Plaies chroniques

Les plaies chroniques concernent majoritairement des patients âgés, polymorbides, bien souvent polymédiqués et dénutris. Elles sont fréquemment d’ origine multifactorielle et les conséquences sur la qualité de vie sont dramatiques (douleurs chroniques, perte d’ autonomie, isolement social, dépression contextuelle etc.), faisant de la plaie chronique un facteur de morbidité important. Il s’  agit d’ un problème de santé publique. La prise en charge est donc complexe, avec plusieurs chevaux de bataille, et nécessite donc l’ installation d’ un réseau de soin multidisciplinaire au centre duquel se situe le patient dont l’ éducation thérapeutique est primordiale. Nous aborderons dans cet article la prise en charge globale des plaies chroniques, spécifiquement celle des ulcères des membres inférieurs, sous forme de guide pratique selon notre expertise.

Les plaies chroniques sont un problème de santé publique. Elles concernent environ 1 à 1.5 % de la population des pays industrialisés. La prévalence augmente avec le vieillissement de la population. La prise en charge est complexe, souvent longue (mois, voire années) comprenant visites médicales, examens complémentaires, soins de plaie spécialisés le plus souvent quotidiens, physiothérapie etc. Pour l’ Union Européenne, ces coûts s’ élèvent à 2-4 % des coûts de la santé globaux (1). Sur le plan individuel, les coûts peuvent être un frein à la prise en charge créant des situations sociales dramatiques, encore peu fréquentes heureusement en Suisse.
Le risque majeur d’ une plaie chronique est la complication infectieuse, i.e. la surinfection locale ou loco-régionale pouvant entraîner une hospitalisation de moyenne à longue durée.
Au quotidien, l’ impact sur la qualité de vie peut être dramatique en fonction de la sévérité de la plaie, si elle s’ accompagne d’ écoulement, de douleurs, d’ odeur nauséabonde etc. Une impotence fonctionnelle peut s’ installer de même qu’ un isolement social voire un état dépressif réactionnel.
La plaie chronique est donc une pathologie fréquente aux causes et conséquences multiples, mettant à rude épreuve le patient et les professionnels de la santé. Il convient d’ instaurer un partenariat solide entre les différents intervenants et avec le patient, clé principale au succès de la prise en charge, avec comme objectif commun la cicatrisation de la plaie et l’ amélioration de la qualité de vie du patient.

Etape 1 : recherche des facteurs favorisants

Une plaie chronique est par définition une plaie de plus de 6 semaines, qui ne cicatrise pas. Elle est donc témoin d’ un trouble ou retard de la cicatrisation.
Ce retard de cicatrisation peut être secondaire à des problèmes vasculaires (artériel et/ou veineux), une stase chronique, des défauts d’ oxygénation (ischémie), un état de malnutrition ou dénutrition. Un ou plusieurs de ces facteurs peuvent se retrouver chez le même patient. Il nous faut donc considérer le patient dans sa globalité avec ses co-morbidités.
Le tableau 1 illustre les facteurs favorisants la survenue de plaies chroniques.
Les 3 types de plaies les plus fréquemment rencontrés sont : les escarres, les ulcères des membres inférieurs et les plaies liées au pied diabétique.
Dans cet article nous considérerons uniquement les ulcères des membres inférieurs. Les ulcères des membres inférieurs sont principalement d’ origine vasculaire, avec une prédominance veineuse (70 %) suivie des ulcères artériels et artério-veineux (20 %) (2).

Etape 2 : recherche des signes cliniques orientant vers une cause vasculaire

Le tableau 2 illustre les caractéristiques sommaires des ulcères veineux et artériels.
Bien souvent, une bonne anamnèse associée à un examen cutané, neurologique et vasculaire détaillé permet d’ identifier dans la majorité des cas l’ origine de l’ ulcère (2).

Etape 3 : Examens complémentaires

Dépistage d’ une malnutrition / dénutrition

La dénutrition est fréquente et touche 4-10 % des personnes âgées vivant à domicile (3). La prévalence est également importante chez les patients hospitalisés. La dénutrition est un facteur favorisant et/ ou la conséquence d’ un retard de la cicatrisation pouvant engendrer un cercle vicieux.
Pour rappel, la cicatrisation est un processus complexe dépendant de l’ interaction entre différents types cellulaires (kératinocytes, fibroblastes, cellules endothéliales et immunocompétentes) et comprenant grossièrement 4 phases ; détersion, phase hémorragique et inflammatoire, réparation (cicatrisation dermique, cicatrisation épidermique) et phase de remodelage.
Les facteurs métaboliques et nutritionnels ont une place importante car ils interviennent dans la réaction inflammatoire, la prolifération cellulaire et la synthèse protéique. Lors du processus de cicatrisation, les dépenses énergétiques augmentent
par conséquence et les réserves nutritionnelles sont mobilisées. L’ intensité de ce processus est proportionnelle à la sévérité de la lésion pouvant ainsi induire ou aggraver un état de malnutrition ou dénutrition.
Il est ainsi important de faire un dépistage nutritionnel à la première visite et à chaque changement de l’ état clinique. En pratique, nous réalisons un score à l’ aide du Nutrition Risk Screening (NRS) ou Mini Nutritional Assessment (MNA). A ce stade, nous ne réalisons pas nécessairement de bilan biologique. S’ il existe un état de malnutrition ou dénutrition, nous adressons les patients à la consultation diététique ou nutritionnelle pour suite de bilan et prise en charge.

Frottis bactériologique

Une plaie chronique est par définition colonisée par différents germes. Lorsqu’ une ou plusieurs colonies bactériennes prennent le dessus et engendre une réaction de l’ hôte, on parle alors d’ infection. Les signes cliniques sont alors : rougeur, douleur (nouvelle ou aggravée), écoulement + / - jaune, vert, mauvaise odeur, nécrose, augmentation de la taille de la plaie, œdème. Cette surinfection peut être locale ou loco-régionale : on parle alors de dermohypodermite infectieuse.
Il n’ est pas recommandé de réaliser d’ emblée un frottis bactériologique car l’ attitude thérapeutique ne sera pas modifiée devant l’ absence de signe clinique de surinfection.
A retenir donc que le frottis bactériologique n’ est réalisé que lors d’ une suspicion clinique de surinfection.

Bilan artériographique et/ ou veineux

Une alliance avec le/la médecin angiologue est nécessaire. Il convient en effet de réaliser un examen artériographique et / ou veineux des membres inférieurs selon la suspicion clinique afin de déceler une cause traitable ; stadifier l’ artériopathie et / ou rechercher des varices alimentant l’ ulcère. S’ il existe une cause traitable sous-jacente, il convient de la traiter afin de garantir une cicatrisation optimale et durable (diminution des risques de récidive).

Etape 4 : Traitement

Dans un premier temps, il convient de traiter la cause comme discuté plus haut. En association, des soins locaux sont proposés dont le choix sera en fonction de l’ état de la plaie (infectée ou pas) et de son stade d’ évolution. Le but d’ un pansement est d’ assurer un milieu favorable pour la cicatrisation, ni trop humide ni trop sec. Les stades d’ évolution de la plaie suivent les phases de la cicatrisation ; détersion (phase inflammatoire), granulation (cicatrisation dermique, revascularisation) et épidermisation (cicatrisation épidermique) (4). A chaque stade d’ évolution, les pansements doivent répondre à un objectif précis, résumé dans le tableau 3.
L’ infirmier (-ère) agissant en première ligne est sentinelle et garant de l’ adéquation du traitement local. L’ alliance médico-infirmière est vitale.

Décontamination de la plaie

En l’ absence d’ infection aigue, les antiseptiques ne sont pas nécessaires. Ils peuvent être au contraire délétères et freiner la cicatrisation. Un nettoyage simple à l’ eau et savon sous la douche ou avec NaCl 0.9 % permet de réduire la colonisation bactérienne et d’ éliminer en partie le matériel fibrinonécrotique. Si la plaie est infectée, des soins locaux antiseptiques suffisent la plupart du temps sans nécessité de recourir aux antibiotiques locaux ou systémiques sauf en cas de dermohypodermite infectieuse bien évidemment.

Débridement

Le débridement permet d’ éliminer les tissus fibrinonécrotiques qui sont un obstacle à la cicatrisation. Deux techniques de détersion sont possibles : chimique ou mécanique. En pratique, nous utilisons conjointement les deux méthodes.

  • Débridement chimique (autolytique)

Les hydrogels, les hydrofibres, les alginates et certains hydrocolloïdes ont cette propriété (7).

  • Débridement mécanique

Il se pratique à l’ aide d’ un scalpel, pince ou Stieffel® (lame circulaire). L’ application d’ une antalgie topique permet de diminuer la douleur et d’augmenter la qualité de ce geste (cf. partie douleur).
En cas de zone nécrotique étendue ou douleur importante malgré les anesthésiants topiques et antalgiques, la détersion peut s’ effectuer au bloc opératoire.

  • La larvothérapie (biochirurgie)

Lucilia sericata est l’ espèce de mouche utilisée pour la larvothérapie. Ces larves se nourrissent exclusivement de tissus morts et de cette manière défibrinent les ulcères. C’ est une méthode rapide mais temporaire. Les études in vitro ont montré que les sécrétions de ces larves agissaient comme des facteurs de croissance sur les fibroblastes, favorisant la cicatrisation (5).

Pansements

Les pansements assurent une protection mécanique et diminuent les douleurs pouvant être occasionnées par la mise à nu du derme. Le but est d’ obtenir un milieu propice à la cicatrisation ; apport d’ humidité, pouvoir absorbant plus ou moins important, propriétés fibrinolytiques, actions sur le biofilm etc.Le tableau 4 résume les pansements classés en fonction de leurs propriétés (6).

La greffe cutanée et les substituts cutanés

Il existe différents types de greffe cutanée ; peau mince, demi-épaisse, totale ou en pastille (7). Le but est de recouvrir la plaie à des fins de cicatrisation et d’ antalgie. La zone receveuse doit être propice, à savoir : fond propre (pas de fibrine, pas de nécrose), absence d’ infection ou de suintement trop important, bien vascularisée. Ce geste peut se pratiquer en ambulatoire, mais l’ hospitalisation est préférable pour assurer une bonne prise de greffe dépendante notamment d’ un maintien du membre au repos.
Le domaine des substituts cutanés, issus des biothérapies, est actuellement en plein essor. Ils sont une alternative moderne et rapide à la greffe cutanée.
Par exemple l’ Apligraf® qui est composé d’ une couche épidermique (kératinocytes humains néonataux) et d’ une couche dermique (collagène bovin et fibroblastes humains néonataux). Son efficacité a été démontrée supérieure aux pansements classiques si les indications sont respectées (8).
Dernièrement, il est possible de réaliser des greffes de membrane amniotique humaine (couche interne de placenta) ayant des propriétés cicatrisantes, anti-inflammatoires et anti-bactériennes (9).Cette pratique est courante en ophtalmologie et n’ est en pratique pas encore réalisée dans notre service. Les résultats sont prometteurs selon les études. Il existe également des pansements fait de placenta complet déshydraté (NuShield®). Les études ont montré la supériorité de ce pansement par rapports aux pansements classiques (10).
Autre nouveauté, la thérapie avec des cellules souches dérivées du tissu adipeux autologue. Le tissu adipeux est constitué d’  adipocytes et des cellules vasculaires stromales. Ces dernières contiennent des cellules progénitrices mésenchymateuses pluripotentes et des cellules souches. Cette thérapie favorise la cicatrisation des ulcères avec un retard de cicatrisation (11).

Thérapie hyperbare

La thérapie hyperbare est l’ administration d’ oxygène à une pression supérieure à la pression atmosphérique, augmentant ainsi la pression partielle d’ oxygène dans le sang et les tissus. Les ulcères sont ainsi mieux oxygénés. L’ oxygénation intermittente de l’ ulcère accroît la production des facteurs de croissance ; elle a un effet microcirculatoire avec réduction des oedèmes et des effets anti infectieux (12). L’ hyperbarie peut donc être envisagée comme association thérapeutique afin de potentialiser la prise en charge.
Les HUG sont les seuls hôpitaux universitaires en Suisse à disposer d’un centre de médecine hyperbare.

La scarification

Elle se fait à l’ aide d’ un bistouri après le nettoyage de la plaie et consiste à inciser les berges de l’ ulcère. Le but est de faire saigner la plaie afin de « relancer » /stimuler l’ inflammation et d’ apporter ainsi des facteurs de cicatrisation. Ce geste concerne les ulcères atones, i.e. sans signes d’ inflammation ni dynamisme (« ulcère sec qui stagne »), car pour rappel, il n’ y a pas de cicatrisation possible sans inflammation.

Etape 5 : Gestion de la douleur

Elle est souvent négligée bien qu’ impérative. Nous avons la possibilité d’ utiliser des traitements anesthésiants et/ou antalgiques locaux associés à l’ antalgie classique per os et/ou MEOPA. Les traitements antalgiques topiques sont utiles pour les soins locaux, notamment la détersion mécanique. Le tableau 5 résume les anesthésiques/antalgiques locaux disponibles. Si la gestion de l’ antalgie reste difficile, nous faisons volontiers appel à l’ équipe mobile de la douleur.

Etape 6 : Gestion des facteurs favorisants et prévention

Contention élastique et drainages lymphatiques

Une alliance avec le/la physiothérapeute est primordiale. La contention élastique est essentielle dans la prise en charge des ulcères veineux. La pression de compression recommandée est entre 30 et 40 mmHg. Il est démontré que le port de bas de contention non seulement favorise la cicatrisation mais diminue également les risques de récidive (13). En cas d’ insuffisance artérielle avec un IPS < 0.5, la contention élastique est contre-indiquée. Chez les patients avec une artériopathie légère à modérée (IPS entre 0.5 et 0.8), une contention est possible avec des bandes de contention moins comprimantes et un suivi clinique (2). En pratique, si le pouls pédieux est palpé, la contention est prescrite. Les drainages lymphatiques ont une place également importante. Le but est de diminuer la stase chronique, l’ œdème et le lymphoedème, réduisant ainsi la pression aux membres inférieurs (frein à la cicatrisation) et le risque de surinfection loco-régionale.

Facteurs de risque cardio-vasculaires

Une alliance avec le/la médecin traitant est primordiale.
L’ état hyperglycémique et le tabac contribuent au retard de cicatrisation, les facteurs de risque cardio-vasculaires doivent être pris en charge.

Etape 7 : enseignement thérapeutique du patient

Une alliance avec le/la patient(e) est primordiale. Elle ne survient qu’ à l’ étape numéro 7 pour des soucis rédactionnels, mais détrône bien évidemment toutes les étapes et est à considérer en premier lieu.
L’ éducation thérapeutique permet au patient d’ acquérir des connaissances et compétences nécessaires pour qu’ il puisse vivre de façon optimale avec sa maladie chronique et son traitement. Il est ainsi acteur de sa prise en charge. Nos recommandations auprès du patient sont nombreuses et parfois fastidieuses, l’ éducation thérapeutique augmente les chances du suivi de celles-ci et est affaire de tous les soignants.
Prenons en exemple la contention, quiconque ne comprenant pas l’ intérêt du port de bas / bandes de contention ne peut se soumettre à les enfiler (mesure souvent pénible) en pleine canicule. Une étude américaine faite sur 203 patients a démontré l’ impact de 1 heure d’ éducation thérapeutique sur la prévention d’ ulcère et amputation chez les patients diabétiques. Dans le groupe bénéficiant de l’ éducation thérapeutique, il y a eu une diminution significative de l’ amputation et de la survenue des ulcères (14).

Dr Marem Abosaleh

Service de dermatologie et vénéréologie
Hôpitaux Universitaires de Genève
Rue Gabrielle-Perret-Gentil 4
1205 Genève

Dr Yassaman Alipour Tehrany

Service de dermatologie et vénéréologie
Hôpitaux Universitaires de Genève
Rue Gabrielle-Perret-Gentil 4
1205 Genève

Dr Laurence Toutous-Trellu

CC (Chargée de Cours)
Service de dermatologie et vénéréologie
Hôpitaux Universitaires de Genève
Rue Gabrielle-Perret-Gentil 4
1205 Genève

laurence.trellu@hcuge.ch

Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en rapport avec cet article.

  • Une prise en charge optimale fait intervenir différentes spécialités devant s’organiser en réseau solide où le patient est l’acteur central.
  • Nous n’avons abordé que les aspects médicaux, mais les aspects sociaux et économiques (pansements non remboursés à la hausse etc.) sont à considérer au même titre.
  • La plaie chronique est un problème de santé publique, dont la prévalence est en augmentation, et consiste un vrai challenge thérapeutique.

1. www.safw-romande.ch
2. Singer AJ, Tassiopoulos A, and Kirsner R. Evaluation and Management of LowerExtremity Ulcers. N Engl J Med. 2017;377:1559
3. Yerly N, Nguyen S, Major K et al. Approche ambulatoire de la dénutrition chez la personne âgée. Rev Med Suisse 2015; volume 11. 2124-2128
4. Salomon D, Vischer U, Terumalai et al. Handout Soins de plaies complexes. 2003
5. Raposio E, Bortolini S, Maistrello L et al. Larval Therapy for Chronic Cutaneous Ulcers: Historical Review and Future Perspectives. Wounds. 2017;29:367-373.
6. Toutous Trellu L. Plaies chroniques les plus fréquentes, principes de la prise en charge. info@gériatrie. 2012 ;21-23.
7. Serra R, Rizzuto A, Rossi Aet al. Skin grafting for the treatment of chronic leg ulcers – a systematic review in evidence-based medicine. Int Wound J. 2017;14:149-157
8. Zaulyanov L, Kirsner RS. A review of a bi-layered living cell treatment (Apligraf) in the treatment of venous leg ulcers and diabetic foot ulcers. Clin Interv Aging. 2007;2:93-8.
9. Castellanos G, Bernabé-García Á, Moraleda JM et al. Amniotic membrane application for the healing of chronic wounds and ulcers. Placenta. 2017 Nov;59:146-153
10. Bianchi C, Cazzell S, Vayser D et al. A multicentre randomised controlled trial evaluating the efficacy of dehydrated humanamnion/chorion membrane (EpiFix® ) allograft for the treatment of venous leg ulcers. Int Wound J. 2018;15:114-122.
11. Konstantinow A, Arnold A, Djabali K,et al. Therapy of ulcus cruris of venous and mixed venous arterial origin with autologous, adult, native progenitor cells from subcutaneous adipose tissue: a prospective clinical pilot study. J Eur Acad Dermatol Venereol. 2017;31:2104-2118.
12. Thistlethwaite KR, Finlayson KJ, Cooper PD et al. The effectiveness of hyperbaric oxygen therapy for healing chronic venous leg ulcers: A randomized, double-blind, placebo-controlled trial. Wound Repair Regen. 2018 ;26:324-331
13. O’Meara S, Cullum N, Nelson EA et al. Compression for venous leg ulcers. Cochrane Database Syst Rev. 2012;14:11
14. Malone JM, Snyder M, Anderson G, et al. Prevention of amputation by diabetic education. Am J Surg. 1989;158:520-3.

La fibrose pulmonaire idiopathique

La fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) est la plus fréquente des pneumopathies interstitielles idiopathiques. Elle survient principalement à un âge avancé, et son évolution demeure fatale. Elle doit être évoquée dans toutes les situations associant toux sèche, dyspnée et râles crépitants. La découverte d’  agents anti-fibrotiques, la pirfenidone et le nintedanib, a modifié de manière significative le pronostic de cette affection en ralentissant son évolution. Ces progrès thérapeutiques ainsi que la possible indication à une transplantation pulmonaire requièrent donc une rigueur diagnostic afin de les initier sans délai. Une approche palliative précoce est également essentielle à la prise en charge de la FPI.

La FPI appartient au groupe des pneumopathies interstitielles, groupe hétérogène de plus de 150 affections, et en représente le 55 % (1). Elle consiste en un remaniement de l’ épithélium alvéolaire entraînant une atteinte bibasale du parenchyme, associée à une dilatation des bronchioles et à une fibrose progressive interstitielle, qui a pour conséquence une diminution de la capacité vitale forcée (CVF), une altération des échanges gazeux, et une hypoxie progressive (2).
Son incidence augmente avec l’ âge, et se manifeste le plus souvent au-delà de 60 ans avec une prédominance masculine. Le tabagisme (70 % des patients sont des fumeurs), l’ exposition aux poussières et aux virus, ainsi que les facteurs génétiques représentent de potentiels facteurs de risque (3). Elle est souvent associée à des comorbidités : hypertension pulmonaire, reflux gastro-œsophagien, BPCO, diabète et coronaropathie (1).
L’ évolution est difficilement prévisible et varie entre une progression lente (décès survenant 3 à 5 ans après le diagnostic avant l’ introduction d’ anti-fibrotiques efficaces), ou rapide à la faveur d’ une exacerbation aiguë (2).

Diagnostic

La démarche diagnostique a fait l’ objet d’ une mise à jour publiée par l’ ATS/ERS/JRS/ALAT en 2018 (4). Le diagnostic doit être évoqué par la triade toux sèche, dyspnée, et râles inspiratoires crépitants. La spirométrie peut être initialement normale et évolue vers un syndrome restrictif. Il doit écarter les autres causes de pneumopathies interstitielles idiopathiques. Sa confirmation se fonde sur l’ imagerie CT en haute résolution (image en nid d’ abeilles) et sur la biopsie chirurgicale. Cette dernière, non dénuée de risque chez les patients âgés souffrant de comorbidités, peut être omise en présence d’ une imagerie suffisamment évocatrice (2). Un diagnostic précoce est un élément déterminant du pronostic.

Traitement

Le traitement, pharmacologique et non pharmacologique, vise à ralentir le déclin de la CVF, à maintenir une oxygénation satisfaisante, à réduire les symptômes et les exacerbations, et à minimiser les effets secondaires des anti-fibrotiques (1).
Avant 2014, seuls des traitements empiriques tels que l’ association prednisone-azathioprine, inefficace et entraînant une augmentation de la morbi-mortalité, ou l’ acétylcystéine, également inefficace, étaient proposés.
L’ arrivée sur le marché d’ anti-fibrotiques ayant fait la preuve de leur sécurité et efficacité au terme d’ études de phase 3 (5 – 6), a radicalement changé le pronostic de la FPI, et entraîné de nouvelles recommandations thérapeutiques. La prise en charge par les assureurs maladie de ces traitements requiert une démarche diagnostique conforme aux recommandations internationales (4).

Les anti-fibrotiques

La pirfenidone (Esbriet®)

Il s’ agit d’ un anti-fibrotique oral dont le mécanisme d’ action est peu clair. Il inhibe la prolifération des fibroblastes et la synthèse du collagène en régulant l’ activité du facteur de croissance transformant β et du TNFα.
L’ étude ASCEND (5) a montré, lorsque l’ on compare la pirfenidone à un placebo, une diminution de 54 % du déclin de la CVF après 1 an de traitement (122 vs 262 ml, p < 0,001) ainsi qu’ une survie à 5 ans significativement améliorée (55,9 % vs 31,5 %, p < 0.02).
En pratique, la posologie est progressive : 3 x 1 gélule de 267 mg/j la première semaine, 3 x 2 gélules/j la 2ème semaine, puis 3 x 3 gélules/j ou 1 gélule de 801 mg/j dès la 3ème semaine.

Le nintedanib (Ofev®)

Bien que le mécanisme d’ action soit incomplètement élucidé, le nintedanib présente des propriétés anti-inflammatoires et anti-fibrotiques, en interférant avec la migration, la prolifération, la différenciation des fibroblastes, et la synthèse du collagène. C’ est un inhibiteur intracellulaire de plusieurs tyrosine-kinases impliquées dans le processus fibrotique.
Comparé à un placebo, le nintedanib réduit le déclin de la CVF de 52 % (115 vs 240 ml, p < 0,001) après 52 semaines de traitement chez 1000 patients. Il réduit également la fréquence des exacerbations (5,3 vs 8,2 / 100 patients-années) (6). En pratique, la posologie est de 2 x 150 mg/j, susceptible d’ être réduite à 2 x 100 mg/j lors d’ intolérance.
Des méta-analyses montrent que la pirfenidone et le nintedanib ont un effet similaire sur le déclin de la CVF. Ni l’ un ni l’ autre n’ ont cependant d’ effet significatif sur l’ amélioration des symptômes cliniques.

Les traitements combinés

L’ étude INJOURNEY (7) a évalué la sécurité et la tolérance du nintedanib + pirfenidone vs nintedanib seul chez 105 patients sur une période 12 semaines. Le déclin de la CVF s’ est avéré moindre dans le groupe combiné (-13,3 ml vs -40,9 ml). Nausées et vomissements ont néanmoins été observés plus fréquemment dans le groupe combiné. Bien que cette étude soit prometteuse, une étude de plus longue durée sur un plus grand collectif, évaluant son efficacité, est néanmoins nécessaire avant de recommander un tel traitement combiné.
D’ autres études sont en cours pour déterminer l’ utilité d’ associations basées sur les comorbidités, anti-fibrotiques + sildénafil dans l’ hypertension pulmonaire par exemple.

Les effets secondaires des anti-fibrotiques

Les effets secondaires les plus fréquents liés aux anti-fibrotiques touchent le système gastro-intestinal (2).
Sous nintedanib, les diarrhées ont été reportées chez 61,5 % des patients. La majorité ont cependant pu poursuivre leur traitement après une réduction de la posologie associée à des anti-diarrhéiques. Nausées, vomissements, inappétence, douleurs abdominales, perturbations des tests hépatiques, perte de poids et hypertension ont également été observés (1). Un risque hémorragique augmenté a encore été reporté en raison de l’ inhibition du récepteur du facteur de croissance de l’ endothélium vasculaire (VEGF), ce qui exige une pesée du risque-bénéfice chez les patients à risque hémorragique. De même des cas de thromboses artérielles ont été décrits, requérant la prudence chez les patients présentant des risques cardio-vasculaires élevés.
Sous pirfenidone, l’ effet secondaire le plus fréquemment reporté est la nausée (35,5 % des patients). Cet effet secondaire est géré par la réduction de dose, la prise du traitement avec les repas, voire son interruption. Une photosensibilisation et un rash cutané ont également été décrits imposant aux patients de minimiser leur exposition au soleil (1).
Le nintedanib et la pirfenidone peuvent entraîner une perturbation des tests hépatiques, ALAT et ASAT, généralement réversible après réduction de dose ou arrêt. Le nintedanib est à proscrire lors d’ atteinte hépatique préexistante (Child B, C) et la posologie réduite à 2 x 100 mg/j pour une atteinte Child A.

Traitements non-pharmacologiques

Si les anti-fibrotiques occupent une place essentielle dans le traitement de la FPI, d’ autres approches font également partie de leur prise en charge.
C’ est le cas de l’ oxygénothérapie qui est clairement indiquée chez les patients hypoxémiques au repos (8).
De même, la réhabilitation pulmonaire doit être envisagée pour améliorer la tolérance à l’ effort et la qualité de vie des patients. Elle permet également d’ apporter conseils et soutien psychologique aux patients et à leurs proches (8).
La transplantation pulmonaire (uni-pulmonaire, bi-pulmonaire, cœur-poumons) représente une option thérapeutique pour une minorité de patients en raison des fréquentes comorbidités et de l’ âge avancé des patients. Elle doit néanmoins faire l’ objet d’ une évaluation au stade précoce de la maladie, avant même la détérioration spirométrique, afin de maximaliser les chances d’ éligibilité chez les patients de moins de 65 ans (9). En Suisse, la fibrose pulmonaire représente le quart des transplantations, bi-pulmonaires le plus souvent.
La progression de la maladie et la fréquence des exacerbations sont par ailleurs significativement réduites par l’ arrêt du tabac et la vaccination (grippe et pneumocoques).

Le traitement des comorbidités et des exacerbations

Les comorbidités, hypertension pulmonaire, reflux gastro-œsophagien (RGO), BPCO, diabète et coronaropathie, sont responsables de 30-40 % des décès de la FPI, et sont associées à un mauvais pronostic. Leur traitement fait donc partie intégrante de la prise en charge de la FPI, et permet d’ améliorer l’ espérance de vie de la FPI.
Ainsi lors de comorbidités cardio-vasculaires, les inhibiteurs de la thrombine, tel que le dabigatran, seront préférés aux coumariniques qui peuvent péjorer le pronostic de la FPI. Les statines ayant une action anti-inflammatoire ont également un effet protecteur dans l’ évolution de la FPI.
Lors de RGO, malgré le faible niveau d’ évidence et le risque majoré d’ infection, les inhibiteurs de la pompe à protons sont recommandés dans la FPI.
Les exacerbations aiguës peuvent survenir n’ importe quand et sont associées à une mortalité de 50 %. Si les corticoïdes ne font plus partie des recommandations du traitement chronique de la FPI, leur place reste avérée, souvent en association avec des antibiotiques, lors d’ exacerbations aiguës malgré l’ absence d’ études contrôlées. Par ailleurs les autres immunosuppresseurs (tacrolimus, cyclophosphamide) sont également une option envisagée dans certaines recommandations cliniques (8).

Perspectives futures

Afin d’ améliorer le diagnostic et le traitement de la FPI, les recherches actuelles portent sur le développement de bio-marqueurs. Le diagnostic pourrait bénéficier de marqueurs sanguins des lésions épithéliales et de la dégradation de la matrice (métalloprotéinase MMP7, chitinase-like protéine) afin d’ éviter des biopsies à risque. De même des marqueurs pronostiques sont étudiés, telle que la C réactive protéine. Des marqueurs génétiques sont aussi étudiés dans le cadre de la médecine prédictive. Ces marqueurs n’ ont cependant pas encore d’ application clinique (9).
Plusieurs évidences mettant en avant le rôle d’ une altération du microbiome dans la progression de la maladie, l’ utilisation d’ antibiotiques, tels que le co-trimoxazole, susceptibles de réduire la charge bactérienne des voies aériennes, est en cours d’ étude (9).

Soins palliatifs

Bien que la qualité de vie et l’ espérance de survie soient souvent inférieures à de nombreux cancers, plusieurs études montrent que le recours à une approche palliative est souvent oublié dans la FPI (10-12). Or, l’ intolérance à l’ effort, la dyspnée progressive, les hospitalisations, et les exacerbations péjorent la qualité de vie des patients souffrant de FPI.
Si les besoins d’ une approche palliative augmentent avec la progression de la maladie, il est essentiel d’ y recourir dès la confirmation du diagnostic afin de minimiser l’ angoisse engendrée par l’ incertitude du pronostic. Un accompagnement individualisé permet de prendre en compte les aspects psycho-sociaux des patients et de leurs proches, ainsi que leurs besoins, tout en leur apportant informations et soutien du diagnostic au décès. L’ accompagnement dans la rédaction de directives anticipées permet de s’ assurer que les traitements entrepris sont conformes aux souhaits du patient et évite des traitements futiles, tels qu’ une intubation ou la mise en place d’ une circulation extracorporelle non désirées.
Des outils tels que le NECPAL (13) peuvent aider les médecins à évaluer de manière qualitative et quantitative les patients susceptibles de bénéficier d’ une approche palliative et du moment le plus approprié d’ intervention.
La gestion des symptômes, dyspnée, toux, fatigue, dépression et anxiété, qui ne doit pas être négligée dans la prise en charge de la FPI, est résumée dans le tableau 1 (10). La plupart des traitements symptomatiques proposés le sont cependant avec un faible niveau d’ évidence.

Conclusion

On estime qu’ en Suisse 2000 personnes souffrent de FPI, une maladie mortelle, dont la médiane de survie est de 3-5ans. De nombreux patients ne bénéficient pas d’ un diagnostic et d’ un traitement initié précocement.
L’ évolution imprévisible de la FPI relève d’ une évaluation initiale interdisciplinaire et holistique dans des centres spécialisés.
L’ instauration d’ un traitement anti-fibrotique, un bilan pré-greffe chez les moins de 65 ans, le traitement des comorbidités, les mesures préventives ainsi qu’ une approche palliative précoce, représentent actuellement la meilleure attitude susceptible d’ améliorer le pronostic et la qualité de vie des patients souffrant de fibrose pulmonaire idiopathique.

Dr Gérard Pralong, MD, MSc

Hôpital de Lavaux, service de médecine et réadaptation
Colombaires 31
1096 Cully

gerard.pralong@hopitaldelavaux.ch

L’auteur n’a déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.

  • Un diagnostic précis et précoce permet l’ instauration d’ un traitement anti-fibrotique, pirfenidone ou nintedanib, lequel a changé le pronostic de la FPI en ralentissant le déclin de la CVF.
  • L’ arrêt du tabac, la vaccination contre l’ influenza et le pneumocoque, la réhabilitation pulmonaire, ainsi que le traitement des comorbidités peuvent contribuer à ralentir la progression de la maladie.
  • La transplantation pulmonaire doit être évoquée chez tous les patients de moins de 65 ans.
  • Les soins palliatifs et les directives anticipées font partie de la prise en charge de la FPI.

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Prise en charge après une opération bariatrique

Les patients ayant subi une intervention bariatrique ont besoin de contrôles réguliers afin de détecter et de traiter les complications et les progressions défavorables à un stade précoce. Comme le nombre de patients recevant une chirurgie bariatrique pour traiter l’ obésité et ses comorbidités augmente rapidement, il devient de plus en plus important pour les médecins d’ avoir une connaissance pratique des principales conséquences de la chirurgie bariatrique. Les thèmes importants lors de ce suivi comprennent la perte de poids, la détection précoce d’ une évolution défavorable, la détection et le traitement des carences en macro- et micronutriments, les symptômes gastro-intestinaux tels que la douleur, le dumping, etc. L’ article suivant donne un aperçu de ces sujets et décrit les options de traitement.

L’ augmentation de l’ obésité au cours des dernières décennies a mené, entre autres, à une utilisation accrue des opérations bariatriques. L’ étude SOS (Swedish Obese Subjects) (1) a documenté de manière impressionnante les succès continus en matière de perte de poids, d’ amélioration de la comorbidité et de réduction de la mortalité chez les patients ayant subi une chirurgie, ce qui a conduit à une utilisation encore plus importante de ces opérations. Il est donc de plus en plus important que les médecins en pratique se familiarisent avec les questions et les problèmes pouvant survenir après une chirurgie bariatrique. L’ article suivant donne un aperçu des questions relatives à la pratique et vise à fournir des conseils sur la façon de procéder dans des situations typiques.
En Suisse, des directives pour le traitement chirurgical de l’ obésité et les soins de suivi après une chirurgie bariatrique ont été élaborées par la SMOB (Swiss Society for the Study of Morbid Obesity and Metabolic Disorders), sont disponibles sur la page d’ accueil www.smob.ch et sont régulièrement actualisées. Selon ces directives, les centres bariatriques sont tenus d’ assurer le suivi de leurs patients tout au long de leur vie. Ce suivi est assuré par les centres bariatriques en collaboration avec les médecins de famille. Selon les directives du SMOB, les centres doivent pouvoir démontrer un taux de suivi d’  au moins 75  % dans les 5 premières années postopératoires. Les contrôles de suivi doivent être effectués deux, quatre, huit et 12 semaines après l’ opération, puis tous les trois mois, dans la deuxième année postopératoire tous les six mois, puis tous les ans, avec dans chaque cas un contrôle en laboratoire de la situation des micronutriments, ou plus fréquemment en cas de problèmes particuliers. Les consultations doivent inclure une évaluation et des conseils concernant l’ évolution du poids, la situation nutritionnelle et de l’ activité physique, ainsi que des comorbidités, en plus de questions individuelles qui doivent aussi être abordées.

L’ opération bariatrique la plus fréquente est le bypass (ou pontage) gastrique, généralement sous la forme du pontage gastrique proximal Roux-Y (Fig. 1), qui agit à la fois de manière restrictive et malabsorptive. L’ effet restrictif est particulièrement marqué après la gastrectomie longitudinale ou gastrectomie sleeve (Fig. 2) ou après l’ implantation d’ un l’ anneau gastrique. Cette dernière était l’ opération standard jusqu’ en 2005 mais n’ est plus utilisée aujourd’ hui en raison de l’ intolérance, de la dysmotilité œsophagienne et des symptômes de reflux. La perte de poids la plus importante survient après une opération de diversion biliopancréatique (DBP) (Fig. 3). Cette opération entraîne une forte malabsorption. En plus des effets restrictifs et malabsorbtifs, ces opérations agissent toutes en modifiant les composantes neuroentéro-humorales, c’ est-à-dire en modifiant les hormones peptidiques gastro-intestinales et en influençant les boucles de contrôle centrales pour réguler la saturation et la récompense. La modification du microbiote après l’ intervention chirurgicale joue également un rôle dans la perte de poids.

Courbe de poids et évolutions défavorables

La perte de poids moyenne 5 ans après le pontage gastrique est de 70 % de perte du poids excessif (LEF), d’ environ 60 % après la gastrectomie longitudinale et d’ environ 80 % après la dérivation biliopancréatique, le nadir étant atteint 12-18 mois après la chirurgie. Par la suite, le but devrait être la stabilisation du poids. Un gain de poids secondaire d’ environ 5 % à 10 % est considéré comme normal et multifactoriel. Toutefois, il convient de noter qu’ il n’ y a pas de limite claire à ce qui constitue une perte de poids suffisante. L’ évolution du poids doit également être évaluée dans le contexte des comorbidités.
Le tableau 1 donne un aperçu des facteurs et des approches thérapeutiques en cas de perte de poids insuffisante ou d’ augmentation du gain de poids secondaire.
Un risque accru de perte de poids supérieure à la moyenne avec détérioration de l’ état général, de la masse musculaire et une perte de force peut survenir dans le cadre d’ une dépression, d’ une adhésion insuffisante aux recommandations alimentaires, en particulier un apport insuffisant en protéines, du développement d’ un trouble alimentaire anorexique secondaire, d’ un abus d’ alcool, d’ une toxicomanie, de tumeurs ou de maladies chroniques, en particulier la BPCO. Un risque accru de malnutrition et de développement d’ une insuffisance pondérale existe surtout après les interventions fortement malabsorptives, surtout après le détournement biliopancréatique.

Carences en micronutriments

Après la chirurgie bariatrique, il existe un risque de carence en micronutriments dû aux faibles quantités d’ aliments ingérées et à la malabsorption, c’ est pourquoi une supplémentation en micronutriments à vie est essentielle (2,  3, 4). Pour répondre aux besoins des patients obèses, des préparations spécialement développées pour les patients obèses (par exemple WLS forte® de FitForMe ou Multi® de Bariatric Advantage) ou une préparation multivitaminée telle que Supradyn® peuvent être prises en alternance avec une vitamine complexe B. Des contrôles réguliers en laboratoire sont toujours indiqués afin de détecter et de traiter les défauts à un stade précoce. Il est important de noter que le risque de symptômes de carence dépend du type d’ opération, c’ est-à-dire que les opérations avec une forte composante malabsorptive, en particulier la chirurgie de dérivation biliopancréatique, mais aussi les opérations de dérivation excluant des sections plus longues de l’ intestin grêle (OAGB, BGRY avec une boucle bilio-pancréatique extra longue) ont un risque considérablement accru de carences en micronutriments. En particulier, le risque de carence en vitamines liposolubles (vitamines A, D, E, K) et de carences en sélénium ou en cuivre par ailleurs rares augmente considérablement. Après une intervention chirurgicale avec des composants purement restrictifs, comme par exemple une gastrectomie longitudinale ou une gastroplastie, le risque est nettement plus faible quoique toujours présent.
D’ autres raisons pour lesquelles les carences surviennent fréquemment après les opérations bariatriques sont les aversions gustatives, la mauvaise compliance des patients dans la prise de suppléments, l’ information insuffisante des patients, peut-être aussi un besoin accru pour d’ autres causes, par exemple une perte supplémentaire de fer due à l’ hyperménorrhée. Un autre problème est le fait que les suppléments ne sont pas pris en charge par l’ assurance maladie obligatoire. Les carences en micronutriments sont déjà fréquentes avant les opérations bariatriques et doivent être traitées déjà avant l’ opération.
Les carences les plus importantes après une opération bariatrique, y compris les symptômes et les conséquences, sont énumérées au tableau 2.
L’ obésité est en soi associée à une carence en vitamine D, de sorte qu’ une carence doit déjà être recherchée et traitée déjà avant l’ opération. L’ absorption du calcium chute fortement après un pontage gastrique. Pour la prophylaxie de l’ ostéoporose après un pontage gastrique et une chirurgie de dérivation biliopancréatique, une supplémentation en calcium-D3 est nécessaire pour couvrir le besoin accru et éviter le développement d’ une hyperparathyroïdie secondaire. Selon les directives de l’ American Society of Metabolic and Bariatric Surgery (ASMBS), un apport total en calcium de 1500 mg/jour après une gastrectomie sleeve, de 1500 à 2000 mg/jour après un pontage gastrique et de 1800 à 2400 mg après une dérivation biliopancréatique est recommandé, étant bien entendu que l’ apport alimentaire devrait continuer à couvrir autant que possible les besoins (2, 3). Il est important que la supplémentation en calcium D3 soit prise avec un certain décalage par rapport aux autres suppléments, en raison du risque d’ une inhibition mutuelle de l’ absorption.

La carence en zinc est fréquente après une chirurgie bariatrique. Dans une étude, 9 % des 324 patients présentaient déjà une carence en zinc en phase préopératoire, contre 42.5 % 12 mois après l’ opération. Les raisons en étaient, d’ une part, le manque de compliance à la supplémentation et, d’ autre part, une absorption de zinc fortement réduite. L’ absorption fractionnée du zinc diminue après pontage de 32,3  % en préopératoire à 13,6 % 6 mois en postopératoire et à 21  % 12 mois après l’ opération. Pour cette raison, des contrôles réguliers en laboratoire doivent également déterminer la teneur en zinc comme marqueur de l’ apport en oligo-éléments. Il convient de noter que le taux de zinc dans le sérum n’ est pas une méthode fiable pour diagnostiquer une carence en zinc, car seulement 0,1 % de la teneur totale en zinc est dissous dans le sérum et la concentration sérique en zinc peut également être affectée par une réaction de phase aiguë (5).
La carence en vitamine B1 mérite une attention particulière. Les réserves de vitamine B1 sont faibles, c’ est pourquoi une carence en vitamine B1 peut survenir après seulement 2 semaines environ si l’ apport est insuffisant et en cas de vomissements à répétition. La triade classique de Wernicke avec ataxie motrice, parésie des muscles oculaires et confusion n’ est pas toujours entièrement présente, mais une carence en vitamine B1 non traitée peut provoquer des déficits neurologiques irréversibles. Si une carence en vitamine B1 est suspectée, le traitement approprié (thiamine 100 mg iv) doit donc être initié avant que les résultats de laboratoire soient disponibles (6).

Carences en macronutriments

Une instruction nutritionnelle détaillée est indispensable après la chirurgie bariatrique, en particulier en ce qui concerne l’ apport en protéines, car une perte de masse musculaire supérieure à la moyenne est à craindre en cas d’ apport insuffisant. L’ objectif est un apport protéique de 1 g de protéines/KG de poids normal. La prise de boissons protéinées (shakes) est généralement nécessaire dans les premiers mois postopératoires afin d’ atteindre cet objectif et de répondre à la demande. Surtout après des opérations avec une malabsorption accrue, une malnutrition protéique sévère avec perte de force, une diarrhée chronique et un œdème généralisé peuvent encore survenir des années après l’ opération. Une hypalbuminémie est souvent observée en laboratoire. Sur le plan thérapeutique, un apport protéique à forte dose peut être obtenu, selon la situation clinique, par des suppléments alimentaires, des compléments protéiques, dans les cas graves également par l’ administration de protéines par une sonde gastrique, ou, si nécessaire, par voie parentérale (4).

Symptômes gastro-intestinaux après une chirurgie bariatrique

Les symptômes gastro-intestinaux après une chirurgie bariatrique sont fréquents, le plus souvent avec plus d’ une diarrhée par semaine chez 23 % des patients, le dumping chez 13 %, des douleurs abdominales chez 10 %, une dysphagie chez 5  %, des vomissements chez 4 %. Une fréquence > 1 x mois est rapportée pour la diarrhée chez 24 % des patients, le dumping chez 27 %, les douleurs abdominales chez 15 %, les vomissements chez 15 %, la dysphagie chez 7 % (7). Les causes particulières de la douleur après une chirurgie bariatrique et le syndrome de dumping sont brièvement expliquées ci-dessous.

Douleurs

Des douleurs survenant après une chirurgie bariatrique peuvent avoir des causes multiples. Une anamnèse précise et l’ examen clinique est généralement utile et capitale. Une clarification précise est importante afin de ne pas rater d’ éventuelles complications graves. Le tableau 3 montre le diagnostic différentiel des douleurs abdominales après une chirurgie bariatrique.
Sur la base de la clinique et de l’ anamnèse, un diagnostic suspect est posé, ce qui détermine la suite de la clarification (tableau 4).
La cause la plus dangereuse de douleurs abdominales est l’ apparition d’ une obstruction des parties exclues de l’ intestin grêle avec accumulation dans l’ estomac exclu, ce qu’ on appelle l’ obstruction du pontage. Les patients éprouvent d’ importantes nausées, mais ne peuvent pas vomir, de même que des douleurs dans la partie supérieure de l’ abdomen ou du dos. Les patients sont extrêmement stressés et donc tachycardes. Le diagnostic est fait par CT abdominal, une radiographie abdominale conventionnelle pouvant être faussement négative en raison d’ un manque de niveau liquides. Dans cette situation une intervention chirurgicale est indiquée sans délai. Une cause beaucoup plus fréquente de douleur abdominale est la hernie interne. Cette complication est favorisée par la réduction de la graisse mésentérique et ne se produit donc généralement qu’ après une perte de poids importante. Une anse de l’ intestin grêle est herniée au niveau des lacunes mésentériques, soit entre le mésocôlon transverse et le méso de l’ anse montée, soit au niveau de l’ espace dit de «Petersen», ce qui peut entraîner une obstruction et une ischémie de l’ intestin grêle. Les symptômes typiques sont des douleurs sévères épigastriques ou de l’ abdomen moyen avec exacerbation postprandiale, dans certains cas des vomissements; en phase précoce les symptômes sont souvent spasmodiques, évoluant par la suite dans une douleur permanente. Une hernie interne peut cependant également se présenter de manière atypique, c’ est-à-dire avec seulement une douleur intermittente. La fréquence indiquée dans la littérature est d’ environ 2,5 à 10 % (8). Le CT abdominal est utile pour le diagnostic, avec une attention particulière accordée à une composante de rotation des vaisseaux mésentériques («whirl sign»). Une intervention chirurgicale rapide par un chirurgien expérimenté en bariatrie est indiquée.

Les ulcères de la muqueuse gastrique sont divisés en ulcères précoces et tardifs (9). Habituellement, les ulcères sont situés dans la zone de l’ anastomose. Les ulcères précoces apparaissent jusqu’ à 10 mois après l’ opération. La cause la plus probable est l’ ischémie ou l’ inflammation. Les facteurs de risque pour le développement d’ un ulcère tardif sont la contamination acide du jéjunum, par exemple par l’ élargissement de la poche, l’ abus de nicotine, la prise d’ AINS et le diabète sucré. La clinique typique pour les ulcères est une douleur épigastrique sévère pendant l’ alimentation. Pour établir le diagnostic, une endoscopie doit être effectuée, le traitement consiste en un traitement par inhibiteur de la pompe à protons (IPP) pendant des mois. Une étude a montré que les formulations solubles, c’ est-à-dire les capsules ouvertes permettent une guérison plus rapide de l’ ulcère que les capsules non ouvertes (10). Une infection par Helicobacter pylori, éventuellement aussi une persistance malgré l’ éradication préopératoire, doit être recherchée et traitée si elle est présente. L’ abstinence de nicotine est fortement recommandée.

Dumping

Un symptôme courant après un pontage gastrique est l’ apparition de symptômes de dumping. Nous faisons la distinction entre le dumping précoce et le dumping tardif. Les mécanismes physiopathologiques du syndrome du dumping ne sont pas bien élucidés. Un des mécanismes possibles est une vidange rapide de la poche de l’ estomac. Le transfert rapide d’ aliments hautement osmolaires, en particulier de glucides isolés, dans l’ anse jéjunale montée déclenche un afflux de liquide dans la lumière intestinale et donc une hypotension, parfois jusqu’ au collapsus, des étourdissements, de la fatigue, des crampes et de la diarrhée. Ce dumping précoce se produit de 0 à 30 minutes après le début du traitement. Le dumping tardif se produit 90 à 120 minutes après un repas contenant des glucides et est causé par une réponse insulinique excessive à la forte concentration de glucides dans l’ intestin grêle, entraînant une hypoglycémie avec les symptômes classiques de la transpiration, des tremblements, une altération de la vision et une diminution de la concentration.
Si les symptômes ne sont pas clairs, il est utile d’ obtenir un protocole de l’ alimentation et des symptômes, combiné avec mesure de glycémie. La surveillance continue de la glycémie peut également être utile en cas d’ incertitude. Sur le plan thérapeutique, il est très important de suivre les recommandations diététiques (pas de repas de glucides purs, intervalle de 30 minutes entre les repas, petits repas réguliers, augmentation de la consommation de fibres, éventuellement de fibres solubles, par ex. Optifiber®). Si les symptômes persistent, on peut essayer un traitement médicamenteux à l’ acarbose pour stabiliser la glycémie ; dans les cas de résistance au traitement, l’ utilisation de liraglutide ou d’ octréotide est également recommandée. En cas de perte de poids insuffisante et de symptômes de décharge, l’ insertion d’ un anneau en silicone, appelé anneau de Fobi, autour de la poche gastrique peut être envisagée. Il en résulte une restriction accrue, une vidange plus lente de la poche et donc une amélioration des symptômes de dumping. Dans le cas d’ un dumping résistant au traitement et d’ une perte de poids supérieure à la moyenne, les experts croient que l’ administration d’ une alimentation entérale continue par le biais d’ un cathéter de gastrostomie dans l’ estomac exclu constitue une option thérapeutique. La dernière option thérapeutique est la réversion du pontage, mais il faut écarter les rares diagnostics différentiels d’ hypoglycémie, comme la présence d’ un insulinome ou d’ une insuffisance surrénalienne. Les médicaments, en particulier la venlafaxine, peuvent également augmenter l’ incidence de l’ hypoglycémie.

Dr Martina Gebhart

Médecin-cheffe Médecine interne / Endocrinologie
Claraspital Centre de Nutrition / Clarunis Bariatric Reference Centre
Lukas Legrand-Strasse 4
4058 Bâle

martina.gebhart@claraspital.ch

L’ auteur n’ a déclaré aucun conflit d’ intérêts en rapport avec cet article.

  • Les opérations bariatriques nécessitent un suivi tout au long de la vie, qui a lieu dans des centres spécialisés en coopération avec les médecins traitants.
  • Les éléments importants pour le suivi comprennent la progression du poids, la détection et le traitement des carences en macro et micronutriments, la détection et l’ évaluation de problèmes spécifiques tels que la douleur et le dumping.
  • Les carences les plus courantes après l’ obésité sont la carence en vitamine D3, la carence en fer, la carence en vitamine B12 et la carence en zinc.

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Un symptôme fréquent impactant la santé et la qualité de vie

La nycturie chez la personne âgée est un symptôme fréquent avec des conséquences importantes sur l’  état de santé et la qualité de vie. L’  étiologie est souvent multifactorielle et il est important d’  avoir une vision globale qui va conduire à des démarches diagnostiques et thérapeutiques appropriées.

Selon la définition de la société internationale de continence, la nycturie est le besoin de se réveiller la nuit pour uriner, chaque miction étant précédée et suivie d’  une période de sommeil (1).
La définition a varié, ce qui rend difficile l’ établissement d’ un chiffre de prévalence précis. Environ 60 % des sujets de plus de 70 ans se lèvent au moins deux fois la nuit (2) et les personnes qui urinent trois fois ou plus durant la nuit ont un excès de mortalité significativement plus élevé (3). La nycturie est-elle une maladie ou une conséquence du vieillissement physiologique? L’   approche de la nyct-
urie comme une maladie a l’  intérêt d’  inciter le médecin à réaliser une recherche étiologique.
L’  étiologie est souvent multifactorielle et comprend des maladies systémiques, des affections de voies urinaires basses, des troubles du sommeil et des facteurs comportementaux rendant complexe la prise en charge. Les différents spécialistes (urologues, gynécologues, endocrinologues, neurologues) ont souvent une approche spécifique basée sur leur domaine de compétence. Pour la prise en charge d’  un patient âgé souffrant de nycturie, il est important d’  avoir une vision globale du problème. Après une anamnèse soigneuse et un examen physique, en particulier cardio-vasculaire et urogénital, le calendrier mictionnel représente un outil de base validé par l’   ICUD-SIU (International Consultation on Urological Diseases-Société Internationale d’  Urologie) pour le bilan de la nycturie qui nous permet de récolter les informations précises sur les symptômes urinaires dans les conditions de vie quotidienne. Il est nécessaire de bien définir les éléments qui participent à la nycturie et sont renseignés par le calendrier mictionnel (tab.1).

Un calendrier mictionnel inclut :
– Le volume et le nombre de mictions sur 24-48h
– Le début et la fin du sommeil
– L’  apport hydrique : type, volume et temps

Pathophysiologie et classification

Selon le calendrier mictionnel de 24 h et le mécanisme de la nycturie, nous catégorisons les maladies déclenchantes en quatre groupes (fig. 1, 4, 5, 6):
1. Polyurie globale
2. Polyurie nocturne
3. Diminution de la capacité vésicale fonctionnelle
4. Mixte

Polyurie globale signifie une augmentation de débit urinaire à plus de 40 ml / kg / 24 h (1). La cause la plus fréquente est la polydipsie primaire. La polyurie est un mécanisme compensatoire dans le cadre d’  une décompensation diabétique hyperosmolaire, elle représente la cause la plus fréquente d’  une polyurie globale chez les personnes âgées. Le diabète insipide se manifeste également par une polyurie. Chez les personnes âgées, cette pathologie est relativement rare.

Polyurie nocturne

La polyurie nocturne est présente chez 80 % des patients souffrant d’  une nycturie et peut être facilement ratée si le calendrier mictionnel n’  est pas complété (4, 5, 6).
Chez les personnes âgées de plus de 65 ans, nous parlons de polyurie nocturne lorsque la diurèse nocturne représente plus de 33 % de la diurèse totale sur 24 h. Chez les individus jeunes une polyurie nocturne est significative quand la diurèse nocturne représente 20 % de la diurèse totale (1, 4).
Différentes situations peuvent conduire à la polyurie nocturne. Chez les personnes âgées souffrant de nycturie, les taux d’  ADH nocturne sont souvent diminués en raison de la perte ou l’  atténuation du rythme nycthéméral de production d’  ADH et de la diminution de la réponse hypothalamique aux variations de l’  osmolarité (7).
La sécrétion d’  ADH peut être altérée également par des lésions du système nerveux central (SNC) avec atteinte de l’ axe hypothalamo-pituitaire et altération du rythme circadien (8). L’ augmentation de la diurèse nocturne peut également être provoquée par une inhibition de l’  effet de l’  ADH au niveau rénal induite par prostaglandines E-2, l’  hypercalcémie, l’  hypokaliémie, le lithium et les tétracyclines (6).
D’  autres pathologies, telles que l’ in-suffisance cardiaque, l’ insuffisance veineuse, l’ hypo-albuminémie, le syndrome néphrotique, peuvent induire une nycturie.
L’  augmentation significative de BNP (brain natriuretic peptide) et ANP (Atrial natriuretic peptid) chez l’ insuffisant cardiaque stimule la natriurèse et l’  excrétion d’  eau dans les urines. Dans ce contexte, une place à part doit être faite au syndrome de l’  apnée obstructive du sommeil (SAOS). L’  hypoxémie chronique induit une vasoconstriction pulmonaire qui augmente la pression intra-murale de l’  oreillette droite et provoque la sécrétion d’  ANP (4, 5). La prise de diurétiques et d’ anticalciques le soir provoque une augmentation de la diurèse nocturne et favorise la nycturie.

Diminution de la capacité vésicale fonctionnelle

Le vieillissement de l’  appareil urinaire peut se manifester par une dénervation du muscle de la vessie, une prolifération des fibres collagènes au niveau de la paroi vésicale et une diminution des fibres musculaires lisses, entraînant une perte d’  élasticité de la vessie et une perte de contractilité.
Les pathologies des voies urinaires basses se manifestent souvent avec une pollakiurie, accompagnée ou non d’ autres symptômes. Toutes les pathologies générant une hyper-activité vésicale (AVC, lésion médullaire, alcool, caféine), ou au contraire une hypoactivité vésicale (lésion médullaire, queue de cheval) et une vessie neurogène ainsi que les pathologies structurelles (fibrose, néoplasie, calculs, et obstacles sous vésicaux) (fig. 1) vont créer une diminution de la capacitance vésicale et se manifester par une nycturie. En cas d’une vessie hyperactive ou d’un détrusor fortement épaissi avec une compliance réduite, la perte de capacité de la vessie peut être absolue. Une diminution fonctionnelle est également observée en cas de trouble de vidange et d’urine résiduelle.

Nycturie mixte

Les patients présentant une nycturie ont souvent plusieurs étiologies. Beaucoup sont atteints de polyurie nocturne et de pathologies provoquant la diminution de la capacité vésicale fonctionnelle.

Impact de la nycturie chez les personnes âgées

L’  impact de la nycturie sur la santé et la qualité de vie est très important. L’  augmentation progressive du nombre de mictions a des effets négatifs sur le sommeil et la qualité de vie (9, 10). Les chutes liées à une nycturie augmentent significativement le nombre de fractures du col du fémur (11). L’  impact sur la santé du proche aidant et la décision d’  une entrée en institution sont aussi à considérer (12).

Prise en charge

La prise en charge de la nycturie chez la personne âgée nécessite l’  identification du mécanisme avec une anamnèse bien ciblée sur les pathologies potentiellement responsables, ainsi que sur l’  impact sur la qualité de vie. La recherche de syndromes gériatriques associés favorisant la nycturie s’ avère très importante dans l’  orientation diagnostique (12, 16) Les troubles du sommeil sont souvent la cause d’une pseudonycturie donc une anamnèse de sommeille approfondie est cruel dans le détermination de la prise en charge. Dans ce sens, il existe de nombreux outils de prise en charge validés, tels que le questionnaire de consultation internationale d’  incontinence, Pittsburgh sleep quality Index, Nocturia – specific Qol (13). Une anamnèse sociale auprès de l’ entourage est très utile pour déterminer la suite de la prise en charge.
Le calendrier mictionnel est un outil très fiable dans la détermination de la nycturie et représente la base de la démarche diagnostique après l’  évaluation clinique (fig. 1). Un ultrason abdominal doit toujours être effectué dans la recherche d’  un résidu post-mictionnel (> 200 ml). Les examens de laboratoires suivants sont recommandés : électrolytes, urée, créatininémie, glycémie, BNP ou NT-proBNP la recherche d’ une bactériurie, d’ une leucocyturie ou d’ une hématurie. D’autres pathologies de la vessie doivent également être exclues (tumeurs de la vessie, inflammations chroniques abactériennes).
Certains médicaments peuvent favoriser la nycturie par plusieurs mécanismes (tab. 2). C’  est pourquoi une révision du traitement médicamenteux est recommandée (13).

Modifications comportementales et du mode de vie

L’  environnement pour obtenir un bon sommeil doit être optimisé en accordant une attention particulière à la température, le bruit, l’  éclairage et les heures du coucher. L’  exercice physique régulier peut conduire à un sommeil plus profond et une augmentation de la capacité de la vessie. La gestion des facteurs psychologiques, financiers et familiaux améliore aussi la qualité du sommeil (14, 19). Une réduction de consommation de boissons avant le coucher, en particulier celles stimulant le détrusor (boissons caféines ) est recommandée. La consommation d’alcool a un effet inhibiteur sur le détrusor et peut conduire à la rétention urinaire. L’  horaire de la prise des diurétiques doit être adapté afin de limiter autant que possible une polyurie nocturne iatrogène. En cas d’  œdèmes des membres inférieurs liés à une insuffisance veineuse, les diurétiques s’ avéreront inappropriés, ils peuvent en effet être responsables d’  orthostatisme, de chutes, d’  un état confusionnel et de déshydratation (12, 15, 18). Pour ces patients, l’ utilisation de bas de compression et l’ élévation des jambes dans l’ après-midi s’  est avéré efficace.

Traitement médicamenteux

Chez les patients diabétiques, une diminution de la glycémie sous le seuil rénal est à obtenir. Chez les patients souffrant d’  une polyurie nocturne provoquée par des maladies systémiques (insuffisance cardiaque, insuffisance rénale, SAOS), une amélioration des symptômes est observée après identification de la cause et instauration d’  un traitement étiologique.
Le desmopressine (analogue d’  hormone anti-diurétique) a démontré son efficacité en cas de polyurie nocturne. Avec une dose optimale de 0.1-0.2 mg / jour, une diminution des symptômes de la nycturie nocturne et une augmentation de la durée du sommeil ont été observées dans différentes études (19, 20). En raison du risque élevé d’  hyponatrémie et de la contre-indication en cas d’  insuffisance cardiaque et d’ insuffisance rénale, l’  utilisation chez les patients âgés fragiles reste très limitée et discutable (21, 12). En cas d’  hyperplasie bénigne de la prostate, le traitement standard est alpha-1-bloquants (la silodosine, la tamsulosine) associé à un anticholinergique (chlorure de trospium, solifénacine) ou souvent un agoniste bêta-3-adrénergique (mirabégron).
Les patients avec nycturie due à la diminution de la capacité vésicale nécessitent une évaluation et suivi urologique. Chez les hommes souffrant d’  obstruction de la vessie, les traitements sont moins efficaces sur la nycturie contrairement aux obstructions sous-vésicales (hypertrophie prostatique). Les α-1-bloquants ont montré une légère amélioration du nombre d’ épisodes nocturnes. L’  effet d’  amélioration est à mettre en corrélation avec la gravité de la nycturie. Toutefois, les α-bloquants doivent être prescrits avec prudence, en particulier chez les personnes âgées en raison d’ une hypotension posturale souvent associée.
Pour l’  hyperactivité vésicale, les anticholinergiques sont bien validés, même si leur efficacité est loin d’  être absolue, ils peuvent néanmoins favoriser une rétention urinaire ou des états confusionnels notamment en cas de troubles cognitifs préexistants. Dans tous les cas, un suivi urologique est indispensable pour bien contrôler l’effet de traitements médicamenteux et le résidu urinaire éventuel. En cas d’inefficacité du traitement une clarification urodynamique pour évaluer la fonction vésicale reste à effectuer.

Chirurgie de la prostate

La chirurgie prostatique (TURP) montre une efficacité sur la nycturie surtout chez les patients jeunes. Les résultats chirurgicaux sont moins efficaces en cas d’  une nycturie mixte avec polyurie nocturne (13). Les changements inflammatoires de la prostate jouent également un rôle importante raison la quelle l’indication et l’avantage d’un TUR-P reste objet d’une évaluation urologique.

Dr Stojan Todorov

Service de la gériatrie aiguë et réadaptation gériatrique
HFR-Riaz
Case postale 70
1632 Riaz

stojan.todorov@h-fr.ch

Dr André Laszlo

Médecin-chef
Service de la gériatrie aiguë et réadaptation gériatrique
HFR-Riaz
Case postale 70
1632 Riaz

Les  auteurs n’    ont aucun conflit d’    intérêts en relation avec cet article.

  • Chez la personne âgée la nycturie est un problème fréquent impactant la santé et la qualité de vie de manière très importante.
  • L’  étiologie est souvent multifactorielle.
  • Une anamnèse soigneuse, un examen physique ciblé et le calendrier mictionnel permettent déjà de poser un diagnostic et d’  initier un traitement dans bon nombre de cas en médecine de premier recours.

1. Van Kerrebroeck et al. The standardization of terminology in nocturia: report from the Standardisation Subcommittee of the Int Continence Soc Neurourol Urodyn. 2002; 21:179-183.
2. Ruud Bosch JLH, The Prevalence and Causes of Nocturia J Urol 2010; 184: 440-446
3. Asplund R.. Mortality in the elderly in relation to nocturnal micturition. BJU Intl 1999; 84: 297–301
4. Weiss JP et al. Nocturia in adults: etiology and classification. Neurourol Urodyn. 1998;175: 467-72.
5. Weiss JP et al. Evaluation of the etiology of nocturia in men: the nocturia and nocturnal bladder capacity indices. Neurourol. Urodyn 1999; 18: 559-65.
6. Weiss JP et al. New Aspects of the Classification of Nocturia Curr Urol Rep 2008; 9:362–367
7. Asplund R and Aberg H. Diurnal variation in the levels of antidiuretic hormone in the elderly. J Intern Med 1991; 229:131-134
8. Ozawa T., Suprachiasmatic nucleus in a patient with multiple system atrophy with abnormal circadian rhythm of arginine-vasopressin secretion into plasma. J Neurol Sci. 1998; 154: 116-21
9. Coyne KS. The prevalence of nocturia and its effect on health-related quality of life and sleep in a community sample in the USA. BJU Int. 2003;92:948-954
10. Tikkinen KAO. Nocturia Frequency, Bother, and Quality of Life: How Often Is Too Often? A Population-Based Study in Finland EAU Eur Urol 2010 488-498
11. Temml C. Nocturia is an Age-independent Risc factor for Hip Fractures in Men. Neurourol. Urodyn 2009 28:949-952
12. Da Costa A, Lang O. Nycturie du patient âgé: en pratique. Rev Med Suisse 2017 13:1946-51
13. Gulur DM. Nocturia as a manifestation of systemic disease BJU Int 2011 107, 702-713
14. Burgio KL. Behavioral Treatment Options for Urinary Incontinence Gastroenterol 2004;126:S82–S89
15. Kazumasa T. The Relationship Between Nocturnal Polyuria and the Distribution of Body Fluid: Assessment by Bioelectric Impedance Analysis J Urol 2009;181:224
16. FitzGerald MP. The Association of Nocturia With Cardiac Disease, Diabetes, Body Mass Index, Age and Diuretic Use: Results From the BACH Survey. J Urol 2007; 177:1385-1389
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18. Swithinbank L et al., The effect of fluid intake on urinary symptoms in women J Urol 2005; 174: 187-189
19. Asplund, R et al., P. Desmopressin for the treatment of nocturnal polyuria in elderly subjects: A dose titration study. Br J Urol 1998; 82, 642- 646
20. Lose, G. Clinical experiences with desmopressin for longterm treatment of nocturia. Journal of Urology, 172, 1021-1025. (2004).
21. Rembratt et al. Desmopressin treatment in nocturia: An analysis of risk factors for hyponatremia. Neurourology and Urodynamics, 25, 105-109. (2006).
22. Taha DE, Oral desmopressin in nocturia with benign prostatic hyperplasia: A systematic rewiew of the literature. AJU 2018 16, 404-410

Automédication et douleur

L’ automédication pour des symptômes douloureux est très fréquente, souvent parfaitement acceptable, mais jamais dénuée de tout risque ni de dérive irrationnelle. Cette pratique n’ est souvent pas connue du médecin traitant. Cet article revoit différents enjeux de l’ automédication concernant les antalgiques et propose quelques recommandations pour le praticien.

On trouve plusieurs définitions de l’ automédication dans la littérature médicale, comme par exemple « le comportement par lequel un individu recourt de sa propre initiative à un médicament, c’ est-à-dire à une substance dont il attend un effet de type pharmacologique bénéfique pour sa santé, que ce soit en vue d’ une prévention primaire, d’ une amélioration de sa condition ou de ses performances, du soulagement de ses symptômes ou d’ une modification du cours d’ une maladie qui l’ affecte  » (1). L’ automédication englobe tant la prise de produits achetés en pharmacie sans ordonnance (Over The Counter, OTC) que la réutilisation de médicaments précédemment prescrits ou le partage d’ un traitement donné à un proche.

Épidémiologie

L’ ampleur de l’ automédication dans la population est difficile à estimer précisément. Elle varie fortement entre les pays, selon les cultures et les politiques de santé (elle est typiquement importante aux Etats-Unis, où les médicaments sont largement disponibles dans le commerce). Selon l’  Enquête Suisse sur la Santé (ESS 2017), une personne sur deux prend des médicaments chaque semaine et 16 % de ces médicaments sont pris sans prescription médicale. La Suisse vient ainsi en tête des pays européens concernant la consommation de médicaments non prescrits (2). De nombreuses études indiquent que l’ automédication est plus fréquente chez les femmes et augmente avec l’ âge (1).
Les antalgiques représentent la classe pharmaceutique la plus largement consommée (24 % des sondés ont pris un antidouleur dans les 7 jours précédant l’ enquête ESS 2017), à hauteur d’ environ 50 % en automédication. Les substances les plus utilisées sont le paracétamol et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) (3, 4).
Une récente enquête belge portant sur la consommation d’ antalgiques en OTC relève que la majorité des participants avaient consulté un médecin pour leur plainte douloureuse actuelle et qu’ environ 75  % étaient au courant du diagnostic retenu par le médecin (migraine, suivie de l’ arthrose, des hernies et de la fibromyalgie par ordre de prévalence). Parmi ces patients, 62 % utilisaient uniquement un traitement non prescrit et 38 % combinaient des médicaments non prescrits avec une antalgie prescrite par le médecin (4).

Motifs de l’ automédication

Comme le montre l’ anthropologue Sylvie Fainzang, la pratique de l’ automédication est essentiellement influencée par les connaissances acquises auprès des professionnels de santé, les expériences propres des individus et leurs représentations du médicament, « dont les logiques symboliques court-circuitent parfois les logiques pharmacologiques » (5).
Plusieurs raisons peuvent amener un patient à l’ automédication : des considérations pratiques telles que la difficulté d’ obtenir un rendez-vous médical, des conditions économiques difficiles, l’ exigence d’ une réponse thérapeutique immédiate, des considérations en lien avec la maladie (que le trouble soit interprété comme d’ importance secondaire, ou qu’ il suscite au contraire la crainte d’ une maladie grave, ou encore qu’ il soit habituel et son traitement bien connu du patient). Choisir soi-même sa médication représente aussi une forme de recherche d’ autonomie. Enfin la crainte, le scepticisme ou une posture critique vis-à-vis de la médecine peuvent également déboucher sur l’ automédication (3-11).
Insistons sur le fait que la prise de médicaments en automédication est régulièrement passée sous silence par le patient lors des consultations médicales. Plusieurs craintes peuvent retenir le patient : d’ avoir mal fait, de dévoiler une faiblesse, de froisser le prescripteur ou de rester incompris (1).

Bénéfices et risques des antalgiques en automédication

Tant qu’ elle permet au patient de se responsabiliser et de renforcer sa confiance dans ses capacités à prendre en charge sa santé, l’ automédication mérite d’ être encouragée. Politiquement, elle est vue comme un moyen de baisser les coûts de la santé en réduisant les consultations chez le médecin. Une facilitation de l’ automédication va résulter de la révision des catégories de remise et de l’ assouplissement de la dispensation en pharmacie, entrés en vigueur en 2019 en Suisse.
Cependant, les risques associés à l’ automédication sont multiples : difficultés de l’ autodiagnostic, effets indésirables, interactions pharmacocinétiques ou pharmacodynamiques, cumul de principes actifs, surdosage, erreur de produit, de posologie ou de durée de traitement, risque d’ abus ou de dépendance (3). Ces risques sont plus élevés chez les patients âgés, souvent polymorbides, polymédiqués et plus sensibles aux effets indésirables. Soulignons également les risques liés à l’ achat de médicaments sur internet, dont les compositions exactes ne sont souvent ni connues ni vérifiées.
Les antidouleurs viennent en tête concernant ces risques. Ainsi en France, jusqu’ à 70 % des annonces de pharmacovigilance pour les médicaments non prescrits concernent des antalgiques (6). L’ hépatotoxicité du paracétamol et les hémorragies liées à l’ aspirine ou aux AINS sont bien connus. La prise d’ AINS augmente aussi les valeurs tensionnelles et, si elle n’ est pas connue du médecin, favorise l’ intensification du traitement antihypertenseur (12).
Un autre risque spécifique aux antalgiques est la survenue de céphalées par abus médicamenteux : la consommation chronique d’ antidouleurs pour des céphalées primaires (migraines, céphalées de tension) peut conduire à une augmentation de la fréquence et de l’ intensité des douleurs et induire ainsi un cercle vicieux, transformant l’ antalgique en agent étiologique des céphalées.
La grossesse représente une période à risque pour l’ automédication, notamment pour les antalgiques puisque les AINS sont contre-indiqués à partir du 2ème trimestre. La prise de médicaments hors prescription est cependant fréquente dans cette population : selon une étude française, elle concerne un quart des patientes, incluant 19 % d’ antalgiques (13) ; de plus, un tiers des femmes ignoraient en 2008 le risque associé à la prise d’ AINS en fin de grossesse (14). Si Internet représente maintenant la première source d’ information vers laquelle se tournent les futures mères pour la sécurité des médicaments, cela reste non dénué de risques : une revue des échanges sur des forums français entre 2008 et 2012 au sujet de la sécurité des traitements durant la grossesse souligne la mauvaise qualité de ces conseils glanés sur internet (15).

Prévention des risques et recommandations

Détection de l’ automédication et information au patient

L’ utilisation de médicaments en automédication doit être systématiquement questionnée lors des consultations médicales, particulièrement dans l’ investigation des causes possibles de nouveaux symptômes et lors de la prescription de nouveaux médicaments. Il est recommandé d’ accueillir ces informations avec tact, empathie et sans préjugé. En cas de recours déraisonnable au médicament, on tentera patiemment de déconstruire le réflexe symptôme-prise médicamenteuse en informant le patient des risques encourus.
De plus, une information de prévention adaptée au contexte clinique mérite d’ être donnée concernant certains risques liés à l’ automédication, pour susciter les bons réflexes en cas de recours à des médicaments non prescrits. Un exemple typique concerne l’ éviction des AINS en cas d’ insuffisance rénale. La posture du médecin peut être délicate entre désir de responsabiliser le patient face à sa prise en charge et conseils restrictifs sur sa prise médicamenteuse.

Communication médecin-patient et relation thérapeutique

Seul un dialogue ouvert permettra de favoriser l’ autonomie du patient tout en prévenant les risques liés à l’ automédication. La décision partagée (Shared Decision Making, SDM) telle que recommandée par la FMH est l’ idéal à viser. Selon ce modèle, médecin et patient décident ensemble d’ un traitement spécifique, en prenant en compte systématiquement les préférences du patient dans la démarche. Le tableau 1 propose une liste non-exhaustive des attitudes propices au SDM et à la formation du patient sur sa maladie (16).

Littératie de la médication

La promotion des compétences en santé des patients, en particulier la littératie de la médication joue un rôle important dans la prévention des risques. Ce concept décrit « la capacité de l’ individu à obtenir, évaluer et comprendre les informations à propos de leurs médicaments, dans le but de prendre une décision appropriée concernant l’ utilisation adéquate de leur médication, indépendamment de la manière dont le contenu est délivré » (17, 18). Différentes techniques à disposition des professionnels de santé permettent d’ améliorer cette littératie (17, 19-22).

Collaboration médecin-pharmacien

Les pharmaciens jouent un rôle important dans la promotion de la littératie en santé. Ils sont aussi susceptibles de détecter un risque lié à l’ automédication et de contacter le médecin prescripteur (23). Une bonne collaboration médecin-pharmacien favorise la sécurité de l’ automédication (23, 24). On encouragera toutefois une attitude critique face aux biais commerciaux d’ une littérature promotionnelle souvent diffusée par les canaux pharmaceutiques.

Cas particulier des douleurs chroniques

De manière générale, l’ automédication est déconseillée pour traiter des affections chroniques, au vu des risques associés. Or les patients ont fréquemment recours à cette pratique lors de douleurs chroniques, notamment de migraines (4). Il vaut la peine de dispenser des conseils tels que « si sur un mois vous prenez plus de deux antalgiques par semaine, consultez votre médecin ». A ne pas oublier, les approches non médicamenteuses complémentaires dans la prise en charge de ces patients (approches corporelles ou psychologiques) qui peuvent procurer une réelle amélioration de la qualité de vie (10, 25-27).

Dre Léonore Diezi

Service de pharmacologie clinique
Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV)
Rue du Bugnon 17
1011 Lausanne

leonore.diezi@chuv.ch

Aurélia Monney

psychologue
Service de pharmacologie clinique
Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV)
Rue du Bugnon 17
1011 Lausanne

aurelia.monney@chuv.ch

Pr Thierry Buclin

Service de pharmacologie clinique
Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV)
Rue du Bugnon 17
1011 Lausanne

thierry.buclin@chuv.ch

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d’ intérêt en relation avec l’ article.

  • Admettre que le recours à l’ automédication est une pratique très courante
  • Favoriser un climat relationnel dans la consultation propice à sa détection
  • Inclure l’ étiologie médicamenteuse dans le diagnostic différentiel de tout trouble nouveau ou aggravé
  • Obtenir et réviser périodiquement la liste complète des médicaments, prescrits et non prescrits
  • Informer régulièrement le patient sur le recours rationnel et la prévention des risques concernant l’ automédication

L’ alcoolisme des seniors au féminin

Ancré dans la société, l’ alcool fait partie intégrante de notre quotidien. La consommation abusive chez les personnes âgées passe encore trop souvent inaperçue, surtout chez les femmes. Certaines femmes développent un alcoolisme tôt dans l’ existence, qui s’ améliore ou se péjore en vieillissant selon leur environnement de vie. D’ autres femmes développent une dépendance à l’ alcool à l’ âge avancé, qui se combine avec une humeur anxio-dépressive et peut entraîner des conséquences dévastatrices.

Une large étude européenne sur la prévalence des troubles psychiatriques à l’ âge avancé a récemment montré que le trouble d’ utilisation de l’ alcool (AUD) est parmi les plus fréquents (1). Selon le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-V), un trouble d’ utilisation de l’ alcool (AUD) est un mode problématique d’ utilisation de l’  alcool qui conduit à une altération du fonctionnement ou une souffrance cliniquement significative, survenant en 12 mois, et témoignant d’ au moins deux des douze symptômes résumés dans le Tableau 1 (APA, 2).
Selon cette étude, 81 % des personnes âgées de 65 à 85 ans rapportent une consommation d’ alcool dans leur vie habituelle. Parmi ces consommateurs, 5.3% (9.1 % à Genève) présentent un AUD développé au cours des 12 derniers mois, et 8.8 % (14.1 % à Genève) un AUD développé plus tôt dans leur vie. Cette entité est cinq fois plus fréquente chez les hommes que chez les femmes, avec une prévalence deux fois plus grande au troisième (65-70 ans) qu’ au quatrième âge (80-85 ans) (1). En effet, plusieurs personnes âgées décèdent des complications somatiques de leur consommation abusive d’ alcool avant d’ atteindre 80-85 ans (maladies cardiaques, démence, chutes).

Une habitude ou un trouble ?

Malgré la forte prévalence et les conséquences néfastes, la consommation d’ alcool reste largement banalisée chez les 55 + ans. Elle permet de maintenir une vie sociale et un réseau amical. Les personnes âgées consomment par habitude et routine avec leur partenaire, des proches ou des amis. Ces habitudes sont souvent la poursuite de patterns de consommation acquis plus tôt dans la vie. Dans ces contextes, la consommation reste en général en-dessous du seuil d’ une consommation à risque selon les critères de l’ OMS (voir Tabl. 2, WHO, 3), à l’ exception de certains évènements sportifs tels que les matchs de foot par exemple, et elle est identifiée comme un choix de vie avec une connotation positive et une adéquation aux normes sociales (4). En miroir, le fait de vivre seul double le risque de développer un trouble d’ utilisation d’ alcool (1). La retraite et le manque de moyens financiers ont un effet ambigu sur la consommation. Ils la favorisent chez certaines personnes, alors qu’ ils la baissent chez d’ autres, à cause de la diminution des rencontres sociales. Kelly et coll. (4) soulignent que la consommation d’ alcool est considérée comme bénéfique par plusieurs personnes âgées, notamment pour les maladies cardiaques, pour soulager les symptômes physiques, ou encore pour se détendre. Les personnes âgées rapportent un certain scepticisme envers les risques potentiels de l’ alcool et les mises en garde de la part des médecins.

Femmes et troubles d’ utilisation d’ alcool

Un effet télescopique de la consommation d’ alcool a été suggéré chez les femmes. Bien qu’ elles commencent à consommer de l’ alcool plus tard dans la vie que les hommes, leur consommation évoluerait plus rapidement d’ une consommation abusive vers une dépendance à l’ alcool en comparaison avec les hommes. Cet effet télescopique a été mis en évidence en Asie, mais n’ a pas pu être reproduit dans d’ autres pays, notamment aux Etats-Unis (5). Au contraire, les normes sociales concernant la consommation d’ alcool chez les femmes ont évolué au cours des siècles. Cette évolution tend à atténuer les différences de genre dans des cohortes plus récentes (5, 6, 7).
A cause des différences relatives au métabolisme de l’ alcool, mais aussi de facteurs psycho-socio-culturels, les femmes sont davantage à risque pour des consommations excessives d’ alcool que les hommes à tout âge. Elles présentent des conséquences physiques, médicales, sociales et psychologiques plus importantes (6, 7). Ainsi, elles présentent plus de maladies cardio-vasculaires et de diabète que les hommes (33 % versus 10 %), après une durée de consommation moins longue et des quantités d’ alcool moins importantes. L’ âge au moment des décès directement causés par la consommation de l’ alcool se situe 24 ans en-dessous de l’ espérance de vie ans pour les femmes, et 15 ans en-dessous pour les hommes (7). Les femmes développent plus rapidement des cirrhoses du foie et souffrent davantage de la neuro-toxicité de l’ alcool que les hommes (6, 8, 9). Une diminution de la substance blanche dans les régions frontales ne diffère pas selon le sexe, or les femmes présentent davantage de lésions de la substance grise contrairement aux hommes, alors même que la quantité d’ alcool consommé est inférieure (10, 11). Les femmes sont plus sensibles aux conséquences neurocomportementales (ralentissement psychomoteur, capacité de conduite) de l’ alcool que les hommes, alors que les hommes sont plus sensibles aux conséquences neurophysiologiques (régulation émotionnelle) que les femmes (7). Cette neuro-toxicité plus élevée chez les femmes a été expliquée par des taux sanguins d’ alcool supérieurs chez les femmes pour une même dose d’ alcool consommé, à cause de leur taille inférieure avec une plus faible proportion de l’ eau corporelle totale, ainsi que d’ une concentration plus faible d’ hormones antidiurétiques au niveau gastro-intestinal, ou encore d’ un métabolisme plus long lors de certaines phases du cycle menstruel (12).

Les troubles d’ utilisation d’ alcool à début tardif

En 1974, Sheldon Zimberg a défini les AUD à début tardif (late-onset) comme un appel à l’ aide contre la solitude, la dépression et le stress lié au vieillissement, et depuis plusieurs auteurs ont exploré ce point de vue. Selon une révision de la littérature, jusqu’ à 1 / 3 des AUD ont commencé après l’ âge de 65 ans (13, 14). Les personnes ont recours à l’ utilisation de l’ alcool pour affronter les événements de vie douloureux dès l’ âge de 50 ans (solitude, deuil, pertes, maladie somatique, influence des pairs). Dans ces situations, la consommation d’ alcool tend à être excessive, non maîtrisée ou en cachette. Les personnes concernées mettent fréquemment en place des stratégies de consommation contrôlée (p.ex. éviter de boire durant la journée ou que pendant les repas) et tendent à faire appel à l’ aide à leur médecin traitant en cas de besoin (4).
La spécificité des AUD à début tardif a été surtout étudiée dans des populations masculines. Ces AUD touchent des hommes avec un niveau socio-économique plus élevé, et sont décrits comme moins sévères, moins diagnostiqués, moins traités, et moins dérangeants socialement, que les AUD à début plus précoce. Ils sont classiquement déclenchés par des événements de vie stressants. La consommation d’ alcool est initialement utilisée pour soulager des affects négatifs, les insomnies, les douleurs ou pour réussir à gérer des situations douloureuses. Environ un quart des personnes évolue vers un AUD (14, 15, 16). Les personnes concernées présentent une thymie dépressive, une baisse de l’ estime de soi et un accès facilité à l’ alcool. Elles sont adressées pour une aide médicale en partie sur ordonnance pénale, par exemple suite à un retrait de permis (17). A noter que selon des évaluations neuropsychologiques les AUD à début tardif sont associés à des atteintes cognitives (flexibilité mentale, inhibition, attention, mémoire de travail) aussi importantes que des personnes qui ont commencé à consommer plus précocement, soulignant la vulnérabilité du cerveau vieillissement face aux effets toxiques de l’ alcool (18).
L’ absence d’ études sur les populations féminines constitue un manque flagrant. En effet, alors que moins d’ un tiers des hommes présentent un début tardif (40-60 ans selon les auteurs) de leur trouble d’ utilisation d’ alcool, 50 % des femmes entrent dans cette catégorie (19). Les femmes qui présentent un AUD à début tardif présentent un tableau clinique spécifique. Elles sont décrites comme utilisant l’ alcool de manière conjointe à des traitements psychopharmacologiques pour soigner une humeur anxio-dépressive, avec un risque d’ interaction entre les substances et de croisement des addictions. Dans une étude sur 6000 personnes âgées de 63.3 ans (9.0), la consommation d’ alcool était associée au risque de développer et maintenir une thymie anxio-dépressive exclusivement pour les femmes, et non pas pour les hommes (20). Ces auteurs émettent l’ hypothèse d’ une activation plus intense de l’ axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPA ou axe du stress) chez les femmes, induite par la combinaison de l’ humeur dépressive, des comportements de consommation, et des changements hormonaux liés au vieillissement (7, 20).
A l’ âge avancé, les femmes tendent à boire en solitaire, ou alors à consommer de l’ alcool sous la pression de leur époux consommateur. Elles affrontent des défis et risques particuliers qui les diffèrent des hommes : ménopause, veuvage, perte du rôle maternel (syndrome du nid vide), et cancer du sein (6). Elles se sentent facilement stigmatisées et tendent peu à faire appel à une aide médicale spécialisée pour leurs consommations abusives d’ alcool (21). Les troubles d’ utilisation d’ alcool chez les femmes âgées sont par conséquent sous-diagnostiqués et sous-traités. Cependant, pour les personnes qui décident de consulter, les résultats peuvent être favorables (21).

Conclusion

Une meilleure compréhension des populations cliniques cibles, à savoir des personnes âgées qui présentent un AUD à début tardif, et notamment les femmes, représentent une population clinique spécifique. Le déni et la honte des patients d’ un côté et le manque de connaissance de cette problématique chez les professionnels de la santé mentale de l’ autre côté renforcent le risque d’ une prise en charge inadéquate.

Kerstin Weber, PhD en psychologie

Service des mesures institutionnelles

Direction médicale et qualité
Hôpitaux universitaires de Genève
Avenue Rosemont 12b
1208 Genève

kerstin.weber@hcuge.ch

Pr Panteleimon Giannakopoulos

Service des mesures institutionnelles

Direction médicale et qualité
Hôpitaux universitaires de Genève
Avenue Rosemont 12b
1208 Genève

panteleimon.giannakopoulos@hcuge.ch

Les auteurs n’ ont déclaré aucun conflit d’ intérêts en relation avec cet article.

  • La consommation d’alcool chez les seniors comporte fréquemment une connotation positive, avec une banalisation des risques pour la santé.
  • La majorité des études sur les syndromes de dépendance à l’alcool à début tardif ont été réalisées dans des populations masculines.
  • Les femmes âgées combinent l’utilisation d’alcool avec les traitements médicamenteux pour soigner leur humeur dépressive, avec un risque d’interaction entre les substances et de croisement des addictions.

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