Les agonistes du GLP-1 dans le traitement de l’ obésité – disponibilité limitée rend la priorisation necessaire

La disponibilité des agonistes des récepteurs du GLP-1 est actuellement limitée au niveau mondial et ne couvre pas les besoins. Comme ce groupe de médicaments joue un rôle particulier dans le traitement de l’ obésité, la question se pose actuellement de savoir quels patients devraient avoir accès en priorité à ces médicaments. Les études actuelles, SELECT et STEP-HFpEF, portant sur l’ utilisation du semaglutide chez des patients présentant des antécédents cardiovasculaires ou une insuffisance cardiaque avec fraction d’ éjection préservée, peuvent fournir des indications sur une priorité médicalement justifiée. D’ autre part, la souffrance individuelle et le désir de traitement chez les personnes souffrant d’ obésité ne correspondent pas toujours aux aspects médicaux de l’ indication de traitement. Cela rend souvent la priorisation difficile pour les médecins traitants dans le quotidien clinique.

The availability of GLP-1 receptor agonists is currently limited worldwide and does not meet demand. As this group of drugs plays a special role in the treatment of obesity, the question currently arises as to which patients should be given priority access to these drugs. The current studies, SELECT and STEP-HFpEF, on the use of semaglutide in patients with pre-existing cardiovascular disease or heart failure with preserved ejection fraction may provide indications of medically justified prioritization. On the other hand, the individual level of suffering and desire for treatment in people with obesity does not always correlate with the medical aspects of the treatment indication. This often makes prioritization difficult for the treating physicians in everyday clinical practice.
Key Words: GLP-1 receptor agonists, obesity, limited availability

Nous disposons depuis quelques années de l’agoniste du GLP-1 liraglutide sous la marque Saxenda pour le traitement de l’obésité et de la surcharge pondérale en cas de comorbidités associées. En avril 2020, le médicament a été inscrit sur la liste des spécialités (LS) de l’ Office fédéral de la santé publique (OFSP) et a été largement utilisé par la suite. Comme nous l’ avons montré dans une étude récemment publiée à l’ échelle nationale, le traitement a été très efficace, mais l’ utilisation et le succès ont été restreints par les limitations de la LS (1).

Nouveau Wegovy® au lieu de Saxenda®

À l’ avenir, Saxenda® ne sera plus utilisé en Suisse pour le traitement de l’ obésité chez l’ adulte, car la société de production Novo Nordisk a actuellement mis sur le marché un nouveau médicament de la même classe de substances actives appelé Wegovy® (principe actif : sémaglutide) avec la même indication thérapeutique, qui est désormais prioritaire en raison des capacités de production limitées. Cette décision semble compréhensible pour différentes raisons et justifiée sur le plan médical. Tout d’ abord, le sémaglutide est, en ce qui concerne la réduction de poids souhaitée nettement plus efficace que le liraglutide (2).

Deuxièmement, on dispose pour la première fois de données cardiovasculaires pour le traitement de l’ obésité et de surpoids avec complications métaboliques chez des personnes sans diabète de type 2 (3, 4). Troisièmement, le sémaglutide, contrairement au liraglutide n’ est pas administré quotidiennement, mais seulement une fois par semaine par voie sous-cutanée, ce qui permet de réduire nettement la consommation de stylos injecteurs, réduisant ainsi l’impact environnemental et permettant l’utilisation plus judicieuse de stylos dont la production est limitée.

Indication et abus du semaglutide

L’ utilisation du semaglutide dans la pratique n’ est pas nouvelle, puisque la substance est disponible sous le nom commercial Ozempic® pour la forme injectable sous-cutanée et Rybelsus® pour la voie orale depuis quelques années déjà pour le traitement du diabète de type 2. Tel que rapporté dans les médias ces derniers mois, ces médicaments ont également été utilisés dans le cadre d’ applications “off label” chez des patients souffrant de surpoids et d’ obésité sans diabète de type 2. Compte tenu des données scientifiques disponibles et du fait que le sémaglutide est déjà utilisé depuis longtemps pour le traitement du surpoids et l’ obésité, cette utilisation off label peut être considérée comme justifiée dans certains cas. Cependant, il semble qu’ il y ait eu un abus à plus grande échelle, car les indications médicales ont été insuffisamment prises en compte et que la médication a été administrée à des personnes sans surpoids ou obésité, dans le seul but d’ optimiser subjectivement la forme corporelle. Cette évolution a des conséquences négatives dramatiques pour les patients atteints de diabète de type 2, car il est parfois impossible de se procurer du semaglutide en raison de l’ indisponibilité du produit. Il est important de souligner que tant les personnes atteintes de diabète de type 2, mais aussi les personnes souffrant d’ obésité ou de surpoids avec des maladies secondaires associées sans diabète de type 2 ont une claire indication à traitement médicamenteux spécifique, étant donné que toutes les maladies mentionnées s’ accompagnent d’ une forte augmentation de la mortalité. La disponibilité restreinte des médicaments ne doit en aucun cas conduire à ce que des groupes de patients individuels soient mis en opposition les uns contre les autres, Afin de garantir un approvisionnement suffisant pour toutes les groupes de patients à l’ avenir, il est essentiel de prescrire strictement les médicaments disponibles dans les indications données.

Quels médicaments pour le diabète de type 2, quels médicaments pour l’ obésité?

L’ obésité est une maladie chronique qui s’ accompagne de nombreuses séquelles et d’ une forte diminution de l’ espérance et de la qualité de vie.
Les personnes souffrant d’ obésité ont donc droit à un traitement adéquat, basé sur des preuves, comme les personnes atteintes de diabète de type 2. Ainsi, il nous semble actuellement difficilement supportable, d’ un point de vue médical et éthique, de devoir nous concentrer formellement sur le traitement du diabète de type 2 ou de l’ obésité chez certaines personnes, pour des raisons réglementaires de prise en charge des coûts, alors que les deux maladies concernent souvent la même personne. Nous souhaitons néanmoins donner ici un aperçu des substances actives autorisées, à quel dosage et sous quel nom, pour le traitement du diabète de type 2 et pour le traitement de l’ obésité ou du surpoids avec troubles associés. Le tirzépatide (“Mounjaro”), un bi-agoniste qui stimule non seulement le récepteur GLP-1, mais aussi le récepteur GIP, jouera probablement un rôle important dans le traitement de toutes les maladies mentionnées dans un avenir proche, c’ est pourquoi nous l’ avons également listé dans le tableau 1. Pour plus de détails sur l’ autorisation et le remboursement, nous vous renvoyons aux publications correspondantes de Swissmedic (5) et à la liste des spécialités (6) de l’ OFSP.

Le semaglutide – toujours en pénurie et contingenté

Selon les informations fournies par le fabricant Novo Nordik, le sémaglutide sous forme d’ injection sous-cutanée ne sera toujours disponible qu’ en quantité limitée. Durant les prochains mois, les investissements massifs réalisés actuellement dans l’ extension de nouvelles capacités de production devraient certes permettre de remédier à cette situation à l’ avenir, mais cela prendra encore plusieurs années avant qu’ un approvisionnement conforme aux besoins soit assuré. Cela signifie que nous continuerons à disposer de médicaments en quantité limitée et que nous devrons établir des priorités. Concrètement, au cours des prochaines années, nous devrons décider quotidiennement quels patients seront traités en priorité avec les médicaments disponibles et quels patients devront attendre malgré le souhait de traitement et l’ indication médicale existante. Il s’ agit là d’ un défi particulier, que nous n’ avons que peu, voire pas du tout, connu en Suisse jusqu’ à présent.

Le défi de la priorisation

L’ obésité est une maladie chronique. Les interruptions du traitement médicamenteux entraînent une reprise du poids corporel (2), ce qui représente une charge émotionnelle importante pour les personnes concernées, mais a également des conséquences somatiques négatives considérables. Pour nous, la priorité absolue est donc de pouvoir poursuivre les traitements existants. C’ est pourquoi nous proposons donc aux patient traités par Saxenda jusqu’à présent ainsi qu’à ceux traités par sémaglutide en utilisation «off label» mais pour des raisons médicales justifées, de changer pour le traitement de Wegovy. Il ne faut pas oublier de mentionner que la poursuite du traitement dépend malheureusement aussi des ressources financières des personnes concernées en raison de la prise en charge des coûts limitée dans le temps jusqu’ à présent, car les traitements correspondants doivent être financés par les personnes elles-mêmes sur le long terme. Contrairement à d’ autres maladies telles que le diabète de type 2 mellitus, l’ hypertension artérielle ou le cancer, les personnes atteintes de cette maladie doivent financer elles-mêmes leur traitement. Le surpoids et l’ obésité sont également des maladies neurobiologiques non imputables à des facteurs polygéniques (7), il s’ agit d’ une situation inacceptable qui doit être corrigée d’ urgence.

Nous pensons que la disponibilité future du sémaglutide devrait s’ améliorer progressivement, de sorte que de plus en plus de nouveaux patients pourront en bénéficier. Aujourd’ hui déjà, les centres qualifiés connaissent de longs délais d’ attente pour les personnes souhaitant être traitées sur la base d’ une indication médicale claire. La question des priorités se pose avec acuité, au plus tard en face de ces longs d’elais d’attente. Pour illustrer ce dilemme de manière tangible dans le quotidien clinique, nous décrivons deux patients rencontrés dans la pratique quotidienne (encadré 1). Qui traiteriez-vous en premier? La patiente qui souffre énormément et qui souhaite absolument un traitement? Ou plutôt le patient qui ne souhaite pas vraiment de traitement et qu’il faudrait probablement encourager à débuter un traitement?

Études cardiovasculaires

Pour prendre de bonnes décisions cliniques, il est important, même si ce n’ est pas toujours suffisant, de connaître les données scientifiques disponibles. L’ étude SELECT récemment publiée (3) est particulièrement pertinente dans le contexte de la priorisation de l’ utilisation du sémaglutide. Cette étude a porté sur des personnes ayant un IMC d’ au moins 27 kg/m2 et souffrant d’ une maladie cardiovasculaire (infarctus du myocarde survenu, accident vasculaire cérébral ou maladie artérielle périphérique). Au total, 17604 personnes ont été randomisées 1:1 pour recevoir soit un placebo, soit 2,4 mg de sémaglutide, 1 fois par semaine, s.c. Le critère d’ évaluation primaire combiné était le décès d’ origine cardiovasculaire, l’ infarctus du myocarde non fatal ou l’ accident vasculaire cérébral non fatal (MACE à 3 pts). L’ étude s’ est terminée après une durée moyenne de traitement de près de 40 mois, après la survenue d’ un nombre prédéfini (1’ 225) d’ événements du critère d’ évaluation primaire. Le résultat a montré que le traitement par le sémagutide a permis de réduire de 20% la survenue du critère d’ évaluation primaire par rapport au traitement par placebo (placebo vs. sémaglutide : 8,0% vs 6,55, hazard ratio 0,80 ; 95% intervalle de confidence 0. 72- 0.90; P<0.001). La réduction absolue du risque était donc de 1.5%, ce qui signifie qu’ environ 67 personnes présentant les caractéristiques cliniques correspondantes devraient être traitées par le sémaglutide pendant 40 mois pour éviter l’ un des critères d’ évaluation primaires.
Une autre étude semble également pertinente dans le cadre de la priorisation. Il s’ agit de l’ étude STEP-HFpEF, qui a inclus des personnes présentant un IMC d’ au moins 30kg/m2 et une insuffisance cardiaque avec fraction d’ éjection préservée (FE >45%, NYHA II-IV) (4). 529 personnes ont été randomisées 1:1 pour recevoir soit 2,4mg de sémaglutide par semaine, soit un placebo, et ont été traitées pendant 52 mois. Outre les effets sur le poids corporel, l’ amélioration de la symptomatologie et des fonctions physiques ont été définies comme critère d’ évaluation primaire. Les résultats ont montré qu’ après 20 semaines de traitement par le sémaglutide, l’ amélioration des symptômes de l’ insuffisance cardiaque était déjà nettement plus importante que sous placebo et que la différence entre les groupes de traitement augmentait avec la durée du traitement. Lors d’ un test de marche de 6 minutes, la distance de marche s’ est allongée de 21,5 mètres sous sémaglutide, alors qu’ elle ne s’ est améliorée que de 1,2 mètre sous placebo (différence de 20,3 mètres ; intervalle de confiance à 95% : 8,6 -32,1 ; p<0,001).

Qui devrait maintenant être traité en priorité?

Revenons à nos deux cas: il n’ est pas facile de décider qui doit être traité en priorité par le sémaglutide. La plupart d’ entre nous seront probablement enclins à traiter en premier la patiente (cas 1) qui souffre beaucoup et qui a une forte envie de traitement. Cependant, cette patiente a une indication claire pour une chirurgie bariatrique, pour laquelle elle a été jugée apte en raison de son obésité marquée et de ses longues années de tentative de perte de poids (8, 9). Dans ce contexte, il convient de rappeler une fois de plus les effets impressionnants de la chirurgie bariatrique sur la prolongation de la vie (10). Basé sur les dates publiées, il est clair que le patient (cas 2) doit être traité prioritairement par le sémaglutide.

Du point de vue de l’ économie de la santé, cela pourrait avoir du sens, si l’ on considère que chez le patient 2 il y a une chance de prévenir un autre accident cardiovasculaire grave dans les années à venir, et donc d’ économiser les coûts du traitement correspondants. Dans une telle considération médicale, plutôt théorique, on perd toutefois de vue la perspective des patients, qui devrait également être prise en compte dans la prise des décisions. En fin de compte, il n’ y aura pas de réponse de principe à la question de la priorisation. Il n’ y a pas de bonne ou de mauvaise réponse, car chaque cas doit être examiné individuellement. Les directives réglementaires, qui sont actuellement en cours d’ élaboration par les sociétés savantes suisses concernées peuvent aider les différents décideurs dans cette situation et offrir un soutien pratique et un certain soulagement en ce qui concerne la responsabilité de la prise de décision.

À quoi ressemblera l’ avenir?

On peut s’ attendre à ce que les pénuries et les retards de livraison soient surmontés. En outre, il y aura toute une série de nouvelles préparations avec des effets similaires, ce qui élargira le choix et la disponibilité des médicaments pour le traitement pharmacologique de l’ obésité, et améliorera encore la situation. En plus du médicament déjà mentionné, le tirazépatide, des substances basées également sur un effet GLP-1 et parfois d’ autres effets supplémentaires, sont actuellement en cours dans des programmes d’ études de phase 2 et de phase 3 (11, 12). Même si les résultats de ces études doivent être attendues, on peut déjà affirmer le grand espoir de voir s’ élargir la palette des options thérapeutiques pour le traitement pharmacologique de l’ obésité à l’ avenir. Il convient de mentionner que de nouvelles substances à base de peptides, aussi des “petites molécules” qui peuvent être prises par voie orale sont à l’ étude et pourraient ainsi être utilisées à moindre coût (13). Si l’ on considère le grand nombre de personnes qui pourraient bénéficier d’ un tel traitement, cela souligne l’ importance de l’ aspect des coûts, car il s’ agit en fin de compte de la possibilité de financer un traitement de longue durée pour une grande partie de la population. À cet égard, la charge socio-économique élevée que représentent pour la société les nombreuses maladies consécutives à l’ obésité extrêmement coûteuses, qui peuvent être évitées grâce aux nouveaux médicaments doivent être prises en compte. La dépendance d’ un traitement médicamenteux efficace de l’ obésité des possibilités financières aux ressources individuelles des personnes concernées est inacceptable, tant du point de vue médical que d’ un point de vue social, car elle ne correspond pas à notre exigence d’ une société socialement équitable. Même s’ il faut attendre les résultats de ces études, on peut déjà espérer que la palette des options thérapeutiques pour le traitement de l’ obésité s’ élargira.

Conclusion

La disponibilité limitée de médicaments contre l’ obésité en général et le sémaglutide en particulier pose actuellement de nouveaux défis importants qui nécessitent une priorisation inhabituelle. Même si le manque de disponibilité sera résolu dans quelques années, les ressources financières limitées du système de santé laissent craindre que dans le futur, des priorités soient fixées pour certains traitements. Dans ce contexte, les expériences dans le domaine de l’ obésité que nous sommes en train d’ acquérir seront aussi précieuses pour les processus décisionnels médicaux futures d’ économie de la santé.

Plus d’informations sur ce sujet : https://www.smob.ch/fr/

Cet article est une traduction de «der informierte arzt – die informierte ärztin» 02_2024

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Pr Dr Bernd Schultes

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de métabolisme Hôpital universitaire de Bâle
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Département de biomédecine, Université de Bâle

Bernd Schultes : Les honoraires de conférence et de conseil de Novo Nordisk et Eli Lilly, ainsi qu’ un soutien financier à la recherche par Novo Nordisk. Gottfried Rudofsky :
honoraires de conférenciers et honoraires de conseil de Novo Nordisk et Eli Lilly. Katharina Timper: honoraires de conférence et honoraires de conseil de Novo Nordisk, Eli Lilly, et Boehringer-Ingelheim, ainsi qu’ un soutien financier à la recherche de la part de Novartis et Novo Nordisc.

1. Schultes B, Timper K, Cavadini G, Rüh J, Gerber PA. Weight loss and treatment patterns in a real-world population of adults receiving liraglutide 3.0 mg for weight management in routine clinical practice in Switzerland (ADDRESS study). Diabe¬tes Obes Metab. 2023 Dec 13;
2. Schultes B, Ernst B, Rudofsky G. Medikamentöse Adipositastherapie – endlich Licht, jedoch auch Schatten. der informierte Arzt. 2023;(03):10–5.
3. Lincoff AM, Brown-Frandsen K, Colhoun HM, Deanfield J, Emerson SS, Esbjerg S, et al. Semaglutide and Cardiovascular Outcomes in Obesity without Diabetes. N Engl J Med. 2023 Dec 14;389(24):2221–32.
4. Kosiborod MN, Abildstrøm SZ, Borlaug BA, Butler J, Rasmussen S, Davies M, et al. Semaglutide in Patients with Heart Failure with Preserved Ejection Fraction and Obesity. N Engl J Med. 2023 Sep 21;389(12):1069–84.
5. Swissmedic 2019 © Copyright. Swissmedic [Internet]. [cited 2023 Dec 19]. Available from: https://www.swissmedic.ch/swissmedic/de/home.html
6. Spezialitätenliste (SL) – Übersicht [Internet]. [cited 2023 Dec 19]. Available from: https://www.xn--spezialittenliste-yqb.ch/
7. Schultes B, Ernst B, Hallschmid M, Bueter M, Meyhöfer SM. The “Behavioral Balance Model”: A new perspective on the aetiology and therapy of obesity. Dia¬betes Obes Metab. 2023 Dec;25(12):3444–52.
8. Aeby G, Schultes B, Bueter M. Chirurgische Behandlung der Adipositas – Teil 1: Richtlinien der Swiss Society for the Study of morbid obesity and metabolic disor¬ders (SMOB). der informierte Arzt. 2023;(05):41–4.
9. Aeby G, Schultes B, Ernst B, Bueter M. Chirurgische Behandlung der Adipositas – Teil 3: Kompikationen und Ergebnisse der bariatrisch-metabolischen Chirurgie. der informierte Arzt. 2023;(11):28–31.
10. Syn NL, Cummings DE, Wang LZ, Lin DJ, Zhao JJ, Loh M, et al. Association of metabolic-bariatric surgery with long-term survival in adults with and without dia¬betes: a one-stage meta-analysis of matched cohort and prospective controlled studies with 174 772 participants. Lancet. 2021 May 15;397(10287):1830–41.
11. Frias JP, Deenadayalan S, Erichsen L, Knop FK, Lingvay I, Macura S, et al. Efficacy and safety of co-administered once-weekly cagrilintide 2·4 mg with once-weekly semaglutide 2·4 mg in type 2 diabetes: a multicentre, randomised, double-blind, active-controlled, phase 2 trial. Lancet. 2023 Aug 26;402(10403):720–30.
12. Jastreboff AM, Kaplan LM, Frías JP, Wu Q, Du Y, Gurbuz S, et al. Triple-Hormone- Receptor Agonist Retatrutide for Obesity – A Phase 2 Trial. N Engl J Med. 2023 Aug 10;389(6):514–26.
13. Wharton S, Blevins T, Connery L, Rosenstock J, Raha S, Liu R, et al. Daily Oral GLP-1 Receptor Agonist Orforglipron for Adults with Obesity. N Engl J Med. 2023 Sep 7;389(10):877–88.

Fatigue et somnolence dans la pratique

Les troubles tels que « fatigue », « somnolence », besoin de sommeil prolongé avec réveil difficile (hypersomnie) ou « épuisement » avec durée de récupération prolongé doivent être définis le mieux possible par des questions ciblées en raison des conséquences thérapeutiques. En cas de fatigue ou de somnolence diurne, il convient d’  envisager à temps une narcolepsie, en plus des causes fréquentes telles que le manque de sommeil, l’  apnée du sommeil et la dépression. En règle générale, une vidéo-polysomnographie est indispensable pour exclure les troubles respiratoires ou moteurs liés au sommeil. En cas de suspicion de narcolepsie ou d’  hypersomnie, elle doit être complétée par l’  actigraphie et un test de latence au sommeil (MSLT). Le médecin traitant doit informer chaque patient souffrant de somnolence diurne, dès la première consultation, de sa grande responsabilité au volant et, en cas de doute, l’  adresser à un centre du sommeil pour un test de maintien de l’  éveil (TME).

Complaints such as «tiredness», «sleepiness», prolonged need for sleep with difficult awakening (hypersomnia) or «exhaustion» with prolonged recovery time must be defined as precisely as possible with targeted questions because of the therapeutic consequences. In the case of any tiredness or sleepiness, narcolepsy should be considered at an early stage in addition to the common causes such as sleep deficiency, sleep apnea and depression. As a rule, a video-polysomnography is necessary to exclude sleep-related breathing or movement disorders. If narcolepsy or hypersomnia is suspected, actigraphy and multiple sleep latency test (MSLT) should be added. The attending physician should inform every patient with daytime sleepiness already at the first consultation about his great responsibility at the wheel and refer the patient in case of doubt to a sleep center for a maintenance of wakefulness test (MWT).
Key Words: Hypersomnolence centrale, somnolence diurne, hypersomnie, narcolepsie, fatigue, syndrome de fatigue chronique

La « somnolence diurne », l’  « hypersomnie », la « fatigue » ou l’  « épui­sement » (fatigue) sont des symptômes fréquents dans le cabinet de chaque médecin, qui nécessitent un diagnostic aussi précis que possible avant qu’  une thérapie et des conseils ciblés ne soient possibles (1, 2, 3). Lors de l’  anamnèse, il convient tout d’  abord de clarifier autant que possible ce que le patient entend par ses troubles, même s’  il faut être conscient que plusieurs troubles peuvent être présents simultanément.

Terminologie

Le terme « somnolence diurne » est utilisé pour désigner l’  augmentation de la pression de sommeil pendant la journée avec des endormissements fréquents dans des situations passives ou même actives. Contrairement à la fatigue, la somnolence s’  améliore lors d’  activités physiques et généralement aussi après une power-nap. Une somnolence diurne se traduit par un score élevé (>10/24 points) au questionnaire d’  Epworth (tab. 1) et peut être objectivée par une latence moyenne d’  endormissement raccourcie (< 10 minutes) au test de latence au sommeil (MSLT).

Le terme « hypersomnie » désigne un besoin de sommeil de >11 heures par 24 heures, généralement associé à un réveil difficile parce que le réveil n’  est pas entendu. La meilleure méthode pour quantifier l’  hypersomnie est la polysomnographie (PSG) « ad libitum », au cours de laquelle le patient peut faire la grasse matinée. Le terme « fatigue » est utilisé pour désigner la sensation d’  un manque d’  énergie prononcé, qui s’  accroît encore en cas d’  activité mentale ou physique. Le score de fatigue (4) (tab. 2) est nettement augmenté, le score d’  Epworth peut également être augmenté ou normal. La latence à l’  endormissement lors du test MSLT est cependant généralement normale (>10 minutes). Le lever matinal est également souvent retardé, non pas parce que le réveil n’  est pas entendu, mais parce que l’  énergie pour se lever manque après le réveil (= clinophilie). Le terme « épuisement (fatigue) » décrit la baisse de performance au cours d’  un effort mental ou physique, généralement suivie d’  un temps de récupération fortement prolongé (> 1 heure à une journée entière) avec un fort désir de repos mais pas forcément de sommeil.

Les causes

En plus de l’  anamnèse détaillée, y compris l’  évolution longitudinale et les éventuels liens avec des maladies somatiques ou psychiatriques, et d’  un examen clinique, le médecin de famille effectuera également quelques examens de laboratoire pour exclure des causes internes (tab. 3). La mise en évidence en laboratoire d’  une hypothyroïdie, d’  une anémie ou d’  une carence en fer ne devrait toutefois que rarement constituer la seule explication d’  une fatigue chronique ou d’  une somnolence.

La fréquente insuffisance de sommeil d’  origine sociale ou une hygiène du sommeil déficiente avec des heures de coucher et de lever variables et un rythme veille-sommeil décalé doivent être exclus dans une période de test de quelques semaines avec un rythme régulier et une durée de sommeil adaptée individuellement. Une insuffisance de sommeil d’  origine sociale d’  une heure par nuit par rapport au besoin de sommeil individuel peut déjà entraîner une somnolence/fatigue diurne. Le décalage du rythme veille-sommeil, qui apparaît surtout à l’  adolescence, se caractérise par l’  apparition simultanée d’  une insomnie d’  endormissement et d’  un réveil difficile, qui disparaît pendant les vacances lorsque le rythme est « libre ».

L’  étape suivante consiste à déterminer, au moyen d’  une vidéo-polysomnographie (PSG), les causes les plus fréquentes du sommeil non récupérable, telles que les troubles respiratoires et moteurs liés au sommeil et diverses parasomnies, y compris les crises d’  épilepsie pendant le sommeil (1). Dans le cas du syndrome d’  apnées obstructives du sommeil, la somnolence diurne ou la fatigue sont bien connues. En revanche, la relation de cause à effet entre un indice élevé de mouvements périodiques des jambes pendant le sommeil (PLMS) et une fatigue ne devrait pas être présumée d’  emblée, tant qu’  un traitement probatoire des PLMS n’  a pas permis d’  améliorer la fatigue. Une fois que le sommeil non récupérable a été exclu, il reste un petit groupe d’  « hypersomnolences centrales », dont font partie, outre la narcolepsie avec ou sans cataplexie, l’  hypersomnie idiopathique (HI) et l’  hypersomnie non organique. En raison des séquences thérapeutiques, ces causes doivent être distinguées et différenciées du syndrome de fatigue chronique (SFC) (7). Le diagnostic est posé sur la base des symptômes cliniques typiques (tab. 4A) et des résultats des examens complémentaires de médecine du sommeil (tab. 4B).
On distingue la narcolepsie avec cataplexie (NC ; type 1) de la narcolepsie sans cataplexie (NSC; narcolepsie monosymptomatique ; type 2) (1, 2).

Il s’  agit d’  un trouble potentiellement invalidant de la « structure du sommeil et de l’  éveil », caractérisé par la pentade 1. attaques de sommeil, 2. pertes de tonus affectif (cataplexie ; type 1 uniquement), 3. hallucinations hypnagogiques, 4. paralysies du sommeil et 5. troubles de sommeil nocturne, y compris des rêves perturbants. La maladie débute souvent entre 15 et 25 ans, pendant l’  apprentissage ou l’  école, mais plus rarement bien plus tard. La plupart du temps, la somnolence diurne extrême apparaît en premier et les cataplexies souvent au cours des mois suivants, mais rarement des années plus tard, voire jamais dans le cas du type 2. Des hallucinations hypnagogiques ou des paralysies du sommeil sont décrites par environ 60 % des patients, mais ne sont pas spécifiques pour la narcolepsie.

La somnolence diurne prononcée, souvent avec un score d’  Epworth > 15 points et/ou sous forme de crises d’  endormissement irrésistibles avec des actions automatiques dans le demi-sommeil, est pratiquement toujours la plainte principale. Les adultes font généralement état d’  un réveil sans problème le matin, voire d’  une insomnie de la nuit et d’  un sommeil diurne récupérable. Les enfants et les adolescents indiquent plus souvent un besoin de sommeil prolongé par 24 heures avec un réveil difficile et des siestes non récupérables.

Le type 1 se caractérise par des crises de faiblesse (= cataplexie) de la musculature de la nuque, des paupières, de la mâchoire inférieure ou une dysarthrie, déclenchées après les premières secondes de l’  émotion. La faiblesse dans les genoux est fréquente, mais moins spécifique de la narcolepsie. Pour un diagnostic clair, surtout pour la recherche, mais aussi en l’  absence de cataplexie classique, un taux d’  hypocrétine fortement réduit dans le liquide céphalorachidien (LCR) est diagnostique en cas d’  une NC.

La cause de la narcolepsie est supposée être une réaction auto-immune avec une production d’  hypocrétine largement absente dans l’  hypothalamus latéral, ce qui se produit chez les personnes génétiquement prédisposées avec un HLA DQB1*0602 positif, spontanément ou après certaines influences exogènes comme par exemple une infection streptococcique ou virale et très rarement après une vaccination (6).

  • L’  hypersomnie idiopathique se caractérise par une augmentation du besoin de sommeil de plus de 2 heures par rapport au passé ou à une valeur > 11 heures par jour. Typiquement, ces patients présentent un réveil difficile et des siestes diurnes non récupérables, ce qui doit également être pris en compte dans la thérapie comportementale, car une prolongation supplémentaire de la durée du sommeil n’  entraîne pas d’  amélioration de la vigilance diurne.
  • L’  hypersomnie non organique s’  observe souvent dans le cadre d’  une dépression partiellement rémittente et peut être suspectée par le début et l’  évolution parallèle des symptômes affectifs

Thérapie et conseil

Le traitement est axé sur les symptômes et se compose de mesures non médicamenteuses et médicamenteuses (tab. 5), dans le but de réussir l’  école ou l’  apprentissage et de permettre l’  exercice de la profession apprise. Pour lutter contre la somnolence diurne, on associe des pauses de sommeil fixes pendant la journée à des stimulants comme le Modasomil®, la Ritaline® ou, « off label », le Wakix®, le Sunosi® ou les amphétamines. Pour le traitement des cataplexies, Xyrem® est aujourd’  hui considéré comme un médicament de premier choix, qui a en même temps un effet positif sur le sommeil nocturne souvent fragmenté et qui, de manière intéressante, peut également atténuer les difficultés de réveil le matin en cas d’  hypersomnie idiopathique (8). En cas de causes non organiques et surtout en cas de syndrome de fatigue chronique, le traitement de premier choix consiste en un programme d’  entraînement progressif dans le cadre d’  une thérapie comportementale, soutenu par des antidépresseurs activateurs (Wellbutrin®, Venlafaxine®).

Le conseil porte sur le choix d’  une profession, les possibilités de compensation des désavantages à l’ école et en apprentissage, le planning familial, l’  aptitude à la conduite et, selon les activités, sur d’  autres domaines de la vie, une étroite collaboration entre le patient, le médecin de famille, le spécialiste du sommeil et, selon la situation, les employeurs et les psychologues étant un grand avantage (tab. 6). L’  association de patients (www.narcolepsy.ch) offre la possibilité d’  un accompagnement par d’  autres personnes concernées qui ont déjà fait l’  expérience de stratégies d’  adaptation (système de pairs).

Cet article est une traduction de « der informierte arzt  – die informierte ärztin» 10_2022

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Pr Johannes Mathis

Consultation de médecine du sommeil,
Neurozentrum Bern
Schänzlistrasse 45
3013 Berne

johannes.mathis@hin.ch

L’ auteur n’ a pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.

1. Mathis J. and Hatzinger M. Praktische Diagnostik bei Müdigkeit/Schläfrigkeit. Schweizer Archiv für Neurologie und Psychiatrie 2011; 162:300-9
2. International Classification of Sleep Disorders (ICSD), 3. Aufl. American Academy
of Sleep Medicine: 2014
3. Stadje R, Dornieden K, Baum E, et.al. The differentil diagnois of tiredness:
a systematic review. BMC Family Practice 2016; 17: 1-11
4. Bloch KE, Schoch OD, Zhang JN, Russi EW. German version of the Epworth Sleepiness Scale. Respiration 1999; 66(5):440-447.
5. Krupp LB, LaRocca NG, Muir-Nash J, Steinberg AD. The fatigue severity scale. Application to patients with multiple sclerosis and systemic lupus erythematosus. Arch Neurol. 1989;46:1121–3.
6. J. Mathis, S. Strozzi. Narkolepsie, eine Folge der H1N1-Grippeimpfung? Schweiz. Med. Forum 2012; 12: 8-10
7. Mathis J. Narkolepsie und andere «Zentrale Hypersomnolenzen». Praxis 107: 1161-1167 (2018)
8. Leu-Semenescu, Smaranda; Louis, Pauline; Arnulf, Isabelle (2016): Benefits and risk of sodium oxybate in idiopathic hypersomnia versus narcolepsy type 1: a chart review. Sleep Medicine 17, S. 38–44. DOI: 10.1016/j.sleep.2015.10.005.
9. Mathis J, Seeger R, Ewert U. Excessive daytime sleepiness, crashes and driving capability. Schweizer Archiv für Neurologie und Psychiatrie 2003; 154:329-338.
10. Mathis J, Kohler M, Hemmeter U-M, Seeger R. Fahreignung bei Tagesschläfrigkeit: Empfehlungen für Ärzte und akkreditierte Zentren für Schlafmedizin. Swiss Med Forum 2017; 17: 442-447 oder www.swiss-sleep.ch/driving

La sclérose en plaques pour le médecin de famille – quand faut-il y penser ?

La sclérose en plaques est la maladie du SNC à médiation auto-immune la plus fréquente et touche surtout les jeunes femmes. Elle se caractérise par une évolution par poussées. Les poussées peuvent se manifester de manière variable, les premiers symptômes fréquents étant une névrite optique ou des troubles de la sensibilité. L’IRM du neuroaxe révèle des lésions démyélinisantes réparties en foyers, qui constituent un corollaire à l’imagerie morphologique. Outre le traitement aigu en cas de poussée, il existe aujourd’hui de nombreuses préparations modifiant l’évolution de la maladie, qui permettent d’influencer de manière significative le cours de la maladie.

Multiple sclerosis is the most common autoimmune-mediated CNS disease and primarily affects young women. A relapsing-remitting course of the disease is characteristic. Relapse symptoms are highly variable, common initial symptoms are optic neuritis or sensory disturbances. Focally distributed demyelinating lesions are typical findings in the MRI of the neuroaxis. In addition to acute treatment options in case of a relapse, numerous disease-modifying drugs with significant impact on disease progression have become available.
Key Words: Multiple sclerosis, McDonald criteria, immune modulation

Vignette de cas

Une étudiante en psychologie de 24 ans se présente à votre cabinet de médecine générale en raison d’une maladresse de la main droite qui dure depuis environ trois semaines. Au début, elle ne l’a remarquée que lorsqu’elle jouait au piano, mais la semaine dernière, un verre lui a presque glissé des mains à deux reprises, si bien qu’elle s’inquiète de plus en plus. Au contact, elle décrit une sensation de fourrure modifiée dans la main. Quelles sont les mesures que vous prenez et quelle pourrait être la cause de ces symptômes?

Les généralités

La sclérose en plaques (SEP) est l’une des maladies auto-immunes les plus fréquentes chez les jeunes et la plus fréquente des maladies inflammatoires chroniques du SNC à médiation auto-immune. Rien qu’en Suisse, environ 15 000 personnes sont touchées (1). La maladie se caractérise par une évolution généralement par poussées et un schéma lésionnel en forme de foyer à l’imagerie par résonance magnétique. La sclérose en plaques est plus fréquente chez les femmes que chez les hommes (sex-ratio 3:1). Dans 80% des cas, elle se manifeste pour la première fois chez le jeune adulte, entre 20 et 40 ans (2). L’étiologie n’est qu’incomplètement comprise à ce jour. Outre l’autoréactivité immunologique, une prédisposition génétique ainsi que des facteurs environnementaux (carence en vitamine D, obésité, tabagisme) sont discutés en cas d’accumulation familiale. Une infection par le virus d’Epstein Barr peut augmenter considérablement le risque de développer une SEP. D’un point de vue physiopathologique, la démyélinisation inflammatoire des fibres nerveuses est la première cause de dommages axonaux secondaires.

La clinique

Le tableau clinique est très variable, en fonction de la localisation de la lésion. Les premiers symptômes typiques de la poussée, qui doivent faire penser à une sclérose en plaques dans le cadre du diagnostic différentiel, sont une détérioration unilatérale de l’acuité visuelle, le plus souvent dans le sens d’un trouble de la vision des couleurs accompagné d’une douleur des mouvements oculaires dans le cadre d’une névrite optique, et des déficits sensitifs ou moteurs (unilatéraux ou en tant que symptômes transversaux) avec ou sans troubles de la fonction vésicale. Les troubles de la sensibilité se manifestent souvent sous forme de paresthésies ou de dysesthésies sous forme de fourrure, de fourmillements, de sensation de ceinture ou de corset avec une répartition asymétrique et plutôt distale. En outre, des troubles de l’équilibre et de la coordination, une vision double et des vertiges sont fréquents comme corrélats d’une atteinte du tronc cérébral. Une poussée est définie comme un symptôme nouvellement apparu qui ne peut pas être expliqué dans le cadre d’une infection ou d’une augmentation de la température corporelle, appelé phénomène d’Uhthoff. La durée minimale est de 24 heures et un intervalle minimum de 30 jours est appliqué par rapport au dernier événement de poussée. Contrairement à d’autres diagnostics différentiels neurologiques (accident vasculaire cérébral, crise d’épilepsie), les symptômes s’installent généralement lentement, sur plusieurs heures ou jours. L’intensité est également très variable. Elle va de troubles discrets de la motricité fine, comme dans le cas décrit dans l’introduction, que les patients perçoivent comme de la maladresse, des hypesthésies ou des paresthésies à type de fourmillements, jusqu’à un syndrome transversal sensitif ou moteur. Souvent, les poussées durent de quelques jours à plusieurs semaines et régressent spontanément, bien que cette régression puisse rester incomplète. Parallèlement, on observe dans environ 50% des cas une symptomatologie de fatigue dès le début de la maladie, qui entraîne presque toujours une réduction considérable de la qualité de vie des personnes concernées au cours de la maladie (2). Les résultats des recherches actuelles indiquent de plus en plus qu’il existe des parallèles et des recoupements importants dans la physiopathologie.

L’examen clinique révèle souvent une augmentation du niveau des réflexes, des réflexes cutanés abdominaux précoces et un signe de Lhermitte positif (dysesthésie semblable à un choc électrique le long de la colonne vertébrale lors des mouvements de la tête). En cas d’atteinte cérébelleuse, on peut observer un nystagmus, un tremblement d’intention dans l’épreuve doigt-nez ainsi qu’une ataxie de la marche. L'”Expanded Disability Status Scale” (EDSS) sert d’instrument pour l’évaluation standardisée des fonctions cliniques chez les patients atteints de SEP.

Le diagnostic

Selon les critères McDonald actuellement en vigueur, la dissémination temporelle et locale doit être remplie pour établir le diagnostic.

Pour la dissémination locale, l’IRM doit montrer des lésions dans au moins deux des quatre régions typiques de la SEP. En cas de poussée d’une autre localisation, une lésion typique de la SEP suffit. La dissémination temporelle est assurée en présence d’au moins deux lésions d’âges différents (par exemple, présence simultanée de lésions enrichies en produit de contraste et de lésions non enrichies), en présence d’un deuxième événement de poussée (antérieur ou postérieur) ou en cas de détection de bandes oligoclonales spécifiques du liquide (pour plus de détails, voir la publication originale de Thompson et al., 2018) (3).

Dans un premier temps, après une anamnèse détaillée et un examen clinique neurologique, il convient, si la suspicion persiste, de procéder à une IRM avec produit de contraste du crâne ou, selon les symptômes, de la moelle épinière, en posant la question des modifications inflammatoires chroniques. Les quatre localisations classiques des lésions de SEP, généralement ovales, aux limites relativement nettes, puis confluentes, sont juxtacorticales, périventriculaires, infratentorielles et spinales (voir figure 1). Les lésions inflammatoires actives se distinguent par leur prise de contraste (4).

Après avoir été adressé au neurologue, un diagnostic sanguin et un diagnostic du liquide céphalorachidien sont complétés dans le cadre du diagnostic différentiel. Une pléiocytose légère à modérée ainsi qu’une synthèse intrathécale d’immunoglobulines avec mise en évidence de bandes oligoclonales sont typiques. En fin de compte, la SEP est un diagnostic d’exclusion. Les diagnostics différentiels pertinents qui doivent être délimités sont, entre autres, la maladie du spectre de la neuromyélite optique et les maladies associées aux anticorps MOG, les infections du SNC comme la neuroborréliose ou le neurolues et une carence en vitamine B12. Dans de rares cas, des maladies rhumatologiques impliquant le SNC, telles que les vascularites, la sarcoïdose ou la maladie de Behcet, peuvent également provoquer un tableau similaire (5).

Les caractéristiques de base de la thérapie

En cas de survenue d’un épisode de poussée invalidant, un traitement anti-inflammatoire peut être mis en place. On utilise classiquement des stéroïdes à haute dose (par ex. 1g de méthylprednisolone p.o./i.v. pendant 3 à 5 jours). Auparavant, il convient d’exclure une infection et, le cas échéant, une grossesse ; selon le profil de risque, il faut penser à une protection gastrique et à une prophylaxie des thromboses pendant le traitement de la poussée. En cas de régression insuffisante des symptômes, une plasmaphérèse ou une immunoadsorption peuvent être évaluées en tant que procédure de réserve.

Pour prévenir les poussées, de nombreuses préparations modifiant l’évolution de la maladie sont désormais disponibles et permettent d’influencer considérablement le cours de la maladie. Il est désormais clair qu’un début de traitement précoce a un effet plus favorable sur l’évolution de la maladie qu’un début de traitement retardé (“hit hard and early”) (6)(7).

Les médicaments autorisés sont classés en trois catégories par ordre croissant d’efficacité. Le choix du traitement se fait d’une part en fonction de l’activité présumée de la maladie sur la base de la clinique et de l’imagerie, et d’autre part en fonction de facteurs personnels (en particulier le désir d’enfant ou la grossesse). Outre les préparations à base d’interféron établies depuis les années 1990, la catégorie 1 comprend notamment le fumarate de diméthyle et le tériflunomide. Les modulateurs du récepteur de la sphingosine-1-phosphate les plus récents (par ex. le fingolimod) sont attribués à la catégorie 2. Les substances de la catégorie 3 sont le natalizumab, un inhibiteur de l’intégrine alpha4 qui inhibe la migration des lymphocytes T à travers la barrière hémato-encéphalique, et les anticorps monoclonaux anti-CD20, qui provoquent une déplétion des cellules B.

Le pronostic des personnes atteintes s’est nettement amélioré au cours des dernières décennies grâce à la disponibilité des préparations modulant la maladie, de sorte que l’on peut aujourd’hui s’attendre à une espérance de vie non compromise au moment du diagnostic. Un début précoce et monosymptomatique de la maladie avec une régression complète des symptômes de poussée s’est avéré être un facteur pronostique favorable (7). En complément, des mesures thérapeutiques non médicamenteuses, par exemple la physiothérapie et l’ergothérapie, ainsi que des stratégies thérapeutiques de soutien pour le contrôle des symptômes sont essentiels et nécessitent une prise en charge interdisciplinaire étroite.

L’  auteur a publié cet article en allemand dans « der informierte arzt  – die informierte ärztin» 12_2023, la traduction en français a été réalisée par les éditeurs. L’ auteur n’ assume aucune responsabilité pour les modifications dues à une traduction.

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Dre Lea Isabella Walter

Médecin-chef, Clinique de neurologie
Hôpital universitaire de Zurich
Frauenklinikstrasse 26
8091 Zurich

Pr Patrick Roth

Médecin-chef, Clinique de neurologie
Hôpital universitaire de Zurich
Frauenklinikstrasse 26
8091 Zurich

Les auteurs n’ont pas déclaré de conflits d’intérêts en rapport avec cet article.

◆ La sclérose en plaques est la maladie inflammatoire chronique à médiation auto-immune la plus fréquente du système nerveux central.
◆ Les symptômes d’un premier épisode de poussée peuvent être un trouble de la sensibilité ou une détérioration de l’acuité visuelle ou un trouble de la vision des couleurs accompagné d’une douleur liée aux mouvements oculaires (névrite optique).
◆ La SEP constitue un diagnostic différentiel important, en particulier chez les jeunes présentant une nouvelle symptomatologie neurologique.
◆ Le diagnostic est posé après exclusion des diagnostics différentiels importants en présence d’une dissémination dans l’espace et dans le temps (critères de McDonald).
◆ Le début précoce d’un traitement modificateur de la maladie peut influencer favorablement l’évolution de la maladie et est donc essentiel.

1. Schweizerische Multiple Sklerose Gesellschaft [Internet]. 2023 [cited 2023 Oct 26]. Available from: https://www.multiplesklerose.ch/de/
2. McGinley MP, Goldschmidt CH, Rae-Grant AD. Diagnosis and Treatment of Multip¬le Sclerosis: A Review. JAMA. 2021 Feb 23;325(8):765–79.
3. Thompson AJ, Banwell BL, Barkhof F, Carroll WM, Coetzee T, Comi G, et al. Diagnosis of multiple sclerosis: 2017 revisions of the McDonald criteria. Lancet Neurol. 2018 Feb;17(2):162–73.
4. Filippi M, Rocca MA, Ciccarelli O, De Stefano N, Evangelou N, Kappos L, et al. MRI criteria for the diagnosis of multiple sclerosis: MAGNIMS consensus guidelines. Lancet Neurol. 2016 Mar;15(3):292–303.
5. DGN One | Leitlinie Details [Internet]. [cited 2023 Oct 26]. Available from: htrum-erkrankungen-und-mog-igg-assoziierten-erkrankungen
6. Amato MP, Fonderico M, Portaccio E, Pastò L, Razzolini L, Prestipino E, et al. Di¬sease-modifying drugs can reduce disability progression in relapsing multiple scle¬rosis. Brain J Neurol. 2020 Oct 1;143(10):3013–24.
7. Wiendl H, Gold R, Berger T, Derfuss T, Linker R, Mäurer M, et al. [Multiple sclerosis treatment consensus group (MSTCG): position paper on disease-modifying treatment of multiple sclerosis 2021 (white paper)]. Nervenarzt. 2021 Aug;92(8):773–801.

Oncogériatrie: une collaboration bicéphale entre oncologue et gériatre

L’oncogériatrie est une discipline en plein essor fondée sur l’incidence croissante des cancers avec l’âge et le vieillissement de la population. Afin d’adapter les soins oncologiques aux patients âgés, les prises de décision imposent un niveau d’expertise complémentaire entre oncologue et gériatre, sans oublier le regard du médecin de famille et l’avis du patient: le tout étant validé au tumor board. Les sociétés savantes ont approuvé le score G8 qui permet à l’oncologue de sélectionner quel patient nécessite le recours au gériatre et la classification de Balducci qui guide le gériatre dans son positionnement concernant le traitement oncologique. Le suivi conjoint est primordial pour réévaluer la cohérence du plan de soins. «Primum non nocere» reste le principe fondamental tout au long de la prise en charge: on privilégiera la qualité de vie du sujet âgé.

Decision-making requires a complementary level of expertise between oncologists and geriatricians, as well as the views of the family doctor and the patient: all validated on the tumorboard. Learned societies approved the G8 score, which enables the oncologist to select patients who need to be referred to the geriatrician, and the Balducci classification, which guides the geriatrician in his position regarding oncological treatment. Joint follow-up is essential to reassess the coherence of the care plan. “Primum non nocere” remains the fundamental principle throughout the treatment process: the elderly patient’s quality of life remains our priority.
Key Words: Oncogeriatrics, G8 scale Oncodage, Balducci’s classification, Elderly people and cancer

Le cancer: pathologie du sujet âgé?

Du point de vue épidémiologique, l’incidence des cancers augmente avec l’âge et 80% sont diagnostiqués après 70 ans, selon les données de l’OFS (1). En parallèle on assiste à un vieillissement de la population avec l’allongement de l’espérance de vie (2) et une hétérogénéité des profils de séniors (3) : c’est l’âge physiologique qui importe (4).

Dans ce contexte, le plan cancer Suisse se positionne pour une vision intégrative sans discrimination de l’âge, chaque individu ayant le droit au même accès au dépistage, diagnostic et traitement (5). Les patients âgés peuvent être autant demandeurs de traitements curatifs que les plus jeunes (6). Mais en pratique, les sujets âgés ont moins d’investigation, sont diagnostiqués à des stades plus évolués, ils sont sous-traités par rapport aux plus jeunes et participent moins aux essais cliniques (7).

Au niveau international, Balducci, un des pionniers de l’oncogériatrie (8) a déterminé un modèle de management des cancers des sujets âgés (9) validé par la Société Internationale d’OncoGériatrie. En parallèle, Extermann développe le process du Geriatric Assessment en oncologie (10) avec update d’évaluation (11): le tout promouvant l’inclusion des patients âgés dans les protocoles de recherche. En France, un maillage territorial par des unités de coordination et antennes en oncogériatrie permet aux patients âgés de bénéficier d’une prise en charge spécifique avec recours aux réunions de concertation pluriprofessionnelle oncogériatrique pour les cas les plus complexes (12). Un programme spécifique de réadaptation appelée Récupération Améliorée Après Chirurgie a été implémenté et l’intergroupe de recherche en oncogériatrie, DIALOG a été labellisé (12).

Apports de l’évaluation gériatrique en oncologie (EGO)

L’EGO vise à éviter les risques de sur- ou de sous-traitement liés aux décisions thérapeutiques basées exclusivement sur l’âge ou sur le seul jugement clinique du médecin (13).

En 2011, Caillet et al (14) ont montré qu’une EGO peut apporter des changements importants dans la prise en charge pour 21% des 375 patients de l’étude sous forme d’une intensification de traitements (10%) ou d’une réduction d’intensité de traitement (81%). Ceci suppose néanmoins pour 9% du collectif d’une augmentation du délai de 15 jours de prise en charge gériatrique avant le traitement oncologique. Concernant les réductions d’intensité, il s’agit dans 86% des cas d’un retrait d’une chimiothérapie au bénéfice des soins de support. Les facteurs gériatriques significatifs en lien avec ces changements concernent la diminution de l’autonomie fonctionnelle (-0,5 point ADL) et la dénutrition.

En 2022, la méta-analyse de Hamaker et al (15), recueillant les résultats de 61 études, a souligné que l’EGO intégrée à la prise de décision oncologique induit des changements de traitements (31%), une diminution des taux de toxicités (60%), une probabilité améliorée d’achèvement du traitement (65%), une amélioration fonctionnelle (100%) et de la qualité de vie du patient (30%) par mise en place d’un plan d’aides personnalisé (70%).

Collaboration bicéphale: l’évidence du binôme oncologue et gériatre

L’hétérogénéité de la population âgée s’ajoute à celle des cancers justifiant l’expertise conjointe de l’oncologue ou spécialiste d’organe gérant des patients cancéreux âgés et du gériatre. Tous les patients âgés ayant un cancer ne peuvent être vus par un gériatre formé à l’oncogériatrie alors le principe de base est de cibler la collaboration entre oncologues et gériatres. Les compétences de chacun permettant d’être plus efficients.

Rôle de l’oncologue et questionnaire G8
Le patient âgé est vu par l’oncologue qui évalue le type de cancer et son stade d’évolution. Il dispose d’un outil de screening Quand l’oncologue réfère le patient au gériatre, le questionnement du choix du traitement oncologique prioritaire et ses alternatives doit être clairement explicité pour cibler l’évaluation du gériatre et ses réponses.

Rôle du gériatre et classification de Balducci
Le gériatre réalise une évaluation standardisée pour rechercher les syndromes gériatriques: dénutrition, trouble neurocognitif, dépression, troubles neuro sensoriels, chutes, polymédication par des tests validés pour déterminer l’autonomie fonctionnelle, décisionnelle, et le contexte de vie du patient. Une évaluation plus spécifique oncogériatrique détermine l’espérance de vie du patient selon tableaux OFS (2), les fragilités selon Fried (17) avec des tests d’expertise plus fine (vitesse de marche, force de préhension, asthénie, perte de poids, activité physique). La qualité de vie selon le patient est également définie avec une échelle d’autoévaluation numérique SF 36 (18) en précisant ce qui a du sens pour lui.
Le gériatre se focalise alors sur le risque en lien avec le traitement oncologique. L’échelle CIRS-G liste le niveau des comorbidités (19), sans oublier l’examen physique et la biologie en particulier la fonction rénale selon Cockroft, les posologies des médicaments étant basées sur ce calcul. Si l’option thérapeutique est une chimiothérapie, le score de CARG (20) ou CRASH (21) prédit le risque de survenue de toxicités de grade 3 à 5. Le risque chirurgical et péri-opératoire quant à lui, sera à évaluer au cas par cas en fonction du geste prévu et des éventuelles conséquences au décours, comme une colostomie définitive par exemple.

L’avis du patient et/ou de son référent thérapeutique par rapport au choix du traitement oncologique est capital : il faut clairement expliquer les effets secondaires et les bénéfices attendus. Le status réanimatoire sera discuté (fig 2).


Le gériatre est alors en mesure de classer le sénior selon Balducci modifié en 4 profils (22) pour guider la prise en charge oncologique. B1 représente les patients âgés robustes qui peuvent bénéficier des traitements oncologiques comme les plus jeunes. B2 concerne les patients pour lesquels une adaptation de traitement est nécessaire. B3 sont des patients relevant de soins de support alors que la classe B4 regroupe les patients en phase palliative. La classification initiale (23) comportait 3 niveaux, mais l’expérience a permis d’ajouter une classe supplémentaire intermédiaire (24) permettant de prendre en compte le bénéfice d’un programme nutritionnel pour le critère de réversibilité potentielle : un patient classé B2 peut être upgradé en B1. Le passage de B3 vers B2 nécessite un programme de réadaptation nutritionnelle intense et de physiothérapie en milieu stationnaire (fig 3).

Outre son positionnement par rapport au traitement oncologique, le gériatre fera aussi d’autres propositions comme une révision médicamenteuse, des conseils de traitement antalgique, des mesures de prévention d’un état confusionnel, un soutien psychologique… Les options de réhabilitation (physio -ergothérapie, programme nutritionnel, support social…) pré-thérapeutique et en intercures sont expliquées pour définir avec le patient un plan d’aides personnalisé en ambulatoire ou en réadaptation oncologique stationnaire. L’avis gériatrique est tout sauf un cumul de scores incompréhensibles aux non-initiés : les scores aboutissent à des diagnostics qui débouchent sur des propositions concrètes.
Les directives anticipées sont alors abordées et à rédiger avec le médecin de famille de préférence. La réflexion est au cas par cas avec comme principe fondamental «Primum non nocere» à tous moments de la prise en soin.

Synthèse oncogériatrique
Une discussion a alors lieu entre gériatre et oncologue et un rapport de la consultation oncogériatrique est adressé à l’oncologue et au médecin de famille. C’est au tumorboard que la décision finale est prise. L’oncologue présente alors au patient le plan de soin oncologique et gériatrique. L’organisation d’un suivi gériatrique conjoint à celui de l’oncologue ou à sa demande optimise la prise en charge, comme cela a été démontré pour l’évaluation gériatrique standardisée (25).

Expériences au RHNe: cas clinique et perspectives

La consultation ambulatoire oncogériatrique se développe depuis 2018 principalement avec l’équipe du département d’oncologie et au Centre du Sein labellisé. L’expérience en pratique montre que l’avis oncogériatrique peut être demandé par l’oncologue sur la base de son sens clinique quand la prise de décision thérapeutique est complexe avec la suspicion d’un trouble neuro cognitif, des chutes répétées. À l’inverse, arrive le questionnement vis-à-vis des theranostics (26) pour le profil des «supers robustes», outrepassant le score G8.

Nos axes d’amélioration concernent les patients oncologiques hospitalisés avec la sensibilisation au recours à l’avis oncogériatrique via l’équipe mobile de gériatrie. La spécificité de celle-ci est sa mixité avec des acteurs du secteur gériatrique et d’autres issus des soins palliatifs. Par ailleurs, la mise en place récente du score IDpall (27) constitue une avancée pour la prise de conscience que les soins palliatifs ne sont pas réservés à la phase terminale.

Vignette clinique

A titre de partage d’expérience et parce que les maladies hémato-oncologiques du sujet âgé représentent des situations particulièrement complexes, voici la situation de Me B, 82 ans.

Contexte oncologique
Me B. est hospitalisée suite à une dyspnée sur épanchement pleural paranéoplasique avec découverte d’une masse médiastinale et métastase osseuse costale gauche: lymphome à grandes cellules B stade IV. Me B. ne prend aucun traitement. Dans ses ATCD, on retient un lymphome du même type au niveau de l’oropharynx traité par RCHOP en rémission depuis 13 ans.

Le questionnement de l’oncologue au gériatre concerne la réalisation d’un traitement par mini R CHOP : Me B. est alors sous prednisone.

Résumé Evaluation gériatrique:
Me B. a présenté une perte d’autonomie brutale récente, elle était autonome pour ses actes de vie quotidienne et activités instrumentales. Elle avait pour habitude de faire 45 minutes de marche tous les matins. Actuellement, elle a besoin d’aide pour sa toilette et habillage et marche avec un rollator en participant activement aux thérapies de réadaptation. Elle est nouvellement incontinente. Du point de vue neuro-cognitif, la patiente est collaborante et orientée et sa capacité de discernement est conservée par rapport au choix du traitement : elle est capable d’expliquer sa pathologie oncologique et elle sait qu’elle a déjà eu un cancer du même type. Elle souhaite bénéficier d’un traitement lourd et demande qu’on lui donne cette chance. Elle s’est déjà battue contre le cancer, elle sait que le traitement sera difficile, mais elle insiste. L’alternative d’une prise en charge type soins de confort n’est pas envisageable pour elle. Ses directives anticipées sont rédigées et son fils est son représentant thérapeutique. Elle présente une dénutrition sévère compliquée d’une perte d’autonomie brutale avec trouble thymique qui en découle. Le tout relève de l’évolution de sa pathologie oncologique avec pronostic sévère.

Résumé évaluation oncogériatrique: Me B. n’a pas de comorbidité évolutive. Selon la classification de Balducci, elle est considérée comme fragile en B3 potentiellement réversible en lien avec sa dénutrition. Le score CARG est à 8 ce qui implique un risque de 55% de développement des toxicités de grade III à V. En parallèle le bilan cardiaque est rassurant et la patiente a une insuffisance rénale chronique modérée KDIGO G3a.

Proposition oncogériatrique: C’est bien l’autonomie antérieure de la patiente et sa détermination soutenue par sa famille qui font basculer la décision. Un cadre est alors posé au vu du pronostic sombre : reconditionnement par alimentation entérale et physiothérapie, adaptation posologie mini RCHOP à la fonction rénale et si effets secondaires majeurs, on stoppe le protocole. En intercure, sera envisagée une réhabilitation oncologique.

Tumorboard: L’option du mini RCHOP adapté à la fonction rénale est validée.

Evolution: Absence de syndrome de renutrition inappropriée. Le rituximab est mal toléré avec un syndrome de lyse tumorale dès J1 traité, une pneumonie de bronchoaspiration et état confusionnel sur rétention aiguë d’urines. À J4, la biologie est normalisée et la patiente bénéficie d’une phase « lune de miel » avec reprise d’autonomie : elle marche aux côtés de son fils et profite de sa famille.

Discussion entre oncologue et gériatre: Au vu des complications en cascade sur le rituximab, le gériatre préconise alors de stopper le protocole et de passer à des soins de confort. Au vu d’une diminution de la masse tumorale, l’oncologue défend une attitude curative. Après réflexion commune, un délai de pause de 48h est convenu.

Evolution: Une dyspnée brutale hypoxémiante apparait sur un épanchement pleural récidivant paranéoplasique de 1l, ponctionné à visée de confort. Le gériatre préconise le relais par l’équipe de soins palliatifs en concertation avec l’oncologue. La cytométrie de flux diagnostique la transformation leucémique : le tumorboard confirme l’arrêt des traitements curatifs.

Des soins de confort sont instaurés. Un réseau est organisé avec la patiente et sa famille, reconnaissantes de la prise en charge intégrative dont ils ont bénéficié. Me B. décèdera paisiblement entourée des siens.

Épilogue: La collaboration entre oncologue et gériatre permet d’assumer en binôme la charge décisionnelle complexe et offrir des soins sur mesure, adaptés et coordonnés : le questionnement éthique restant sous-jacent tout au long des prises en charge.

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Dre Laure Poudens-Gaudout

Médecin cheffe adjointe du Département de Gériatrie
Réadaptation et Soins Palliatifs RHNe Gériatre (F) avec
formation complémentaire en oncogériatrie

laure.poudens@rhne.ch

L’auteur n’a pas declaré de conflits d’intérêt.

◆ L’expertise conjointe de l’oncologue, spécialiste d’organe et du gériatre est indispensable pour les prises décisionnelles initiales et dans le
suivi du sujet âgé atteint d’un cancer, vue la disparité de la population âgée à laquelle s’ajoutent l’hétérogénéité des cancers et les avancées thérapeutiques. Le score G8 aide l’oncologue à dépister quel patient âgé peut bénéficier d’une évaluation oncogériatrique. Le gériatre doit déterminer si l’altération du patient âgé est en lien avec son cancer ou pré existant à une fragilité gériatrique et donner son avis concernant le traitement oncologique en se basant sur la classification modifiée de Balducci. Mais l’algorithme décisionnel ne doit pas enfermer le patient âgé dans une case, la notion de réversibilité potentielle offre des perspectives avec prise en charge adaptée aux besoins et à l’évolution du sujet âgé par ce binôme oncogériatrique.

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Cancers invasifs du sein chez les femmes âgées de ≥ 80 ans

Breast cancer is the most common cancer in women, and increases considerably with age. Developments in oncological treatments have led to a reduction in breast cancer mortality. However, for patients ≥ 80 years, there are few treatment guidelines, that is why it is important to clearly define the objectives of the treatment as well as its potential effects on functionality and quality of life. Treatment recommendations based on available data must take into account the patient’s life expectancy, goals and geriatric assessment. This article summarizes the current literature and possible adaptations in patients ≥ 80 years with early or metastatic breast cancer.
Key words: oncogériatrie, patiente âgée et cancer du sein, cancer sein localisé, cancer du sein métastatique

Introduction

L’âge médian au diagnostic de cancer du sein est de 64 ans en Suisse; 36% des patientes ont 70 ans et plus, 15% 80 ans et plus. Le taux de survie spécifique à 5 ans augmente depuis des années et atteint 88% (1) tous stades confondus. En 2022, l’espérance de vie d’une femme de 80 ans est de 10,4 ans (2). Ces patientes très âgées ne sont pas représentées dans les études qui incluent sauf exception des patientes en bon état générale, sans dysfonction d’organe avec un status performance selon OMS 0 ou 1 soit activité normale ou restreinte pour des activités physiques importantes, mais patient ambulant et capable de fournir un travail léger. Il existe donc une incertitude quant à l’efficacité et à la toxicité des traitements oncologiques pour cette population qui, par ailleurs présente une forte prévalence de comorbidités et de polymédication. La Société internationale d’oncologie gériatrique (SIOG) a émis des recommandations pour la population âgée (3).

Évaluation gériatrique

Les bonnes pratiques recommandent une évaluation gériatrique pour tous les patients âgés ≥70 ans atteints de cancer (3). En routine le score de dépistage G8 permet d’identifier les patients nécessitant une évaluation gériatrique plus complète (4). Plusieurs essais randomisés ont montré que l’adaptation des prises en charge suite à cette évaluation réduisait la toxicité des traitements, diminuait les hospitalisations et améliorait la qualité de vie, tout en préservant la survie (5,6). Une évaluation de l’espérance de vie à l’aide d’outils validés et répertoriés sur ePrognosis (4) devrait être effectuée.

Cancer du sein localisé

Lorsque l’espérance de vie est <10 ans, le dépistage mammographique est futile car une réduction de la mortalité par cancer du sein est peu probable (7). La prise en charge standard est résumée dans le tableau 1. Le choix thérapeutique dépend essentiellement du stade TNM et du phénotype histologique tableau 2. Environ 90 % des patientes âgées de ≥ 80 ans présentent des tumeurs RH+ HER2- (8).

Traitement chirurgical du sein

Vu l’absence de différence de survie globale (SG) par rapport à la mastectomie, la chirurgie conservatrice du sein (CCS) avec radiothérapie adjuvante est devenue la référence (9). Une hormonothérapie première sans chirurgie devrait rester l’exception étant donné un moins bon contrôle local rendant parfois nécessaire une chirurgie de rattrapage (10) et le fait qu’une moins bonne SG après 5 ans est observée dans une étude récente chez des femmes de 80 ans et plus avec un cancer RH+(11).

Traitement chirurgical axillaire

L’essai de phase III NSABP-32, n’a pas trouvé de différence de survie ou de contrôle locorégional pour les patientes avec cancer du sein RH+ sans atteinte axillaire clinique, traitées par la technique du ganglion sentinelle (GS) versus un curage axillaire, faisant du GS la référence pour ces patientes (12). Cette pratique diminue les complications classiques du curage (douleur, engourdissement, gonflement et limitation des mouvements du bras).

Dès 2016, certaines guidelines recommandent de ne pas utiliser en routine la biopsie du GS chez les femmes de ≥70 ans avec un cancer RH+, HER2-, <2cm, grade 1 ou 2 (13). Récemment, l’essai SOUND (N=1405, 36% ≥ 65 ans) n’a pas montré de différence de survie sans maladie à distance, chez les femmes atteintes d’un cancer du sein <2cm, RH+, HER-(14).

Radiothérapie postopératoire

La radiothérapie (RT) postopératoire réduit la récidive locorégionale et, chez les patientes N+, diminue la mortalité par cancer du sein (15). Son indication chez les patientes âgées, doit être évaluée selon une stratification du risque (16). Deux essais randomisés, ont montré que la RT après une CCS n’améliorait pas la survie globale ou spécifique au cancer du sein chez les patientes âgées ≥ 70ans atteintes d’un cancer du sein RH+ (17,18) et recevant une hormonothérapie par tamoxifene (Tam). Dans ces 2 études, le taux de récidive locorégionale était plus élevé sans radiothérapie (10% Tam vs 2% Tam+RT à 10 ans (17) et 4,1% Tam vs 1,3% Tam+RT à 5 ans (18)). Cependant, l’étude prospective de cohorte LUMINA (âge médian 67,1 ans) a montré que la récidive locale à 5 ans était faible (2.3 %), malgré l’absence de RT chez les femmes ménopausées (8% ≥ 75 et 3% ≥ 80) avec cancer bas risque (luminal A, grade 1 ou 2, T1N0), traitées par CCS et hormonothérapie (19).

La radiothérapie du sein entier reste donc toujours recommandée après CCS, mais l’abstention est raisonnable lors de cancer à faible risque pour les patientes ayant une espérance de vie limitée.

Chimiothérapie néoadjuvante/adjuvante

En situation préopératoire, seul 6,3% des 8949 patientes incluses dans 8 études randomisées avaient 65 ans ou plus et aucune plus de 80 ans (20). L’expérience d’un centre de référence montre que des toxicités plus importantes conduisent à la réduction ou à l’arrêt prématuré du traitement dans 78% versus 57% (p < 0.001) chez les 74 patientes âgées de 71 à 76 ans (21). L’indication à un tel traitement ne devrait être envisagée que pour des patientes hautement sélectionnées, lors de risques accrus de récidives, sur la base de scores pronostiques (22), ou lors de cancers RH- pour lesquels la plupart des rechutes surviennent dans les 5 ans. Comme pour la chimiothérapie néoadjuvante, les schémas standard pouvant être proposés dans cette classe d’âge sont les suivants : 4 cycles de docétaxel et cyclophosphamide (TC), 4 cycles de doxorubicine – cyclophosphamide, ou 6 cycles de cyclophosphamide, méthotrexate et fluorouracile (CMF). Le paclitaxel hebdomadaire en particulier, peut être combiné au traitement antiHER2, et être administré également chez des patientes plus fragiles (22).

Traitements anti-HER2

Lors de cancers HER2+, un traitement anti-HER2 par trastuzumab devrait être introduit quel que soit l’âge, bien que les patientes âgées ≥60ans soient sous-représentées, 16% dans l’étude HERA (23), et présentent une augmentation de la toxicité cardiaque, nécessitant des interruptions du traitement dans près de 40 % des cas (24). La SIOG recommande une chimio adjuvante (docetaxel ou paclitaxel hebdomadaire) associée à 1 an de trastuzumab. Vu le risque accru de toxicité, notamment digestive, l’association avec le pertuzumab doit être réservée aux patientes en bonne santé (22). Un traitement plus court (6 mois) peut être envisagé pour les patientes plus fragiles ou présentant un risque cardiologique (25,26). L’essai de phase III Short-HER montre une survie sans maladie et une SG comparables avec 9 semaines de trastuzumab versus 1 an pour les risques faibles (N0) et intermédiaires (moins de 4 ganglions atteints) (27). L’utilisation du trastuzumab seul, sans chimio, peut également être discutée chez les patientes les plus fragiles (28).

Dans l’essai KATHRINE (âge médian 49 ans, moins d’1% ≥75 ans), le trastuzumab emtansine (T-DM1) adjuvant lors d’une maladie résiduelle après un traitement néoadjuvant à base de trastuzumab, réduit le risque de récidive et de décès par rapport au trastuzumab adjuvant. Des toxicités telles que la neuropathie et la pneumopathie questionnent le rapport bénéfice/risque chez les patientes âgées (29).

Hormonothérapie

L’efficacité du traitement endocrinien est indépendante de l’âge et le choix du traitement dépend du risque estimé de récidive, des comorbidités de la patiente et des effets secondaires attendus du traitement endocrinien dont l’ostéoporose et les douleurs musculo-squelettiques (inhibiteurs de l’aromatase (IA)) ou le risque thrombo-embolique et de cancer de l’endomètre (Tam) (30). Les IA sont légèrement supérieurs au Tam en termes de risque de récidive du cancer du sein et de mortalité, et devraient être privilégiés.

La non observance du traitement endocrinien est un problème majeur à tout âge et semble augmenter chez les 80 ans et plus 52% (n=100) contre 24,2% pour la population totale (n=1192). (31). Dans une étude portant sur 437 patientes de ≥ 60 ans, les patientes de ≥ 80 ans (n=79) ont plus souvent refusé de débuter l’hormonothérapie (13,0 % contre 4,5 %, P = 0,01) (32). Ce problème devrait être abordé avant de décider de ne pas opérer une maladie localisée.

Traitement des cancers métastatiques

Le traitement de toute patiente atteinte d’un cancer du sein métastatique, quel que soit son âge, est non curatif et vise à contrôler le cancer et à maintenir la qualité de vie. Nous nous limiterons aux premières lignes de traitements (tableau 2).

Tumeurs hormonosensibles RH+ HER2-

Plus l’expression des RH est importante, plus le cancer est susceptible de répondre à un traitement hormonal, qui constitue alors le premier choix. Si une menace de la fonction d’organes nécessite une réponse tumorale rapide, une chimio peut être discutée. Les inhibiteurs de la kinase 4/6 dépendante de la cycline (CDK4/6) (ribociclib, abemaciclib, palbociclib) associés à un IA ou au fulvestrant (anti oestrogénique), améliorent le taux de réponse et la survie sans progression (SSP) (33). Une meilleure survie globale est obtenue en 2ème ligne, mais à ce jour en première ligne, seul ribociclib plus létrozole a démontré un avantage de SG (médiane 63,9 mois contre 51,4 mois avec létrozole plus placebo) y compris chez les ≥ 75 ans (34). L’efficacité des inhibiteurs de CDK4/6 parait indépendante de l’âge (198 patientes ≥75 ans soit 10,8% de la population incluse), au prix de toxicités plus élevées (88.8% grades 3-4 si ≥ 75 ans versus 73,4 % si <75 ans), nécessitant des modifications de dose, voire l’arrêt du traitement (33). Au moment de la progression, un changement de thérapie endocrinienne (de IA à fulvestrant, de fulvestrant à IA) est proposé. La poursuite de l’inhibiteur CDK4/6 reste discutée (35), mais celui-ci devrait être débuté s’il n’a pas été introduit auparavant, étant donné le bénéfice de SG attendu (36). En cas de résistance à l’hormonothérapie, d’autres thérapies peuvent se discuter (chimio, thérapies ciblées (37)).

Cancers HER2+

Chez les patientes avec cancer HER2+, le traitement anti-HER2 par trastuzumab associé au pertuzumab et au paclitaxel hebdomadaire est recommandé comme traitement de première intention (38).

Pour les patients non éligibles aux taxanes, ou qui désirent des schémas moins toxiques (peu ou pas d’alopécie ou de complications digestives, infectieuses, et neurologiques), la vinorelbine ou la capécitabine peuvent être des alternatives (22,39,40). Chez les patientes très fragiles, le trastuzumab +/- pertuzumab seul ou associé à une hormonothérapie si RH+ peut être envisagé (41,42). Après traitement de première ligne par trastuzumab, l’anticorps conjugué trastuzumab-deruxtecan (T-dxd) est associé à une meilleure SG par rapport au T-DM1 (SG à 24 mois 77.4% vs 69.9%) (43). Chez les patientes de ≥ 65 ans on observe une augmentation des toxicités (digestives et hématologiques) amenant à un arrêt du traitement dans 25,4% des cas contre 18,7% chez les plus jeunes. Le risque de pneumopathie est également supérieur (17,5% contre 11,8%) (44). L’utilisation de ce traitement doit donc être très prudente chez les patientes âgées. Le T-DM1 pourrait être utilisé en cas d’intolérance (45).

Cancers triples négatifs (TN) ou hormonorésistants

Une chimio peut être proposée aux patientes avec cancer du sein métastatique TN-, ou lors de cancer RH+ résistant à la thérapie endocrinienne ou dont la maladie progresse rapidement ou menace la fonction d’organes. Une mono-chimiothérapie est préférable, étant donné le risque plus élevé d’effets secondaires (22). Le choix est basé sur le profil des effets secondaires, les comorbidités et les souhaits de la patiente.

L’ajout d’un inhibiteur des checkpoints (ICP) à la chimio de première ligne, lors de tumeurs TN exprimant PDL1, améliore la SG d’environ 7 mois (âge médian 55 ans, 23% ≥ 65ans (46) ; âge médian 53 ans, 21% > 65 ans (47)). L’utilisation de ces ICP est déjà bien établie dans la population âgée et/ou fragile. Le mauvais pronostic des tumeurs TN avec l’utilisation de la chimio seule, est également amélioré en 2ème ligne par l’anticorps sacituzumab ciblant le récepteur Trop2 conjugué au govitecan (un inhibiteur topoisomérase), avec une survie médiane 12,1 versus 6,7 mois (âge médian 54 ans, (29–82) (48)). Ces nouvelles thérapies doivent être utilisées avec la plus grande prudence chez les patientes âgées.

Conclusion

Les patientes atteintes d’un cancer du sein, âgées de ≥ 80 ans, représentent une proportion croissante de la population. Les décisions thérapeutiques doivent être basées sur l’espérance de vie, les bénéfices potentiels du traitement, les souhaits de la patiente et les effets secondaires potentiels du traitement.

Une collaboration étroite entre les oncologues et les gériatres est essentielle pour parvenir à un équilibre entre les objectifs du traitement oncologique et le maintien de la qualité de vie des patientes.

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Dre Marie-Gabrielle Courtès

Service d’oncologie
Hôpital du Valais – CHVR
Av. Grand-Champsec 86
1951 Sion

marie-gabrielle.courtes@hopitalvs.ch

PD Dr Sandro Anchisi

Service d’oncologie
Hôpital du Valais – CHVR
Av. Grand-Champsec 86
1951 Sion

sandro.anchisi@hopitalvs.ch

Les auteurs n’ ont pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.

◆ Les femmes âgées avec cancer du sein représentent une population croissante
◆ La mortalité par cancer du sein diminue, grâce à l’évolution des traitements oncologiques
◆ Les patientes ≥80 ans sont peu représentées dans les études cliniques, rendant l’élaboration de standards difficile dans cette population
◆ Une adaptation des traitements est nécessaire après une évaluation gériatrique en tenant compte de l’espérance de vie, des comorbidités et des souhaits des patientes

 

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Presbyacousie, existe-t-il un entraînement?

Selon l’OMS, on estime qu’environ 1,5 milliard de personnes dans le monde sont touchées par une déficience auditive (21). La perte auditive est donc considérée comme la déficience sensorielle la plus fréquente chez l’homme. La probabilité statistique de souffrir d’une déficience auditive augmente considérablement avec l’âge. Les conséquences d’une capacité auditive et de communication réduite peuvent être l’isolement social, la perte d’autonomie et la dépression (2). La perte auditive est également considérée comme un facteur de risque important et influençable de la démence (13). Les causes sont des modifications de l’organe auditif périphérique et du système auditif central. Il est donc évident que les deux composantes doivent être pris en compte dans le cadre d’une thérapie de réhabilitation auditive optimale (8). Ce bref article a pour but de mettre en lumière les principaux aspects de la presbyacousie et d’aborder en particulier les différentes mesures thérapeutiques.

According to the WHO, it can be assumed that around 1.5 billion people worldwide are affected by hearing impairment. Hearing loss is therefore considered the most common sensory impairment in humans. With advancing age, the statistical probability of suffering from hearing loss increases significantly. Consequences of limited hearing and communication ability can include social isolation, loss of autonomy and even depression. Hearing loss is also considered an important modifiable risk factor for dementia. The causes are changes in the peripheral as well as in the central auditory system. It is therefore obvious that both components must be taken into account as part of optimal hearing rehabilitation therapy. This short overview is intended to shed light on the most important aspects of age-related hearing loss and, in particular, to address various therapeutic options.
Key Words: hearing impairment, hearing loss, hearing rehabilitation therapy

Les bases de l’audition

Pour qu’un événement acoustique puisse être perçu consciemment, des ondes de pression acoustique doivent atteindre le tympan et le faire vibrer. Ensuite, les osselets de l’oreille moyenne transmettent le signal sonore à la base de l’étrier. Cela est possible parce que le marteau est fermement en contact avec le tympan. Dans l’oreille moyenne, l’information acoustique n’est pas seulement transmise, mais aussi amplifiée. La base de l’étrier est reliée à l’oreille interne par la fenêtre ovale, qui est remplie de liquide (fig. 1). La vibration de la base de l’étrier génère des ondes de pression dans l’oreille interne qui, en fonction de la fréquence sonore, entraînent la déviation de la membrane basilaire à un endroit spécifique de l’oreille interne. L’organe de Corti, dans lequel sont intégrées les cellules sensorielles auditives (cellules ciliées), se trouve sur la membrane basilaire (fig. 2). La déviation de la membrane basilaire permet de générer des potentiels d’action dans les cellules ciliées, de sorte que le stimulus physique initial de la vibration acoustique est transformé en un signal neuronal. Le potentiel d’action est ensuite transmis par le VIIIe nerf crânien aux centres auditifs du tronc cérébral, puis au cortex auditif, où se produit la perception auditive consciente (15). Depuis le cortex auditif, des impulsions neuronales sont transmises à un réseau de régions cérébrales supérieures qui, à l’écoute du langage parlé, extraient et interprètent des informations acoustiques pertinentes à partir du signal acoustique, permettant ainsi de comprendre le contenu d’une phrase (9).

Les causes de la presbyacousie

L’étiologie de la presbyacousie est le plus souvent multifactorielle. Des études épidémiologiques ont montré par exemple, une forte association avec le diabète, l’obésité, le tabagisme et d’autres facteurs de risque cardiovasculaires, mais la causalité n’est pas prouvée. D’autres facteurs de risque sont l’exposition continue ou répétée au bruit. Des facteurs génétiques semblent également jouer un rôle dans la vulnérabilité aux traumatismes sonores et, plus généralement, dans la perte auditive chez les personnes âgées (3).

Il y a une trentaine d’années déjà, des efforts ont été faits pour mettre en évidence les modifications morphologiques de l’organe auditif périphérique responsables de la presbyacousie. Quatre sites principaux de lésions ont été mis en évidence. Des processus pathologiques ont pu être décelé dans l’organe de Corti, de même qu’une réduction des neurones des voies auditives périphériques et centrales. Dans certains cas, des épaississements et des calcifications de la membrane basilaire ont été mis en évidence, ce qui entrave sa capacité vibratoire. Cependant, l’atrophie de la stria vascularis, qui joue un rôle central dans l’équilibre de l’oreille interne, a été considérée comme la lésion la plus fréquente (5).

Des travaux plus récents ont pu montrer, au niveau moléculaire, que les processus hypoxiques et ischémiques semblent jouer un rôle, tout comme le stress oxydatif ou les mutations mitochondriales (8). En outre, on peut supposer qu’avec l’âge, la transmission des signaux entre les cellules nerveuses est de plus en plus perturbée, ce qui se traduit par des synaptopathies cochléaires. Malheureusement, l’audiogramme semble souvent peu sensible à ce type de modifications. Il est probablement beaucoup plus facile d’en saisir les effets en testant la compréhension de la parole dans le bruit (12).

Des modifications sont décelables avec l’âge non seulement dans l’organe auditif périphérique, mais aussi dans le système auditif central. Ainsi, le processus normal de vieillissement comprend une diminution de la densité des neurones et des synapses ainsi qu’un amincissement de la substance blanche dans la voie auditive du tronc cérébral, dans les aires auditives corticales et dans les réseaux temporaux et frontaux du cerveau, qui sont recrutés pour le traitement du langage parlé (6, 16). Ces changements structurels dans le système auditif central s’accompagnent d’une diminution de la qualité du traitement des signaux acoustiques. Pour compenser cette détérioration du traitement auditif, le cerveau des personnes âgées réagit différemment aux stimuli acoustiques que celui des jeunes. Dans des situations d’écoute particulièrement complexes, comme par exemple la compréhension de la parole dans le bruit, des zones motrices du langage sont activées en plus des réseaux auditifs pour compenser les parties floues, imprécises ou manquantes d’un signal de parole (1). Parallèlement, des régions préfrontales ou pariétales du cerveau, qui ne sont pas considérées comme faisant partie des réseaux auditifs et vocaux, sont recrutées. Les recherches actuelles partent du principe que ces régions “cognitives” soutiennent la mémoire de travail et la mémoire phonologique dans des situations d’écoute défavorables et compensent ainsi dans une certaine mesure la perte du traitement auditif (7, 20). Il se peut toutefois que cet effort supplémentaire du cerveau s’accompagne d’un effort et d’une fatigue subjectivement perceptibles.

L’examen médical

L’examen médical de l’audition commence généralement par un examen détaillé de l’histoire de la maladie, les patients faisant généralement état d’une perte auditive bilatérale. Comme la perte auditive est généralement lente et progressive, les premiers symptômes sont souvent des problèmes de compréhension de la parole, en particulier dans des situations acoustiques difficiles, par exemple en présence de bruits parasites ou dans les pièces avec réverbération. La réduction de la compréhension de la parole peut s’accompagner d’un bourdonnement de l’oreille (acouphène). De même, les personnes concernées font parfois état d’une augmentation accélérée de l’intensité sonore (recrutement). Si d’autres symptômes auriculaires tels que des vertiges, des écoulements auriculaires (otorrhée) ou des douleurs sont également signalés, il faut penser à une autre cause ou à des comorbidités. Comme les personnes âgées sont souvent sous médication permanente en raison de diverses affections de base, il est important de vérifier, en particulier dans ce groupe d’âge, si des préparations ayant un effet potentiellement nocif sur l’audition sont prises, comme par exemple des diurétiques de l’anse, des cytostatiques, des médicaments contre la malaria (quinine) ou certains antibiotiques, surtout les aminoglycosides.

Afin d’exclure une pathologie au niveau du conduit auditif externe (p. ex. un bouchon de cérumen) et du tympan, chaque examen auditif est accompagné d’une microscopie de l’oreille. En cas de presbyacousie seule, aucun résultat pathologique n’est à attendre ici. Dans le test du diapason, il faut partir du principe que le test de Weber est non lateralisé et que le test de Rinne est positif des deux côtés.

Comme test d’orientation de l’audition, on peut ensuite tester les chiffres de chuchotement. Pour une évaluation plus précise, un audiogramme est toutefois indispensable. Celui-ci révèle typiquement une surdité de perception bilatérale symétrique et accentuée par les aigus (fig. 3). Dans les pays germanophones, le test le plus fréquemment utilisé pour évaluer l’intelligibilité de la parole dans le calme est le Freiburger Sprachtest, qui teste les mots d’une ou de deux syllabes. Dans le cas de la presbyacousie, on observe souvent une divergence entre les mots monosyllabiques et les mots bisyllabiques. Les mots chiffrés (bi-syllabiques) sont relativement bien compris par rapport aux monosyllabiques. Cela peut s’expliquer, au moins en partie, par la perte des aigus typique de la presbyacousie. Pour la compréhension des chiffres, les parties vocaliques de basse fréquence suffisent souvent, alors que pour la compréhension des monosyllabes, les consonnes avec leurs spectres de haute fréquence sont primordiales.

Comme décrit plus haut, les personnes âgées ont souvent des problèmes de compréhension de la parole dans le bruit. Cela n’est pas lié en premier lieu à l’évolution de la fréquence du trouble auditif, mais surtout à des capacités cognitives réduites et à un traitement temporel réduit. Les tests de langage (par ex. le test de la phrase de Bâle), qui examinent la compréhension dans le bruit, testent ainsi non seulement l’organe auditif périphérique, mais aussi des parties centrales du système auditif (22). Une imagerie en couches fines n’est pas indiquée en cas de résultats cliniques et audiométriques typiques, comme indiqué ci-dessus. Cependant, si la courbe auditive est asymétrique ou si des symptômes supplémentaires sont présents, comme par exemple des acouphènes pulsatiles est judicieux d’exclure une pathologie rétrocochléaire ou une malformation vasculaire par l’imagerie (5, 14).

Possibilités de traitement:

Contrairement aux amphibiens, aux oiseaux et aux poissons, la régénération naturelle des cellules ciliées endommagées n’est pas possible chez les mammifères (2). Grâce à une recherche constante, la compréhension de la biologie de l’oreille interne n’a cessé de progresser, mais il n’a pas été possible jusqu’à présent de rétablir la perte auditive chez les personnes âgées par des médicaments. Dans le cadre d’études, on utilise actuellement des préparations qui doivent surtout influencer positivement le stress oxydatif sur les cellules ciliées internes ainsi que l’apoptose (3).

Pour compenser les performances réduites de l’oreille interne, on utilise en premier lieu des appareils auditifs qui amplifient le signal sonore entrant en cas de surdité de perception légère ou moyenne. En fonction de leur forme, on distingue principalement les appareils auditifs intra-auriculaires et les appareils auditifs contour d’oreille (14). Lorsque la perte auditive s’aggrave, les appareils auditifs ne sont plus d’une utilité suffisante pour les personnes concernées. L’implant cochléaire est alors la seule possibilité de percevoir suffisamment les signaux acoustiques et, en particulier, de comprendre à nouveau la parole. Pour ce faire, on introduit dans l’oreille interne, au cours d’une opération d’environ 90 minutes, une électrode capable de stimuler les ganglions spiraux du nerf auditif en contournant les cellules ciliées dysfonctionnelles (2, 4). Les patients âgés obtiennent en moyenne une compréhension de la parole aussi bonne dans le calme que les adultes plus jeunes avec un implant cochléaire. Ils obtiennent des résultats légèrement inférieurs en ce qui concerne la compréhension de la parole dans le bruit (11). Du point de vue de l’économie de la santé, il convient également de mentionner qu’en cas de surdité profonde de l’oreille interne ou de surdité, une implantation cochléaire unilatérale jusqu’à un âge très avancé présente un meilleur rapport coût/bénéfice qu’un appareillage auditif non suffisant. L’implantation cochléaire permet une amélioration avérée de la qualité de vie jusqu’à un âge avancé (10, 19).

En complément des mesures d’amélioration de l’audition périphérique, il existe de plus en plus de protocoles d’entraînement scientifiquement développés et contrôlés, qui entraînent les capacités auditives et cognitives et stimulent ainsi le système auditif central (18). Mais jusqu’à présent, ce sont surtout des entraînements simples et unilatéraux qui ont été proposés, basés par exemple uniquement sur le traitement de la fréquence ou de la longueur des sons. Dans de tels procédés, on fait par exemple écouter deux sons à une patiente qui doit ensuite décider lequel a une fréquence plus élevée. Cette fonction auditive de base, qui consiste à distinguer différentes fréquence de son, ne peut toutefois pas être facilement transposée au traitement de la parole. Cela signifie qu’il y a peu de “transfert” vers des situations communicatives quotidiennes, même si l’on s’améliore avec le temps dans la pratique. La parole est un signal beaucoup plus complexe que les soi-disant sons sinusoïdaux, qui n’existent pas vraiment dans la nature. C’est pourquoi les nouveaux entraînements adaptatifs et personnalisés, qui possèdent en outre une composante ludique et se concentrent sur le langage parlé naturel dans des situations d’écoute difficiles proches de la vie quotidienne, montrent des résultats beaucoup plus importants. Différentes approches d’entraînement peuvent être choisies en fonction du degré de perte auditive et des capacités cognitives des personnes, en se concentrant par exemple sur l’entraînement des capacités cognitives dans des contextes de communication (appelé auditory cognitive training ; ACT) ou sur une meilleure utilisation des informations vocales visuelles sur le visage des locuteurs (17) (fig. 4). La recherche à l’université de Zurich (sous la direction du professeur Giroud) développe et teste en outre d’autres procédés, comme les entraînements en réalité virtuelle ou la stimulation cérébrale.

Cette nouvelle génération d’entraînements est souvent basée sur des situations de communication pertinentes pour les personnes âgées, comme par exemple dialoguer alors que l’on se trouve dans un restaurant bruyant. La difficulté est de pouvoir se concentrer uniquement sur un locuteur et d’ignorer toutes les autres personnes et tous les bruits. De telles situations quotidiennes requièrent une écoute attentive, le traitement et l’interprétation du langage parlé, ainsi que des capacités cognitives telles que la mémorisation des informations traitées et la préparation d’une réponse à une question posée par le locuteur. Un programme d’entraînement validé scientifiquement pour le (suisse-) allemand est déjà disponible sur www.lippenlesen.ch de Pro Audito Suisse, le principal centre d’accueil pour les personnes souffrant d’une déficience auditive en Suisse (17).

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Cet article est une traduction de «der informierte arzt» 11_2023

Dr Patrick Dörig

Hôpital universitaire de Bâle
Clinique d’oto-rhino-laryngologie
Petersgraben 4
4031 Bâle

Pre Nathalie Giroud

Groupe de recherche en neurosciences du langage et de l’audition,
Université de Zurich, Institut de linguistique informatique
Andreasstrasse 15
8050 Zurich

les auteurs n’ont pas déclaré de conflits d’intérêts en rapport avec cet article.

◆ Avec l’âge, de nombreuses personnes sont touchées par une perte auditive. Cela a des répercussions non seulement sur la qualité de vie générale, mais aussi et surtout sur les fonctions psychosociales et cognitives.
◆ La presbyacousie évolue typiquement de manière lentement progressive et est à peu près aussi prononcée des deux côtés. La cause en est des modifications décelables aussi bien dans l’organe auditif périphérique que dans le système auditif central.
◆ Si, en raison de l’importance de la perte auditive, des appareils auditifs de haute qualité ne peuvent plus apporter de bénéfice pertinent, l’éva­luation d’un implant cochléaire est judicieuse jusqu’à un âge avancé.
◆ Outre les aides auditives techniques, il existe également de nouvelles possibilités thérapeutiques pour stimuler le système auditif central, comme par exemple l’entraînement à la lecture labiale ou à la communication au quotidien.

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