un examen détaillé de l’histoire de la maladie, les patients faisant généralement état d’une perte auditive bilatérale. Comme la perte auditive est généralement lente et progressive, les premiers symptômes sont souvent des problèmes de compréhension de la parole, en particulier dans des situations acoustiques difficiles, par exemple en présence de bruits parasites ou dans les pièces avec réverbération. La réduction de la compréhension de la parole peut s’accompagner d’un bourdonnement de l’oreille (acouphène). De même, les personnes concernées font parfois état d’une augmentation accélérée de l’intensité sonore (recrutement). Si d’autres symptômes auriculaires tels que des vertiges, des écoulements auriculaires (otorrhée) ou des douleurs sont également signalés, il faut penser à une autre cause ou à des comorbidités. Comme les personnes âgées sont souvent sous médication permanente en raison de diverses affections de base, il est important de vérifier, en particulier dans ce groupe d’âge, si des préparations ayant un effet potentiellement nocif sur l’audition sont prises, comme par exemple des diurétiques de l’anse, des cytostatiques, des médicaments contre la malaria (quinine) ou certains antibiotiques, surtout les aminoglycosides.

Afin d’exclure une pathologie au niveau du conduit auditif externe (p. ex. un bouchon de cérumen) et du tympan, chaque examen auditif est accompagné d’une microscopie de l’oreille. En cas de presbyacousie seule, aucun résultat pathologique n’est à attendre ici. Dans le test du diapason, il faut partir du principe que le test de Weber est non lateralisé et que le test de Rinne est positif des deux côtés.

Comme test d’orientation de l’audition, on peut ensuite tester les chiffres de chuchotement. Pour une évaluation plus précise, un audiogramme est toutefois indispensable. Celui-ci révèle typiquement une surdité de perception bilatérale symétrique et accentuée par les aigus (fig. 3). Dans les pays germanophones, le test le plus fréquemment utilisé pour évaluer l’intelligibilité de la parole dans le calme est le Freiburger Sprachtest, qui teste les mots d’une ou de deux syllabes. Dans le cas de la presbyacousie, on observe souvent une divergence entre les mots monosyllabiques et les mots bisyllabiques. Les mots chiffrés (bi-syllabiques) sont relativement bien compris par rapport aux monosyllabiques. Cela peut s’expliquer, au moins en partie, par la perte des aigus typique de la presbyacousie. Pour la compréhension des chiffres, les parties vocaliques de basse fréquence suffisent souvent, alors que pour la compréhension des monosyllabes, les consonnes avec leurs spectres de haute fréquence sont primordiales.

Comme décrit plus haut, les personnes âgées ont souvent des problèmes de compréhension de la parole dans le bruit. Cela n’est pas lié en premier lieu à l’évolution de la fréquence du trouble auditif, mais surtout à des capacités cognitives réduites et à un traitement temporel réduit. Les tests de langage (par ex. le test de la phrase de Bâle), qui examinent la compréhension dans le bruit, testent ainsi non seulement l’organe auditif périphérique, mais aussi des parties centrales du système auditif (22). Une imagerie en couches fines n’est pas indiquée en cas de résultats cliniques et audiométriques typiques, comme indiqué ci-dessus. Cependant, si la courbe auditive est asymétrique ou si des symptômes supplémentaires sont présents, comme par exemple des acouphènes pulsatiles est judicieux d’exclure une pathologie rétrocochléaire ou une malformation vasculaire par l’imagerie (5, 14).

Possibilités de traitement:

Contrairement aux amphibiens, aux oiseaux et aux poissons, la régénération naturelle des cellules ciliées endommagées n’est pas possible chez les mammifères (2). Grâce à une recherche constante, la compréhension de la biologie de l’oreille interne n’a cessé de progresser, mais il n’a pas été possible jusqu’à présent de rétablir la perte auditive chez les personnes âgées par des médicaments. Dans le cadre d’études, on utilise actuellement des préparations qui doivent surtout influencer positivement le stress oxydatif sur les cellules ciliées internes ainsi que l’apoptose (3).

Pour compenser les performances réduites de l’oreille interne, on utilise en premier lieu des appareils auditifs qui amplifient le signal sonore entrant en cas de surdité de perception légère ou moyenne. En fonction de leur forme, on distingue principalement les appareils auditifs intra-auriculaires et les appareils auditifs contour d’oreille (14). Lorsque la perte auditive s’aggrave, les appareils auditifs ne sont plus d’une utilité suffisante pour les personnes concernées. L’implant cochléaire est alors la seule possibilité de percevoir suffisamment les signaux acoustiques et, en particulier, de comprendre à nouveau la parole. Pour ce faire, on introduit dans l’oreille interne, au cours d’une opération d’environ 90 minutes, une électrode capable de stimuler les ganglions spiraux du nerf auditif en contournant les cellules ciliées dysfonctionnelles (2, 4). Les patients âgés obtiennent en moyenne une compréhension de la parole aussi bonne dans le calme que les adultes plus jeunes avec un implant cochléaire. Ils obtiennent des résultats légèrement inférieurs en ce qui concerne la compréhension de la parole dans le bruit (11). Du point de vue de l’économie de la santé, il convient également de mentionner qu’en cas de surdité profonde de l’oreille interne ou de surdité, une implantation cochléaire unilatérale jusqu’à un âge très avancé présente un meilleur rapport coût/bénéfice qu’un appareillage auditif non suffisant. L’implantation cochléaire permet une amélioration avérée de la qualité de vie jusqu’à un âge avancé (10, 19).

En complément des mesures d’amélioration de l’audition périphérique, il existe de plus en plus de protocoles d’entraînement scientifiquement développés et contrôlés, qui entraînent les capacités auditives et cognitives et stimulent ainsi le système auditif central (18). Mais jusqu’à présent, ce sont surtout des entraînements simples et unilatéraux qui ont été proposés, basés par exemple uniquement sur le traitement de la fréquence ou de la longueur des sons. Dans de tels procédés, on fait par exemple écouter deux sons à une patiente qui doit ensuite décider lequel a une fréquence plus élevée. Cette fonction auditive de base, qui consiste à distinguer différentes fréquence de son, ne peut toutefois pas être facilement transposée au traitement de la parole. Cela signifie qu’il y a peu de “transfert” vers des situations communicatives quotidiennes, même si l’on s’améliore avec le temps dans la pratique. La parole est un signal beaucoup plus complexe que les soi-disant sons sinusoïdaux, qui n’existent pas vraiment dans la nature. C’est pourquoi les nouveaux entraînements adaptatifs et personnalisés, qui possèdent en outre une composante ludique et se concentrent sur le langage parlé naturel dans des situations d’écoute difficiles proches de la vie quotidienne, montrent des résultats beaucoup plus importants. Différentes approches d’entraînement peuvent être choisies en fonction du degré de perte auditive et des capacités cognitives des personnes, en se concentrant par exemple sur l’entraînement des capacités cognitives dans des contextes de communication (appelé auditory cognitive training ; ACT) ou sur une meilleure utilisation des informations vocales visuelles sur le visage des locuteurs (17) (fig. 4). La recherche à l’université de Zurich (sous la direction du professeur Giroud) développe et teste en outre d’autres procédés, comme les entraînements en réalité virtuelle ou la stimulation cérébrale.

Cette nouvelle génération d’entraînements est souvent basée sur des situations de communication pertinentes pour les personnes âgées, comme par exemple dialoguer alors que l’on se trouve dans un restaurant bruyant. La difficulté est de pouvoir se concentrer uniquement sur un locuteur et d’ignorer toutes les autres personnes et tous les bruits. De telles situations quotidiennes requièrent une écoute attentive, le traitement et l’interprétation du langage parlé, ainsi que des capacités cognitives telles que la mémorisation des informations traitées et la préparation d’une réponse à une question posée par le locuteur. Un programme d’entraînement validé scientifiquement pour le (suisse-) allemand est déjà disponible sur www.lippenlesen.ch de Pro Audito Suisse, le principal centre d’accueil pour les personnes souffrant d’une déficience auditive en Suisse (17).

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Cet article est une traduction de «der informierte arzt» 11_2023

Dr Patrick Dörig

Hôpital universitaire de Bâle
Clinique d’oto-rhino-laryngologie
Petersgraben 4
4031 Bâle

Pre Nathalie Giroud

Groupe de recherche en neurosciences du langage et de l’audition,
Université de Zurich, Institut de linguistique informatique
Andreasstrasse 15
8050 Zurich

les auteurs n’ont pas déclaré de conflits d’intérêts en rapport avec cet article.

◆ Avec l’âge, de nombreuses personnes sont touchées par une perte auditive. Cela a des répercussions non seulement sur la qualité de vie générale, mais aussi et surtout sur les fonctions psychosociales et cognitives.
◆ La presbyacousie évolue typiquement de manière lentement progressive et est à peu près aussi prononcée des deux côtés. La cause en est des modifications décelables aussi bien dans l’organe auditif périphérique que dans le système auditif central.
◆ Si, en raison de l’importance de la perte auditive, des appareils auditifs de haute qualité ne peuvent plus apporter de bénéfice pertinent, l’éva­luation d’un implant cochléaire est judicieuse jusqu’à un âge avancé.
◆ Outre les aides auditives techniques, il existe également de nouvelles possibilités thérapeutiques pour stimuler le système auditif central, comme par exemple l’entraînement à la lecture labiale ou à la communication au quotidien.

1. Alain C, Du Y, Bernstein LJ et al. (2018) Listening under difficult conditions: An activation likelihood estimation meta-analysis. Hum Brain Mapp 39:2695-2709
2. Carlson ML (2020) Cochlear Implantation in Adults. N Engl J Med 382:1531-1542
3. Cunningham LL, Tucci DL (2017) Hearing Loss in Adults. N Engl J Med 377:2465-2473
4. Dalbert A, Röösli C, Kleinjung T et al. (2021) Cochlea-Implantation. Swiss Medical Forum 21:474-478
5. Fischer N, Weber B, Riechelmann H (2016) [Presbycusis – Age Related Hearing Loss]. Laryngorhinootologie 95:497-510
6. Giroud N, Hirsiger S, Muri R et al. (2018) Neuroanatomical and resting state EEG power correlates of central hearing loss in older adults. Brain Struct Funct 223:145-163
7. Giroud N, Keller M, Meyer M (2021) Interacting effects of frontal lobe neuroanatomy and working memory capacity to older listeners’ speech recognition in noise. Neuropsychologia 158:107892
8. Hesse G, Eichhorn S, Laubert A (2014) [Hearing function and hearing loss in the elderly]. HNO 62:630-639
9. Hickok G, Poeppel D (2007) The cortical organization of speech processing. Nat Rev Neurosci 8:393-402
10. Laske RD, Dreyfuss M, Stulman A et al. (2019) Age Dependent Cost-Effectiveness of Cochlear Implantation in Adults. Is There an Age Related Cut-off? Otol Neurotol 40:892-899
11. Lenarz M, Sonmez H, Joseph G et al. (2012) Cochlear implant performance in geriatric patients. Laryngoscope 122:1361-1365
12. Liberman MC, Kujawa SG (2017) Cochlear synaptopathy in acquired sensorineural hearing loss: Manifestations and mechanisms. Hear Res 349:138-147
13. Livingston G, Huntley J, Sommerlad A et al. (2020) Dementia prevention, intervention, and care: 2020 report of the Lancet Commission. Lancet 396:413-446
14. Lohler J, Cebulla M, Shehata-Dieler W et al. (2019) Hearing Impairment in Old Age. Dtsch Arztebl Int 116:301-310
15. Probst R, Grevers G, Iro H (2008) Hals-Nasen-Ohren-Heilkunde. Georg Thieme Verlag KG
16. Profant O, Skoch A, Balogova Z et al. (2014) Diffusion tensor imaging and MR morphometry of the central auditory pathway and auditory cortex in aging. Neuroscience 260:87-97
17. Schmitt R, Meyer M, Giroud N (2023) Improvements in naturalistic speech-in-noise comprehension in middle-aged and older adults after 3 weeks of computer-based speechreading training. NPJ Sci Learn 8:32
18. Stropahl M, Besser J, Launer S (2020) Auditory Training Supports Auditory Rehabilitation: A State-of-the-Art Review. Ear Hear 41:697-704
19. Tang L, Thompson CB, Clark JH et al. (2017) Rehabilitation and Psychosocial Determinants of Cochlear Implant Outcomes in Older Adults. Ear Hear 38:663-671
20. Wong PC, Jin JX, Gunasekera GM et al. (2009) Aging and cortical mechanisms of speech perception in noise. Neuropsychologia 47:693-703
21. World, Health, Organization (2021) World report on hearing.
22. Zust H, Tschopp K (1993) Influence of context on speech understanding ability using German sentence test materials. Scand Audiol 22:251-255

Les inhibiteurs de SGLT2 et les GLP1-RA en hépatologie

Le traitement antidiabétique moderne avec un SGLT2-I. et/ou un GLP1-RA, en plus de son effet cardioprotecteur et rénoprotecteur a également un effet hépatoprotecteur très prometteur. Ce dernier en cas de stéatose hépatique non alcoolique ou d’hépatopathie, respectivement stéatohépatite, désigné jusqu’à présent par NAFL ou NASH. Le GLP1-RA et d’autres nouveaux agonistes des récepteurs hormonaux entraînent une perte de poids significative de ≥10-15% du poids corporel et réduisent le risque de stéatose hépatique et d’autres maladies secondaires. Sous ces médicaments la stéatose hépatique et la stéatohépatite sont réversibles.

Modern antidiabetic therapy with an SGLT2-H. and/or a GLP1-RA has a very promising hepato-protective effect in addition to the cardio- and renoprotective effect. The latter in the case of non-alcoholic fatty liver or steatohepatitis; previously referred to as NAFL or NASH. GLP1-RA and other new hormone receptor agonists lead to a significant weight reduction of ≥10-15% of body weight and reduce the risk of steatotic liver disease and its sequelae. Hepatic steatosis and steato-hepatitis are reversible with these drugs.
Key Words: Non-alcoholic fatty liver disease, NAFLD/NASH, MASLD/MASH, SGLT2-I., GLP1-RA,cardiovascular disease, adiposity

Cet article est un complément aux deux publications sur les inhibiteurs de SGLT2 en cas d’insuffisance cardiaque et rénale (1,2) et se base sur une conférence en ligne récente de Diabetes Live (Streamed up) du novembre 2023.

Depuis le congrès de l’EASL de 2023, les termes “NAFL” et “NASH” sont remplacés par les termes MASLD et MASH (metabolic dysfunction associated steatotic liver disease ou metabolic dysfunction associated steatotic liver disease, associated steatohepatitis) seront utilisés. Le nouveau terme MASLD montre l’étroite interconnexion des facteurs hépatiques et métaboliques de la maladie. De plus, cela met en évidence la nécessité d’une prise en charge interdisciplinaire par des hépatologues et des spécialistes du métabolisme.

La nouvelle nomenclature comprend également la SLD/Steatotic Liver Disease comme terme générique, ALD/Alcoholic associated Liver Disease MetALD/MASLD + consommation d’alcool >10 ou 20 g/jour. Il y a aussi une aetiologie spécifique SLD (médicaments, virus, auto-immune, etc.) et une SLD cryptogénique (3).

La stéatose hépatique non alcoolique (NAFLD/MASLD) a une prévalence (DT2) allant jusqu’à 70%, une stéatohépatite (NASH/MASH) jusqu’à 40% et une maladie hépatique avancée jusqu’à 20%. On parle de MASLD lorsque chez les personnes atteintes de stéatose hépatique, au moins un des cinq facteurs de risque cardiométabolique sont présents. Il s’agit du pré-diabète, de l’obésité, de l’hypertension, de l’augmentation des triglycérides et du cholestérol LDL. Il est rare qu’une NAFL survienne chez des personnes minces. (génétique, effet secondaire de l’ immunothérapie).

L’échographie du foie doit être utilisée comme imagerie diagnostique. Elle n’est cependant pas assez sensible pour détecter une stéatose hépatique. mais elle est très spécifique en cas de teneur élevée en graisse (>25%) lors de la mise en évidence d’un modèle échogène du foie comparé à celui du parenchyme du rein droit. Une échographie entre la NAFL et la NASH n’est pas possible – cf. Figure 1. Les transaminases AST/GOT et L’ALT/la GPT ne peuvent pas être utilisées avec certitude pour détecter une stéatose hépatique. Elles ne sont élevées que dans 6 et 10% des cas. Le Fatty-Liver Index (FLI) est utile avec une sensibilité et une spécificité élevées pour une stéatose hépatique pour une teneur en graisse >25%. Il peut être calculé à partir de l’IMC, du tour de taille, de la y-GT et des triglycérides. Plus le taux de graisse dans le foie, plus le risque cardiovasculaire (cv) est élevé (4). Le rapport de risque correspondant pour le décès cardiovasculaire, l’infarctus du myocarde non létal et l’accident vasculaire cérébral ischémique était de 1,98 chez des personnes auparavant en bonne santé. Le FLI est un marqueur de surrogat de la NAFLD, et a une valeur pronostique pour l’identification des individus avec un risque plus élevé d’événements cardio-vasculaires et de TDM, un DT2.

Une stéatohépatite se développe à partir d’une stéatose hépatique dans 7-30% des cas, avec une fibrose supplémentaire. Jusqu’à présent appelée NASH, désormais appelée MASH / metabolic dysfunction associated steatohepatitis (stéatohépatite associée à un dysfonctionnement métabolique). Celle-ci a une morbidité et mortalité hépatiques accrues. Plus la fibrose est importante, plus le pronostic à long terme est mauvais. On en trouve une chez 12-20% des patients avec DT2. Les transaminases sont également élevés en cas de DT2 et de fibrose hépatocellulaire, mais seulement dans un faible pourcentage. (18 et 28% respectivement) (5). Le diagnostic de fibrose peut être établi à l’aide du score FIB-4. Celui-ci se calcule à partir de l’âge, les plaquettes (baisse en cas de cirrhose) et des trans-aminases. En cas de DT2, ce score devrait être relevé 1x par an par le médecin généraliste ou un diabétologue, tout comme l’eGFR et l’UACR pour exclure une IRC. Si le score FIB-4 est ≥1,3 il convient de s’orienter vers un gastroentérologue/hépatologue pour un fibroscan, car il existe un risque accru de cirrhose du foie ou carcinome hépatocellulaire (CHC) – voir figure 1.

Un CHC peut également se développer à partir d’une stéatose hépatique sans cirrhose, contrairement à l’hépatite C. Il existe donc un risque élevé chez les patients atteints de DT2. Voir aussi www.DDG. de/Diabetes and fatty liver.

Un très bel article de synthèse de Xu (6) montre comment se développe une stéatose hépatique. Outre la génétique, un apport calorique trop élevé avec une obésité et une augmentation du tissu adipeux, de l’adipokine et de la leptine, joue un rôle dans une modification du microbiome, une inflammation, une résistance à l’insuline, une lipogenèse hépatique de novo et le DT2.

La thérapie

L’obésité touche plus de 500 millions de personnes dans le monde. Dans les 10 prochaines années cela sera environ ¼ de la population mondiale. L’obésité est une maladie chronique complexe qui entraîne un grand nombre de maladies secondaires. Parmi les principales comorbidités sont le DT2, l’augmentation des décès d’origine vasculaire, la thromboembolie, les troubles du sommeil et le cancer.

En plus d’une alimentation saine et d’une activité physique suffisante, une réduction du poids de 5 à 10%, une activité physique, une réduction du poids de 5 à 10 % est judicieuse en cas d’hypertension, de stéatose hépatique, de dyslipidémie et pour la prévention du DT2.

Encore mieux pour la prévention cardiovasculaire, la rémission du DT2, l’amélioration des paramètres rénaux et hépatalogiques est une réduction du poids de 10 à >15%, y compris la NASH/fibrose, une ostéoarthrite du genou et une réduction de la mortalité cardiovasculaire. Sans médicaments cet objectif de 10->15% est difficilement atteignable.

Les inhibiteurs de SGLT2, les GLP1-RA et la metformine ont un effet très positif sur la stéatose hépatique et ses complications. Les sulfonylurées et les insulines augmentent cependant ces maladies.
Les inhibiteurs SGLT2 : ils réduisent les acides gras libres dans le foie, inhibent la lipogenèse, favorisent la lipolyse, inhibent l’inflammation et l’apoptose et augmentent l’autophagie avec une diminution du stress cellulaire. Ils inhibent également la résistance à l’insuline et la lipogenèse de novo dans le foie. Ainsi, outre le HbA1c, le poids, les enzymes hépatiques et les triglycérides, la stéatose hépatique et la fibrose sont diminuées avec Cana-, Dapa- et Empagliflozin pendant 12-48 semaines.selon différentes études sur le DT2 (6). Les i- SGLT2- sans DT2 ne sont pas autorisés dans cette indication hépatologique.
Les GLP1-RA : outre son utilisation dans le cadre d’un DT2 avec une nette amélioration des paramètres métaboliques et des effets cardioprotecteurs et néphroprotecteurs. le GLP1-RA est également utilisé en cas d’obésité. Une réduction effective du poids de 10->15 peut aujourd’hui être atteinte par voie médicamenteuse. Selon les lignes directrices de l’ESC de 2023 “Diabète + cœur”, il existe une indication pour un GLP1-RA en cas de DT2 avec un IMC de 30kg/m2 ou ≥27 avec des comorbidités adaptées au poids. Selon la substance, des doses efficaces permettent une réduction du poids effective.

Ce médicament doit ètre utilisé comme le i-SGLT2, indépendamment de l’HbA1c en cas de risque cardiovasculaire très élevé ou élevé, de DT2 et d’ ASCVD ou d’un risque de 10 ans ≥20% du score de diabète; DT2 et un risque à 10 ans de 10-<20% (IA). En cas d’IMC ≥35, après échec des mesures conservatrices y compris la thérapie avec un GLP1-RA , l’utilisation de la chirurgie métabolique/bariatrique est possible, (7).

Dans l’étude STEP-HFpEF, un GLP1-RA a permis d’améliorer la qualité de vie des patients souffrant d’insuffisance cardiaque. (IC)) avec une fraction d’éjection (FE) préservée (>50%) et une obésité (IMC ≥30kg/m2), en plus d’une réduction de poids, une amélioration des symptômes de l’IC et une amélioration de la limitation physique, de la qualité de vie et une réduction de la CRP ont été obtenues (8).

Dans l’étude actuelle SELECT, la prise de 2,4 mg du sémaglutide s.c. 1x par semaine chez 8803 patients obèses à risque cardiovasculaire sans DT2, une réduction significative de 20% du critère d’évaluation primaire (décès cardiovasculaire, infarctus/accident vasculaire cérébral non fatal) l’obésité a été montré comme un facteur de risque car­diovasculaire traitable. La réduction des décès, des infarctus du myocarde et des accidents vasculaires cérébraux par le sémaglutide a été observée, en plus d’un bon traitement conforme aux lignes directrices.

Le sémaglutide, administré à faible dose (0,1/0,2/0,4mg s.c. par jour), diminue l’ALT/GPT pendant 72 semaines dans une stéatohépatite non alcoolique( 10). Cette étude de phase 2 menée chez des patients atteints d’une MASH a montré que le traitement entraînait une augmentation significative du pourcentage de patients avec une amélioration de la stéatose hépatique (59 vs 17%). L’étude n’a toutefois pas montré de nette différence entre les groupes dans le pourcentage de patients avec une amélioration du stade de fibrose.

Un agoniste triple (GIP/GLP-1/Glucagon-RA) nommé Retatrutide à 8mg resp. 12mg/semaine a entraîné chez des patients obèses sans DT2 en plus d’une réduction du poids de ≥15% dans 83% des cas, une réduction de la stéatose hépatique ; celle-ci se résorbe chez plus de 85% des participants en 48 semaines. Le médicament entraîne une réduction du poids effective de jusqu’à 24%. De plus, il y a un effet positif sur le LDL-C, l’homéostasie du glucose et les lipides et profil lipidique (11,12).

L’ampleur de la réduction de poids semble être plus importante qu’avec le sémaglutide ou le tirazépatide, un agoniste dual, avec un profil de sécurité comparable (13). Dans le cas de traitement de l’obésité pure sans DT2, ces médicaments sont souvent encore off-label Use. À l’avenir, ils pourraient partiellement remplacer la chirurgie bariatrique/métabolique.

Dans les années à venir, nous allons donc assister à plusieurs études intéressantes sur le traitement des paramètres cardiométaboliques, sur la protection cardiovasculaire et rénale, sur la stéatose hépatique et l’obésité et leurs complications avec ces agonistes des récepteurs prometteurs et leurs combinaisons.

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Cet article est une traduction de «der informierte arzt» 01_2024

Dr Urs Dürst

Zelglistrasse 17
8127 Forch

L’  auteur n’ a pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.

  • Une perte de poids efficace de ≥15% du poids corporel permet d’éviter la stéatose hépatique, de améliorer nettement le risque cardiovasculaire, la morbidité/mortalité hépatique et l’état métabolique. Ceci n’est possible qu’avec l’aide des GLP1-RA et d’autres agonistes innovants des récepteurs d’hormones intestinales.
    Les incrétines sont disponibles dans le traitement du DT2 et de l’obésité.
    Elles augmentent la sécrétion d’insuline postprandiale. et ont un effet sur différents organes cibles.
  • Les inhibiteurs du SGLT2 et les GLP1-RA ont un effet cardio-, néphro- et hépatoprotecteur.

1. Durst U., SGLT2-H. in der Therapie, Teil 1 Herzinsuffizienz, Der informierte Arzt, Sept. 2023
2. Durst U., SGLT2-H. in der Therapie, Teil 2 Niereninsuffizienz, Der informierte Arzt, Nov.2023
3. Rinella ME et al., A multi-society Delphi consensus statement on new fatty liver disease nomenclature, Hepatology 2023, June 24, 101133
4. Kim JH et al., Fatty liver index and development of cardiovascular disease in Koreans without pre-existing myocardial infarction and ischemic stroke: a large population-based study, Cardiovasc Diabetol.2020, (19);Mai 2;19(1):51.doi: 10.1186/s12933-020-01025-4
5. Lomanaco R. et al., Advanced Liver Fibrosis Is Common in Patients With Type 2 Diabetes Followed in the Outpatient Setting: The Need for Systematic ScreeningDiabetes Care 2021;44(2):399-406
6. Xu R. et al., SGLT2-I. for Non-Alcoholic Fatty Liver Disease : A Review, Front Biosci (Land-mark Ed) 2023;28(7):134
7. Marx N. et al., 2023 ESC Guidelines for the management of cardiovascular disease in patients with diabetes, European Heart Journal (2023) 00, 1–98, https://doi. org/10.1093/ eurheartj/ehad192
8. Kosiborod MN et al., Semaglutide in patients with heart failure with preserved ejection fraction and obesity, 25. August 2023 DOI: 10.1056/NEJMoa2306963
9. Lincoff AM et al. Semaglutide and Cardiovascular Outcomes in Obesity without Diabetes. N Engl J Med. 2023 Nov 11. doi: 10.1056/NEJMoa2307563. Epub ahead of print. PMID: 37952131
10. Newsome PN et al., N Engl J Med 2021 Mar 25 ;384(12) :1113-1124
11. Jastreboff A.M. et al., Triple-Hormone-Receptor Agonist Retatrutide for Obesity – A Phase 2 Trial, N Engl J 2023 Aug 10, 389(6):514-526
12. Sanyal AJ et al., ADA Kongress 2023 in San Diego
13. Nauck M.A. et al., GIP und GLP-1-Rezeptoragonismus in der Therapie des Typ 2 Diabetes mit Fokus auf Tirzepatid, Diabetol. Stoffwechs 2023, Thieme Verlag

La BPCO – update 2023

La BPCO est considérée comme une maladie populaire. La prévalence mondiale de la BPCO est de 10,3% avec une tendance à la hausse en raison de l’ augmentation du nombre de fumeurs dans les pays à faible et moyen revenu (LMIC) et du vieillissement dans les pays à revenu élevé. Comme les années précédentes, la Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease (GOLD), a publié une mise à jour de la recommandation publiée pour la première fois en 2001 concernant le diagnostic, la prise en charge et la prévention de la BPCO, avec quelques nouveautés essentielles. (1)

COPD is considered to be a popular disease. The global prevalence of COPD is 10.3%, with an upward trend due to the increase in the number of smokers in low- and middle-income countries (LMIC) and ageing in high-income countries. As in previous years, the Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease (GOLD), has published an update of the recommendation published for the first time in 2001 concerning the diagnosis, management and prevention of COPD, with some essential new features.
Key Words: bronchopneumopathie chronique obstructive, GOLD, prévention

Entre autres, la définition de la maladie BPCO est adaptée pour prendre en compte du fait qu’ outre la fumée de tabac comme cause principale de la maladie, d’ autres mécanismes pathogéniques contribuent à la présentation clinique de la BPCO qui est une maladie très hétérogène.
La taxonomie adaptée comprend ce que l’ on appelle les étiotypes suivants de la BPCO:
– BPCO-G (genetique): BPCO déterminée génétiquement, par exemple déficience de l’ AA1AT BPCO-D (developement): causée par un développement pulmonaire anormal, par ex. naissance précoce
– BPCO-C (cigarette): due à l’ exposition à la fumée de tabac (cigarettes, exposition au tabagisme passif, vapotage/cigarette).
– BPCO-P (pollution): due à l’ exposition à des polluants (atmosphériques) provoque
– BPCO-I (infections): causée par des infections graves/répétées (dans la petite enfance) provoque
– BPCO-A (asthme): liée à l’ asthme et à l’ enfance
– BPCO-U (unknown) : maladie inconnue

Le diagnostic de la BPCO doit être établi sur la base de l’ anamnèse, des symptômes cliniques, d’ un examen physique et d’ un examen spirométrique. Lors de la spirométrie, on considère toujours qu’ un taux du rapport postbronchodilatateur de VEMS/CVF (valeur de Tiffen-eau) inférieur à 70 % est un signe de trouble ventilatoire obstructif. Il convient cependant de noter que l’ utilisation d’ un taux fixe du rapport VEMS/CVF (inférieur à 70%) pour définir une obstruction mène a un sur-diagnostic chez les personnes âgées et un sous-diagnostic d’ un trouble respiratoire obstructif ou d’ une BPCO, en particulier en cas de maladie légère (2). Il est donc préférable d’ utiliser une valeur limite basée sur la limite inférieure des valeurs normales du VEMS/CVF (LLN : lower limit of normal).

De plus, il faut savoir qu’ une valeur VEMS abaissée (VEMS 1 inférieur à 80% de la valeur normale après bronchodilatation) avec une valeur de Tiffeneau en dessus de 70% de la valeur normale avec des troubles respiratoires peut être un signe précurseur de BPCO (PRISm: Preserved ratio impaired spirometry).

Ce groupe de patients présente également une probabilité plus élevée de comorbidités, en particulier de maladies cardiovasculaires et d’ une mortalité plus élevée, quel qu’ en soit la cause (3).

La classification des patients atteints de BPCO dans les degrés de gravité GOLD 1-4 continue de s’ effectuer en cas de limitation de la valeur de Tiffeneau inférieure à 0,7 ou 70 % selon le test de dilatation bronchique en fonction de la limitation de la capacité absolue en une seconde (GOLD 1 : moins de 80 % du volume cible VEMS 1 à GOLD 4 : moins de 30 % du volume cible VEMS 1).

En outre, en cas d’ incertitude diagnostique, le diagnostic fonctionnel pulmonaire étendu (ici surtout la pléthysmographie corporelle et la mesure de la capacité de diffusion) ainsi que des examens d’ imagerie, l’ échographie (cardiaque), la tomodensitométrie, l’ oxymétrie de pouls (également à l’ effort, p. ex. test de marche de six minutes)) sont recommandés.

Le CT thoracique doit être réalisé chez les patients présentant des exacerbations récurrentes (entre autres, question sur les bronchectasies), un VEMS inférieur à 45% (entre autres, question sur l’ hyperinflation/emphysème), des symptômes non proportionnels à la sévérité de la limitation de la capacité pulmonaire (entre autres, question sur la fibrose pulmonaire) et chez les patients qui répondent aux critères de dépistage du cancer du poumon (4).

Le GOLD souligne également l’ importance des comorbidités, comme par ex. maladies cardiovasculaires, le cancer du poumon, l’ ostéoporose, le reflux gastro-œsophagien, le diabète sucré, la dépression, les troubles anxieux et la sarcopénie qui ont une influence significative sur l’ évolution de la BPCO et le pronostic de la maladie.

Outre le tabagisme, une inflammation chronique dans l’ ensemble de l’ organisme est également soupçonnée d’ être à l’ origine des comorbidités (5).

En raison de l’ importance des exacerbations pour l’ évolution et le pronostic de la BPCO les degrés de sévérité C et D sont désormais regroupés en un seul degré de sévérité E qui, indépendamment de la sévérité des symptômes, doit être caractérisé par au moins deux exacerbations modérées, respectivement une exacerbation, mais qui conduit à une hospitalisation (figure 1).

Les symptômes doivent être évalués à l’ aide d’ un CAT (test d’ évaluation de la BPCO) ou du mMRC (modified Medical Research Council) et déterminent la classification dans le groupe A (peu de symptômes) ou B (symptômes sévères), s’  il n’ y a pas plus d’ une exacerbation modérée (sans hospitalisation) dans l’ année (6, 7).

Un nouvel aspect important est également la définition adaptée d’ une exacerbation.

Celle-ci se caractérise par une augmentation de la dyspnée et/ou de la toux avec expectoration en moins de 14 jours. Cela peut être accompagné d’ une tachypnée et/ou une tachycardie et est souvent associée à une augmentation d ’ une inflammation locale et d’ une inflammation systémique causée par des infections des voies respiratoires, la pollution de l’ air ou d’ autres irritations des voies respiratoires (8).

Les diagnostics différentiels importants en cas d’ exacerbation de la BPCO sont l’ embolie pulmonaire, la décompensation cardiaque, l’ infarctus du myocarde, la pneumonie et le pneumothorax (9).

Le pronostic à long terme d’ une exacerbation de la BPCO avec hospitalisation est mauvais, avec un taux de mortalité d’ environ 50 % à 3,6 ans. Les facteurs pronostiques indépendamment associés à une mauvaise évolution comprennent un âge plus élevé, un IMC plus faible, des comorbidités (par ex. maladies cardiovasculaires ou cancer du poumon), des hospitalisations antérieures pour exacerbation de la BPCO, la gravité clinique de l’ exacerbation et la nécessité d’ une oxygénothérapie à long terme au moment de la sortie.

Même si jusqu’ à 80 % de toutes les exacerbations peuvent être traitées en ambulatoire (médicamenteux avec des bronchodilatateurs, une thérapie de choc aux stéroïdes avec 40 mg de prednisone pendant 5 jours et des antibiotiques chez les patients présentant les trois symptômes cardinaux suivants : augmentation de la dyspnée, augmentation de la quantité de crachats et purulence des crachats) (10, 11), GOLD propose les critères suivants indications d’ hospitalisation en cas d’ exacerbation:

– Symptômes graves tels qu’ une augmentation aiguë de la dyspnée au repos, une fréquence respiratoire élevée, une mauvaise saturation en oxygène, nouvelle confusion
– Insuffisance respiratoire aiguë
– Nouvelle apparition de signes physiques tels qu’ une cyanose ou un œdème périphérique
– Absence de réponse au traitement médicamenteux initial de l’ exacerbation
– Comorbidités sévères telles qu’ insuffisance cardiaque ou apparition récente de troubles du rythme cardiaque
– Soins à domicile insuffisants.

La plupart des patients atteints de BPCO continuent à souffrir des conséquences de l’ exacerbation pendant plusieurs semaines et ne reviennent souvent jamais à leur ancien niveau clinique.

Un suivi clinique précoce devrait être effectué dans le mois suivant la sortie, de sortie et permet de réduire les rechutes ou les réexacerbations (1).

Le traitement de la BPCO stable est basé sur la symptomatologie et l’ expectoration historique des exacerbations avec une répartition dans les groupes de risque A, B et E et se divise en deux parties, d’ une part la recommandation thérapeutique initiale et d’ autre part le suivi du traitement. Le traitement de base de la BPCO consiste en principe en des bronchodilatateurs ; dans le groupe A GOLD recommande un bronchodilatateur à courte ou longue durée d’ action avec une préférence pour les préparations à longue durée d’ action, avec une certaine préférence pour les anticholinergiques. Dans les groupes B et E, le bronchodilatateur double (combinaison de LABA (long acting beta agonists) et LAMA (long acting muscarinic agonists)) est le traitement de choix.

La combinaison de LABA et d’ ICS (inhaled cortico steroid) n’ est en principe plus recommandée dans le traitement de la BPCO.
Si les ICS sont indiqués (voir graphique Critères de traitement par ISC), il convient d’ utiliser une triple combinaison de LABA, LAMA et ICS.
Le nombre de cellules éosinophiles dans l’  hémogramme différentiel (plus de 300 éosinophiles/µl) et l’ historique des exacerbations devraient servir de critères pour les ICS en tant que traitement supplémentaire dans le groupe E.

L’ administration à long terme de stéroïdes oraux/systémiques est contre-indiquée. Dans la situation de suivi, il est décisif de savoir si les patients souffrent davantage de symptômes ou si des exacerbations sont survenues entre-temps chez le patient sous traitement. En cas de traitement déjà en cours par une combinaison LABA/LAMA, une escalade avec des ICS est recommandée (combinaison LABA/LAMA/ICS = trithérapie), si le nombre d’ éosinophiles dans l’ hémogramme périphérique est supérieur à 100 cellules/µl. Il convient toutefois de noter qu’ un traitement stéroïdien systémique éventuellement administré au moment de l’ hémogramme peut masquer un nombre d’ éosinophiles supérieur à 100/µl.

Par rapport à un traitement combiné LAMA/LABA, le traitement par une trithérapie peut apporter un avantage significatif en termes de survie chez les patients symptomatiques qui présentent des exacerbations sous traitement de la maladie (12).

Les principes actifs combinés de manière fixe (appelés trithérapie fixe) offrent un avantage en termes de bénéfice maximal et d’ adhésion au traitement.

En principe, GOLD recommande d’ évaluer, de vérifier et de prendre en compte, avant/pour chaque changement de traitement, la symptomatologie et l’ historique des exacerbations, mais aussi la technique d’ inhalation et l’ observance du traitement, ainsi que les mesures non pharmacologiques telles que le sevrage tabagique ou les mesures de réhabilitations ambulatoires/stationnaires visant à augmenter l’ activité physique.
De plus, la vaccination contre la grippe, le SARS-CoV-2 et la vaccination contre les pneumocoques, la coqueluche et l’ herpès zoster est recommandée à tous les patients avec BPCO.

Enfin, pour une prise en charge optimale de nos patients atteints de BPCO, il est essentiel et indispensable d’ avoir la meilleure coopération possible entre les médecins de famille, les spécialistes, les physiothérapeutes, les nutritionnistes, les médecins de rééducation et, au stade final, les médecins palliatifs.

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Dr Andreas Piecyk

LungenZentrum Hirslanden
Wittelikerstrasse 40
8032 Zurich

a.piecyk@lungenzentrum.ch

L’ auteur n’ a pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.

1. The Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease, 2023 GOLD REPORT
2. Guder C. et al.: Gold or lower limit of normal definition? A comparison with expert based diagnosis of chronic obstructive pulmonary disease in a porspective cohort study. Respir Res 2012 Feb 6;13(1):1
3. Stolz D. et. al.: Towards the elimination of chronic obstructive pulmonary disease: a Lancet Commission. Lancet 2022 Sep 17;400(10356):921-972.
4. Galban C et. al.: Computed tomography-based biomarker provides unique signature for diagnosis of COPD phenotypes and disease progression. Nat Med 2012 Nov;18(11):1711-5.
5. Fabbri L. M. et. al.: Complex chronic comorbidities of COPD. Eur Respir J 2008 Jan;31(1):204-12.
6. Fletcher CM: Standardised questionnaire on respiratory symptom: a statement prepared and approved by the MRC Committee on the Aetiology of Chronic Bronchitis (MRC breathlessness score). BMJ 196: 2: 1662.
7. Jones P.W. et al.: Development and first validation of the COPD Assessment Test. Eur Respir J 2009 Sep;34(3):648-54.
8. Celli R.B. et. al.: An Updated Definition and Severity Classification of Chronic Obstructive Pulmonary Disease Exacerbations: The Rome Proposal. Am J Respir Crit Care Med 2021 Dec 1;204(11):1251-1258.
9. Beghè B. et al.: Exacerbation of respiratory symptoms in COPD patients may not be exacerbations of COPD. Eur Respir J 2013 Apr;41(4):993-5.
10. Leuppi J.D. et. al.: Short-term vs Conventional Glucocorticoid Therapy in Acute Exacerbations of Chronic Obstructive Pulmonary DiseaseThe REDUCE Randomized Clinical Trial. JAMA. 2013;309(21):2223-2231.
11. Miravittles M. et. al.: Sputum colour and bacteria in chronic bronchitis exacerbations: a pooled analysis. Eur Respir J 2012 Jun;39(6):1354-60.
12. Martinez FJ, et al.: Reduced All-Cause Mortality in the ETHOS Trial of Budesonide/Glycopyrrolate/Formoterol for Chronic Obstructive Pulmonary Disease. A Randomized, Double-Blind, Multicenter, Parallel-Group Study. Am J Respir Crit Care Med 2021;203:553–564

Parler des douleurs chroniques à l’âge avancé

Cette étude a investigué les pratiques de communication de personnes âgées souffrant de douleurs chroniques, par le biais d’   entretiens individuels et de focus groups. L’    expression des douleurs chroniques survient surtout dans les entourages socio-médical, familial et amical. Certains facteurs, tels que la banalisation, l’   âgisme et le stoïcisme, peuvent empêcher la thématisation des douleurs. Pour optimiser les pratiques cliniques, il s’   agit, pour les professionnels de la santé, d’   avoir un regard réflexif sur leurs échanges avec les patients âgés souffrant de douleurs chroniques et de mobiliser adroitement le réseau de ces derniers sans toutefois l’   épuiser.

This study used interviews and focus groups to explore elderly people’   s communicative practices about their chronic pain. Chronic pain is mainly expressed with health professionals, family members and friends. The thematization of chronic pain is often difficult due to phenomena such as pain banalization, agism and stoicism. Clinicians could enhance their practice by developing a self-reflective stance toward their interactions with elderly patients and by a skillful mobilization of their network without exhausting its members.
Key words: communication ; âge avancé ; douleurs chroniques ; recherche qualitative

Avec qui les personnes âgées parlent-elles de leurs douleurs chroniques ? Et pourquoi privilégient-elles certains interlocuteurs plutôt que d’ autres ? Voilà deux questions essentielles pour tout soignant souhaitant tenir compte du réseau social de ses patients dans son accompagnement thérapeutique.

Les douleurs chroniques – définies comme « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à, ou ressemblant à celle associée à, une lésion tissulaire réelle ou potentielle » (1) – réduisent la qualité de vie de nombreuses personnes âgées, tant au plan fonctionnel que relationnel (2, 3, 4). S’ il est admis qu’ une bonne gestion de la communication dans l’ entourage des personnes âgées souffrant de douleurs chroniques peut contribuer à réduire les effets délétères d’ un tel état de santé (5, 6), les données scientifiques tenant compte des expériences vécues par la population concernée restent limitées. Pour combler cette lacune, a été menée entre octobre 2019 et mars 2022 au Centre Hospitalier Universitaire Vaudois une étude interdisciplinaire sur la thématisation des douleurs chroniques et de leur traitement au sein des réseaux de communication des personnes âgées (7).

Financée par le Fonds National Suisse (10001C_179292), cette recherche s’ est basée sur un protocole de recherche original permettant, sur la base d’ entretiens semi-directifs avec une cinquantaine de personnes âgées, de documenter à la fois les pratiques de communication des personnes âgées et la structure de leur réseau social. À ces entretiens s’ est ajouté la réalisation de focus groups intégrant d’ autres populations concernées par les douleurs chroniques des personnes âgées (proches aidants, soignants, décideurs institutionnels et politiques). L’ ensemble des données collectées a été analysé en combinant analyse du contenu et analyse du discours (8). Cette multi-méthode a permis de mettre en évidence les types d’ interlocuteurs avec lesquels les personnes âgées évoquent la thématique des douleurs chroniques, les paramètres facilitant ou inhibant cette thématisation ainsi que les recommandations les plus à même d’ améliorer le quotidien des personnes âgées souffrant de douleurs chroniques (9, 10, 7). Les paragraphes suivants font la synthèse, nécessairement incomplète, des travaux menés dans le cadre de cette recherche.

Interlocuteurs

Les réseaux de communication des personnes âgées souffrant de douleurs chroniques présentent des tailles variables, allant d’ un seul interlocuteur récurrent à plus d’ une trentaine. Quelle qu’ en soit la taille, les personnes âgées soulignent souvent la réduction progressive de leur réseau. Plusieurs paramètres expliquent cette variation, parmi lesquels le vieillissement de l’ entourage amical et familial, la diminution de la mobilité et des capacités perceptives (surdité, notamment) et la difficulté à faire usage des technologies numériques.
Les personnes âgées s’ orientent principalement vers trois domaines de la vie sociale quand il s’ agit de décrire les interlocuteurs avec lesquels ils thématisent leurs douleurs chroniques : le monde socio-médical (médecins, infirmières, etc.), le monde familial (partenaire, enfants, etc.) et le monde amical.

Les personnes interrogées considèrent généralement les membres des corps médicaux et paramédicaux comme les interlocuteurs évidents pour traiter de cette thématique. Si l’ empathie et la disponibilité temporelle de la part du personnel de santé sont des facteurs facilitant la communication, celle-ci peut se trouver empêchée par une trop forte technicisation de l’ évaluation de la douleur (utilisation récurrente d’ échelles) et la peur de subir les conséquences de préjugés âgistes (banalisation de la douleur à l’ âge avancé, infantilisation des personnes âgées).
Même si le personnel de santé est présenté comme un interlocuteur de première importance, c’ est avec les membres de la famille nucléaire que les personnes âgées thématisent le plus souvent la question des douleurs chroniques : leur partenaire et leurs enfants, et parmi ceux-ci en général leur(s) fille(s). Cette tendance à privilégier les enfants comme interlocuteurs à propos de cette thématique se voit infléchie dès lors que les personnes âgées ont l’ impression que leurs difficultés de santé pourraient mettre en danger leur autonomie.

Il apparaît que la famille n’ est pas le seul répertoire d’ interlocuteurs des personnes âgées à propos de cette thématique, puisque le réseau amical, même s’ il tend à se réduire fortement au fil des années, s’ offre comme un lieu dans lequel il est possible de trouver un fort soutien émotionnel. Les interlocuteurs provenant du cercle amical partagent souvent les mêmes conditions d’ existence que les personnes interrogées dans l’ étude (âge et douleurs chroniques, notamment) et sont ainsi capable d’ une grande capacité d’ écoute et de compréhension. Les données montrent par ailleurs que la vie en institution est rarement pourvoyeuse de nouveaux interlocuteurs, du fait de difficultés perceptuelles et cognitives.

Le monde des services (par exemple, le coiffeur) n’ apparaît quasiment pas dans nos données. Quant au voisinage (voisins, concierge), il semble essentiel pour apporter une aide pratique ponctuelle et des opportunités d’ interactions sociales. Dans ces situations, la thématisation des douleurs n’ a, toutefois, qu’ exceptionnellement sa place et sous la forme d’ évocations superficielles.

Inhibiteurs à la communication des douleurs chroniques

Par-delà les types d’ interlocuteurs avec lesquels les personnes âgées parlent de leur douleurs chroniques, les données ont révélé cinq types de facteurs inhibant fortement la communication : le stoïcisme ; le fatalisme, l’ âgisme ambiant, l’ inadéquation contextuelle et la crainte pour son autonomie. Ces facteurs peuvent être liés à des barrières personnelles présentes chez les participants comme à des comportements que les personnes âgées observent chez leurs interlocuteurs.

Le stoïcisme réfère à la propension de nos participants à vouloir proscrire toute plainte et à souffrir en silence : « L’éducation, ça fait tout (…) j’ avais un père qui était dur, une mère qui était dure (…) on se plaint pas, on pleure pas, on dit pas qu’ on a mal » (participante, 75 ans). Ce tabou linguistique, tel qu’ il émerge de nos données, semble être une caractéristique générationnelle, produit d’ une socialisation langagière partagée tant par les femmes que les hommes. Au stoïcisme s’ ajoute un certain fatalisme, qui voit dans les douleurs chroniques une conséquence naturelle du vieillissement : « L’ épaule, c’ est du vieillissement, donc il y a pas de raison que j’ en parle tout le temps » (participante, 85 ans). Cette banalisation de la douleur va de pair avec sa mise sous silence et fait écho un âgisme ambiant enjoignant les personnes âgées à accepter et taire leurs douleurs si elles n’ empêchent pas une certaine autonomie fonctionnelle : « Et pis mon médecin il me dit: ‘mais enfin madame, vous avez 84 ans, vous croyez quoi (…) vous pouvez encore faire votre ménage, vous faites vos commissions, et tout, alors soyez contente’ » (participante, 84 ans). Plus généralement, les personnes âgées perçoivent bien l’ inadéquation contextuelle souvent associée à la thématisation des douleurs chroniques : « Ils ont autre chose à faire que d’ écouter mes jérémiades » (participante, 89 ans). Face à des interlocuteurs qu’ elles perçoivent souvent comme pressés par le temps (tant dans le monde médical que familial), elles veulent éviter de passer pour des personnes plaintives, ressassant presque obsessionnellement leurs difficultés. Enfin, la mise sous silence des douleurs chroniques est parfois motivée par une crainte pour son autonomie, qui fait de la santé en général une thématique extrêmement délicate à aborder pour les personnes âgées :
« vu mon âge, s’il m’arrive le moindre pépin, je pense qu’on va me dire: ‘votre permis, vous l’avez plus’ . Et ça, ce serait une catastrophe » (participante, 75 ans). La thématisation des douleurs chroniques prend ainsi place dans une situation où les personnes ont peur de voir se réduire leur champ d’ action et de décision.

Implication pour la pratique

Les résultats des analyses des entretiens avec les personnes âgées associées aux conclusions tirées des focus groups ont conduit à la formulation d’ une série de recommandations à l’ égard de divers publics : personnes âgées, proches (aidants), personnel de santé et société civile (7). Deux recommandations s’ avèrent essentielles pour la pratique clinique :
– Faire un examen critique de ses façons d’ échanger avec les personnes âgées à propos des douleurs chroniques (éviter l’ âgisme sans sous-estimer les vertus d’ un certain stoïcisme ; développer avec les patients un vocabulaire commun autour du ressenti douloureux) ;
– Impliquer avec précaution le réseau de communication de ses patients (identifier les personnes ressources, non seulement dans le cercle familial mais aussi amical ; veiller à éviter de surcharger les proches, notamment en permettant la thématisation de la douleur dans le cadre de la consultation).

La mise sous silence des douleurs chroniques n’ est pas une fatalité à l’ âge avancé, mais ceci ne signifie pas qu’ il faille absolument en faire une thématique omniprésente dans le quotidien des personnes concernées.

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Dr Gilles Merminod 1
Msc Imane Semlali 2
Dr Orest Weber 2
Dr Eve Rubli Truchard 2
Ma Anamaria Terrier 1
Pr Isabelle Decosterd 2
Pr Pascal Singy 1,2
1 Université de Lausanne
2 Centre Hospitalier Universitaire Vaudois

Dr Gilles Merminod

Université de Lausanne

Pr Pascal Singy

– Université de Lausanne
– Centre Hospitalier Universitaire Vaudois

Les auteurs n’ ont pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.

◆ Si l’    entourage médical et familial proche offre aux personnes âgées un environnement privilégié pour parler de leurs douleurs chroniques, les amis sont également cruciaux, notamment pour leur soutien émotionnel. La banalisation parfois âgiste des douleurs des aînés et le stoïcisme très répandu parmi les 3èmes et 4èmes âges actuels sont des facteurs inhibiteurs essentiels de l’    expression des vécus douloureux. Dans le travail clinique, la réflexivité est de mise, pour permettre d’    éviter des blocages communicationnels superflus tout en respectant le besoin des aînés de ne pas faire de leurs douleurs chroniques une thématique prenant trop de place.

1. Raja SN, Carr DB, Cohen M. et al. The revised International Association for the Study of Pain definition of pain: concepts, challenges, and compromises. Pain 2020;161(9):1976-1982. doi: 10.1097/j.pain.0000000000001939. PMID: 32694387; PMCID: PMC7680716.
2. Larsson C, Hansson E, Sundquist U. Chronic pain in older adults: prevalence, incidence, and risk factors. Scandinavian Journal of Rheumatology 2017;46:317–25.
3. Rastogi R, Meek B. Management of chronic pain in elderly, frail patients: finding a suitable, personalized method of control. Clin Interv Aging 2013;8:37–46.
4. Stubbs B, Schofield P, Patchay S. Mobility limitations and fall-related factors contribute to the reduced health-related quality of life in older adults with chronic musculoskeletal pain. Pain Practice 2016;16:80–89.
5. Clarke A, Anthony G, Gray D, Jones D, McNamee P, Schofield Pet al. “I feel so stupid because I can’    t give a proper answer…” How older adults describe chronic pain: a qualitative study. BMC Geriatrics 2012;12:78. doi: 10.1186/1471-2318-12-78
6. Stewart M. Developing your communication toolkit: a practical guide for healthcare professionals. Pain-E-Book: A textbook for health professionals 2022;21.
7. Singy P, Merminod G, Weber O, Semlali I, Terrier A, Decosterd I & Rubli Truchard E. Les douleurs chroniques à l’    âge avancé: en parler ou non ? 2023 Lausanne: BIL.
8. Merminod G, Weber O, Vaucher C, Semlali I, Terrier A, Decosterd I, Rubli Truchard E & Singy P. Communication about chronic pain in older persons’     social networks: study protocol of a qualitative approach. Frontiers in Public Health 2021;9. doi: 10.3389/fpubh.2021.764584.
9. Merminod G, Weber O, Semlali I, Terrier A, Decosterd I, Rubli Truchard E & Singy P. Talking about chronic pain in family settings: a glimpse of older persons’     everyday realities. BMC Geriatrics 2022;22(1). doi: 10.1186/s12877-022-03058-8
10. Semlali I, Merminod G, Weber O, Terrier A, Decosterd I, Rubli Truchard E & Singy P. Friendship in later life: How friends are significant resources in older persons’     communication about chronic pain. International Journal of Environmental Research and Public Health 2022;19. doi: 10.3390/ijerph19095551.