Voilà la grippe à nouveau au portillon, avec dans ses bagages un impact délétère majeur sur le plan social et économique. Pour chaque individu existe un risque non négligeable de complications potentiellement mortelles.
Nous disposons heureusement de vaccins efficaces adaptés chaque année aux mutations du virus de l’ influenza. Son efficacité préventive se manifeste non seulement chez les malades à risque, mais également chez les sujets en bonne santé. D’ où notre motivation à encourager nos malades à se faire vacciner au début de l’ hiver.
Le message du Dr Urs Dürst publié dans ce numéro est clair: l’ infection par le virus de la grippe fait des dégâts au niveau cardiovasculaire. Elle entraîne un état inflammatoire qui touche les artères et le cœur (infarctus du myocarde, insuffisance cardiaque), ce qui se manifeste par un risque accru de morbidité et de mortalité. Les chiffres sont éloquents : le risque d’ infarctus aigu du myocarde et d’ accident vasculaire cérébral dans les 3 premiers jours d’ une grippe est multiplié par 10 et 8, respectivement. Ce risque augmente, comme attendu, chez les patients âgés ou atteints d’ une affection chronique.
L’ efficacité préventive de la vaccination contre la grippe est largement étayée. Ainsi peut-on s’ attendre grâce à elle à une diminution des affections cardiovasculaires de l’ ordre de 45%. Il n’ est toutefois pas toujours facile de convaincre les gens, qu’ ils soient malades ou en bonne santé, de se faire vacciner contre la grippe. La revue du Dr Urs Dürst présentée ici est à cet égard très utile. Elle nous donne des arguments convaincants en faveur de cette vaccination. À lire absolument à cette période de l’ année.
L’ exemple de la vitamine D permet d’ illustrer ce que l’ on appelle le “cycle de hype”.
Le “cycle d’ engouement” illustré dans la figure 1, qui se produit sous différentes formes pour presque toutes les innovations scientifiques, peut être reproduit. Après que pratiquement toutes les études d’ intervention sur la vitamine D dans de nombreux domaines de la médecine se sont révélées négatives ou non concluantes, nous nous sommes retrouvés dans la vallée de la déception (“trough of disillusionment”). Mais peut-être commençons-nous à en sortir : Sur la base d’ un critère d’ évaluation mixte (décès ou récidive après 5 ans), la substitution en vitamine D a entraîné une réduction hautement significative de la mortalité et du taux de récidive dans le cas des cancers gastro-intestinaux (donc un groupe plutôt hétérogène). Toutefois, cela ne s’ est produit “que” chez les patients (tout de même un tiers de toutes les tumeurs) dont le tissu tumoral contenait l’ oncogène P53 (1). Chez ces derniers, la survie sans récidive était de 81% dans le groupe vitamine D (2000 U/jour) et de 31% seulement dans le groupe placebo (p = 0.002) ! Ces résultats sont encourageants, mais le sous-groupe d’ une étude négative (concernant les patients non sélectionnés) publiée en 2019 (AMATERASU, 2), analysé a posteriori, incite à la prudence.
Dose unique de psilocybine en cas d’ épisode dépressif majeur
L’ efficacité des interventions pharmacothérapeutiques aiguës dans le cadre de cette maladie à la mortalité et à la morbidité importantes est malheureusement limitée. On sait que la psilocybine (substance “psychédélique” et composant principal du champignon hallucinogène psiclocybe lancéolé) ressemble chimiquement à la sérotonine et qu’ elle peut activer le récepteur de la sérotonine (5-HT2A). Son effet antidépresseur aigu survit nettement à la détectabilité chimique de la substance dans les liquides corporels. Chez plus d’ une centaine de patients souffrant d’ un épisode dépressif sévère (âge moyen 41 ans, répartition équilibrée entre les sexes), une dose unique de 25 mg de psilocybine p.o. a entraîné une amélioration nette et hautement significative des symptômes dépressifs par rapport à la substance de contrôle choisie (100 mg de niacine p.o.), aussi bien après 8 jours qu’ après 6 semaines, apparemment sans effets secondaires significatifs (1). Les auteurs ont justifié le choix de la niacine par le fait qu’ il n’ existe pas (encore) de capsules de placebo pour la psilocybine et qu’ une carence en niacine peut tout au plus avoir des effets dépressifs. Un suivi psychiatrique/psychologique a également été assuré dans les deux groupes. La réponse a été objectivée par le score MADRS (Montgomery-Asberg Depression Rating Score, valeurs de 0 à 60, les valeurs les plus élevées correspondant à une symptomatologie dépressive plus sévère, voir l’ adresse Internet mentionnée en référence 2). Sous psilocybine, le MADRS a diminué de 12 points de score hautement significatifs (p<0,001) par rapport à la niacine, à la fois après 8 et 43 jours. Des résultats impressionnants et probablement les meilleurs à ce jour pour les épisodes dépressifs majeurs. La persistance de l’ effet d’ une dose unique de psilocybine pendant 6 semaines ouvre également une fenêtre d’ opportunité pour les autres thérapies antidépressives.
JAMA 2023, doi:10.1001/jama.2023.14530, 2. https://www.mdcalc.com/calc/4058/montgomery-asberg-depression-rating-scale-madrs, redigé le 02.10.2023
Inhalations de glucocorticoïdes chez les patients ambulatoires atteints de Covid-19 ?
Compte tenu de l’ augmentation déjà évidente des chiffres du Covid-19 cet été et au début de l’ automne (si l’ on cherche bien cette maladie), un travail est pertinent pour la pratique, qui a examiné la question suivante : les glucocorticoïdes inhalés (“topiques”) peuvent-ils raccourcir le temps jusqu’ à la disparition des symptômes et réduire les hospitalisations ou la mortalité ? Non, car chez près de 1300 patients, le fluticasone (200ugr 1/jour) pendant 14 jours n’ a pas entraîné de réduction des symptômes par rapport au placebo, alors que les visites aux urgences et les hospitalisations étaient comparables dans les deux groupes (et relativement peu nécessaires). Dans cette étude, une mortalité de 0 a été observée dans les deux groupes. Il semble toutefois que ce soit une bonne idée de ne pas arrêter les glucocorticoïdes inhalés en cas d’ infection par le Covid-19 en cas de maladie broncho-obstructive préexistante (asthme, BPCO).
New England Journal of Medicine 2023, doi:10.1056/NEJMoa2209421
Moins de controverses
Risque de cancer en cas de reflux gastro-œsophagien
La prévalence de cette forme de reflux est de 15 à 20 % en Europe et est nettement plus rare en Asie (5 %). La prédisposition au risque de cancer de l’ œsophage est clairement établie en cas de lésions érosives et d’ autres lésions de la muqueuse et nécessite des examens de suivi gastroentérologique appropriés. Toutefois, chez environ ²/³ de tous les patients souffrant de reflux gastro-œsophagien typique, on ne trouve pas de lésions de la muqueuse typiques du reflux. Quel est la prognostiquee (en cas de symptômes de reflux, mais de panendoscopie supérieure normale) ? Selon l’ étude mentionnée ici, le risque n’ est pas augmenté, contrairement aux œsophagites érosives. Dès la première endoscopie diagnostique, l’ incidence des adénocarcinomes est deux fois plus élevée en cas d’ œsophagite érosive qu’ en cas d’ œsophagite non érosive. Ensuite, le risque de développer un adénocarcinome au cours des 20 à 30 prochaines années augmente d’ un facteur 2 dans le groupe de patients présentant des lésions érosives, alors qu’ il n’ est jamais supérieur à celui d’ une population dans le groupe présentant des troubles du reflux mais une endoscopie normale sur la même période. L’ étude a des effets pratiques, peut-être même des effets d’ économie : Les contrôles endoscopiques ne semblent pas nécessaires en cas de reflux et d’ endoscopie normale (de la majorité des patients). Les indications pour les analyses manométriques et de pH, très coûteuses, devraient également être nettement redimensionnées.
BMJ 2023, doi.org/10.1136/bmj-2023-076017, redigé le 02.10.2023
La BPCO est considérée comme une maladie populaire. La prévalence mondiale de la BPCO est de 10,3% avec une tendance à la hausse en raison de l’ augmentation du nombre de fumeurs dans les pays à faible et moyen revenu (LMIC) et du vieillissement dans les pays à revenu élevé. Comme les années précédentes, la Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease (GOLD), a publié une mise à jour de la recommandation publiée pour la première fois en 2001 concernant le diagnostic, la prise en charge et la prévention de la BPCO, avec quelques nouveautés essentielles. (1)
COPD is considered to be a popular disease. The global prevalence of COPD is 10.3%, with an upward trend due to the increase in the number of smokers in low- and middle-income countries (LMIC) and ageing in high-income countries. As in previous years, the Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease (GOLD), has published an update of the recommendation published for the first time in 2001 concerning the diagnosis, management and prevention of COPD, with some essential new features. Key Words: bronchopneumopathie chronique obstructive, GOLD, prévention
Entre autres, la définition de la maladie BPCO est adaptée pour prendre en compte du fait qu’ outre la fumée de tabac comme cause principale de la maladie, d’ autres mécanismes pathogéniques contribuent à la présentation clinique de la BPCO qui est une maladie très hétérogène.
La taxonomie adaptée comprend ce que l’ on appelle les étiotypes suivants de la BPCO:
– BPCO-G (genetique): BPCO déterminée génétiquement, par exemple déficience de l’ AA1AT BPCO-D (developement): causée par un développement pulmonaire anormal, par ex. naissance précoce
– BPCO-C (cigarette): due à l’ exposition à la fumée de tabac (cigarettes, exposition au tabagisme passif, vapotage/cigarette).
– BPCO-P (pollution): due à l’ exposition à des polluants (atmosphériques) provoque
– BPCO-I (infections): causée par des infections graves/répétées (dans la petite enfance) provoque
– BPCO-A (asthme): liée à l’ asthme et à l’ enfance
– BPCO-U (unknown) : maladie inconnue
Le diagnostic de la BPCO doit être établi sur la base de l’ anamnèse, des symptômes cliniques, d’ un examen physique et d’ un examen spirométrique. Lors de la spirométrie, on considère toujours qu’ un taux du rapport postbronchodilatateur de VEMS/CVF (valeur de Tiffen-eau) inférieur à 70 % est un signe de trouble ventilatoire obstructif. Il convient cependant de noter que l’ utilisation d’ un taux fixe du rapport VEMS/CVF (inférieur à 70%) pour définir une obstruction mène a un sur-diagnostic chez les personnes âgées et un sous-diagnostic d’ un trouble respiratoire obstructif ou d’ une BPCO, en particulier en cas de maladie légère (2). Il est donc préférable d’ utiliser une valeur limite basée sur la limite inférieure des valeurs normales du VEMS/CVF (LLN : lower limit of normal).
De plus, il faut savoir qu’ une valeur VEMS abaissée (VEMS 1 inférieur à 80% de la valeur normale après bronchodilatation) avec une valeur de Tiffeneau en dessus de 70% de la valeur normale avec des troubles respiratoires peut être un signe précurseur de BPCO (PRISm: Preserved ratio impaired spirometry).
Ce groupe de patients présente également une probabilité plus élevée de comorbidités, en particulier de maladies cardiovasculaires et d’ une mortalité plus élevée, quel qu’ en soit la cause (3).
La classification des patients atteints de BPCO dans les degrés de gravité GOLD 1-4 continue de s’ effectuer en cas de limitation de la valeur de Tiffeneau inférieure à 0,7 ou 70 % selon le test de dilatation bronchique en fonction de la limitation de la capacité absolue en une seconde (GOLD 1 : moins de 80 % du volume cible VEMS 1 à GOLD 4 : moins de 30 % du volume cible VEMS 1).
En outre, en cas d’ incertitude diagnostique, le diagnostic fonctionnel pulmonaire étendu (ici surtout la pléthysmographie corporelle et la mesure de la capacité de diffusion) ainsi que des examens d’ imagerie, l’ échographie (cardiaque), la tomodensitométrie, l’ oxymétrie de pouls (également à l’ effort, p. ex. test de marche de six minutes)) sont recommandés.
Le CT thoracique doit être réalisé chez les patients présentant des exacerbations récurrentes (entre autres, question sur les bronchectasies), un VEMS inférieur à 45% (entre autres, question sur l’ hyperinflation/emphysème), des symptômes non proportionnels à la sévérité de la limitation de la capacité pulmonaire (entre autres, question sur la fibrose pulmonaire) et chez les patients qui répondent aux critères de dépistage du cancer du poumon (4).
Le GOLD souligne également l’ importance des comorbidités, comme par ex. maladies cardiovasculaires, le cancer du poumon, l’ ostéoporose, le reflux gastro-œsophagien, le diabète sucré, la dépression, les troubles anxieux et la sarcopénie qui ont une influence significative sur l’ évolution de la BPCO et le pronostic de la maladie.
Outre le tabagisme, une inflammation chronique dans l’ ensemble de l’ organisme est également soupçonnée d’ être à l’ origine des comorbidités (5).
En raison de l’ importance des exacerbations pour l’ évolution et le pronostic de la BPCO les degrés de sévérité C et D sont désormais regroupés en un seul degré de sévérité E qui, indépendamment de la sévérité des symptômes, doit être caractérisé par au moins deux exacerbations modérées, respectivement une exacerbation, mais qui conduit à une hospitalisation (figure 1).
Les symptômes doivent être évalués à l’ aide d’ un CAT (test d’ évaluation de la BPCO) ou du mMRC (modified Medical Research Council) et déterminent la classification dans le groupe A (peu de symptômes) ou B (symptômes sévères), s’ il n’ y a pas plus d’ une exacerbation modérée (sans hospitalisation) dans l’ année (6, 7).
Un nouvel aspect important est également la définition adaptée d’ une exacerbation.
Celle-ci se caractérise par une augmentation de la dyspnée et/ou de la toux avec expectoration en moins de 14 jours. Cela peut être accompagné d’ une tachypnée et/ou une tachycardie et est souvent associée à une augmentation d ’ une inflammation locale et d’ une inflammation systémique causée par des infections des voies respiratoires, la pollution de l’ air ou d’ autres irritations des voies respiratoires (8).
Les diagnostics différentiels importants en cas d’ exacerbation de la BPCO sont l’ embolie pulmonaire, la décompensation cardiaque, l’ infarctus du myocarde, la pneumonie et le pneumothorax (9).
Le pronostic à long terme d’ une exacerbation de la BPCO avec hospitalisation est mauvais, avec un taux de mortalité d’ environ 50 % à 3,6 ans. Les facteurs pronostiques indépendamment associés à une mauvaise évolution comprennent un âge plus élevé, un IMC plus faible, des comorbidités (par ex. maladies cardiovasculaires ou cancer du poumon), des hospitalisations antérieures pour exacerbation de la BPCO, la gravité clinique de l’ exacerbation et la nécessité d’ une oxygénothérapie à long terme au moment de la sortie.
Même si jusqu’ à 80 % de toutes les exacerbations peuvent être traitées en ambulatoire (médicamenteux avec des bronchodilatateurs, une thérapie de choc aux stéroïdes avec 40 mg de prednisone pendant 5 jours et des antibiotiques chez les patients présentant les trois symptômes cardinaux suivants : augmentation de la dyspnée, augmentation de la quantité de crachats et purulence des crachats) (10, 11), GOLD propose les critères suivants indications d’ hospitalisation en cas d’ exacerbation:
– Symptômes graves tels qu’ une augmentation aiguë de la dyspnée au repos, une fréquence respiratoire élevée, une mauvaise saturation en oxygène, nouvelle confusion
– Insuffisance respiratoire aiguë
– Nouvelle apparition de signes physiques tels qu’ une cyanose ou un œdème périphérique
– Absence de réponse au traitement médicamenteux initial de l’ exacerbation
– Comorbidités sévères telles qu’ insuffisance cardiaque ou apparition récente de troubles du rythme cardiaque
– Soins à domicile insuffisants.
La plupart des patients atteints de BPCO continuent à souffrir des conséquences de l’ exacerbation pendant plusieurs semaines et ne reviennent souvent jamais à leur ancien niveau clinique.
Un suivi clinique précoce devrait être effectué dans le mois suivant la sortie, de sortie et permet de réduire les rechutes ou les réexacerbations (1).
Le traitement de la BPCO stable est basé sur la symptomatologie et l’ expectoration historique des exacerbations avec une répartition dans les groupes de risque A, B et E et se divise en deux parties, d’ une part la recommandation thérapeutique initiale et d’ autre part le suivi du traitement. Le traitement de base de la BPCO consiste en principe en des bronchodilatateurs ; dans le groupe A GOLD recommande un bronchodilatateur à courte ou longue durée d’ action avec une préférence pour les préparations à longue durée d’ action, avec une certaine préférence pour les anticholinergiques. Dans les groupes B et E, le bronchodilatateur double (combinaison de LABA (long acting beta agonists) et LAMA (long acting muscarinic agonists)) est le traitement de choix.
La combinaison de LABA et d’ ICS (inhaled cortico steroid) n’ est en principe plus recommandée dans le traitement de la BPCO.
Si les ICS sont indiqués (voir graphique Critères de traitement par ISC), il convient d’ utiliser une triple combinaison de LABA, LAMA et ICS.
Le nombre de cellules éosinophiles dans l’ hémogramme différentiel (plus de 300 éosinophiles/µl) et l’ historique des exacerbations devraient servir de critères pour les ICS en tant que traitement supplémentaire dans le groupe E.
L’ administration à long terme de stéroïdes oraux/systémiques est contre-indiquée. Dans la situation de suivi, il est décisif de savoir si les patients souffrent davantage de symptômes ou si des exacerbations sont survenues entre-temps chez le patient sous traitement. En cas de traitement déjà en cours par une combinaison LABA/LAMA, une escalade avec des ICS est recommandée (combinaison LABA/LAMA/ICS = trithérapie), si le nombre d’ éosinophiles dans l’ hémogramme périphérique est supérieur à 100 cellules/µl. Il convient toutefois de noter qu’ un traitement stéroïdien systémique éventuellement administré au moment de l’ hémogramme peut masquer un nombre d’ éosinophiles supérieur à 100/µl.
Par rapport à un traitement combiné LAMA/LABA, le traitement par une trithérapie peut apporter un avantage significatif en termes de survie chez les patients symptomatiques qui présentent des exacerbations sous traitement de la maladie (12).
Les principes actifs combinés de manière fixe (appelés trithérapie fixe) offrent un avantage en termes de bénéfice maximal et d’ adhésion au traitement.
En principe, GOLD recommande d’ évaluer, de vérifier et de prendre en compte, avant/pour chaque changement de traitement, la symptomatologie et l’ historique des exacerbations, mais aussi la technique d’ inhalation et l’ observance du traitement, ainsi que les mesures non pharmacologiques telles que le sevrage tabagique ou les mesures de réhabilitations ambulatoires/stationnaires visant à augmenter l’ activité physique.
De plus, la vaccination contre la grippe, le SARS-CoV-2 et la vaccination contre les pneumocoques, la coqueluche et l’ herpès zoster est recommandée à tous les patients avec BPCO.
Enfin, pour une prise en charge optimale de nos patients atteints de BPCO, il est essentiel et indispensable d’ avoir la meilleure coopération possible entre les médecins de famille, les spécialistes, les physiothérapeutes, les nutritionnistes, les médecins de rééducation et, au stade final, les médecins palliatifs.
L’ auteur n’ a pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.
1. The Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease, 2023 GOLD REPORT
2. Guder C. et al.: Gold or lower limit of normal definition? A comparison with expert based diagnosis of chronic obstructive pulmonary disease in a porspective cohort study. Respir Res 2012 Feb 6;13(1):1
3. Stolz D. et. al.: Towards the elimination of chronic obstructive pulmonary disease: a Lancet Commission. Lancet 2022 Sep 17;400(10356):921-972.
4. Galban C et. al.: Computed tomography-based biomarker provides unique signature for diagnosis of COPD phenotypes and disease progression. Nat Med 2012 Nov;18(11):1711-5.
5. Fabbri L. M. et. al.: Complex chronic comorbidities of COPD. Eur Respir J 2008 Jan;31(1):204-12.
6. Fletcher CM: Standardised questionnaire on respiratory symptom: a statement prepared and approved by the MRC Committee on the Aetiology of Chronic Bronchitis (MRC breathlessness score). BMJ 196: 2: 1662.
7. Jones P.W. et al.: Development and first validation of the COPD Assessment Test. Eur Respir J 2009 Sep;34(3):648-54.
8. Celli R.B. et. al.: An Updated Definition and Severity Classification of Chronic Obstructive Pulmonary Disease Exacerbations: The Rome Proposal. Am J Respir Crit Care Med 2021 Dec 1;204(11):1251-1258.
9. Beghè B. et al.: Exacerbation of respiratory symptoms in COPD patients may not be exacerbations of COPD. Eur Respir J 2013 Apr;41(4):993-5.
10. Leuppi J.D. et. al.: Short-term vs Conventional Glucocorticoid Therapy in Acute Exacerbations of Chronic Obstructive Pulmonary DiseaseThe REDUCE Randomized Clinical Trial. JAMA. 2013;309(21):2223-2231.
11. Miravittles M. et. al.: Sputum colour and bacteria in chronic bronchitis exacerbations: a pooled analysis. Eur Respir J 2012 Jun;39(6):1354-60.
12. Martinez FJ, et al.: Reduced All-Cause Mortality in the ETHOS Trial of Budesonide/Glycopyrrolate/Formoterol for Chronic Obstructive Pulmonary Disease. A Randomized, Double-Blind, Multicenter, Parallel-Group Study. Am J Respir Crit Care Med 2021;203:553–564
Cette étude a investigué les pratiques de communication de personnes âgées souffrant de douleurs chroniques, par le biais d’ entretiens individuels et de focus groups. L’ expression des douleurs chroniques survient surtout dans les entourages socio-médical, familial et amical. Certains facteurs, tels que la banalisation, l’ âgisme et le stoïcisme, peuvent empêcher la thématisation des douleurs. Pour optimiser les pratiques cliniques, il s’ agit, pour les professionnels de la santé, d’ avoir un regard réflexif sur leurs échanges avec les patients âgés souffrant de douleurs chroniques et de mobiliser adroitement le réseau de ces derniers sans toutefois l’ épuiser.
This study used interviews and focus groups to explore elderly people’ s communicative practices about their chronic pain. Chronic pain is mainly expressed with health professionals, family members and friends. The thematization of chronic pain is often difficult due to phenomena such as pain banalization, agism and stoicism. Clinicians could enhance their practice by developing a self-reflective stance toward their interactions with elderly patients and by a skillful mobilization of their network without exhausting its members. Key words: communication ; âge avancé ; douleurs chroniques ; recherche qualitative
Avec qui les personnes âgées parlent-elles de leurs douleurs chroniques ? Et pourquoi privilégient-elles certains interlocuteurs plutôt que d’ autres ? Voilà deux questions essentielles pour tout soignant souhaitant tenir compte du réseau social de ses patients dans son accompagnement thérapeutique.
Les douleurs chroniques – définies comme « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à, ou ressemblant à celle associée à, une lésion tissulaire réelle ou potentielle » (1) – réduisent la qualité de vie de nombreuses personnes âgées, tant au plan fonctionnel que relationnel (2, 3, 4). S’ il est admis qu’ une bonne gestion de la communication dans l’ entourage des personnes âgées souffrant de douleurs chroniques peut contribuer à réduire les effets délétères d’ un tel état de santé (5, 6), les données scientifiques tenant compte des expériences vécues par la population concernée restent limitées. Pour combler cette lacune, a été menée entre octobre 2019 et mars 2022 au Centre Hospitalier Universitaire Vaudois une étude interdisciplinaire sur la thématisation des douleurs chroniques et de leur traitement au sein des réseaux de communication des personnes âgées (7).
Financée par le Fonds National Suisse (10001C_179292), cette recherche s’ est basée sur un protocole de recherche original permettant, sur la base d’ entretiens semi-directifs avec une cinquantaine de personnes âgées, de documenter à la fois les pratiques de communication des personnes âgées et la structure de leur réseau social. À ces entretiens s’ est ajouté la réalisation de focus groups intégrant d’ autres populations concernées par les douleurs chroniques des personnes âgées (proches aidants, soignants, décideurs institutionnels et politiques). L’ ensemble des données collectées a été analysé en combinant analyse du contenu et analyse du discours (8). Cette multi-méthode a permis de mettre en évidence les types d’ interlocuteurs avec lesquels les personnes âgées évoquent la thématique des douleurs chroniques, les paramètres facilitant ou inhibant cette thématisation ainsi que les recommandations les plus à même d’ améliorer le quotidien des personnes âgées souffrant de douleurs chroniques (9, 10, 7). Les paragraphes suivants font la synthèse, nécessairement incomplète, des travaux menés dans le cadre de cette recherche.
Interlocuteurs
Les réseaux de communication des personnes âgées souffrant de douleurs chroniques présentent des tailles variables, allant d’ un seul interlocuteur récurrent à plus d’ une trentaine. Quelle qu’ en soit la taille, les personnes âgées soulignent souvent la réduction progressive de leur réseau. Plusieurs paramètres expliquent cette variation, parmi lesquels le vieillissement de l’ entourage amical et familial, la diminution de la mobilité et des capacités perceptives (surdité, notamment) et la difficulté à faire usage des technologies numériques.
Les personnes âgées s’ orientent principalement vers trois domaines de la vie sociale quand il s’ agit de décrire les interlocuteurs avec lesquels ils thématisent leurs douleurs chroniques : le monde socio-médical (médecins, infirmières, etc.), le monde familial (partenaire, enfants, etc.) et le monde amical.
Les personnes interrogées considèrent généralement les membres des corps médicaux et paramédicaux comme les interlocuteurs évidents pour traiter de cette thématique. Si l’ empathie et la disponibilité temporelle de la part du personnel de santé sont des facteurs facilitant la communication, celle-ci peut se trouver empêchée par une trop forte technicisation de l’ évaluation de la douleur (utilisation récurrente d’ échelles) et la peur de subir les conséquences de préjugés âgistes (banalisation de la douleur à l’ âge avancé, infantilisation des personnes âgées).
Même si le personnel de santé est présenté comme un interlocuteur de première importance, c’ est avec les membres de la famille nucléaire que les personnes âgées thématisent le plus souvent la question des douleurs chroniques : leur partenaire et leurs enfants, et parmi ceux-ci en général leur(s) fille(s). Cette tendance à privilégier les enfants comme interlocuteurs à propos de cette thématique se voit infléchie dès lors que les personnes âgées ont l’ impression que leurs difficultés de santé pourraient mettre en danger leur autonomie.
Il apparaît que la famille n’ est pas le seul répertoire d’ interlocuteurs des personnes âgées à propos de cette thématique, puisque le réseau amical, même s’ il tend à se réduire fortement au fil des années, s’ offre comme un lieu dans lequel il est possible de trouver un fort soutien émotionnel. Les interlocuteurs provenant du cercle amical partagent souvent les mêmes conditions d’ existence que les personnes interrogées dans l’ étude (âge et douleurs chroniques, notamment) et sont ainsi capable d’ une grande capacité d’ écoute et de compréhension. Les données montrent par ailleurs que la vie en institution est rarement pourvoyeuse de nouveaux interlocuteurs, du fait de difficultés perceptuelles et cognitives.
Le monde des services (par exemple, le coiffeur) n’ apparaît quasiment pas dans nos données. Quant au voisinage (voisins, concierge), il semble essentiel pour apporter une aide pratique ponctuelle et des opportunités d’ interactions sociales. Dans ces situations, la thématisation des douleurs n’ a, toutefois, qu’ exceptionnellement sa place et sous la forme d’ évocations superficielles.
Inhibiteurs à la communication des douleurs chroniques
Par-delà les types d’ interlocuteurs avec lesquels les personnes âgées parlent de leur douleurs chroniques, les données ont révélé cinq types de facteurs inhibant fortement la communication : le stoïcisme ; le fatalisme, l’ âgisme ambiant, l’ inadéquation contextuelle et la crainte pour son autonomie. Ces facteurs peuvent être liés à des barrières personnelles présentes chez les participants comme à des comportements que les personnes âgées observent chez leurs interlocuteurs.
Le stoïcisme réfère à la propension de nos participants à vouloir proscrire toute plainte et à souffrir en silence : « L’éducation, ça fait tout (…) j’ avais un père qui était dur, une mère qui était dure (…) on se plaint pas, on pleure pas, on dit pas qu’ on a mal » (participante, 75 ans). Ce tabou linguistique, tel qu’ il émerge de nos données, semble être une caractéristique générationnelle, produit d’ une socialisation langagière partagée tant par les femmes que les hommes. Au stoïcisme s’ ajoute un certain fatalisme, qui voit dans les douleurs chroniques une conséquence naturelle du vieillissement : « L’ épaule, c’ est du vieillissement, donc il y a pas de raison que j’ en parle tout le temps » (participante, 85 ans). Cette banalisation de la douleur va de pair avec sa mise sous silence et fait écho un âgisme ambiant enjoignant les personnes âgées à accepter et taire leurs douleurs si elles n’ empêchent pas une certaine autonomie fonctionnelle : « Et pis mon médecin il me dit: ‘mais enfin madame, vous avez 84 ans, vous croyez quoi (…) vous pouvez encore faire votre ménage, vous faites vos commissions, et tout, alors soyez contente’ » (participante, 84 ans). Plus généralement, les personnes âgées perçoivent bien l’ inadéquation contextuelle souvent associée à la thématisation des douleurs chroniques : « Ils ont autre chose à faire que d’ écouter mes jérémiades » (participante, 89 ans). Face à des interlocuteurs qu’ elles perçoivent souvent comme pressés par le temps (tant dans le monde médical que familial), elles veulent éviter de passer pour des personnes plaintives, ressassant presque obsessionnellement leurs difficultés. Enfin, la mise sous silence des douleurs chroniques est parfois motivée par une crainte pour son autonomie, qui fait de la santé en général une thématique extrêmement délicate à aborder pour les personnes âgées :
« vu mon âge, s’il m’arrive le moindre pépin, je pense qu’on va me dire: ‘votre permis, vous l’avez plus’ . Et ça, ce serait une catastrophe » (participante, 75 ans). La thématisation des douleurs chroniques prend ainsi place dans une situation où les personnes ont peur de voir se réduire leur champ d’ action et de décision.
Implication pour la pratique
Les résultats des analyses des entretiens avec les personnes âgées associées aux conclusions tirées des focus groups ont conduit à la formulation d’ une série de recommandations à l’ égard de divers publics : personnes âgées, proches (aidants), personnel de santé et société civile (7). Deux recommandations s’ avèrent essentielles pour la pratique clinique :
– Faire un examen critique de ses façons d’ échanger avec les personnes âgées à propos des douleurs chroniques (éviter l’ âgisme sans sous-estimer les vertus d’ un certain stoïcisme ; développer avec les patients un vocabulaire commun autour du ressenti douloureux) ;
– Impliquer avec précaution le réseau de communication de ses patients (identifier les personnes ressources, non seulement dans le cercle familial mais aussi amical ; veiller à éviter de surcharger les proches, notamment en permettant la thématisation de la douleur dans le cadre de la consultation).
La mise sous silence des douleurs chroniques n’ est pas une fatalité à l’ âge avancé, mais ceci ne signifie pas qu’ il faille absolument en faire une thématique omniprésente dans le quotidien des personnes concernées.
Copyright Aerzteverlag medinfo AG
Dr Gilles Merminod 1
Msc Imane Semlali 2
Dr Orest Weber 2
Dr Eve Rubli Truchard 2
Ma Anamaria Terrier 1
Pr Isabelle Decosterd 2
Pr Pascal Singy 1,2
1 Université de Lausanne
2 Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
Dr Gilles Merminod
Université de Lausanne
Pr Pascal Singy
– Université de Lausanne
– Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
Les auteurs n’ ont pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.
◆ Si l’ entourage médical et familial proche offre aux personnes âgées un environnement privilégié pour parler de leurs douleurs chroniques, les amis sont également cruciaux, notamment pour leur soutien émotionnel. La banalisation parfois âgiste des douleurs des aînés et le stoïcisme très répandu parmi les 3èmes et 4èmes âges actuels sont des facteurs inhibiteurs essentiels de l’ expression des vécus douloureux. Dans le travail clinique, la réflexivité est de mise, pour permettre d’ éviter des blocages communicationnels superflus tout en respectant le besoin des aînés de ne pas faire de leurs douleurs chroniques une thématique prenant trop de place.
1. Raja SN, Carr DB, Cohen M. et al. The revised International Association for the Study of Pain definition of pain: concepts, challenges, and compromises. Pain 2020;161(9):1976-1982. doi: 10.1097/j.pain.0000000000001939. PMID: 32694387; PMCID: PMC7680716.
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La vaccination contre la grippe peut réduire de manière significative les événements cardiovasculaires tels que l’infarctus aigu du myocarde, l’accident vasculaire cérébral et la mortalité globale et cardiovasculaire. La prévention au moyen d’un vaccin quadrivalent inactivé à haute dose devrait être effectuée selon l’OMS chaque automne chez les personnes âgées de 65 ans et plus et souffrant d’une maladie chronique ou chez les seniors ≥75 ans. Malheureusement, le taux de vaccination contre la grippe chez les personnes atteintes de maladies chroniques est aujourd’hui encore beaucoup trop faible. Le conseil médical et la motivation sont déterminants à cet égard. L’objectif serait d’atteindre un taux de vaccination de cette population de ≥75%. La surmortalité en cas de grippe est essentiellement cardiovasculaire.
Influenza vaccination can significantly reduce cardiovascular events such as acute myocardial infarction, stroke, and all-cause and cardiovascular mortality. Prevention using an inactivated, quadrivalent HD vaccine should be performed in persons 65 years of age and older with chronic disease or in seniors ≥75 years of age each fall, according to WHO. Unfortunately, influenza vaccination coverage in chronic disease is still far too low today. Medical advice and motivation are critical in this regard. The goal would be a vaccination rate of this population ≥75%. Excess mortality from influ¬enza is primarily cardiovascular. Key Words: Influenza, influenza vaccination, cardiovascular diseases in influenza, myocardial infarction
Cet article se base sur la littérature actuelle, trois excellentes présentations lors du congrès annuel de la DGK de cette année et les recommandations de vaccination contre la grippe 2023/24 de la CFV/OFSP.
Pour beaucoup de gens, la grippe n’ est qu’ un désagrément passager avec de la fièvre,du rhume, de la toux, des maux de tête et des douleurs musculaires. La durée de la grippe typique est de 5 à 7 jours de maladie aiguë, dont généralement 3-4 jours de repos au lit. Souvent, la toux et l’ asthénie post-grippale persistent. Le fait est que les coûts médicaux, économiques et sociaux de l’ influenza et de ses complications sont largement sous-estimés.
Comparée à d’ autres maladies infectieuses, l’ influenza représente une maladie infectieuse dont la charge de morbidité est la plus élevée. Ceci est illustré par l’impact de la grippe en termes d’ années de vie perdues en bonne santé. Celui-ci est nettement plus important en cas de grippe qu’ en cas d’ infection par la TBC, le VIH ou le pneumocoque, pour ne citer que quelques infections (1). Chez les groupes à risque, la maladie chronique sous-jacente est renforcée et le risque d’ évolution grave ou fatale de la maladie est nettement accru.
Une infection par le virus de la grippe entraîne, par la libération de cytokines, un état inflammatoire systémique. Cela peut entraîner une hypercoagulabilité, une activation des macrophages et à une éventuelle constellation septique comprenant un déséquilibre hémodynamique avec activation du système nerveux sympathique, une tachycardie et une vasoconstriction. Il peut y avoir aussi un dysfonctionnement endothélial et une rupture de plaque. La conséquence est un infarctus aigu du myocarde, un accident vasculaire cérébral, une péri/myocardite virale avec une possible insuffisance cardiaque et/ou une arythmie peuvent également se produire. Les complications respiratoires jouent un rôle important avec hypoxémie, hypotension et un besoin accru en O2 – cf. fig. 1 (2). En ce qui concerne les maladies secondaires il s’ agit de la pneumonie, de l’ exacerbation d’ une maladie chronique ou d’ une autre BPCO ou d’ un asthme, la décompensation d’ un diabète sucré ou d’ autres maladies métaboliques. En outre existe la possibilité d’ aggravation de maladies rénales, hépatiques, neurologiques, immunologiques, et les maladies cancereuses. Cela entraîne une augmentation de la mortalité cardio-vasculaire et une augmentation de la mortalité globale. Le risque d’ un infarctus aigu est jusqu’ à 10 fois plus élevé dans les 3 premiers jours d’ une grippe, et le risque d’ accident vasculaire cérébral est multiplié par 8. L’ hospitalisation pour infarctus du myocarde est multiplié par 6 dans les sept premiers jours de l’ infection. et le risque d’ hospitalisation est également nettement plus élevé chez les patients avec une maladie cardiaque chronique (2-6). Chez les adultes, le risque cardiovasculaire est 6 fois plus élevé pour un infarctus du myocarde en cas d’ infection respiratoire virale, en particulier de la grippe, pendant l’ épisode infectieuse, du premier au septième jour. D’ autres virus respiratoires présentent un risque plus faible (5).
Lors d’ une forte vague d’ influenza, on peut observer une nette augmentation de la mortalité. Ainsi, selon l’ institut Robert Koch (RKI), 22’ 900 de décès supplémentaires ont été enregistrés en Allemagne en 2016/17, et dans la saison 2017/2018, 25’ 100 de décès supplémentaires, dont 86% étaient âgés de ≥60 ans. 60’ 000 hospitalisations étaient liées à la grippe en 2017/18, 58% chez des personnes de ≥60 ans. Les maladies de base telles que les maladies respiratoires, cardio-vasculaires, le diabète et le cancer ont un risque nettement plus élevé de souffrir d’ une maladie respiratoire liée à la grippe (+65%) et d’ une maladie cardiovasculaire (+23%) (7).
Dix-huit pourcent de tous les décès dus à la grippe chez les patients >65 ans sont dus à des maladies cardiovasculaires. Pour les maladies chronique pulmonaires le risque de décès est 20x plus élevé. Les personnes infectées âgées ont le plus souvent souffert d’ une détérioration de leur état général de santé – chutes, fragilité, diminution de l’ autonomie, altération de l’ état mental et / ou l’ exacerbation de la maladie de base après 1 à 2 mois, que chez les personnes non infectées.
La vaccination
L’ efficacité préventive de la vaccination contre la grippe en ce qui concerne l’ infarctus aigu du myocarde est de 15-45% ; elle est nettement supérieure à celle de l’ administration d’ une statine (19-30%) ou d’ un traitement antihypertenseur (17-25%) et à peu près aussi efficace qu’ une abstinence systématique de nicotine (32-43%) (fig. 2) (3,6).
La vaccination contre la grippe est recommandée par toutes les lignes directrices. Les objectifs de la vaccination sont: la prévention de l’ infection grippale, la prévention de pneumonies secondaires (pneumocoques), la prévention d’ une inflammation systémique et d’ une réaction immunitaire entraînant les événements cardiovasculaires mentionnés, la prévention des hospitalisations et des décès en cas d’ insuffisance cardiaque.
Selon une grande méta-analyse de 2012, la vaccination a permis de réduire les risques: MACE de -54%, la mortalité totale de -40%, l’ infarctus du myocarde de -27% (8). Selon une étude de Cochrane Database en 2015, la mortalité cardiovasculaire a diminuée 55% grâce à la vaccination (9). Selon une nouvelle méta-analyse, le NNT pour la vaccination en cas de MACE est de 23, et de 36 en cas de décès cardio-vasculaire (10). Une méta-analyse très complète de 2022 portant sur 18 études (5x randomisée, 13x études d’ observation) montre chez 217’ 072 patients et patientes à haut risque atteints de maladies cardiovasculaires avec un âge moyen de 68 ans, une réduction significative de la mortalité totale de 29%, des événements cardiovasculaires de 17% et une réduction des critères d’ évaluation secondaires de la mortalité cardiovasculaire et de l’ infarctus du myocarde de respectivement 22 et 18%. Une réduction de l’ insuffisance cardiaque n’ a pu être constatée que de manière non significative. Aucun effet n’ est apparu sur le taux d’ attaque cérébrale (11). Dans une autre grande méta-analyse de 2020, les maladies cardiovasculaires ont pu être réduites de 45% grâce à la vaccination (12). En cas d’ accident vasculaire cérébral (AVC), la vaccination a un effet protecteur modéré peu après l’évènement (13).
Avec l’ âge, l’ efficacité du système immunitaire diminue (immunosénescence); de ce fait, les personnes âgées sont plus vulnérables et présentent des évolutions de maladie plus graves. Les vaccins standard (SD-I.) sont donc moins efficaces pour les personnes âgées. Le vaccin grippal quadrivalent inactivé à haute dose (HD-I.) avec une quantité d’ antigènes 4 fois plus élevée, présente une immunogénicité supérieure. Il est plus efficace et protège les personnes âgées sur la base des données actuelles, contre la grippe et ses complications. L’ efficacité absolue s’ élevait en 2021 selon le RKI à 47% chez les personnes ≥60 ans (7).
La Commission Fédérale Suisse pour les Vaccins et l’ OFSP recommandent la vaccination contre la grippe à dose standard (SD) et à dose élevée (HD) avec la prise en charge des coûts par l’ assurance obligatoire des soins (AOS) pour les groupes d’ âge et les groupes d’ indication respectifs. Pour la vaccination contre la grippe saisonnière 2023/24 un vaccin à haute dose et deux vaccins différents à dose standard sont actuellement disponibles et autorisés par l’ OFSP sous certaines conditions – voir les recommandations de vaccination contre la grippe OFSP 2023/2024. Il s’ agit de: HD-I: Efluelda® ; SD-I : Fluarix Tetra® et Vaxigrip Tetra®.
Le vaccin à haute dose, nettement plus cher, est autorisé par l’ OFSP chez les adultes de 65 ans et plus avec un autre facteur de risque, il est très bien toléré; les effets secondaires sont la rougeur locale au point d’ injection, les myalgies, les céphalées et une sensation de malaise. Rarement, une réaction allergique aiguë peut se produire.
L’ OFSP écrit au sujet du vaccin à haute dose contre la grippe:
“Une méta-analyse (14) portant sur 34 millions de participants sur une durée de période d’ utilisation >10 ans montre une plus grande efficacité des vaccins contre la grippe HD (60μg au lieu de la dose standard de 15 μg d’ antigène par souche vaccinale) contre les complications de la grippe chez les personnes âgées ; une observation qui a également été confirmée au Danemark. Celles-ci et d’ autres données pour les vaccins HD montrent une amélioration de 10 à 20 % de protection pour les personnes ≥65 ans, raison pour laquelle la Suisse a également autorisé le vaccin avec prise en charge des coûts pour toutes les personnes ≥75 ans ainsi que pour les personnes ≥65 ans présentant au moins un autre facteur de risque de grippe sévère en raison d’ une comorbidité selon les recommandations de vaccination contre la grippe. Dans ces groupes d’ âge, a) le risque de contracter la grippe ou des complications et d’ être hospitalisé est plus élevé que chez les personnes plus jeunes en bonne santé, et b) le type de la réponse immunitaire à la vaccination est plus faible. Ce sont de bonnes raisons pour recommander un vaccin HD pour ces personnes pour les protéger contre la grippe”.
Le vaccin saisonnier doit être administré chaque année en automne.
La composition des antigènes (particules virales sous forme fragmentée) est déterminée chaque année par l’ OMS. Dans les années où la prédiction du vaccin était mauvaise avec une faible efficacité, la protection cardiovasculaire était significativement plus faible. Cela donne des indications claires sur l’efficacité du vaccin. L’ objectif reste que ≥75% des seniors et des enfants (à partir de 6 respectivement 36 mois) souffrant d’ une maladie chronique sous-jacente soient vaccinées. L’ OFSP et la STIKO (Commission permanente de vaccination auprès du RKI) recommandent également une vaccination chez toutes les femmes enceintes à partir du 2e trimestre (plus tôt en cas d’ indication), en post-partum et chez les personnes qui peuvent être considérées comme une source d’ infection potentielle des personnes à risque dans le même ménage ou pour celles-ci qui sont prises en charge par ces personnes. Une indication professionnelle existe chez le personnel médical, chez les personnes travaillant dans des établissements fréquentés par le public y compris les crèches et chez les personnes en contact avec des volailles et oiseaux sauvages – voir www.bag.admin.ch/grippeimpfen ; www.rki.de/grippeimpfen ; www.infovac.ch
Selon le trial IAMI, la vaccination contre la grippe devrait être effectuée dans les 72 heures du traitement hospitalier après un infarctus du myocarde ou en cas d’ une coronaropathie à haut risque, car elle entraîne une réduction significative de la mortalité totale, de l’ infarctus du myocarde ou de thrombose de stent ceci de 28% en 12 mois et de décès cardiovasculaire (15).
Actuellement, le taux de vaccination se situe selon la maladie de base (CHK ou HI) au maximum de 30-43% (3, 7). Chez nous aussi, de nombreux patients ne sont conscients de l’ importance de la vaccination saisonnière annuelle en automne. Souvent, on constate dans la population une méconnaissance de la vaccination ou une mauvaise appréciation des risques liés à une absence de vaccination. Il est donc nécessaire de mettre en place une bonne information et motivation des patients, des seniors et de leurs partenaires/familles par les médecins. Des campagnes de vaccination et, dans à l’ avenir, un soutien par un logiciel de cabinet médical électronique seront très utiles.
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Dr Urs Dürst
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L’ auteur n’ a pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.
◆ La vaccination contre la grippe peut prévenir les événements cardiovasculaires, tels qu’ un infarctus du myocarde ou un accident vasculaire cérébral, et en réduire la morbidité et la mortalité de manière significative. Une prévention est recommandée aussi bien chez les patients souffrant d’ une maladie chronique et chez les personnes de ≥65 ans. Ces mesures sont simples, efficaces et rentables.
◆ Malheureusement l’ administration de la vaccination annuelle contre la grippe est toujours sous-optimale, malgré de très bonnes données chez la population âgée et chez les patients à risque
◆ La vaccination contre la grippe est la “prévention secondaire vécue”.
◆ Il existe une efficacité nettement supérieure du vaccin a haute dose contre la grippe avec une protection améliorée de 10 à 20 % pour les personnes de ≥65 ans. En dessous de 65 ans, il n’ y a pas d’ autorisation de mise sur le marché. La prise en charge des coûts par les assurances maladie selon l’ OFSP est pour toutes les personnes ≥75 ans, ainsi que les personnes ≥65 ans avec au moins un autre facteur de risque selon les recommandations de vaccination contre la grippe.
◆ Ainsi, la vaccination annuelle contre la grippe saisonnière reste une tâche importante de la médecine de famille, mais aussi un défi pour le cardiologue qui suit le patient, le pneumologue et d’ autres spécialistes.
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Le trouble obsessionnel-compulsif (TOC) est une des maladies psychiatriques les plus invalidantes. Il se caractérise par la présence d’ obsessions, c’ est à dire des pensées vécues comme intrusives (du latin obsidere – assièger), et des compulsions qui correspondent à des actes rituels nécessaires pour réduire l’ intensité des obsessions.
Obsessive-compulsive disorder (OCD) is one of the most disabling psychiatric illnesses. It is characterised by the presence of obsessions, i.e. thoughts experienced as intrusive (from the Latin obsidere – to besiege), and compulsions, which correspond to ritual acts necessary to reduce the intensity of the obsessions. Key words: TOC, Neuromodulation, Pathologie résistante, DBS, Thérapie cognitivo-comportementale
Introduction
Selon l’ OMS, ce diagnostic figure parmi les dix premières conditions pathologiques ayant un retentissement sur l’ autonomie et la qualité de vie de la personne qui en est atteinte [1]. En Europe, la prévalence dans la population générale se situe entre 1 et 2% [2], les données sur l’ épidemiologie de la personne âgée sont très fragmentaires. L’ idée répandue d’ une réduction de la prévalence associée à l’ âge [3] et des données anciennes rapportant une prévalence de 0.8% dans la population de plus de 65 ans [4], est contredite par des investigations plus récentes sur la prévalence à un mois dans une population âgée non démente qui retrouvent un taux de 1.3% chez les hommes et 4.3% chez les femmes [5]. Le TOC est une maladie avec des spécificités de traitement souvent peu connues par les professionnels [6], situation qui est probablement due à la résistance à chercher de l’ aide des personnes qui en souffrent [7]. L’ instrument principal d’ évaluation clinique du TOC est l’ échelle YBOCS (Yale Brown Obsessive Compulsive Scale), qui évalue sur 5 items les obsessions et sur 5 les compulsions. Le résultat peut varier entre 0 et 40, avec un seuil pathologique à 8 et une intensité sévère à partir de 24. Bien que cette échelle soit devenue le gold-standard pour évaluer la sévérité des TOC, elle a été parfois critiquée car son administration demande beaucoup de temps et est exigeante tant pour les cliniciens que pour les patients. De plus, pour que l’ entretien soit valide et fiable, les cliniciens doivent avoir une expérience consolidée à la fois de la maladie et de l’ instrument. [8] Cet article se propose de réviser les différents traitements actuellement indiqués, en proposant un schéma de traitement par étape selon les meilleures évidences dans la littérature.
Traitements de première ligne
Psychothérapie
La psychothérapie cognitivo-comportamentale (TCC) avec exposition et prévention de la réponse est le traitement de première ligne pour le TOC [9]. Elle consiste en l’ exposition du patient aux stimuli anxiogènes avec une inhibition conséquente de l’ obsession. Le « number needed to treat » (nombre de sujets à traiter ou NST) avec une psychothérapie est égale à trois, contre 5 patients nécessaires pour une pharmacothérapie avec ISRS [10]. Cependant, la résistance du patient, les coûts d’ un tel traitement et les taux de dropout constituent de fortes limitations dont il convient de tenir compte lors d’ une prise en charge, notamment des cas les plus sévères.
Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine – ISRS
Les ISRS sont recommandés en première ligne dans le traitement aussi bien que la psychothérapie dans les guidelines [9]. En règle générale, il faut considérer ces molécules plutôt comme des anti-obsessionnels et non pas des antidépresseurs dans cette indication, ce qui implique des différences autant sur le plan posologique (cf. Tableau 1) que sur celui du délai d’ efficacité. Une méta-analyse portant sur la question de la corrélation entre le dosage et la réponse clinique a conclu que la réduction des symptômes du TOC était de 7 à 9 % plus élevée chez les patients du groupe recevant la dose la plus élevée [11]. Il faut garder à l’ esprit que le NST en monothérapie avec une dose standard est de 5, alors que le NST pour observer une amélioration en passant à une dose moyenne ou élevée varie de 13 à 15 [12]. Le délai de réponse minimal entre l’ instauration d’ un ISRS à dose efficace et son impact clinique est de 10 à 12 semaines [13]. Cependant, les premiers résultats statistiquement significatifs de réduction des symptômes sont observés après seulement 2 semaines de prescription des ISRS, et l’ amélioration suit une courbe logarithmique selon laquelle les effets les plus importants du traitement sont observés dans la phase initiale.
Traitements de deuxième ligne
Clomipramine
Plusieurs méta-analyses [14, 15] ont mis en évidence une plus grande efficacité de la clomipramine par rapport aux ISRS, mais les essais individuels [16, 17] qui la comparent directement aux ISRS n’ étayent pas ces données. Bien que la clomipramine reste un traitement de deuxième intention selon l’ APA [9], les données les plus récentes suggèrent que le passage d’ un ISRS à la clomipramine n’ est pas obligatoire [18].
Inhibiteurs de la recapture de la sérotonine-noradrénaline (IRSN)
La venlafaxine est la molécule de cette classe sur laquelle on a le plus de données [19, 20], mais dont l’ interprétation reste limitée par les définitions divergentes de la réponse chez les différents auteurs. Son efficacité est probablement comparable à celle de la clomipramine, avec un profil d’ effets secondaires qui la rend préférable à cette dernière [20].
Traitement adjuvant
3.1 Combinaison d’ antidépresseurs
Bien qu’ il y ait peu de preuves à l’ appui, l’ ajout de la clomipramine en association avec des ISRS est toujours à envisager [9].
Molécules antidopaminergiques
D’ après les connaissances les plus récentes, les prescriptions les plus efficaces sont de faibles doses d’ aripiprazole (1-5 mg/j) ou de rispéridone (0,5-1 mg/j) [21, 22, 23].
L’ ajout d’ un antipsychotique aux ISRS est efficace chez environ un tiers des patients, en particulier en présence de tics, avec un NST d’ environ cinq [12].
La clozapine n’ est pas recommandée, car il existe suffisamment de preuves de son rôle dans l’ aggravation possible des symptômes du TOC [24].
Molécules glutamatergiques
L’ efficacité de la mémantine, un antagoniste des récepteurs NMDA qui régule les effets d’ un taux de glutamate pathologiquement élevé dans le traitement de la maladie d’ Alzheimer, a été étudiée dans le TOC dans un petit essai, en complément de la fluvoxamine pendant 8 semaines. 89 % des patients traités à la mémantine correspondaient aux critères de de rémission, définis par un score YBOCS inférieur ou égal à 16, contre 32 % dans le groupe placebo [25].
La kétamine est un antagoniste des récepteurs NMDA et un agent non sélectif ciblant les systèmes opioïdes, cholinergiques et monoaminergiques, ce qui peut contribuer à son efficacité dans le TOC [26, 27, 28]. Elle est utilisée dans la pratique clinique, sans indications officielle, comme stratégie d’ augmentation lorsque les approches mieux éprouvées ont échoué [29, 30]. La plupart des essais indiquent un effet rapide mais de courte durée (de quelques jours à quelques semaines) et très hétérogène allant de la rémission complète à l’ absence de bénéfice [31].
Vers la psychiatrie interventionnelle
Un patient répond aux critères de TOC résistant lorsqu’ il présente une réduction inférieure à 25 % à l’ YBOCS malgré un essai d’ au moins 12 semaines à la dose la plus élevée tolérée d’ ISRS ou de clomipramine, en association avec au moins 30 heures de TCC. Le TOC réfractaire est défini comme une non-réponse après 3 à 6 mois à au moins trois antidépresseurs (y compris la clomipramine), et au moins deux essais d’ appoint avec des antipsychotiques atypiques [14]. Même dans les cas où un traitement adéquat est proposé au patient, on peut observer une persistance chez 10 % des patients d’ handicap sévère du TOC [32].
La stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS)
La stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS) est un traitement de neuromodulation basé sur l’ induction ciblée d’ un courant électrique dans le système nerveux central à travers l’ exposition d’ un champ magnétique variable. La rTMS bilatérale à basse fréquence ciblant l’ aire motrice supplémentaire (SMA) réduit significativement les symptômes obsessionnels avec un effet durable après 6 semaines de suivi [33]. Une autre étude a montré la supériorité d’ une stimulation de 1 Hz du cortex préfrontal dorsolatéral (DLPFC) par rapport à une stimulation similaire de 10 Hz et au placebo [34]. La rTMS est considérée comme une alternative viable aux essais de médicaments de deuxième et troisième ligne relativement risqués, tels que les antipsychotiques, les opioïdes, les benzodiazépines et les agents glutamatergiques [35]. Ces données suggèrent qu’ il est indiqué de planifier un traitement par rTMS avant de poser une indication à la DBS (cf. ci-dessous), compte tenu de la balance risques-bénéfices.
Stimulation cérébrale profonde (DBS)
La DBS est une technique de neuromodulation dont l’ application dans les TOC est basée sur une efficacité bien documentée [36]. Une revue systématique a montré qu’ en ce qui concerne la cible il n’ y avait pas de différences significatives entre la partie antérieure de la capsule interne (ALIC) et le noyau sous-thalamique (STN), et que jusqu’ à 60% des patients opérés avaient une réduction d’ au moins 35% à l’ YBOCS [37]. Le mauvais positionnement des électrodes ou l’ infection intracrânienne sont les principales causes de retrait et de réimplantation du dispositif. L’ hémorragie intracrânienne est un effet secondaire grave dans environ 5% des cas. L’ effet secondaire le plus fréquent lié à la stimulation est l’ hypomanie, bien qu’ il disparaisse généralement après ajustement des paramètres de stimulation. Des crises d’ épilepsie, quel que soit le site de stimulation, ont été occasionnellement décrites dans les cinq années suivant l’ opération. Les autres effets indésirables liés à la stimulation sont la prise de poids, les troubles du sommeil, les troubles subjectifs de la mémoire et l’ augmentation de l’ anxiété [38].
Conclusion
On estime que moins de 10% des patients atteints par un TOC reçoivent un traitement adapté peut-être en lien avec la réticence chez le patient de chercher de l’ aide et des symptômes constituent rarement une menace urgente pour soi-même ou autrui ce qui est susceptible de limiter le contact de ces patients avec les professionnels et, par voie de conséquence, les compétences de ces derniers. Dans la population âgée, la situation est aggravée par un manque de données spécifiques, autant sur le plan épidémiologique que sur celui de la prise en charge clinique adaptée. Le consensus actuel encourage les professionnels à adopter la meilleure stratégie thérapeutique disponible pour les patients âgés, en évitant au maximum que la vieillesse constitue un obstacle à l’ accès aux soins. Des recherches ultérieures sont nécessaires pour assurer à ces patients un traitement optimisé à leur état de santé, souvent marqué par des complexités qu’ on ne retrouve pas chez les jeunes et les adultes jeunes.
Copyright bei Aerzteverlag medinfo AG
Dr Kevin Swierkosz-Lenart
Dre Beatriz Pozuelo Moyano
Dre Marie-Thérèse Clerc
Pr Armin von Gunten
Service universitaire de psychiatrie de l’ âge avancé (SUPAA), CHUV
Rue du Bugnon 46, 1011 Lausanne
Dr Kevin Swierkosz-Lenart
Service universitaire de psychiatrie de l’ âge avancé (SUPAA)
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Dre Beatriz Pozuelo Moyano
Service universitaire de psychiatrie de l’âge avancé
Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV)
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Pr Armin von Gunten
Service universitaire de psychiatrie de l’âge avancé (SUPAA),
Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), Lausanne.
Les auteurs n’ ont pas déclaré de conflits d’ intérêts en rapport avec cet article.
Si l’ entourage médical et familial proche offre aux personnes âgées un environnement privilégié pour parler de leurs douleurs chroniques, les amis sont également cruciaux, notamment pour leur soutien émotionnel. La banalisation parfois âgiste des douleurs des aînés et le stoïcis
me très répandu parmi les 3èmes et 4èmes âges actuels sont des facteurs inhibiteurs essentiels de l’ expression des vécus douloureux.
Dans le travail clinique, une réflexivité est de mise, pour permettre
d’ éviter des blocages communicationnels superflus tout en respectant
le besoin des aînés de ne pas faire de leurs douleurs chroniques une thématique prenant trop de place.