Maladies cardiovasculaires ischémiques chez les femmes

Eszter Simon, médecin diplômée
PD, MER Dre Judith Bouchardy
PD, MER Dr David Nanchen
PD, MER Dre Carole Clair

Chez les femmes, les maladies cardiovasculaires sont la cause principale de décès. Pourtant, l’  athérosclérose est encore trop souvent considérée comme une maladie de
l’  homme uniquement. Des données récentes ont mis en lumière les différences entre les hommes et les femmes en terme d’  épidémiologie, de prise en charge et de pronostic de la maladie coronarienne notamment. Le but de cet article est de réviser les différences de sexe dans la maladie cardiovasculaire ischémique.

L’   infarctus du myocarde (IM) a été considéré pendant des années comme une «maladie de
l’ homme», une croyance qui a influencé les processus de prise en charge médicale (2). En réalité, bien que la prévalence des maladies cardiovasculaires ischémiques soit plus élevée chez les hommes, la mortalité cardiovasculaire est plus importante chez les femmes (3, 4). Ceci est notamment lié au fait que les femmes sont plus âgées et ont plus de comorbidités au moment de
l’  évènement ischémique. De plus, elles présentent plus fréquemment des symptômes atypiques (5, 6), parfois responsables d’  une banalisation de la situation et de diagnostics erronés ou plus tardifs. La présence de stéréotypes de genre dans la prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaires (FRCV) contribue également à expliquer les disparités de pronostic entre les hommes et les femmes.

Spécificités hommes-femmes dans les facteurs de risque cardiovasculaire

Mécanismes physiopathologiques

Des études épidémiologiques suggèrent que l’ incidence de maladies cardiovasculaires (MCV) chez les femmes non ménopausées est inférieure à celle des hommes du même âge, et que l’ incidence et la gravité des MCV augmentent après la ménopause (7). L’  incidence plus faible des MCV chez les femmes en âge de procréer est attribuée au moins en partie aux œstrogènes (7). Les femmes ménopausées perdent l’  effet protecteur relatif des œstrogènes ce qui entraîne une accumulation rapide des FRCV, comme l’  HTA (8), la dyslipidémie (9), les troubles de l’  homéostasie de glucose (10) et l’  obésité viscérale (11). Le manque d’  œstrogène crée un milieu pro-inflammatoire (12), une perturbation de la vasoréactivité coronarienne (13), un dysfonctionnement microvasculaire et endothélial (14) et un remodelage coronarien. Dans un stade avancé, la carence oestrogénique accélère le développement des plaques d’  athérome dans des coronaropathies obstructives (15).
Toutefois, et de façon inquiétante, on observe sur les deux dernières décennies, une tendance vers une augmentation des maladies ischémiques chez les jeunes femmes que ce soit en France ou aux Etats-Unis (16, 17).

Impact des facteurs de risque selon le sexe

L’  impact selon le sexe des FRCV est représenté dans le Tableau 1. Chez les femmes, l’  hypertension artérielle, le tabagisme, l’  hypertriglycéridémie ainsi que le diabète de type 2 (DM2) sont associés à des risques plus élevés d’ IM par rapport aux hommes (18).
Un rapport de taille-hanche plus élevé est un facteur de risque cardiovasculaire chez les deux sexes, mais le risque est plus important chez les femmes (20).
Les femmes atteintes d’  un DM2 ont un risque plus élevé d’  avoir une maladie coronarienne fatale que les hommes atteints d’  un DM2 (21).
Bien qu’ il y ait, en Suisse, globalement moins de femmes fumeuses dans la population adulte (15 ans et plus), avec 21.1 % de femmes pour 29.5 % d’ hommes selon les statistiques de 2016 (22), le risque de maladie coronarienne chez les femmes fumeuses était de 25 % plus élevé par rapport aux hommes tabagiques selon une méta-analyse publiée en 2011 (23).
En Suisse, 42 % de la population est en surpoids ou obèse, 51 % des hommes et 33 % des femmes selon les statistiques de 2017 (24). La différence entre hommes et femmes est nettement moins prononcée si l’  on ne considère que l’  obésité (12.3 % des hommes contre 10.2 % des femmes) (24). L’  impact de l’  obésité sur les maladies cardiovasculaires semble être plus important chez les femmes. Dans l’ étude de la Framingham Heart Study, l’ obésité augmentait le risque relatif de maladie coronarienne de 64 % chez les femmes, contre 46 % chez les hommes (8).
Les femmes développent une hypertension environ une décennie après les hommes mais
l’  hypertension est plus fréquente chez les femmes âgées que chez les hommes âgés (8). Dans
l’  étude Framingham, parmi les sujets âgés de 65 à 74 ans, les femmes souffrant d’ hypertension artérielle avaient un risque de maladie coronarienne plus élevé que les hommes hypertendus (8).
Les femmes non ménopausées ont un profil lipidique plus favorable que les hommes. Cependant, après 50 ans, les femmes ont tendance à avoir une augmentation des taux de triglycérides et de LDL-cholestérol et une diminution du HDL-cholestérol. L’ hypertriglycéridémie et un faible taux de HDL-cholestérol sont des FRCV plus importants pour les femmes que pour les hommes (19, 25).
On peut donc conclure que la plupart des FRCV sont associés à des risques relatifs plus élevés d’ IM chez les femmes par rapport aux hommes.

Facteurs de risque spécifiques aux femmes

Diabète gestationnel

Les femmes qui ont eu un diabète gestationnel, présentent un risque d’ événements cardiovasculaires post-partum deux fois plus élevé par rapport aux femmes qui n’  ont pas eu de diabète gestationnel. Ce risque ne dépend pas du diabète de type 2 intercurrent et se manifeste dans la première décennie suivant la grossesse. Ainsi, même sans progresser vers le diabète de type 2, les femmes atteintes de diabète gestationnel constituent une population à risque de MCV. Cette augmentation du risque cardiovasculaire nécessite une surveillance et potentiellement un traitement précoce des facteurs de risque (26).

Pré-éclampsie

La pré-éclampsie est une complication hypertensive de la grossesse accompagnée par une protéinurie. Il ne s’  agit pas uniquement d’  une pathologie obstétricale se résolvant après
l’  accouchement. La pré-éclampsie est reconnue actuellement comme un marqueur du risque cardiovasculaire à long terme. Cette augmentation du risque pourrait se manifester déjà en préménopause, mais le mécanisme est encore peu connu (27).

Ménopause précoce ou chirurgicale

La ménopause précoce et l’ ovariectomie bilatérale chez les femmes jeunes sont associées à une incidence accrue de MCV, d’ IM et de mortalité globale (28). Les femmes qui ont subi une ménopause chirurgicale par ovariectomie bilatérale sans substitution oestrogènique auraient un risque de développer ultérieurement une maladie coronarienne deux fois plus élevé que les femmes ayant bénéficié d’  une substitution par œstrogènes (29).

Syndrome des ovaires polykystiques (SOPK)

De nombreuses études cliniques ont mis en évidence un lien entre le SOPK et le profil de risque CV des patientes atteintes, en raison d’ un métabolisme altéré des lipides et du glucose, d’ une hypertension, d’ une affection inflammatoire systémique et de lésions vasculaires. Compte tenu de
l’ apparition précoce de la maladie, le SOPK pourrait être considéré comme un véritable FRCV (30).

Cancer du sein

Les femmes atteintes d’ un cancer du sein ont une probabilité 1,44 fois plus élevée (IC 95 %, 1,00-2,06) d’  avoir des MCV que les femmes sans cancer du sein. Les MCV peuvent être liés aux effets cardiotoxiques ou métaboliques de certains traitements du cancer du sein, tels que le trastuzumab, les schémas à base d’ anthracycline et la radiothérapie (31).

Polyarthrite rhumatoïde

La polyarthrite rhumatoïde (PR) a une prévalence d’  environ 0.5-1 % dans la population européenne, avec une morbidité deux fois plus élevée chez les femmes par rapport aux hommes. La PR est associée à une morbidité et une mortalité CV accrues, vraisemblablement liés à la charge inflammatoire cumulative et la cardiotoxicité des médicaments antirhumatismaux (32).

Lupus érythémateux systémique

Les patient-e-s atteints de lupus érythémateux systémique ont un risque accru d’ événements CV. Des preuves récentes suggèrent que l’ inflammation et une réponse immunologique active sont largement responsables de la plaque d’  athérosclérose (33).

Concernant les facteurs de risque spécifiques au femmes énoncés ci-dessus, lorsqu’  un de ces facteurs de risque est présent, le calcul du risque coronarien avec algorithmes utilisant les facteurs de risque traditionnels, sous-évalue le risque chez les femmes. Pratiquement, nous recommanderions de catégoriser les femmes dans un niveau de risque supérieur à celui donné par le score de risque de l’  AGLA, lorsqu’  un ou plusieurs de ces facteurs de risque spécifique est présent.

Spécificités hommes-femmes dans la présentation et la prise en charge des cardiopathies ischémiques

Prise en charge d’  une maladie coronarienne stable

Les femmes souffrant d’  angor récurrent sans coronaropathie obstructive doivent être diagnostiquées et traitées car elles courent un risque deux fois plus élevé de développer une atteinte coronarienne significative au cours des 5 à 8 prochaines années (4). Les investigations constituent toutefois un challenge puisque selon une étude suédoise jusqu’  à 80 % des femmes qui présentent un angor stable n’  auraient pas de lésions obstructives lors de la coronarographie (34).
Pour ce qui est de la prise en charge en ambulatoire, selon les données d’  une étude de cohorte en Suisse romande, bien que la même proportion de femmes et d’ hommes présente une douleur thoracique d’ origine cardiovasculaire, les hommes sont 2,5 fois plus susceptibles d’  être référés à un ou une cardiologue lors des 12 mois qui suivent une consultation en médecine de premier recours en raison d’  une douleur thoracique que les femmes (35). Ces données suggèrent que des efforts doivent être faits pour assurer une équité entre hommes et femmes dans les soins médicaux.
À ce jour, il n’  existe pas de score clinique spécifique pour les femmes, intégrant les signes et les symptômes chez les patientes présentant un diagnostic présumé de maladie coronarienne ischémique. Cependant, les guidelines l’  American Heart Association proposent depuis 2014 un algorithme de diagnostic différent pour les femmes que pour les hommes pour tenir compte de ces spécificités cliniques (1) (Fig. 1).
Les femmes préménopausées sont considérées comme ayant un risque bas (sauf en cas de diabète). Chez elles, aucune évaluation diagnostique n’  est indiquée. En cas de clinique inquiétante, l’  ECG d’  effort reste l’  examen le plus adapté. Les femmes ayants une cinquantaine d’  années sont considérées comme risque bas ou intermédiaire, selon leur limitation fonctionnelle pour les activités de la vie quotidienne. En cas de limitation fonctionnelle, elles doivent être considérées comme à risque intermédiaire. Les femmes ayants la soixantaine sont considérées comme risque intermédiaire. Si elles n’  ont pas de limitation pour une activité physique et elles ont un ECG de repos dans les limites de la norme, un ECG d’  effort est recommandé. En cas de limitation physique, elles doivent être testées comme en cas de risque élevé. Les femmes ayant la septantaine, ou présentant certaines comorbidité (p.ex diabète mal équilibré, artériopathie périphérique etc.) sont considérées comme à risque élevé, ainsi que les patientes avec un ECG de repos anormal (p.ex. élévation du segment ST) et doivent avoir une imagerie fonctionnelle ou un scanner coronarien, dont le choix doit être discuté avec un-e cardiologue (1, 34, 36).

Prise en charge d’  un syndrome coronarien aigu

Plusieurs études ont démontré des différences hommes femmes dans les symptômes cliniques lors d’  un syndrome coronarien aigue (SCA). Par exemple, les femmes présentent plus souvent un angor instable et un IM sans élévation du segment ST (NSTEMI) sans douleur thoracique (39). La douleur reste toutefois le symptôme principal lors d’  un SCA, mais les femmes présentent plus souvent que les hommes des douleurs atypiques et des symptômes aspécifiques (40) (Fig. 2). Ce phénomène conduit à une fausse interprétation des plaintes et résulte une présentation plus tardive aux urgences (39).
Les femmes sont moins susceptibles que les hommes de bénéficier d’  investigations complémentaires, invasives ou non, lors d’  un SCA (41, 42). Malgré l’  augmentation de l’ utilisation
d’ interventions cardiaques invasives, les femmes se présentant avec SCA ont encore plus de risque
d’ être traitées de manière conservative, possiblement en raison d’  une sous-estimation du risque (43). Les hommes sont donc plus susceptibles que les femmes de bénéficier une angiographie coronaire et des procédures de revascularisation au cours d’  une hospitalisation pour une maladie coronarienne connue ou soupçonnée (44).
Selon une récente étude effectuée en Suisse, le temps d’  ischémie – calculé comme le temps entre le début des symptômes et la prise en charge en salle de cathétérisme – était supérieur de 41 minutes chez les femmes par rapport aux hommes (45). Ce retard était principalement lié au fait que les femmes attendent plus longtemps avant de demander de l’  aide médicale.
Une cause sous-diagnostiquée du SCA est la dissection spontanée des artères coronaires, qui survient principalement chez les femmes, plus fréquemment entre 45 et 60 ans, de préférence pendant la grossesse ou immédiatement après l’  accouchement et peut être causée par des modifications hormonales (46). Cette pathologie pose des défis diagnostiques et des dilemmes thérapeutiques importants étant donné le manque de recherche pour guider sa prise en charge.
On estime que 8 % des SCA chez les femmes mais moins de 1 % chez les hommes sont associés au syndrome de Takotsubo. Il survient plus souvent chez les femmes âgées et ménopausées, se caractérise par une hypokinésie parfois marquée, principalement de l’ apex du ventricule gauche et est associé à un stress émotionnel ou physique. Les troubles de la cinétique segmentaire apicaux sont généralement transitoires et disparaissent en quelques jours à plusieurs semaines. Son pronostic est généralement bon (47).

Pronostic

Selon une étude de cohorte rétrospective entre 1992 et 1993, les femmes de moins de 75 ans ont présenté un taux de mortalité deux fois plus élevé que les hommes du même groupe d’ âge après un IM (48). Une étude récente a examiné une population internationale européenne entre 2010 et 2016 (49). Les résultats étaient similaires ; la mortalité était plus élevée à 30 jours après un IM avec élévation du segment ST (STEMI) chez les femmes de moins de 60 ans. La différence n’  était plus significative pour les patientes plus âgées. Lors d’  un STEMI, la mortalité diminuait chez les deux sexes après une angioplastie coronarienne, mais la mortalité restait néanmoins plus élevée chez les femmes, avec 30  % de plus de décès (49) (Fig. 3).
En Suisse, entre 1997 et 2016, le taux de mortalité à l’ hôpital des patientes et des patients atteints d’  IM été réduit de moitié et le gender gap (écart de mortalité hommes-femmes) a également diminué. La réduction de la mortalité était en effet plus prononcée chez les femmes que chez les hommes, en particulier celles âgées de moins de 60 ans. La diminution de la mortalité pourrait en grande partie être expliquée par l’ utilisation accrue du traitement de reperfusion, en particulier des procédures interventionnelles percutanées (PCI), qui ont contribué à atténuer les disparités de genre (50). Cependant, une étude a reporté un taux de complications plus élevé chez les femmes atteintes d’ un SCA qui bénéficiaient une stratégie invasive précoce et une revascularisation coronaire par rapport aux hommes (51).
Les femmes ont une mortalité plus élevée après une chirurgie de pontage coronaire élective, en partie en raison d’  un cumul de comorbidités lié à un âge plus élevé que les hommes (40). De plus, les femmes ont une moins bonne qualité de vie liée à la santé que les hommes, suite à une chirurgie coronaire (40). Ceci est probablement aussi expliqué par le fait qu’  au moment de l’  opération, les femmes sont plus âgées et ont plus de comorbidités. Un autre facteur à prendre en compte est la dépression, dont la prévalence est plus élevée chez les femmes. Une plus grande attention devrait être accordée au diagnostic et au traitement de la dépression chez les patientes subissant un pontage coronaire (52).

PD, MER Dre Carole Clair

Unisanté, Centre Universitaire de médecine générale et santé publique
Rue du Bugnon 44
1011 Lausanne

carole.clair@hospvd.ch

Les auteurs déclarent aucun conflit d’  intérêt en relation avec cet article.

  • La plupart des facteurs de risque cardiovasculaires sont associés à des risques relatifs plus élevés d’ IM chez les femmes par rapport aux hommes.
  • L’  angor stable et les SCA se manifestent plus fréquemment par des symptômes aspécifiques et des douleurs thoraciques atypiques chez les femmes.
  • La lutte pour améliorer la prise en charge et le taux de survie des femmes atteintes de maladie cardiovasculaire doit rester une priorité afin d’  éliminer les disparités de genre en santé.

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« Chemins vers le pancréas artificiel »

Lors de la «Top Innovation Session», qui a fait partie du Congrès de printemps 2019 de la SSMIG et qui a été consacrée aux progrès de la technologie médicale dans le traitement du diabète, le Pr Roger Lehmann de Zurich a parlé des «voies vers un
pancréas artificiel».
Que manque-t-il dans le diabète de type 1 ? Dans le pancréas, il y a 1 million d’  îlots pancréatiques entourés de tissu pancréatique exocrine. Le poids total s’   élève à 2 g, le poids total des cellules bêta est quant à lui de 1 g. Ceux-ci sont détruits avec le diabète ayant une tendance à l’  acidocétose. Pathogénétiquement, la charge génétique est faible. Cependant, une maladie auto-immune apparaît par la suite – même si l’  on ne sait pas encore exactement ce qui la déclenche aujourd’  hui – ce qui entraîne la destruction des cellules T de la masse totale des cellules bêta (Fig. 1).
Par conséquent, le diabète de type 1 manque de glucosenseur et d’  insuline ainsi que de sécrétion d’  insuline dans la veine portale. Ces facteurs sont nécessaires pour un contrôle normal de la glycémie.

Diverses stratégies sont disponibles pour le traitement moderne du diabète de type 1. En effet, le diabète de type 1 peut être traité par le remplacement de l’  insuline, des capteurs de glucose artificiels, le remplacement des cellules bêta sous forme de greffes d’  îlots ou de pancréas ainsi que par un pancréas artificiel. Les stratégies visant à influencer l’  auto-immunité ainsi que les thérapies à base de cellules souches et de gènes sont des objectifs de la recherche future.
La thérapie moderne de remplacement de l’  insuline tente d’  imiter le schéma physiologique de sécrétion de l’  insuline, d’  une part, avec une insuline basale à action prolongée et, d’  autre part, avec des analogues de l’  insuline à action brève au moment des repas (Fig. 2).

Le plus grand problème dans le traitement d’  un diabétique par l’  insuline est le risque de développer une hypoglycémie, dont l’  incidence atteint environ 50 % avec l’  augmentation de la durée du traitement à l’  insuline après plus de 15 ans. L’  hypoglycémie est dangereuse. En effet, elle entraîne des arythmies cardiaques, des arrêts cardiaques et donc le décès du patient. De plus, elle entraîne des événements vasculaires et le décès par des mécanismes inflammatoires ainsi qu’   un dysfonctionnement endothélial. Sur la base d’  un homme de 50 ans atteint de diabète de type 1 sans complications depuis 27 ans, l’   orateur détaille le calcul des besoins en insuline.
Le médecin traitant doit se demander quelle distribution de l’  insuline basale / insuline alimentaire, et quelle quantité de glucides est recommandée. Comment mesurer la glycémie ? Comment appliquer l’  insuline ? La régulation de l’  insuline se déroule en 3 étapes. Tout d’  abord le besoin quotidien en insuline doit être calculé. Dans la plupart des cas, il se situe entre 0,6-0,8 U/ kg et par jour, avec un diabète nouvellement découvert 0,5 U. À la puberté, le besoin est beaucoup plus élevé à 1,0-1,4 U en raison de l’  augmentation de l’  hormone de croissance (Fig. 3).

Dans l’  exemple d’   un patient de 50 ans, le besoin quotidien en insuline serait de 56 U. La 2ème étape est de déterminer le besoin en l’  insuline de base, qui est de 50 % soit 28 unités. La 3ème étape est la détermination du bolus d’  insuline, 28 autres unités soit environ 9 unités par repas. A chaque repas, le patient souhaite consommer environ 70 g de glucides. Pour ce faire, le patient doit être en mesure d’estimer correctement la teneur en glucides des différents composants alimentaires. 10 g de glucides augmentent la glycémie d’  environ 2,0 mmol/l. Le sang contient 4 g de glucose. Un bon contrôle glycémique est impossible sans peser ou estimer correctement les glucides. Dans
l’  exemple mentionné, 28 U d’  insuline alimentaire sont nécessaires pour 210 g de glucides. A partir de là, nous pouvons calculer le facteur glucidique : 210 / 28 = 7,5 g de glucides par unité d’  insuline. Au début d’  un traitement, nous pouvons prévoir 10 g de glucides par unité d’  insuline. L’  insuline corrective abaisse la glycémie à un niveau normal. Elle est calculée selon la formule : 100-150 / insuline totale = 125 / 56 = 2,25 mmol / U, en tenant compte du fait que l’  insuline de correction abaisse la glycémie pendant la journée de manière moins intensive que pendant la nuit, de sorte que le patient peut abaisser spécifiquement la glycémie de 2 mmol pendant la journée et de 3-4 mmol la nuit avec une unité d’  insuline.
Avec les pompes à insuline conventionnelles, le besoin physiologique en insuline peut être défini individuellement en programmant l’  administration horaire d’  insuline (insuline à action rapide)
(Fig. 4).

L’  entraînement à l’  utilisation correcte de la thérapie par pompe classique comprend des instructions sur le débit de base : le facteur glucidique, le facteur de correction, le taux de glycémie cible, la durée d’  insuline et les ajustements nécessaires en cas de sport ou de maladie. Pour les pompes supportées par un capteur de glucose, les fonctions basales (pompe à insuline de base : débit basal, bolus, bolus de correction), les fonctions postprandiales du glucose (bolus expert avec facteur glucidique et facteur de correction) et les fonctions avancées avec surveillance glycémique continue peuvent être utilisées en plus des fonctions de base (pompe à insuline de base : débit basal, bolus, bolus de correction).
Qu’  est-ce qu’  un pancréas artificiel ? Il se compose d’  une pompe à insuline, d’  un capteur de glucose et d’  un ordinateur. Pour la mesure continue du glucose, un cathéter métallique fin est inséré dans le tissu sous-cutané. La mesure a lieu dans le tissu interstitiel. Il en résulte un certain retard par rapport à une mesure effectuée directement dans le vaisseau sanguin. Aujourd’  hui, il existe des systèmes qui mesurent la glycémie période par période ou en continu. Les systèmes plus récents peuvent être couplés à une pompe, devant être obligatoirement calibrés. En outre, il existe des systèmes implantables qui n’  ont pas encore fait leurs preuves. Les pompes modernes assistées par capteur avec désactivation prédictive de l’  hypoglycémie permettent d’  éviter largement
l’  hypoglycémie (Fig. 5).

Les pompes semi-automatiques les plus récentes, approuvées pour les patients atteints de diabète de type 1 âgés de plus de 14 ans, ne nécessitent pas de débit de base défini. Le capteur de glucose mesure et l’  ordinateur calcule la quantité d’  insuline nécessaire pour maintenir un taux de glycémie normal. Avec ce système, il est possible d’  atteindre l’  objectif de 3,9-10 mmol / l dans 3/4 de cas contre 2 / 3 avec les anciens systèmes de pompage. L’  hypoglycémie a été réduite de 1,0  % à 0,6  %. Chez 75  % de tous les patients traités, l’  HbA1c s’  est améliorée, de sorte que plus de la moitié
d’  entre eux avaient une HbA1c inférieure à 7  %, contre environ un tiers avec les anciens systèmes. La manipulation de ces nouvelles pompes semi-automatiques est fondamentalement plus facile. Cependant, la connaissance des facteurs glucidiques est cruciale. Sous la devise «Pas de contrôle de la glycémie sans connaître la quantité de glucides», le patient doit pouvoir mesurer avec précision la teneur en glucides de ses repas. Il est donc essentiel de connaître la teneur en glucides de chaque aliment. Muesli, farine et flocons d’  avoine se composent de 2/3 glucides, pain 1/2, riz et pâtes cuites 1/4, pommes de terre 1/7, fruits 1/10, lait, yaourt 1/20, légumes, viande, graisse 0. Des projets comme GoCarb sont actuellement en développement. Ils permettraient une reconnaissance automatique des glucides, par exemple avec la photographie des aliments sous 2 angles, puis la segmentation, la reconnaissance des aliments et la reconstruction 3D du volume avec calcul de la quantité de glucides (Fig. 6).

Etant donné que la libération totale d’  insuline dépend de la détermination correcte de la glycémie, le capteur doit également être calibré 2 ou 3 fois. Pour finir, l’  orateur souligne les points suivants : la technologie peut toujours échouer, c’  est pourquoi une formation détaillée est nécessaire pour être en mesure d’   agir correctement en cas d’  urgence. De nos jours, l’  empathie ainsi que la motivation et
l’  individualisation sont de la plus haute importance. Les conditions de base pour le traitement du diabète dans le futur sont, d’   une part, l’  ouverture d’  esprit à la technologie et, d’   autre part, la compréhension.
Dans une perspective d’  avenir, le professeur Lehmann présente la découverte révolutionnaire d’  une sous-population de lymphocytes chez des patients atteints de diabète de type 1, qui présentent à la fois des récepteurs des lymphocytes B et T. Ces cellules codent pour un peptide qui se lie aux cellules présentant l’  antigène avec une affinité 1000 fois plus élevée que l’  insuline. Par conséquence, celles-ci se multiplient et détruisent les cellules bêta. Si une approche thérapeutique était découverte ici, l’  auto-immunité pourrait également être traitée.

Prof. Dr. med.Roger Lehmann

UniversitätsSpital Zürich
Rämistrasse 100
8091 Zurich

Roger.Lehmann@usz.ch

Syndrome d’apnée obstructive du sommeil

Le syndrome d’ apnée obstructive du sommeil (SAOS) est une maladie très fréquente qui a des conséquences sur la santé et la société. La société moderne nous impose des exigences de plus en plus grandes – la fatigue, la somnolence et même l’ épuisement professionnel ainsi que la dépression en sont souvent les conséquences. Un traitement conséquent et l’ observance soutenue du traitement par les patients atteints de SAOS sont rapidement payants.

Le patient fatigué et somnolent est un défi fréquent dans la pratique du médecin généraliste. Tout
d’ abord, il est important de distinguer la fatigue de la somnolence, car les diagnostics différentiels ainsi que les clarifications divergent. Parmi les nombreux diagnostics différentiels de somnolence
(c’  est-à-dire le domaine de la médecine du sommeil), il faut d’ abord penser à la maladie la plus courante ayant des conséquences sur la santé et la société, à savoir le syndrome d’ apnée du sommeil. Une clarification adéquate n’ est pas un défi, mais il peut être difficile d’ établir et de maintenir la meilleure thérapie, la CPAP. Les difficultés ne sont pas d’ ordre technique, car les machines et les masques CPAP modernes offrent une thérapie très sophistiquée et douce. Souvent, les difficultés viennent plutôt d’ un problème de motivation et de compréhension du patient. Les thérapies alternatives ne sont adaptées et efficaces que pour les formes légères et ne sont souvent pas faciles à appliquer. Puisque l’ affection chronique ne peut être corrigée et ne peut être guérie
(à l’ exception des mesures chirurgicales), le traitement doit également être chronique. Il n’ est pas rare que les patients restent somnolents pendant le traitement. L’ article ci-dessous traite brièvement de tous ces aspects.

Fatigue vs. somnolence

La fatigue équivaut à être « terne, épuisé, sans énergie », « comme des muscles endoloris », le corps est fatigué, mais pas nécessairement la tête. La somnolence est « l’ étage supérieur » de la fatigue –
« la tête est fatiguée », « les yeux sont lourds », il faut se défendre contre l’ envie de dormir. Si le patient n’  y parvient pas, nous pouvons parler d’ un micro-sommeil ou d’ un assoupissement. La somnolence est normale le soir, et, à certaines heures (postprandiales), également pendant la journée. L’ état peut également varier d’ un jour à l’ autre en fonction de la durée de la nuit de sommeil. Ces fluctuations doivent être prises en compte lors des entretiens avec les patients. L’ outil établi (et validé en français) pour mesurer la somnolence est l’ échelle de somnolence d’ Epworth (ESS). Cet outil est largement disponible et connu (voir tab. 1.). Il s’ agit d’ une auto-évaluation à remplir par le patient lui-même (pas nécessairement en consultation avec le médecin). D’ après mon expérience, il en vaut la peine de revoir l’ ESS avec le patient. Souvent, le résultat est corrigé vers le bas (normalement jusqu’ à 10 points), car le patient est souvent encore « fatigué » lors de l’ évaluation. Deux autres explications importantes sont : « Veuillez indiquer la moyenne des 4 à 6 dernières semaines » et « ne tenez compte que de l’ heure de la journée, c’ est-à-dire du moment où vous vous êtes levé jusqu’ à 2 heures avant de vous coucher ».
Le diagnostic différentiel de la fatigue est très large : les causes les plus fréquentes sont les maladies physiques (insuffisance cardiaque, carence en fer avec ou sans anémie, hypothyroïdie, maladie
d’ Addison, symptômes B dans les tumeurs ou maladies systémiques) ou les maladies psychologiques telles que dépression, insomnie chronique, burn out.
Le diagnostic différentiel de somnolence comprend : Le manque de sommeil (syndrome
d’ insuffisance de sommeil, perturbations du rythme circadien sommeil-éveil telles que le travail par quarts, le décalage ou les changements de phase du sommeil) ; le syndrome des jambes sans repos et autres troubles du mouvement ; le sommeil inefficace tel que le syndrome d’ apnée du sommeil, l’ épilepsie ou les parasomnies ; les maladies neurologiques comme la narcolepsie ou les très rares hypersomnies idiopathiques.

Épidémiologie, clinique et comorbidités du SAOS

Un simple ronflement est courant, et ne vous rend pas somnolent. Avec le vieillissement (et une augmentation du poids), elle survient jusqu’ à 45 % chez les hommes de plus de 60 ans et jusqu’ à 25 % chez les femmes. Le SAOS est une maladie très courante, qui augmente avec l’ âge et le poids. Pour les hommes, le SAOS survient généralement dans 4 % de la population, pour les femmes, il représente 2 % de la population totale (prévalence). Le SAOS est défini par un index d’apnée-hypopnée (IAH) > 15/h en absence de symptômes ou de signes ou comorbidités cliniques, ou par un IAH >  5/h en présence de tels symptômes (voir ci-dessous). Formellement, la subdivision en 3 degrés de sévérité s’ applique : léger à IAH 5-15/h, moyen à IAH 16-30/h et lourd à IAH > 30/h.
Les facteurs de risque sont le sexe masculin, l’ âge, l’ obésité et les affections anatomiques comme
l’ obstruction de la respiration nasale et le pharynx étroit. Le syndrome d’ apnée centrale du sommeil, la respiration de Cheyne-Stokes et les formes mixtes ne sont pas abordés ici.
La clinique comprend des symptômes diurnes (somnolence, fatigue, troubles de la concentration, capacité de réaction réduite, irritabilité, humeur dépressive, troubles de puissance, gorge sèche) et nocturnes (pauses anamnestiques étranges, ronflements cycliques forts, attaques de suffocation, réveil, sommeil superficiel et agité, palpitations, sueurs nocturnes, nycturie, soif).
Les comorbidités comprennent également des affections très fréquentes qui se potentialisent mutuellement, telles que (la prévalence des SAOS dans la maladie concernée) : hypertension artérielle résistante au traitement (83 %), obésité (77 %), insuffisance cardiaque chronique (76 %), diabète de type 2 (72 %), après accident vasculaire cérébral (62 %), fibrillation auriculaire (49 %). Le SAOS est un facteur de risque indépendant de coronaropathie. Le risque cardiovasculaire sur 10 ans (morbidité et mortalité) augmente fortement à partir du SAOS modéré (IAH > 15/h). De nos jours, il s’ agit d’ une faute professionnelle de ne pas penser à un SAOS avec ces comorbidités. Un SAOS influence massivement le risque peropératoire lors de toute intervention chirurgicale sous anesthésie d’ intubation, en particulier lors d’ un pontage gastrique.
Les conséquences sociales vont d’ « inoffensives » – un travail de mauvaise qualité à cause de la somnolence – à « graves » – accidents du travail et de la circulation. La question de l’ inaptitude à conduire doit être abordée dès la première suspicion de SAOS avec somnolence chez le patient.

Options thérapeutiques

Les mesures générales telles que le respect des règles d’ hygiène du sommeil (en particulier la durée du sommeil supérieure à 7  heures !), éviter de boire de l’ alcool le soir, les sédatifs, les hypnotiques et les opiacés, éviter la conduite en cas de somnolence sont toujours recommandés en premier. Les « mesures simples» comprennent également ce qu’ on appelle la thérapie de position (éviter la position couchée sensible). Ceci n’ est indiqué que pour un degré de sévérité léger à moyen, si l’ accentuation en position couchée ne dépasse pas IAH > 30 / h.
La meilleure thérapie (de loin) est la thérapie CPAP, aujourd’ hui conçue de manière flexible avec une pression auto-adaptative (AutoCPAP ou thérapie APAP). Elle fonctionne du SAOS le plus léger au SAOS le plus sévère et doit toujours être suggérée comme premier choix. Ce n’ est que lorsqu’ elle ne s’ est pas établie après 3 mois avec tous les « trucs» (voir ci-dessous) (essai CPAP), que le deuxième choix entre en jeu, à savoir l’ attelle de mâchoire. Les mesures chirurgicales ORL (plus fréquemment indiquées) et maxillo-faciales (beaucoup moins fréquemment indiquées) suivent. Même dans le cas d’ une intervention chirurgicale agressive à plusieurs niveaux, la réduction maximale de l’ ILA initiale dans les mesures ORL est de 50 %, le risque de complications peropératoires est accru (comme pour toute opération) et les résultats ne peuvent être inversés en cas d’ échec. Une chirurgie nasale « simple » peut améliorer l’ observance du traitement CPAP en améliorant la respiration nasale. Une chirurgie maxillo-faciale peut être curative si elle est indiquée avec soin. Elle est cependant beaucoup plus complexe.
Il convient de mentionner ici qu’un SAOS sévère dû à une obésité morbide n’est pas guéri par un pontage gastrique, même s’il est réalisé avec succès. Même en cas de perte de poids massive, les résultats initiaux de l’ IAH sont diminués à un maximum de 50 %. Une approche pragmatique consiste à poursuivre une thérapie CPAP établie. Une fois que le nouveau poids définitif est atteint et reste stable, une polygraphie respiratoire native peut être effectuée après une pause de 2 semaines de CPAP pour déterminer la position. Si l’ IAH reste > 15/h, il existe toujours une indication thérapeutique.
Il faut souligner que seule la thérapie CPAP fonctionne dans toute la gamme des sévérités, alors que toutes les autres thérapies échouent dans les SAOS graves.

L’ adhérence thérapeutique est primordiale

La conformité du traitement commence par une bonne relation médecin-patient et exige une persévérance à long terme des deux parties. Elle débute par une explication des conséquences sur la santé (chez les hommes, il faut parler de l’ impuissance), avec une indication sérieuse de l’ inaptitude à conduire en présence d’ un SAOS non traité (même si la somnolence est niée).
Toutes les craintes et les préjugés à l’ encontre de la thérapie CPAP doivent alors être surmontés. Ce n’ est que si la thérapie est abordée avec empathie par le médecin et avec patience/motivation par le patient qu’ elle porte ses fruits.
Les « astuces » du médecin consistent à choisir le bon réglage CPAP et surtout le bon masque. Les masques faciaux complets sont rarement utilisés (< 10 %). Il est très important de respirer le plus librement possible afin d’ éviter un problème au « portail d’ entrée ». En plus de l’ utilisation à long terme des sprays nasaux NaCl, de l’ utilisation temporaire de décongestionnants (éventuellement encore des sprays de cortisone), il faut pratiquement toujours travailler généreusement avec un humidificateur d’ air chaud. La petite dépense supplémentaire en vaut toujours la peine – la peur de suffocation, typique d’ une respiration nasale obstruée, est absente.
L’ ensemble de la thérapie est au début une « désensibilisation » – elle doit donc être abordée lentement. Certains patients sont déjà enthousiastes le lendemain matin, alors que d’ autres ont besoin de jusqu’ à 2 semaines pour bien dormir et en profiter.
Les premiers contrôles de suivi sont toujours utiles à la demande du patient. Le médecin doit contacter le patient par téléphone au plus tard au bout de 2 à 3 semaines en cas de suspicion de difficultés au démarrage. Souvent, de petits réglages de la pression, du niveau d’ humidification ou un changement de masque s’ avèrent cruciaux.
Le patient, en tant que principal malade et bénéficiaire de la thérapie, doit faire sa part du travail. En effet, la somnolence / la tension psychologique / le risque pour la santé ne se rétablira que si le masque est porté régulièrement (au moins 80 % des nuits à long terme) pendant > 4 heures/nuit. Pour l’ aptitude à la conduite, il faut même > 5 heures/nuit. Grâce au logiciel moderne intégré dans les appareils, tous les détails peuvent être enregistrés et même lus à distance (pour le confort du patient, pas pour sa surveillance). De cette façon, vous pouvez savoir immédiatement si le problème est dû au réglage de la pression, au masque (fuite) ou à une mauvaise observance. En outre, vous pouvez aussi confirmer le succès du traitement et cela augmente la motivation du patient.
Toutes les autres thérapies n’ offrent pas ces options de surveillance.

Dr. med. Vladimir Popov

LungenZentrum Hirslanden
Witellikerstrasse 40
8032 Zürich

v.popov@lungenzentrum.ch

L’ auteur n’ a déclaré aucun conflit d’ intérêts en rapport avec cet article.

  • Le SAOS est une maladie répandue qui a de grandes conséquences individuelles et sociales.
  • Souvent accompagné d’autres comorbidités pertinentes, et lui-même considéré comme un facteur de risque cardiovasculaire, le SAOS contribue de façon significative à la morbidité et à la mortalité à long terme.
  • Le patient somnolent doit être correctement évalué et clarifié.
  • Dans le cas d’ un SAOS important, la thérapie CPAP, avec une bonne motivation et observance, aide rapidement et de manière décisive à contrôler le SAOS et toutes ses conséquences.
  • La somnolence disparaît, à condition que le traitement soit suivi
    régulièrement.

Troubles anxieux

Les troubles anxieux sont parmi les maladies psychiatriques les plus courantes et sont associés à un niveau élevé de souffrance. Un trouble anxieux ne peut être traité avec succès que si on le reconnaît comme tel. Cet article portera sur la manière dont les troubles anxieux se manifestent et comment ils peuvent être classés sur le plan diagnostique. Les options de traitement psychothérapeutique et psychopharmacologique seront présentées dans un article ultérieur.

Un nombre limité d’ émotions de base qui sont universelles et indépendantes de la culture ont été décrites. Ekman (1) fait la distinction entre le dégoût, la peur (fear), la joie, la tristesse, la surprise et la colère. Ces émotions ont une fonction importante et nous donnent un retour d’ information consciemment perceptible quant à la satisfaction ou non d’ un besoin. Alors que les besoins satisfaits entraînent des sentiments agréables, les besoins non satisfaits déclenchent des sentiments désagréables.
L’ American Psychological Association (APA, www.apa.org) définit l’ anxiété comme une émotion qui s’ accompagne d’ un sentiment de tension et qui se caractérise par des pensées d’ inquiétude et de changement physique. L’ anxiété se manifeste dans des situations perçues comme menaçantes, c’  est-à-dire lorsque le besoin de sécurité n’ est pas suffisamment satisfait. L’ ampleur de la peur dépend alors de l’ évaluation du danger et de l’ estimation de ses capacités pour faire face à la situation (2). Le mot peur est lié au latin «angustus» = « étroit ». Une personne en proie à la peur se sent souvent acculée et ressent une oppression.
Si une réaction d’ anxiété est déclenchée, divers processus adaptatifs sont mis en route par le système nerveux sympathique et autonome. Celles-ci entraînent des réactions physiques (p.ex. palpitations, transpiration, respiration plus rapide et moins profonde), des symptômes psychologiques (p.ex. agitation, tension), ainsi que des changements mentaux (p.ex. cercles de pensée et catastrophisation) dans le but de mobiliser l’ énergie. Au niveau du comportement, un évitement, une agitation ou une frénésie peuvent se produire. Ces processus d’ adaptation permettent à notre corps et à notre esprit de se concentrer sur la situation dangereuse et de réagir de manière adéquate à la situation de menace (réaction « fight-flight » ou « fright » (3)).
La limite entre la peur appropriée et la peur pathologique ne peut pas toujours être clairement définie. En général, on peut dire que la peur pathologique survient dans des situations où il n’ y a pas de menace réelle. Elle semble alors infondée et inappropriée pour les personnes non touchées.

Epidémiologie

L’ Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu’ en 2015, environ 264 millions de personnes dans le monde souffraient d’ un trouble anxieux (y compris les troubles obsessionnels compulsifs et le syndrome de stress post-traumatique (SSPT), qui ne sont pas décrits dans cet article). Les femmes sont touchées environ deux fois plus souvent que les hommes. Le nombre d’ années vécues avec un handicap (Years Lived with Disability, YLD) dans la région européenne est de 1,2 million d’ années (4). On estime que 38,2 % de la population de l’ UE (UE-27 plus la Suisse, l’ Islande et la Norvège) souffrent d’ au moins une maladie mentale chaque année, ce qui correspond à 164,8 millions de personnes touchées. Les troubles anxieux sont parmi les maladies psychiatriques les plus courantes, touchant environ 69,1 millions de personnes (5). En 2010, 893 000 personnes en Suisse souffraient de troubles anxieux. Les troubles anxieux les plus courants étaient les phobies spécifiques (39,2  %), suivies des phobies sociales (17,2 %), du trouble d’ anxiété généralisée (TAG  ; 15,1 %), de l’ agoraphobie (15 %) et du trouble panique (13,4 %). Environ 1,3 milliard d’ euros ont été investis dans le traitement de ces troubles (6).
Dans une revue systématique, une prévalence sur un an de 10,6 % et une prévalence au cours de la vie de 16,6 % sont indiquées pour les troubles anxieux (y compris les troubles obsessionnels compulsifs et le SSPT). Le TAG est le trouble anxieux dont la prévalence sur la vie entière est la plus élevée (6,2 %), suivi des phobies spécifiques (5,3 %), de l’ agoraphobie (3,8  %), des phobies sociales (3,6 %) et du trouble panique (1,2 %) (7).

Taxonomie

Les troubles anxieux sont diagnostiqués dans le cadre de soins ambulatoires et hospitaliers conformément à la 10ème version de la classification internationale des maladies et des problèmes de santé connexes (CIM-10) (8, 9). Pour un aperçu des classifications, voir le tableau 1.
Une distinction approximative est faite entre les troubles phobiques (F40.-) et les autres troubles anxieux (F41.-).
Dans les troubles phobiques, la peur se manifeste dans des situations clairement définies, de fait inoffensives. Cela déclenche soit un comportement d’ évitement ou alors la situation est endurée avec crainte. Les craintes du patient peuvent être liées à des symptômes individuels tels que des palpitations ou des sentiments de faiblesse. En outre, des peurs secondaires se manifestent souvent, comme la peur de mourir ou de perdre le contrôle, ou le sentiment de devenir fou. Dans le cas des troubles phobiques, on distingue l’ agoraphobie sans (F40.00) et avec (F40.01) trouble panique, les phobies sociales (F40.1) et les phobies spécifiques (isolées) (F40.2) (p.ex. des animaux, des hauteurs, etc.).
Pour les autres troubles anxieux, l’ anxiété est le principal symptôme, sans être liée à une situation environnementale spécifique. Ici, la principale distinction est faite entre le trouble panique (anxiété paroxystique épisodique ; F41.0), le TAG (F41.1) et le «trouble anxieux et dépressif, mixte» (F41.2).
Dans la CIM-11 à venir, qui devrait entrer en vigueur en 2022, la catégorie « troubles liés à l’ anxiété et à la peur » (anxiety and fear-related disorders) comprendra le mutisme sélectif (« selective mutism », 6B06) et le trouble d’ anxiété de séparation « separation anxiety disorder », 6B05) en plus des troubles d’ anxiété énumérés ci-dessus. Ainsi, l’ importance de ces troubles, qui ont été diagnostiqués en psychiatrie de l’ enfant et de l’ adolescent, pour l’ évolution ultérieure de la maladie à l’ âge adulte est prise en compte. Il a été constaté que 43,1 % d’ un échantillon de 38 993 adultes avaient plus de 18 ans lors de la première manifestation du trouble d’ angoisse de séparation (10).

Diagnostic et diagnostic différentiel des troubles anxieux

En pratique, il peut être difficile d’ identifier les troubles anxieux, car les patients font souvent état de douleurs, de troubles du sommeil ou d’ autres plaintes somatiques plutôt que de leurs angoisses (11, 12). Si l’ on soupçonne un trouble anxieux, des questions peuvent être posées dans le cadre des soins primaires (tab. 2) (13) ou des questionnaires de dépistage scientifiquement validés peuvent être utilisés, p.ex le questionnaire d’ évaluation des troubles anxieux généralisés (GAD-7 (14) ; fig. 1)). Le questionnaire GAD-7 (Generalized Anxiety Disorder Assessment) a été développé à l’ origine pour le TAG, mais il s’ est avéré sensible et spécifique pour d’ autres troubles anxieux (15). Dans le questionnaire GAD-7, un score total de 8 ou plus indique un possible trouble anxieux.
Si la suspicion d’ un trouble anxieux est confirmée, il convient d’ orienter le patient vers une institution spécialisée, où un diagnostic selon la CIM-10 (8, 9) est établi (tab. 1) et les options de traitement sont présentées et expliquées en détail au patient. Un trouble anxieux doit être traité par un médecin spécialiste / psychologue-psychothérapeute (13).
Pour l’ évaluation précise des troubles anxieux, les entretiens structurés et semi-structurés (p.ex. le Mini-International Neuropsychiatric Interview (M.I.N.I. ; DSM-IV ; CIM-10)) (16) peuvent être utilisés.
Les troubles anxieux doivent être distingués des autres troubles psychiatriques présentant des symptômes similaires par un diagnostic différentiel. Le tableau 3 donne un aperçu des principaux diagnostics différentiels psychiatriques. En plus des véritables troubles anxieux pouvant être diagnostiqués selon la CIM-10, il existe certaines causes non psychiatriques qui peuvent déclencher des « symptômes d’ anxiété » (tab.  4). En outre, La thérapie des troubles anxieux sera décrite dans un article à suivre.

Article traduit de « der informierte arzt » 11_2019
Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Dr. med. Lucas Krug

Psychiatrie und Psychotherapie FMH
Sanatorium Kilchberg AG und eigene Praxen in Zürich
Selnaustrasse 6
8001 Zürich

l.krug@hin.ch

Dr. phil. Olivia Bolt

Eidgenössisch anerkannte Psychotherapeutin
Sanatorium Kilchberg AG und eigene Praxen in Zürich
Selnaustrasse 6
8001 Zürich

olivia.bolt@hin.ch

Les auteurs ont déclaré n’  avoir aucun conflit d’  intérêts en rapport avec cet article.

  • La peur est une émotion qui se manifeste lorsqu’une situation est perçue comme menaçante. La peur pathologique survient dans des situations où il n’y a pas de menace ou de danger réel.
  • Les troubles anxieux sont courants et invalidants, avec une prévalence moyenne de 10,6 % sur un an et de 16,6 % sur toute la durée de la vie.
  • La CIM-10 distingue les troubles anxieux suivants : l’ agoraphobie (avec et sans trouble panique), la phobie sociale, les phobies spécifiques (isolées), le trouble panique (anxiété paroxystique épisodique), le trouble anxieux généralisé et le «trouble anxieux et dépressif» mixte.
  • Les patients anxieux présentent souvent des douleurs, des insomnies et d’autres symptômes somatiques. Des questions spécifiques sur l’anxiété ou un questionnaire de dépistage peuvent aider à identifier les troubles anxieux dans les soins primaires.
  • Les troubles anxieux doivent être clarifiés dans une institution spécialisée et traités par un médecin spécialiste / psychologue-psychothérapeute et/ou une thérapie psychopharmacologique.

1. Ekman, P., Facial expression and emotion. Am Psychol, 1993. 48(4): p. 384-92.
2. Lazarus, R.S., Stress und Stressbewältigung – ein Paradigma, in Kritische Lebensereignisse, S.H. Fillipp, Editor. 1981, Urban & Schwarzenberg: München.
3. Cannon, W.B., Bodily changes in pain, hunger, fear, and rage. 1932, New York: Appleton-Century-Crofts.
4. World Health Organisation (WHO), Depression and other common mental disorders: Global health estimates. 2017.
5. Wittchen, H.U., et al., The size and burden of mental disorders and other disorders of the brain in Europe 2010. Eur Neuropsychopharmacol, 2011. 21(9): p. 655-79.
6. Maercker, A., et al., The costs of disorders of the brain in Switzerland: an update from the European Brain Council Study for 2010. Swiss Med Wkly, 2013. 143: p. w13751.
7. Somers, J.M., et al., Prevalence and incidence studies of anxiety disorders: a systematic review of the literature. Can J Psychiatry, 2006. 51(2): p. 100-13.
8. World Health Organisation (WHO), Tenth Revision of the International Classification of Diseases, Chapter V (F): Mental and Behavioural Disorders (including disorders of psychological development). Clinical Descriptions and Diagnostic Guidelines. 1991, Geneva: World Health Organisation.
9. DIMDI, Internationale statistische Klassifikation der Krankheiten und verwandter Gesundheitsprobleme, 10. Revision, German Modification (ICD-10-GM). 2020.
10. Silove, D., et al., Pediatric-Onset and Adult-Onset Separation Anxiety Disorder Across Countries in the World Mental Health Survey. Am J Psychiatry, 2015. 172(7): p. 647-56.
11. Knaster, P., et al., Psychiatric disorders as assessed with SCID in chronic pain patients: the anxiety disorders precede the onset of pain. Gen Hosp Psychiatry, 2012. 34(1): p. 46-52.
12. Wittchen, H.U., et al., Generalized anxiety and depression in primary care: pre-valence, recognition, and management. J Clin Psychiatry, 2002. 63 Suppl 8: p. 24-34.
13. Bandelow, B., et al., Deutsche S3-Leitlinie Behandlung von Angststörungen. 2014. www.awmf.org/leitlinien.html
14. Löwe, B., et al., Validation and standardization of the Generalized Anxiety Disorder Screener (GAD-7) in the general population. Med Care, 2008. 46(3): p. 266-74.
15. Plummer, F., et al., Screening for anxiety disorders with the GAD-7 and GAD-2:
a systematic review and diagnostic metaanalysis. Gen Hosp Psychiatry, 2016. 39: p. 24-31.
16. Sheehan, D.V., et al., The Mini-International Neuropsychiatric Interview (M.I.N.I.): the development and validation of a structured diagnostic psychiatric interview for DSM-IV and ICD-10. J Clin Psychiatry, 1998. 59 Suppl 20: p. 22-33;quiz 34-57.
17. Neu, P., Akutpsychiatrie: Das Notfall Manual. 3. Auflage, 2017, Stuttgart: Schattauer.

Mouvements anormaux et troubles cognitifs

La survenue de mouvements anormaux dans le cadre d’ une trouble cognitif léger ou sévère peut apporter des informations importantes au diagnostic. Il convient tout d’ abord de relever si ces mouvements surviennent dans la phase prodromale, d’ état ou terminal de la maladie. Si certaines affections comme la chorée de Huntington ou le parkinsonisme, les maladies à prions et les encéphalites autoimmunes débutent volontiers avec une dyskinésie et finissent avec un trouble cognitif plus ou moins sévère, d’ autres comme la maladie d’ Alzheimer commencent par les troubles cognitifs ou des troubles cognitivo-comportmentaux pseudo-psychiatriques comme la démence fronto-temporale et évoluent avec un syndrome akinétique parkinsonien, des dyskinésies, et une maladie du motoneurone.

Il s’ agit ensuite de déterminer si les troubles moteurs sont d’ installation progressive, aiguë ou intermittente voire paroxystique. En premier lieu. Il s’ agit de voir dans la liste des médicaments s’ il existe de potentiels perturbateurs (neuroleptiques de première génération, dompéridone, antiépileptiques, antidépresseurs, lithium…).

Les réflexes archaïques et les syndromes de dépendance à l’ environnement

Les réflexes archaïques : grasping manuel, oral avec wolfing (morsure), visuel, podal, les réflexes péri-oraux, de la moue (snout), palmomentonier, de la glabelle (nasopalpébral ou Meyerson), la paratonie ou Gegenhalten (oppositionnelle, d’ accompagnement du mouvement passif ou de non-relaxation sur demande) ne sont pas spécifiques mais orientent vers une atteinte frontale.
Les comportements de dépendance à l’ environnement (préhension-manipulation forcée, carphologie, autograsping), échophénomènes (écholalie répétition de la question ou de la phrase, échopraxie : copie des gestes de l’ examinateurs), comportement d’ utilisation d’ objets présents devant le patient, orientent vers une pathologie frontale. Les stéréotypes (mouvements ou paroles répétitives) également. Ils sont classiquement présents dans les atrophies fronto-temporales et la paralysie supranucléaire progressive.

Les dyskinésies ou hypercinésies

La reconnaissance du type de mouvement anormal est primordiale. Parmi les hypercinésies ou dyskinésies on distinguera les myoclonies, les tremblements, les chorées, les dystonies, les stéréotypies, et les akathisies. Parmi les syndromes akinétiques le syndrome parkinsonien, le continuum de l’ apathie au mutisme akinétique et à la catatonie. Viennent ensuite les ataxies, les atteintes du motoneurone central et périphérique, les troubles de la marche et les troubles moteurs du langage.
Le tremblement est certainement le mouvement anormal le plus représenté dans les démences, mais plutôt par son association à l’ âge sauf dans le syndrome parkinsonien. Mouvement sinusoïdal régulier autour d’ une articulation, il peut se présenter aux membres supérieurs, inférieurs, sur la face ou le menton, la musculature cervicale. S’ il est postural et en général lié à l’ âge, il n’ a pas de connotation particulière avec les troubles cognitifs. En revanche, de type parkinsonien, de repos, asymétrique, avec disparition au début de l’ action avec une réémergence au maintien de la posture ou associant une composante de repos et d’ action de type tremblement essentiel, plutôt symétrique et familial, les autres composantes du syndrome parkinsonien (brady-hypo-akinésie, amimie, hypophonie, micrographie, marche à petits pas en antéflexion avec un tremor de repos et une diminution du ballant, difficulté au retournement et rétropulsion) sont à rechercher. S’ il est associé à un trouble cognitif, il attire l’  attention vers une synucléopathie (démence du Parkinson à début tardif, maladie à corps de Lewy) en présence de fluctuations cognitives, d’ hallucinations, de troubles du comportement du sommeil paradoxal, d’ hypersomnie ou de fausses reconnaissances. Un DAT scan et au scan au MIBG confortent ce dernier diagnostic. Les parkinsonismes sur tauopathie (paralysie supranucléaire progressive, syndrome cortico-basal) ou les formes vasculaires prédominant aux membres inférieurs ne tremblent en général pas ou ont un tremor myoclonique (brusque) ou dystonique (associé à une posture anomale). Un tremblement associé à une ataxie et un trouble cognitif doit suggérer également le FAXTAS (syndrome de X fragile avec un autisme ou un retard mental à rechercher dans la deuxième génération et une anomalie de signal dans les pédoncules cérébelleux moyens à l’ IRM).
Les myoclonies, brèves contractions ou perte soudaine (astérixis ou myoclonies négatives) de tonus musculaire, non suppressibles et persistant dans le sommeil sont en général de mauvais pronostic en présence de troubles cognitifs. Dans une maladie d’ Alzheimer, les myoclonies souvent spontanées et multifocales, signalent une évolution rapide et se présentent en fin d’ évolution avec des crises épileptiques occasionnellement. Les maladies à prions associent classiquement des myoclonies et un sursaut pathologique à une ataxie. Les myoclonies sont focales puis multifocales, au repos, en posture ou à l’ action, spontanées ou en réponses au stimulus (sensitifs, lumière, bruit, proprioceptifs). La variante pseudo-prion de la maladie à corps de Lewy, d’ évolution galopante est un diagnostic différentiel, tout comme les syndromes paranéoplasiques. Chez un jeune, une forme autoimmune à anticorps antineuronaux est à rechercher. Les endocrinopathies (thyroïdienne) et les médicaments (lithium, inhibiteurs du recaptage de la sérotonine) sont parfois des facteurs confondants.
Une chorée, si elle survient précocement, peut être confondue avec des tics, mais oriente avant tout sur une chorée de Huntington. Il s’ agit de mouvements brefs, fluents le long des membres, augmentant au stress et é l’ action, dont le patient est anosognosique ou qu’ il camoufle. On recherchera une hypotonie et des réflexes pendulaires, une impersistance motrice (impossibilité à maintenir une posture ou un mouvement fixe). Les maladies à prions, les encéphalites autoimmunes, surtout chez les jeunes, les endocrinopathies (thyroïdiennes) et des maladies plus rares, dégénérescence dentato-pallido-rubrale DRPLA, ou certaines dégénérescences cérébelleuse (SCA 17) ou les maladies à inclusions neuronales intranucléaires (NIID). Une hémichorée hémiballisme fugace d’ évolution spontanée peut baliser un trouble cognitif vasculaire microangiopathique, un lupus ou des maladies métaboliques adultes rares.
Une dystonie, co-contraction durable des muscles agonistes et antagonistes engendrant des postures anormales et des mouvements anormaux peuvent se voir surtout au niveau cervical, rachidien ou asymétrique dans les tauopathies (paralysie supranucléaire progressive, dégénérescence cortico-basale).
Un trouble cognitif associé à une ataxie doit faire exclure une encéphalopathie de Gayet Wernicke s’ ils s’ y associent des troubles oculomoteurs et une installation aiguë. Les maladies à prions sont toujours à exclure dans ces situations par une IRM avec des séquences de diffusion et un rtc test. La variante très ataxique familiale de Gerstmann-Sträussler-Scheinckker est rarissime. Les encéphalites autoimmunes (anticorps antineuronaux) ou paranéoplasiques, le FAXTAS, les maladies métaboliques tardives (Niemann-Pick de type C). A relever que les atrophies multisystémiques de type MSA C avec ataxie et dysautonomie ne font généralement pas de troubles cognitifs ou très mineurs exécutifs, mais les NIID peuvent le faire avec un trouble cognitif.

Un parkinson avec des troubles cognitifs légers ou sévère implique le syndrome parkinsonien idiopathique à début tardif, la maladie à corps de Lewy, les Parkinson démences du groupe des tauopathies (paralysie supranucléaire progressive, dégénérescence cortico-basale), les démences fronto-temporales avec motoneurone et parkinsonisme souvent discret TDP 43, c9orf72, PRGN, MAPT/tau, (très rare : FUS, VCP, CHMP2B), les calcifications de noyaux gris, les parkinsonismes vasculaires, les formes post-encéphaliques, médicamenteuses, les séquelles de radio- et de chimiothérapie, les encéphalopathies hépatiques sévères. Un syndrome parkinsonien asymétrique avec apraxie, dystonie, myoclonies, rigidité, spasticité et phénomène de main étrangère, troubles sensitifs discriminatifs, oriente vers une tauopathie de type dégénérescence cortico-basale, les variantes apraxiques sans parkinsonisme avec posturing dystonique vers une atrophie focale de type Alzheimer ou TDP 43. Un tableau de paralysie supranucléaire oculomotrice (regard vers le bas puis vertical complet), blépharospasme, avec parkinsonisme dopa-résistant axial et proximal avec sévères troubles de la marche avec freezing et chutes précoces, apathie, syndrome de dépendance à l’ environnement et troubles moteurs du langage oriente vers un syndrome de type paralysie supranucléaire progressive de type Richardson tau 4R dont l’ histologie est le plus souvent une tauopathie, mais peut aussi être une DFT de type TDP 43 plus rarement PRGN. Des présentations purement langagières de tauopathies de type PSP ou CBS histologiques, de maladie d’ Alzheimer ou de TDP 43, PRGN et c9orf72 sont décrites. Les mutations tau MAPT réalisent des syndromes parkinsoniens plus ou moins complexes associés à une DFT et une atteinte du motoneurone peu sévère. Les NIID peuvent aussi le faire, avec ataxie et dysautonomie.
Les troubles neurocognitifs vasculaires micro-angiopathiques s’ associent volontiers à des troubles de la marche dits fronto-striés aussi appelés parkinsonisme des membres inférieurs avec difficulté d’ initiation, sensibilité à la double tâche, difficulté au retournement avec aimantation, marche avec polygone élargi, petits pas mais ballant préservé, non trémulant, parkinsonisme axial et proximal essentiellement akinétique et rigide avec parfois spasticité et paratonie, un syndrome pseudobulbaire et des microsignes multifocaux (pyramidaux, champ visuel, ataxie…).
Des signes d’ atteinte du motoneurone central, périphérique ou pseudobulbaire doivent orienter vers un diagnostic d’ atrophie fronto-temporale de type c9orf72 ou TDP 43, plus rarement tau/MAPT, FUS ou VCP.
A relever que les troubles de la marche se rencontrent quasiment toujours dans les stades terminaux de tous les troubles cognitifs sévères, de même que les positions fœtales en toute fin d’ évolution.

Pr Joseph-André Ghika

Service de Neurologie
Hôpital du Valais
Av Gd Champsec 90
1950 Sion

Joseph.ghika@hopitalvs.ch

L’ auteur n’ a pas déclaré aucun conflit d’ intérêts en relation avec cet article.

  • La survenue de mouvements anormaux dans le cadre de troubles cognitifs apporte une orientation diagnostic sans toutefois apporter une spécificité absolue.
  • Leur apparition dans la phase prodromale, d’ état ou terminale de la maladie, après évaluation du rôle de la médication dans leur apparition est également utile au diagnostic, mais ne peut y amener que grâce à la synthèse de l’ analyse des biomarqueurs biologiques, y compris génétiques, radiologiques et électrophysiologiques.
  • L’ aide d’ un spécialiste en neurologie pour leur analyse fine justifie la présence du neurologue dans les consultations pluridisciplinaires de la mémoire.

S’adresser à l’auteur.

Des situations dans lesquelles le sodium est indispensable

Pour la prévention de l’ hypertension artérielle et de ses complications, il est recommandé de consommer du sel à raison de 5-6 g de NaCl par jour. Il existe cependant des situations cliniques dans lesquelles un apport journalier de sel plus élevé est nécessaire. C’ est le cas, par exemple, des patients qui souffrent d’ hypotension orthostatique en l’ absence de prise médicamenteuse faisant baisser la pression, ou des sujets qui font des efforts physiques modérés à intensifs ou du sport de haut niveau. Après l’ exercice, il est recommandé de compenser les pertes cutanées d’ eau et de sel, mais la question se pose si la compensation doit être complète ou partielle. En Suisse, dans le cadre de la prévention des déficiences en iode et de ses conséquences cliniques, du iode est ajouté au sel de cuisine. Les apports en iode de la population sont donc très liés à la consommation de sel. Des données récentes ont montré qu’ environ 14 % des femmes suisses sont en état de déficience en iode. Cette situation pourrait potentiellement s’ aggraver en cas de régime pauvre en sel (< 5 g NaCl/j). Les jeunes femmes en âge de procréer et leurs enfants sont particulièrement à risque de développer des complications liées au manque de iode.

Le sodium est un électrolyte essentiel pour les fonctions cellulaires, pour la régulation des compartiments liquidiens du corps et pour la régulation de la pression artérielle (PA). Aujourd’ hui, pratiquement toutes les sociétés médicales recommandent un apport journalier modéré en sodium ou en sel de table essentiellement pour prévenir le développement de l’ hypertension artérielle avec l’ âge et les complications cardiovasculaires et rénales qui sont associées à l’ hypertension (1). La consommation journalière de sel (NaCl) devrait être de 5-6  g par jour. En réalité, en Suisse (2), comme en Europe et aux Etats Unis, la consommation moyenne de sel est de l’ ordre de 9-11 g/j avec une consommation un peu plus élevée chez les hommes (10.5 g/j) que chez les femmes (7.5  g/j). Dans toutes les études populationnelles, il existe une relation linéaire significative entre la consommation de sel journalière et la pression artérielle, l’ impact étant plus prononcé chez les hypertendus que chez les normotendus.
Dans le débat sur la consommation de sel à recommander, une question revient systématiquement: un régime restreint en sel est-il favorable pour tout le monde ou existe-t-il des risques liés à un régime pauvre en sel chez certains individus ou groupes de sujets ? Cette question a été ravivée par plusieurs publications suggérant qu’ un apport trop restreint en sel est associé à une augmentation de la mortalité globale, sans que l’ on connaisse vraiment les mécanismes de cette surmortalité. Au delà de ce débat précis, il est évident qu’ il existe des situations cliniques dans lesquelles un apport journalier de sel plus élevé est nécessaire. Le but de cet article est de discuter les situations cliniques les plus fréquentes associées à des besoins en sel supérieurs à ceux qui sont recommandés pour la population générale et les patients hypertendus en particuliers.

L’ hypotension orthostatique

Selon les dernières recommandations de la Société Européenne de Cardiologie, l’  hypotension orthostatique (HO) se définit comme une chute anormale de la PA au passage de la position assise à debout avec une baisse de la PA ≥ 20 mmHg de systolique ou ≥ 10 mmHg de diastolique ou une chute de la PA systolique à moins de 90 mmHg (3). La prévalence de l’ HO augmente avec l’ âge. L’ hypovolémie et une perte rénale de sel nocturne sont deux caractéristiques de la physiopathologie de l’ hypotension orthostatique survenant chez des individus souvent jeunes qui ne reçoivent pas de traitements hypotenseurs. Dans ces cas, il est fortement recommandé d’ augmenter le volume circulant pour prévenir les hypotensions et cela peut se faire de deux manières: d’ une part en augmentant les apports hydriques et d’ autre part en augmentant la consommation de sel, ce qui augmentera la soif et favorisera la rétention hydrosodée et l’ augmentation du volume circulant. Ainsi, dans cette situation, on propose aux patients de boire plus de 2 litres de liquide par jour et de manger 10 grammes de sel par jour, soit le double des recommandations. Cette approche non-pharmacologique de l’ HO permet souvent de diminuer les symptômes de chute de pression. Toutefois, elle ne peut pas être appliquée à des patients qui souffrent d’ une insuffisance cardiaque en raison du risque de surcharge et d’ oedème aigu du poumon.
En cas de hypotension aiguë, une manière simple de faire remonter la PA est de boire un verre (environ 250 à 500 ml) d’ eau froide qui active le système nerveux sympathique et augmente la pression artérielle.

Régime pauvre en sel et carence en iode

Le iode est un élément essentiel pour tous les organismes vivants. Le déficit en iode est reconnu depuis le début du XXe siècle comme une cause majeure du goitre et du crétinisme (4). Aujourd’ hui, la carence en iode, même modérée, est surtout associée à des troubles du développement cérébral et des troubles cognitifs chez l’ enfant. En Suisse, la consommation de iode est intrinsèquement liée à celle du sel. En effet, depuis 1922, date à laquelle une Commission Fédérale pour la prophylaxie du goitre (4) à décidé de donner du iode à la population, le sel est enrichi en iode à des concentrations qui sont en augmentation constante : 3.75 mg/kg en 1922, 15 mg/kg en 1980 et 25 mg/kg en 2014. Pour obtenir les taux urinaires de iode recommandés par l’ OMS (100 μg/jour) il faut manger plus de 5 grammes de sel par jour. Dans l’ étude suisse sur la consommation de sel, réalisée entre 2010 et 2012, l’ excrétion urinaire de iode a été mesurée (5). Il s’ est avéré que 14 % des femmes et 2 % des hommes présentaient un déficit en iode (Fig. 1). Le déficit était plus marqué chez les femmes parce qu’ elles mangent globalement moins que les hommes et dès lors, elles ont un apport en sodium et iode inférieur. Ces données ont conduit à une augmentation du contenu en iode du sel en 2014. Cette observation pose donc la question de la pertinence d’ une réduction globale de la consommation de sel dans la population pour prévenir l’ hypertension artérielle, en particulier chez les jeunes femmes qui ont un risque d’ hypertension et de maladies cardiovasculaires plutôt bas, en tout cas jusqu’ à la ménopause.

Exercice physique et consommation de sel

L’ exercice physique modéré et régulier est fortement encouragé par les recommandations internationales pour la prévention des maladies cardiovasculaires et fait partie des approches non-médicamenteuses de l’ hypertension artérielle (1). L’ activité physique, même modérée, entraîne une déshydratation et une augmentation de la sudation qui peut être à l’ origine d’ une perte de sel assez conséquente selon l’ intensité et la durée de l’ effort et les conditions environnementales (température ambiante, humidité, etc.). Ainsi, après un exercice physique léger (45 % de la VO2max), un individu peut perdre environ 600 mg de sodium, et autant de chlore, par la peau et avec un effort d’ intensité modérée (65 % de la VO2 max) la perte peut être de 1.5 g de sodium et 3 g de chlore. De même, la perte liquidienne varie beaucoup d’ un individu à l’ autre et se montre de 0.5 à 1.5 L. Aujourd’ hui, les conseils diététiques donnés aux individus qui veulent faire de l’ exercice ou du sport sont d’ augmenter un peu leurs apports en sel avant, pendant et après l’ exercice, de manière à maintenir leur équilibre hydro-électrolytique. Pour les efforts légers, la diète habituelle suffit à maintenir cet équilibre. Pour les efforts modérés à intenses, il est préférable de compenser les pertes hydro-sodées par des boissons légèrement salées pour éviter le risque d’ hyponatrémie et ses conséquences neurologiques. Toutefois, la question se pose de savoir si la restitution du sel perdu par la peau durant l’ exercice est vraiment bénéfique à long-terme par exemple chez les patients hypertendus. En effet, il est maintenant bien établi que, lors d’ un régime riche en sel, le sodium s’ accumule dans la peau chez les hypertendus, les diabétiques et les insuffisants rénaux. L’ exercice physique augmente les pertes cutanées de sodium et par ce biais contribue à diminuer le stockage du sel dans les tissus comme le muscle et la peau. C’ est en partie par ce mécanisme que l’ exercice physique a des effets bénéfiques sur la pression artérielle. Dès lors, une compensation complète ou excessive des pertes sodées cutanées après un exercice pourrait limiter à la fois les bénéfices de l’ exercice et ceux liés à la réduction de la consommation de sel au quotidien. La question a été discutée récemment dans une revue intéressante qui remet en question les bénéfices d’ une substitution sodée complète après l’ exercice (6). Lors d’ activité physique de faible intensité, recommandée par les Sociétés Internationales d’ Hypertension, il est probablement préférable de ne pas compenser les pertes sodées, ce qui n’ est pas le cas dans les activités sportives intenses.

Autres situations cliniques nécessitant un apport sodé important

Dans les paragraphes précédents, nous avons discuté les situations cliniques les plus fréquentes dans lesquelles une restriction des apports en sel à 5-6 g/j pourrait s’ avérer problématique. Il existe plusieurs autres pathologies rénales et endocriniennes dans lesquelles un apport élevé de sel est nécessaire, entre autre pour maintenir la pression artérielle. C’ est le cas des enfants et des adultes qui présentent un syndrome de Gitelman ou de Bartter, qui sont hypotendus en raison d’ une perte rénale de sel. Ces deux maladies rénales génétiques sont caractérisées par une perte rénale de sodium consécutive à des mutations de certains transporteurs tubulaires du sodium. Une autre situation clinique peu fréquente est l’ insuffisance surrénalienne. Dans ce contexte, l’ insuffisance minéralocorticoïde entraîne une perte de sel due au déficit en aldostérone avec pour conséquence clinique une hypotension artérielle et parmi les symptômes, un appétit du sel important (salt craving). En l’ absence d’ une compensation minéralocorticoïde adéquate, un régime riche en sel est nécessaire pour maintenir la pression artérielle. Cependant, les apports en sel doivent être réduits lorsque la compensation surrénalienne médicamenteuse est efficace.

Conclusions

La réduction de la consommation de sel à 5-6 g par jour dans la population, comme recommandée par les Sociétés de Cardiologie et d’ Hypertension, constitue une étape importante dans la prévention des maladies cardiovasculaires. C’ est pour cela, que cette recommandation est également soutenue par de grandes organisations de santé comme l’ Organisation Mondiale de la Santé qui signale également qu’ il ne faut pas oublier l’ apport en iode dans de nombreux pays. Cependant, manger moins de sel a d’ autres effets bénéfiques en dehors du domaine cardiovasculaire, par exemples sur la survenue des calculs rénaux, sur le métabolisme osseux, sur l’ incidence du cancer de l’ estomac, et peut-être aussi sur l’ asthme et le développement de la cataracte (7). Il est vrai qu’ il existe des situations cliniques dans lesquelles un apport de sel supérieur aux recommandations est nécessaire comme discuté dans cette courte revue. Cependant ces situations sont relativement peu fréquentes et ont un impact sur la mortalité globale plutôt faible en comparaison des complications cardiovasculaires induites par une consommation trop élevée de sel.

Deuxième impression de l’ article paru dans «info@coeur+vaisseau» 04_2020

Copyright Aerzteverlag medinfo AG

Pr Michel Burnier

Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
Service de néphrologie et hypertension
Rue du Bugnon 17
1011 Lausanne

michel.burnier@chuv.ch

Dr Arlène Ghajarzadeh Wurzner

Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
Service de néphrologie et hypertension
Rue du Bugnon 17
1011 Lausanne

Les auteurs n’ ont déclaré aucun conflit d’ intérêts en rapport avec cet article.

  • Une consommation de sel (NaCl) de 5 à 6 grammes par jour est recommandée pour l’ ensemble de la population.
  • En cas d’ hypotension orthostatique, après l’ arrêt des médicaments
    à effet hypotenseur, il est recommandé de manger 10g de sel et de boire au moins 2 litres par jour avant de prescrire des hypertenseurs.
  • En Suisse, chez les jeunes femmes en âge de procréer, il est recommandé de manger au moins 6 grammes de sel par jour pour prévenir la carence en iode.
  • Chez les sujets qui ont une activité physique modérée à élevée ou font du sport de compétition, les pertes sodées doivent être compensées par un apport plus élevé de sel. Cependant, la compensation ne devrait pas être complète.

1. Williams, B., et al., 2018 ESC/ESH Guidelines for the management of arterial hypertension: The Task Force for the management of arterial hypertension of the European Society of Cardiology and the European Society of Hypertension: The Task Force for the management of arterial hypertension of the European Society of Cardiology and the European Society of Hypertension. J Hypertens, 2018. 36(10):
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